L`éveil du chameau : Barbara Schulz bouscule le destin de Pascal

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L`éveil du chameau : Barbara Schulz bouscule le destin de Pascal
L’éveil du chameau : Barbara Schulz bouscule
le destin de Pascal Elbé
Duel de dames pour un seul homme au Théâtre de l’Atelier. L’écrivaine Murielle Magellan égrène, à travers un trio
de deux dames autour d’un mâle, quelques uns de nos sujets de société les plus familiers : le refus de grandir et de
s’engager chez les hommes, l’hyper-responsabilité chez les femmes, et l’horloge biologique qui trépigne pour des
quadragénaires hyper actives dans une comédie douce amère que portent trois formidables acteurs, Barbara
Schulz, Valérie Decobert et Pascal Elbé.
A la recherche du père
Maryse, qu’incarne formidablement Barbara Schulz en quadragénaire bon chic bon
genre, est une femme parfaite. Et une mère inquiète. Sa fille aînée, enceinte de 5
mois, vient de se faire larguer par le père du bébé. Parti en raison de la charge
paternelle trop lourde à assumer. Démissionnaire familial. Adolescent grandi trop
vite et abandonnant une fiancée éplorée, qui a arrêté de s’alimenter,
compromettant ainsi la santé de son bébé. La voilà donc qui débarque sans prévenir dans le bureau
appartement de Mickaël, directeur d’une association humanitaire et père de Simon, le père absent. Pascal
Elbé, qui joue Michaël, est plus vrai que nature. Dans un décor envahi de journaux et de revues sexy, il
campe le mâle orgueilleux, débonnaire et coureur de jupons qui s’anime davantage vis-à-vis de la faim au
sud Soudan que vis-à-vis de son propre fils.
Familles en décomposition
En a t-il un, du reste ? Mickaël va vite avouer à Maryse que son fils Simon reproduit
son schéma de vie, paternité en fuite, égoïsme forcené et volonté de s’accrocher
coûte que coûte à une liberté masculine bridée par le lasso des femmes. Sauf par
celui de son assistante qui accepte son inconstance, tout en avouant plus tard la
souffrance que sa passion pour Mickaël lui a imposé. Deux univers s’affrontent dans cette pièce écrite avec
finesse et humour par Murielle Magellan, qui n’évite cependant pas les clichés. Dire que la mayonnaise
prend entre ces deux-là serait exagéré, mais le fil qui tisse la toile de cette improbable relation fait son
bonhomme de chemin grâce à l'ironie du texte et par la grâce des acteurs.
Trois acteurs épatants
Barbara Schulz nous conduit, par l’énergie et le rayonnement de sa présence, dans
chacune des scènes qui composent la pièce. Sans en faire trop, sans jouer la
surdose de la mère de famille guindée, elle impose à Pascal Elbé sa séduction de
maîtresse femme démoniaque, qui semble dominer l’échiquier. Face à elle, Pascal
Elbé fait des prodiges dans la posture du baroudeur beau garçon revenu de tout,
qui a fait le tour du monde et des femmes, peu enclin à s’en laisser compter par une emmerdeuse
donneuse de leçons morales. Autour d’une pizza livrée et de deux limonades, la conversation devient plus
sucrée. Valérie Decobert est la deuxième dame de cette partie de poker menteur en incarnant très
justement une jeune femme sincère mais pas dupe, violemment attachée à son ancien amant. Dans la mise
en scène d’Anouche Setbon, les trois comédiens nous ravissent.
Hélène Kuttner

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