Produits de terroir : Nourritures nostalgiques et/ou appétits nouveaux ?

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Produits de terroir : Nourritures nostalgiques et/ou appétits nouveaux ?
Produits de terroir : Nourritures nostalgiques et/ou appétits nouveaux ?
Duquesne B. 1, Bodson D.2 et Lebailly Ph. 3
1-3
Unité d’Economie et Développement rural, FUSAGX
2
Unité d’Anthropologie et Sociologie, UCL
Encouragés par les politiques agricoles à se diversifier, le choix de produire des
denrées alimentaires ou de se tourner vers d’autres productions telles les agro-carburants est
devenu un enjeu important pour le monde agricole.
Alors qu’elles étaient devenues l’objet d’une sollicitude sans précédent, les
productions alimentaires locales se trouvent aujourd’hui concurrencées par d’autres
orientations des pouvoirs publics.
Ces produits correspondent-ils aux nouvelles attentes du mangeur du XXIème S ? et,
dans l’offre alimentaire, le terroir fera-t-il encore recette ?
L’expression « produits de terroir » n’est-elle pas galvaudée ?
Si « Le trait le plus pervers de la submodernité...est une « mise en spectacle » du
monde qui nous habitue insensiblement à n’avoir de rapport au monde et aux autres qu’à
travers des images » [AUGE, 1994]∗, l’image abondamment entretenue par la grande
distribution intéressée par le « terroir-caisse » mais décalée de la réalité des productions
agricoles locales n’induit-elle pas paradoxalement un doute quant à l’existence même de tels
produits ?
Pour les producteurs qui ont fait, ou feront, le choix de continuer à nous nourrir, il est
par conséquent important de rendre accessible aux consommateurs une information de qualité.
A cette fin, l’identification des divers sens que peut revêtir l’appellation « produit de
terroir » afin d’en dégager des critères pertinents de différenciation nous apparaît une
approche utile préalable à la communication.
Nous présentons ici les résultats d’enquêtes réalisées afin de recueillir une évocation
spontanée du concept « produits de terroir », menées lors de manifestations agricoles ( 2005 2006 ) et destinées à compléter voire à modifier l’information contenue dans une étude
réalisée en 1996 conjointement par la SPRL INTRAPRISE et l’Unité d’Economie et
Développement rural.
Matériel et méthodes
Conduite d’enquêtes lors de manifestations agricoles
Des questionnaires ont été proposés aux visiteurs du Salon Agribex (décembre 2005)
et de la Foire de Libramont (juillet 2006).
Les lieux d’enquête ont été choisis afin de cibler un public supposé marquer un intérêt
pour l’agriculture.
∗
Augé, 1994, Pour une anthropologie des mondes contemporains, p.174
398 questionnaires ont été complétés (260 lors du Salon Agribex et 138 lors de la
Foire de Libramont).
Les questionnaires abordaient d’une part l’évocation du terme « produit de terroir »
par une question ouverte (en 3 à 5 mots) et d’autre part les caractéristiques sociodémographiques des répondants.
Le traitement des données a été réalisé avec l’aide du logiciel SPAD.
Le détail du contenu du questionnaire figure dans le tableau 1 ci-après.
Type de question
Libellé de la question et des modalités de réponse
Nombre de
modalités
Qu’évoque pour vous le terme « Produit de terroir »
(en 3 à 5 mots)
3-5
Ouvertes
-
numérique
simple et/ou
numérique
•
•
•
Age*
Lieu de naissance et/ou code postal
Lieu de résidence et/ou code postal
1
2
2
Fermées
Choix multiple
*
Sexe M ou F
Situation familiale
- célibataire
- en couple
- divorcé – séparé – veuf
• Composition de famille
- 1 personne
- 2
- 3
- 4
- 5
- 6 et plus
• Niveau d’étude
- Secondaire inférieur ou supérieur
- Secondaire technique ou professionnel
- Secondaire général
- Supérieur
- Etudiant
•
•
L’âge a été codé en classes d’intervalles de
- 12 à 19 ans /20 à 35 ans/36 à 49 ans/ 50 à 66 ans/ plus de 66 ans
2
3
6
5
8
•
Activité professionnelle
- Professions intellectuelles et scientifiques
- Professions intermédiaires
- Employés, service et vendeurs
- Agriculteurs et ouvriers agricoles
- Artisans et ouvriers
- Retraités
- Sans profession
- Etudiants
Résultats
1. La population des « répondants »
Parmi les 398 personnes qui ont complété les questionnaires, on dénombre 58 %
d’hommes et 42 % de femmes. Les moins de 20 ans et plus de 65 ans ne constituent que 15 %
de l’échantillon. Ce sont les professions intellectuelles et scientifiques ainsi que les étudiants
qui sont les plus représentés parmi les répondants, avec en corollaire la même tendance
observée, si l’on considère le niveau d’étude : 45 % de diplômes du supérieur et 20 %
d’étudiants.
Si certaines variables n’ont pas été traitées, c’est que, pour des raisons diverses,
l’analyse des résultats ne nous semblait pas pertinente.
Ainsi les réponses obtenues pour la situation familiale et la composition de famille
semblent difficilement interprétables car parfois contradictoires : si 62 % des personnes se
déclarent en couple, seulement 11 % déclarent vivre seuls !
De même les questions concernant les lieux de naissance et de résidence avaient été
incluses dans le questionnaire afin de faire une distinction éventuelle entre une population
vivant ou d’origine rurale à opposer à une population urbaine. Le seul renseignement du code
postal ou de la commune nous est apparu insuffisant pour cette analyse.
Les caractéristiques socio-démographiques des répondants sont reprises dans le
tableau 2 ci-après.
Tableau 2 : Caractéristiques socio-démographiques des répondants
Lieu où le questionnaire a été rempli
AGRIBEX
FOIRE DE LIBRAMONT
Total répondants
Niveau d'étude
260
138
398
.
65%
35%
100%
7
225
166
391
.
58%
42%
100%
Sexe
Non-Répondants
Masculin
Féminin
Total répondants
Non-Répondants
0
Secondaire inférieur ou moins
Secondaire tech ou prof
Secondaire général
Supérieur
Etudiant
Sans réponse
Total répondants
36
49
41
180
81
12
398
9%
12%
10%
45%
20%
3%
100%
Non-Répondants
de 12 à 20 ans
de 21 à 35 ans
de 36 à 50 ans
de 51 à 65 ans
de 66 à 80 ans
Total répondants
0
37
129
111
99
22
398
9%
32%
28%
25%
6%
100%
Lieu de résidence
Non-Répondants
Belgique
Bruxelles capitale
Brabant wallon
Brabant flamand
Anvers
Limbourg
Liège
Namur
Hainaut
Luxembourg
Flandres occidentales
Flandres orientales
Etranger
France
Total répondants
5
381
20
33
9
4
0
59
68
124
52
7
5
12
12
393
97%
5%
8%
2%
1%
0%
15%
17%
32%
13%
2%
1%
3%
3%
3%
Age
Situation familiale
Non-Répondants
Célibataire
En couple
Divorcé - Séparé - Veuf
Total répondants
5
125
244
24
393
.
32%
62%
6%
100%
Composition de la famille
Non-Répondants
10
1 personne
43
2 personnes
91
3 personnes
66
4 personnes
102
5 personnes
60
6 personnes ou plus
26
Total répondants
388
.
11%
23%
17%
26%
15%
7%
100%
Catégorie socio-professionnelle
Non-Répondants
Prof intellect et scient
Prof intermédiares
Employés, service et vendeurs
Milieu agricole
Artisans et ouvriers
Pensionnés et prép
Sans profession
Etudiants
Sans réponse
Total répondants
0
.
97
37
50
50
15
25
10
81
33
398
24%
9%
13%
13%
4%
6%
3%
20%
8%
100%
Degré d'urbanisation du lieu de résidence
Non-Répondants
degré 1 (plus de 500 hab/km²)
degré 2 (entre 100 et 500 hab/km²)
degré 3 (moins de 100 hab/km²)
Total répondants
17
81
201
99
381
21%
53%
26%
100%
2. Répartition des réponses de la question ouverte « Produit de terroir »
L’encodage des 398 questionnaires a permis le recueil de 1 308 citations.
Les réponses ont été classées en trois catégories, selon qu’une référence était faite au
produit (49 %*) au mode de production (42 %) ou au consommateur lui-même (9 %).
Pour chacune des catégories, les citations ont été regroupées par thèmes.
L’ensemble de ces rubriques est repris dans le graphique 1 ci-après.
Graphique 1 : Répartition des citations
67
Savoir faire
Echelle de prod
Production alternative
Sécurité sanitaire Lieu
Ethique de production
Facteurs économiques
Ethique de consommation
Plaisir
Hygiène et santé
Coût
Autres sentiments
Nourriture nostalgique
Qualité
Noms
Information
Qualités sensorielles
Spécificités
Points négatifs
Qualité sanitaire
*
22
Mode de
production
151
51
197
33
24
18
Consommateur
56
17
21
4
111
213
Produit
74
9
136
43
3
58
Tous les pourcentages cités le sont (sauf spécification contraire) par rapport au nombre total de termes encodés
2.1. Le produit
L’ensemble de toutes les citations évoquant une qualité du produit recouvre un tiers
des réponses. Le terme « qualité » est de loin le plus cité (16 %), en tant que tel ou par des
adjectifs, allant de « bon », « bien » à « meilleur », « supérieur », « super », « excellent ».
10 % des termes se rapportent à ce que nous avons désigné par « qualité sensorielle » et qui
font référence au goût, à la saveur du produit. Quant à la qualité sanitaire (4 %), c’est surtout
au caractère « sain » et de « fraîcheur » qu’il est fait allusion.
Sous le vocable « nourriture nostalgique » (8 %), nous avons regroupé les citations
faisant allusion au passé (« retour », « qui a une histoire », « du patrimoine »,
« rustique », …).
6 % des citations concernent des noms de catégories de produits (« viande », « porc »,
« saucisson », « pommes de terre », « poulet », « légumes », « lait », …), voire parfois des
spécialités (« pâté gaumais », « escavèche », …) mais il est à noter toutefois qu’aucune
marque n’est citée contrairement à ce qui avait été constaté lors de l’enquête de 1996 où
figuraient des noms de Fromages ou bières d’abbaye.
2.2. Le mode de production
Il n’est pas étonnant que bon nombre de citations (15 %) évoquent le lieu, concept de
la définition de « terroir » (de terre) admise par les linguistes*.
Cette notion varie dans les évocations : il s’agit soit d’un lien d’appartenance
identitaire (« de chez nous »), soit d’une localisation dont les limites géographiques sont plus
ou moins restreintes (« du village », « de proximité », « en milieu rural », « local »,
« régional », « du pays »). Certains toutefois précisent : « région wallonne », « pays de
Herve », « Ardennes », « belge ».
Un dixième des citations fait référence au mode de commercialisation : « vente
directe », « circuit court », « contact producteur-consommateur ».
La notion de production alternative à l’industriel déjà citée dans l’enquête en 1996 est
encore bien présente dans les citations recueillies (12 %). Parmi les termes employés, entre
l’allusion directe (« qui ne passe pas par l’agroalimentaire », « non industriel ») la moitié
renvoie au caractère « artisanal » (« artisan », « artisanal-artisanat ») et un tiers à une
production liée à l’agriculture (« ferme », « agricole », « paysan ») avec parfois la précision :
« diversification ».
5 % des citations se rapportent au savoir faire et à la Tradition.
*
Larousse 2005 – Terroir : 1. Terre considérée sous l’angle de la production ou d’une production agricole
caractéristique. 2. Ensemble du sol et du climat correspondant à un vignoble délimité, donnant un caractère
spécifique au vin qu’il produit. 3. Territoire exploité par un village, une communauté rurale. 4. Province,
campagne considérée sous le rapport de certaines habitudes spécifiques, ainsi que de la relation au passé, aux
morts. Mots du terroir
L’aspect sanitaire et la traçabilité ne concernent que 4 % des termes en relation avec le
mode de production.
2.3. Le consommateur
Lorsque les consommateurs font référence à eux-mêmes, c’est manifestement la
notion de plaisir qui domine dans l’évocation de la locution « produit de terroir ».
4 % des citations renferment outre le mot « plaisir » associé ou non à « de la table »,
« de manger », des évocations telles que « vacances », « rencontre », « fête », « cadeau »,
« convivialité ».
La notion de coût (2 %) lorsqu’elle est relevée, indique un « prix élevé », « cher »
exception faite des 3 citations suivantes : « prix justifié », « coût moindre », « pas cher ».
3. Des évocations différentes selon les caractéristiques des répondants. *
3.1. Le genre
Les femmes citent plus souvent des références au produit (52 %vs 49%) qu’au mode
de production (39%vs 42%) et la situation inverse est observée chez les hommes (47 % et
44%)
Concernant le produit, les citations féminines dominent dans les références à la
« nourriture nostalgique » (19%vs17%) et à la « qualité sanitaire « (12%vs9%). Les hommes
quant à eux citent davantage le mot « qualité » ou des adjectifs s’y référant (38%vs 33%).
Pour le mode de production, les termes associés au savoir faire sont nettement plus
fréquents chez les hommes (17%vs12%) ainsi que dans une moindre mesure, les allusions à la
sécurité sanitaire et la traçabilité (11%vs9%). Les femmes, elles, évoquent davantage la
production alternative (35%vs28%) et l’éthique de production (8%vs6%).
Les connotations de plaisir (49%vs47%) lorsqu’il s’agit du consommateur et plus
encore celles d’hygiène et santé ( 20%vs 15%) abondent parmi les citations féminines tandis
que l’aspect « coût » est plus évoqué par la gente masculine(21%vs18%).
3.2. L’âge
Les moins de 20 ans font très peu référence au consommateur lui-même (3 % vs 9 %)
par contre c’est dans la classe d’âge des 36-50 ans que l’allusion au consommateur est la plus
fréquente (11 %), avec une part moindre de citations concernant le mode de production (37 %
vs 42 %)
Concernant le produit, on dénombre chez les très jeunes consommateurs (< 20 ans)
moins de citations concernant la qualité (22 % vs 33 %), surtout sensorielle (12 % vs 21 %)
mais par contre une abondance de noms de produits (42 % vs 11 %). Les noms de produits
sont également nombreux parmi les citations des plus de 65 ans (24 % vs 11 %) mais ce sont
surtout les termes évoquant les « nourritures nostalgiques » qui se démarquent (24 % vs 17 %)
*
Fréquence des citations comparée à la moyenne de l’échantillon.
dans cette classe d’âge. Par contre les termes concernant les qualités sensorielles (14 % vs
21 %) et surtout sanitaires (3 % vs 9 %) y sont sous représentés.
C’est pour la classe des 50-65 ans que le nombre d’évocations de la qualité sanitaire
est la plus importante (12 % vs 9 %).
Pour le mode de production, la référence au savoir faire, à la tradition est nettement
plus importante pour les 20-36 ans (17 % vs 12 %) que pour les autres classes d’âge.
Ce sont surtout les plus jeunes qui citent l’alternative à l’industriel (32% vs 28%), à
l’inverse des plus de 65 ans (18%) chez qui cette évocation est sous représentée. La sécurité
sanitaire est nettement moins évoquée avant 35 ans (5% vs 9% et 13% à partir de 36ans).
Les très jeunes (< 20 ans) de même que les aînés (> 65 ans) évoquent davantage
l’éthique de production (11 et 9% vs 6%). Chez les aînés de plus de 65 ans, il y a lieu de
souligner également l’importance des citations concernant les facteurs économiques de la
production (14% vs 4%).
Lorsqu’ils font référence au consommateur, les 36-50 ans citent davantage les notions
d’hygiène et de santé (26%vs 15%). La référence du plaisir est la plus fréquemment citée par
les 20-36 ans et les 50-66 ans ( 60 et 58% vs 48%), les aînés de plus de 65 ans n’y font par
ailleurs aucune allusion, de même qu’à la notion de coût mais privilégient la notion d’éthique
de consommation.
3.3. Le niveau d’études
Les répondants d’un niveau d’études secondaire général sont les seuls à faire
davantage référence au produit, les citations des autres font par contre plus fréquemment
allusion au mode de production.
C’est parmi les titulaires d’un diplôme secondaire inférieur ou moins que les citations
se rapportant aux consommateurs eux-mêmes sont les moins fréquentes (3%vs9%).
Parmi les références au mode de production le concept de lieu est surtout évoqué par
les répondants d’un niveau secondaire technique, professionnel ou général (42 et 50% vs
36%). Les notions de sécurité sanitaire et traçabilité apparaissent davantage dans les citations
du groupe de niveau secondaire inférieur ou moins (21% vs 9%). La notion d’éthique de
production apparaît plus fréquemment dans les réponses des détenteurs d’un diplôme du
secondaire général (11%vs 6%) mais pratiquement pas chez ceux du secondaire technique ou
professionnel(2%). Chez ces derniers, les citations concernant la production alternative à
l’industriel ou le savoir faire et la Tradition sont également peu présentes.
S’agissant du produit, les qualités sensorielles sont essentiellement évoquées par les
répondants d’un niveau supérieur, les noms de produits et adjectifs désignant plus
globalement la qualité sont par contre prépondérants parmi les citations du groupe de niveau
secondaire inférieur ou moins. C’est également chez ces derniers que le critère de qualité
sanitaire apparaît le plus souvent. Enfin, c’est parmi les répondants de niveau secondaire
technique ou professionnel que l’évocation du produit en termes de « nourriture nostalgique »
est la plus rare.
Les consommateurs qui associent le plus souvent le produit de terroir au « plaisir »
sont d’un niveau secondaire général et secondaire inférieur ou moins. Chez ces derniers, la
mention du coût est de plus fréquemment relevée tandis que c’est la notion de santé qui
apparaît davantage chez les premiers. Enfin, ce sont les répondants d’un niveau d’études
supérieurs qui associent le plus fréquemment un principe d’éthique à la consommation de
produit de terroir.
3.4. Catégorie socio-professionnelle
Seuls les « sans profession » citent davantage le mode de production que le produit
lui-même.
Parmi les mentions relatives au produit, il est plus souvent fait appel au souvenir d’une
« nourriture nostalgique » par les employés, à l’opposé des étudiants, mais aussi des
personnes sans profession et du milieu agricole. C’est parmi ces deux dernières catégories que
les termes relatifs à la qualité sont les plus nombreux.
Des noms de produits sont fréquemment cités par les étudiants et les sans profession.
Les répondants des professions intermédiaires sont les plus nombreux à faire allusion
aux qualités sensorielles. Quant à la qualité sanitaire du produit, c’est manifestement parmi les
artisans et ouvriers qu’elle est le plus souvent mentionnée, à l’inverse des professions
intellectuelles et scientifiques ainsi que des « sans profession ».
Pour le mode de production, les étudiants sont les plus nombreux à citer le savoir faire
contrairement aux employés et pensionnés. De même la production alternative à l’industriel
est très souvent mentionnée par les étudiants, les « sans profession » et les professions
intellectuelles et scientifiques. L’évocation de la sécurité sanitaire et la traçabilité apparaît
plus fréquemment chez les artisans et les pensionnés.
Ce sont davantage les employés, les professions intermédiaires et les sans profession
qui font référence au lieu. Quant à l’éthique de production, elle est le plus souvent abordée par
les artisans et ouvriers.
L’éthique de consommation est par contre très largement référencée par les « sans
profession ». La connotation de plaisir pour les consommateurs apparaît avant tout dans les
citations du milieu agricole et des employés, ainsi que parmi les étudiants. Cette notion n’est
pas relevée par les pensionnés et est moins fréquente également parmi les professions
intermédiaires. C’est chez ces derniers par contre, que l’on retrouve le plus de citations en
relation avec l’hygiène et la santé, aspect que ne relèvent pas non plus les pensionnés qui par
contre abordent le coût payé par le consommateur.
Les différentes typologies des répondants en fonction des évocations relevées sont
résumées dans les trois graphiques ci-après :
Graphique 1 –Références au mode de production
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Féminin
De 12 à 20 ans
De 60 à 80 ans
Secondaire général
Artisans et ouvriers
Secondaire tech ou prof
Secondaire général
Prof intermédiaires
Sans profession
Ethique de
production
• Masculin
• De 20 à 36 ans
• Etudiants
Savoir faire
Lieu
Production
alternative
-Sécurité sanitaire
Traçabilité
Masculin
De 36 à 50 ans
De 50 à 66 ans
Secondaire inférieur ou
moins
• Artisans et ouvriers
• Pensionnés et prép
•
•
•
•
•
•
•
•
Féminin
De 12 à 20 ans
Prof intellect et scient
Sans profession
Graphique 2 –Références au produit
• Féminin
• De 50 à 66 ans
• Secondaire inférieur
ou moins
• Artisans et ouvriers
Qualité sanitaire
• Féminin
• De 66 à 80 ans
• Employés, service et
vendeurs
Nourriture
nostalgique
Qualités sensorielles
• Niv. d’étude : Supérieur
• Prof. intermédiaires
Noms
•
•
•
•
Qualité
• Masculin
• Secondaire inférieur
ou moins
• Milieu agricole
• Sans profession
De 12 à 20 ans
De 66 à 80 ans
Etudiants
Sans profession
Graphique 3 –Références au consommateur
• Niv d’étude :Supérieur
• Sans profession
• Masculin
• Secondaire inférieur
ou moins
• Pensionnés et prép
Coût
Ethique de
consommation
Hygiène et santé
•
•
•
•
Féminin
De 66 à 80 ans
Secondaire général
Prof intermédiaires
Plaisir
•
•
•
•
•
•
•
•
Féminin
De 20 à 36 ans
De 50 à 66 ans
Secondaire inférieur ou moins
Secondaire général
Employés, service et vendeurs
Milieu agricole
Etudiants
Conclusion
Une définition simple du produit de terroir à destination du consommateur, entité
abstraite, ne nous apparaît guère possible. La multiplicité des évocations recueillies relève de
la diversité des consommateurs.
De par la fréquence des citations, certains critères, repris parfois sous des vocables
différents, apparaissent néanmoins pertinents dans l’identification des produits de terroir.
Ainsi, pour le mode de production, la relation au lieu de production et une alternative à
l’industriel sont les évocations les plus fréquentes. Ces critères semblent une constante
puisque dans l’étude susmentionnée réalisée en 1996, les auteurs retenaient la connotation
régionale et les méthodes de production artisanale comme évocations principales des
consommateurs. Il est à remarquer toutefois qu’aucune référence aux labels européens de
protection d’origine (AOP, AOC, STG, IGP) ou autres labels de qualité n’a été citée. De
même, les énoncés de « produits locaux », « produits fermiers » repris pour évoquer les »
produits de terroir » par bon nombre de personnes interrogées laissent supposer qu’aucune
distinction entre ces termes n’existe à leurs yeux, même si des cadres juridiques différents les
définissent.
Dans nos enquêtes, le produit de terroir bénéficie de l’image d’un produit de qualité.
Outre les nombreux adjectifs signifiant globalement la qualité qui lui sont attribués, les
attributs de valeur gustative sont plus nombreux dans nos relevés que les qualités sanitaires
alors que c’est l’évocation de son caractère « naturel » qui avait été retenue par les auteurs de
l’enquête réalisée en 1996.
Enfin, le produit de terroir s’avère un aliment festif, associé aux plaisirs d’une table
conviviale et de la bonne chère.
Si quelques répondants ancrent avec une certaine nostalgie le produit de terroir dans le
passé, plus nombreux sont ceux qui y voient une alternative à une production uniformisée et
standardisée. Promouvoir et rendre accessibles les produits locaux devraient permettre à
davantage de consommateurs de découvrir cette diversité alimentaire et, peut-être, de susciter
des appétits nouveaux pour les produits de terroir.