EINSTEIN ET LA SCIENCE DU LANGAGE

Transcription

EINSTEIN ET LA SCIENCE DU LANGAGE
EINSTEIN ET LA SCIENCE DU LANGAGE
Roman Jakobson
Gallimard | Le Débat
1982/3 - n° 20
pages 131 à 142
ISSN 0246-2346
Article disponible en ligne à l'adresse:
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-le-debat-1982-3-page-131.htm
Pour citer cet article :
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Jakobson Roman , « Einstein et la science du langage » ,
Le Débat, 1982/3 n° 20, p. 131-142. DOI : 10.3917/deba.020.0131
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Distribution électronique Cairn.info pour Gallimard.
© Gallimard. Tous droits réservés pour tous pays.
La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des
conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre
établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que
ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en
France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 1
Roman Jakobson
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Dans une allocution radiodiffusée prononcée en septembre 1941 à une réunion de la British Association
for the Advancement of Sciences et intitulée « Le langage commun de la science » (The Common Language
of Science)1, Einstein rappelait à ses auditeurs et à ses lecteurs qu’à un stade très avancé de son
développement, le langage, malgré toutes ses insuffisances, « devient un instrument de raisonnement au vrai
sens du terme ». On peut ajouter que, pour Einstein lui-même, le langage, de ses rudiments aux différentes étapes de son développement, était devenu un thème préféré d’intense raisonnement métalinguistique, en particulier au cours de la partie américaine de sa vie, celle où il s’est le plus tourné vers le
passé. La grande attention que le savant a consacrée à ces questions et son don saisissant pour témoigner
avec profondeur et éloquence sur les différents thèmes de ce domaine sont à comparer avec les informations
que nous donnent ses biographes sur l’enfance d’Einstein.
C’est ainsi, par exemple, que les lignes que le livre très instructif de Philipp Frank consacre au « petit
Albert » affirment ceci : « En réalité, il a mis très longtemps à apprendre à parler et ses parents commençaient
à craindre qu’il ne fût anormal. L’enfant a finalement commencé à parler, mais il est toujours resté
taciturne... » Même à neuf ans, dans la dernière classe de l’école élémentaire, « il continuait à manquer de
facilité de parole et tout ce qu’il disait n’était exprimé qu’après mûre considération et réflexion »2.
Un certain nombre de ses biographes ont commenté le fait qu’Einstein a été incapable de parler ou a
montré de la répugnance à le faire jusqu’à trois ans, et la difficulté qu’il a eue toute sa vie à apprendre et à
maîtriser les langues étrangères. En outre, Gerald Holton a publié pour la première fois une assertion de
Maja, la sœur d’Einstein, qui écrit que, dans son enfance, l’acquisition de la parole « s’est faite lentement,
et que la langue parlée lui est venue avec une telle difficulté que son entourage avait peur qu’il n’apprît jamais
à parler »3.
L’éminent mathématicien Jacques Hadamard – qui était à cette époque le doyen pour les sciences de
l’École libre des Hautes Études créée à New York par des réfugiés français, et professeur invité dans
1. Publiée dans Advancement of Science 2, n° 5 (1941), pp.109-110.
2. P. Frank, Einstein : His Life and Times, traduit [en anglais] par George Rosen, édité et revu par Shuichi Kusaka,
New York, Alfred A. Knopf, 1947, pp. 8, 10. [Traduction française par A. Georges, Einstein, sa vie, son temps, Paris,
Albin Michel, 1950.]
3. G. Holton, Thematic Origins of Scientific Thought : Kepler to Einstein, Cambridge, Mass., Harvard University Press,
1973, p. 367.
Les deux derniers livres de Roman Jakobson en français, aux Éditions de Minuit : Six leçons sur le son et le sens (1976)
et La Charpente phonique du langage (1980).
Cet article est paru en mai 1982 dans le n° 20 du Débat (pp. 131 à 142).
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Einstein
et la science du langage
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 2
2
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Au moment même où il envoyait son livre à l’imprimeur, Hadamard reçut, comme il le dit dans une note,
« une lettre du professeur Einstein... contenant des informations d’un intérêt capital » ; il ajouta ce témoignage
tardif au volume sous la forme du deuxième Appendice. Nous soumîmes l’un et l’autre à un examen serré
les réponses « circonstanciées et approfondies » du message d’Einstein et confrontâmes son introspection
à l’aperçu linguistique dont je viens de parler. Einstein décrit le caractère intime et presque sans mots de
son processus de création en répondant aux questions sur ces espèces de signes qui apparaissent dans son
esprit quand il est absorbé dans des découvertes scientifiques : « Les mots et le langage écrits ou parlés ne
semblent pas jouer le moindre rôle dans le mécanisme de ma pensée. »
Le psychologue Max Wertheimer raconte qu’il avait l’habitude de passer des heures seul avec Einstein
tandis que celui-ci lui racontait « l’histoire du développement spectaculaire qui a culminé dans la théorie
de la relativité ». Einstein affirmait (des dizaines d’années avant sa lettre à Hadamard !) que, sur ce thème,
ses pensées ne lui venaient pas dans une quelconque formulation verbale : « Je pense très rarement en
mots. Une pensée vient, et je peux essayer de l’exprimer en mots après coup. » Il riait de la conviction de
certaines personnes, qui croient qu’« elles pensent toujours en mots »5. Il est évident que l’évolution de la
pensée d’Einstein avait pris les devants sur la consolidation de son langage.
Comme en témoigne Einstein dans la lettre jointe au livre d’Hadamard, « certains signes ou des images
plus ou moins claires » (les italiques sont de moi), les deux sortes d’« entités psychiques qui semblent servir
d’éléments à la pensée », peuvent – déjà dans cette période préverbale – être délibérément réitérés et
réordonnés, et devenir ainsi un répertoire personnel de dispositifs significatifs. La question de la
reproduction et de la recombinaison conjointes indique que l’identification et le réarrangement de composantes, ou, en d’autres termes, les idées complémentaires entre elles d’invariance et de variabilité
4. J. Hadamard, An Essay on the Psychology of Invention in the Mathematical Field, Princeton, N. J., Princeton University
Press, 1945, pp. 96-97. [Traduction française par Jacqueline Hadamard : Essai sur la psychologie de l’invention dans le
domaine mathématique, Paris, Gauthier-Villars, 1975. Dans la version française, la contribution de Roman Jakobson se trouve
p. 93 ; la lettre d’Einstein est incorporée au texte et commentée pp. 82-83 (N.d.T.).]
5. M. Wertheimer, Productive Thinking, New York, Harper, 1959, pp. 213-228.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
plusieurs universités américaines – a fait une enquête sur le processus de l’invention mathématique ; il s’agit
d’une recherche qu’il avait commencée à Paris et qu’il a poursuivie en 1943-1944, en relation avec toute
une série de conférences qu’il a données à l’École libre. Son travail systématique sur ce sujet aboutit à un
livre, publié en 1945. À différentes occasions, il prit contact avec moi pour discuter de problèmes rattachant
ce projet séduisant à la science des signes verbaux et des autres signes. Suivant la proposition d’Hadamard,
je rédigeai ma conception linguistique, alors succincte, de ce problème embarrassant : les réflexions sans
mots. Il l’inséra dans son étude :
Les signes sont un soutien nécessaire de la pensée. Pour la pensée socialisée (stade de la communication)
et pour la pensée en train de se socialiser (stade de la formulation), le système de signes le plus courant
est le langage proprement dit ; mais la pensée intérieure, surtout quand elle est créatrice, use volontiers
d’autres systèmes de signes qui sont plus souples, moins standardisés que le langage et qui laissent davantage
de liberté, de dynamisme à la pensée créatrice... Parmi tous ces signes ou symboles, il faut distinguer entre
des signes conventionnels, empruntés aux conventions sociales, d’une part, et, d’autre part, des signes
personnels qui, à leur tour, peuvent se subdiviser en signes constants, appartenant aux habitudes générales,
au schéma individuel de la personne considérée et en signes épisodiques créés ad hoc et qui ne participent
qu’à un seul acte créateur4.
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 3
3
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
contextuelle, sont une véritable obsession pour Einstein, en ce qui concerne un stade prélinguistique,
sémiotique au niveau de l’individu. Pour lui, comme le dit son « Témoignage », il est évident que le
« désir de parvenir finalement à des concepts logiquement liés est la base émotionnelle de ce jeu assez vague
sur les éléments dont j’ai parlé ».
Trois facteurs subjectifs : désir, émotion et « intuition pure », sous-tendent la conception que se fait
Einstein de la pensée créatrice en tant que jeu sélectif, assertif et combinatoire. Ses allusions répétées à « ce
jeu assez vague » sont en relation avec la profession de foi* qu’il proclame à la fin de ce même témoignage :
« Ce que vous appelez pleine conscience est un cas limite qui ne se réalise jamais complètement. »
Trait totalement symptomatique de la mentalité d’Einstein et du souvenir qu’il a gardé de la lutte
prolongée menée dans son enfance contre le langage hors d’atteinte : dans ses réponses aux questions
pénétrantes d’Hadamard et de Wertheimer, et la recherche laborieuse de « mots conventionnels » et
l’intervention de ceux-ci dans le « jeu d’association » sont renvoyées – que ce soit par mauvaise volonté
ou par incapacité – à un stade évidemment plus tardif, « après coup », à une phase « secondaire » visant un
système « assez bien établi » de mots standardisés et de constructions régulières, c’est-à-dire de mots et de
constructions qui soient capables d’être reproduits à volonté et, surtout, « communiqués aux autres ». Quand
Einstein témoigne que « dans un stade où les mots interviennent le moins du monde, ils sont », dans son
cas, passifs, c’est-à-dire « purement auditifs », cela correspond entièrement à la perception correcte
par l’enfant de la parole de son entourage couplée avec la production encore défectueuse de ses propres
énonciations.
On trouve un témoignage semblable dans les « Conversations avec Albert Einstein » que rapporte le
physicien R. S. Shankland : « Quand je lis, j’entends les mots. Il m’est difficile d’écrire, et je communique
très mal de cette manière6. » Il est remarquable que dans le cas d’Einstein, élucidé par Hadamard, les
éléments primordiaux de la pensée habituelle, « avant que les mots n’interviennent », semblent être plutôt
de type visuel ainsi que musculaire, apparemment gestuel.
Dans ses « Notes autobiographiques », Einstein trace une nette ligne de démarcation entre la pensée
personnelle et la communication interpersonnelle7. Dans ce dernier processus, les systèmes conceptuels
deviennent « communicables » au moyen de la verbalisation et de règles syntaxiques, alors que le processus
de la pensée par lui-même crée ce qu’il appelle « un libre jeu avec les concepts », qui peut même se développer en grande partie sans utiliser de signes connaissables par les sens et reproductibles, et, au-delà de cela,
peut se développer « dans une grande mesure inconsciemment ». Comme Einstein l’avait dit une dizaine
d’années plus tôt, il n’est que de fixer un ensemble de règles, comparables aux règles arbitraires d’un jeu,
et dont seule la rigidité rend le jeu possible, alors qu’« elles ne seront jamais définitivement fixées »8.
La relation entre les « concepts qui apparaissent dans notre pensée et dans nos expressions linguistiques »
est traitée de deux manières disparates dans les écrits d’Einstein. Dans ses « Remarks on Bertrand Russell’s
Theory of Knowledge », il insiste sur le fait qu’il est impossible que les « créations libres de la pensée »,
qu’elles soient conceptuelles ou verbales, soient obtenues à partir d’expériences sensorielles : « Nous ne
prenons pas conscience du gouffre – logiquement infranchissable – qui sépare le monde des expériences
* En français dans le texte (N.d.T.).
6. In American Journal of Physics, 31 (1963), p. 50.
7. A. Einstein, « Autobiographical Notes », trad. [en anglais] par P. A. Schilpp, in Shilpp éd., Albert Einstein : Philosopher
Scientist, Evanston, Ill., Library of Living Philosophers, 1949.
8. A. Einstein, « Physics and Reality », trad. [en anglais] par J. Piccard, Journal of the Franklin Institute, 221 (1936),
pp. 249-382.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 4
4
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
sensorielles du monde des concepts et des propositions »9, en bref les données empiriques brutes de la
théorie de la science. D’autre part, Einstein s’en est pris à de nombreuses reprises au langage, parce qu’il
nous oblige à travailler avec des mots qui sont inopportunément liés à des notions préscientifiques et
inadaptées et qu’il transforme notre instrument conventionnel de raisonnement « en une dangereuse source
d’erreur et de duperie ». Par exemple, l’équivalence essentielle de deux concepts est facilement cachée
quand on se sert de termes impropres qui les disjoignent.
En ce qui concerne l’inclination personnelle et primordiale d’Einstein à attribuer à l’acte de penser une
indépendance complète à l’égard du langage, son propre témoignage montre à l’évidence que des aspirations
émotionnelles ne sont pas seulement à l’œuvre pour guider sa pensée inventive dans son rôle de philosophehomme de science, mais que celles-ci sous-tendent aussi – quand il s’agit d’événements tragiques comme
ceux de la Seconde Guerre mondiale – ses « efforts passionnés pour comprendre clairement » l’humanité
et pour atteindre des « vérités générales » supranationales. À ces moments-là, les « mots du langage »
apparaissent soudain dans l’arrière-plan. Einstein conclut ainsi l’allocution radiodiffusée de 1941 que nous
avons citée plus haut : « Le développement mental de l’individu et sa manière de former des concepts sont,
dans une grande mesure, fonction du langage » et du « guidage verbal de son entourage ». Pourtant,
l’inventeur insiste encore sur le fait que les concepts scientifiques « ont été établis par les meilleurs cerveaux
de tous les pays et de tous les temps » et, naturellement – il n’oublie pas de l’ajouter – cela se fait dans
la solitude du processus créateur. Mais, cette fois-ci, il prend aussi en compte l’« effort de coopération
pour le résultat final », un effort commun qui, « à la longue », peut surmonter la « confusion des objectifs »
contemporaine.
En dehors de la familiarité intime, on pourrait presque dire innée, d’Einstein avec les questions
fondamentales que pose la place attribuée au langage dans l’esprit humain, le physicien était attaché par de
profonds liens spirituels à un remarquable précurseur de la linguistique moderne, l’érudit suisse Jost Winteler
(1846-1929). La thèse de Winteler, publiée en 1876, montre une nouveauté et une acuité méthodologiques
provocantes dans sa manière d’aborder le système phonologique des langues, avec sa distinction
fondamentale entre « traits accidentels » (variations) et « propriétés essentielles » (invariants)10. Mais les
principes théoriques de l’auteur ne rencontrèrent qu’une méfiance partiale chez les bureaucrates
universitaires. Le courageux chercheur fut ainsi condamné à sacrifier ses plans scientifiques à longue portée
et à accepter pour toute sa vie le morne sort d’un professeur, d’abord actif mais retraité de bonne heure.
En 1895, Albert Einstein, encore adolescent, après avoir échoué à l’examen d’entrée à l’École
polytechnique fédérale de Zurich, prit refuge pendant un an à l’école cantonale d’Aarau et fut là l’élève, le
pensionnaire et le jeune ami de Jost Winteler, qui devait par la suite devenir aussi le beau-père de la sœur
d’Albert, Maja. À bon nombre d’indices, on voit que ce séjour se révéla bénéfique pour Einstein. Ainsi,
Miss Helen Dukas a eu la gentillesse de nous fournir une citation des courts mémoires biographiques écrits
par Maja Winteler en 1924 :
9. A. Einstein, « Remarks on Bertrand Russell’s Theory of Knowledge », trad. [en anglais] par P. A. Schilpp, in Schilpp,
éd., The Philosophy of Bertrand Russell, Evanston, Ill., library of Living Philosophers, 1946, pp. 277-291, en particulier p. 287.
10. Jost Winleler, Die Kerenzer Mundart des Kantons Glarus, in ihren Grundzügen dargestellt, Leipzig et Heidelberg, 1876.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 5
5
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Le jeune étudiant et l’homme plus âgé portaient évidemment le même regard sur les questions politiques.
Le professeur Elmar Holenstein de l’université de la Ruhr à Bochum, dans son étude d’ensemble « Albert
Einsteins Hausvater in Aarau : Der Linguist Jost Winteler »11, mentionne une lettre inédite écrite en 1901
par Einstein à Winteler qui condamne l’« adoration des autorités » (Authoritätendusel) des Allemands
comme étant « le principal ennemi de la vérité ». Un mois avant sa mort, Einstein louait encore ses
professeurs d’Aarau, « qui ne se fondaient sur aucune autorité extérieure ».
Les conversations quotidiennes entre ce précepteur à l’esprit si clair et cet adolescent sensible firent
probablement découvrir à ce dernier le principe essentiel de la thèse de Winteler, et le terme utilisé pour le
désigner, la « relativité des situations » (Relativität der Verhältnisse)12, ainsi que la relation indissoluble entre
les concepts de relativité et d’invariance sur lesquels repose la théorie linguistique de Winteler, et entre
lesquels Einstein a hésité un moment pour nommer sa découverte fondamentale. Parmi les sources inédites
de Holenstein, l’une est tout particulièrement intéressante : il s’agit de la lettre écrite le 10 avril 1942 au
directeur de la Bibliothèque nationale suisse à propos du professeur d’Aarau Jost Winteler, par l’un des fils
de ce dernier, le docteur Jost Fridolin Winteler ; celui-ci cherche à démontrer que le souvenir des relations
entre le maître et l’élève et l’appréciation du jugement clair et perspicace du maître sont restés durables :
Vom ihm habe ich auch erstmalig Ausführungen über Relativität gehört, die dann Einstein, der die
Kantonschule in Aarau besuchte, da die Matura bestand und bei uns wohnte, mathematisch entwickelt hat
(1895-1896). C’est lui [le père de Jost Fridolin] qui m’a parlé pour la première fois des principes de la
relativité développés mathématiquement par Einstein (1895-1896), qui avait fréquenté l’école cantonale et
passé sa maturité à Aarau et qui avait pris pension chez nous.
Einstein le reconnaît lui-même, le « germe de la théorie de la relativité restreinte » était déjà contenu
dans ces réflexions paradoxales (Gedankenexperiment) qui l’inspirèrent tout au long de l’année scolaire
passée à Aarau et qui lui parurent « intuitivement claires »13.
Le style emphatique de Winteler frappe celui qui lit la préface de sa thèse de doctorat :
Dans son essence, mon travail s’adresse uniquement à ceux qui sont capables de saisir la forme verbale
comme cette révélation de l’esprit humain qui se trouve avec l’esprit lui-même dans des rapports bien plus
intimes et plus complets que ne le sont les produits, même les meilleurs, d’une littérature plus achevée. Ceux
à qui s’adresse mon travail doivent donc concevoir l’étude des pouvoirs latents qui déterminent le mouvement
continuel de la forme verbale comme une tâche qui le dispute en intérêt et en pertinence à tous les autres
domaines de la science14.
11. In Schweizer Monatshefte 59 (mars 1979), pp. 221-233.
12. Winteler, Die Kerenzer Mundart, p. 27.
13. « Autobiographical Notes », p. 53.
14. Winteler, Die Keremer Mundart, p. VIII.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Dans la famille d’un professeur à l’école d’Aarau qui était un érudit dans le domaine historicolinguistique, [Einstein] fut accepté avec sympathie et se sentit donc immédiatement chez lui... C’est ainsi
que la période passée à Aarau prit de bien des façons de l’importance pour lui, et fut l’une des meilleures
de toute sa vie.
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 6
6
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Nous avons examiné les idées d’Einstein sur le langage à la lumière de ses attitudes divergentes
vis-à-vis de la cognition, d’une part, et vis-à-vis de la communication de l’autre. Nous avons aussi abordé
la question de la familiarité entre Einstein, jeune homme, et un éminent pionnier de la linguistique de cette
époque. Passons maintenant à la question des inspirations einsteiniennes que reflètent les théories linguistique contemporaines, ou, du moins, aux analogies entre les tendances de la physique et de la linguistique
modernes.
Malgré la diversité des idéologies relativistes dans les différentes provinces des activités artistiques et
savantes, il est hors de doute que leurs principaux slogans, dispositifs et résultats présentent un dénominateur
commun. Voici ce que j’ai écrit il y a près de vingt ans pour tenter de décrire les combats qui, à l’échelle
internationale, ont animé notre génération :
Ceux d’entre nous qui s’occupaient du langage apprirent à appliquer le principe de la relativité aux
opérations linguistiques ; nous étions normalement attirés dans cette direction par le développement
spectaculaire de la physique moderne et par la théorie et la pratique du cubisme en peinture, où tout est
fondé sur la relation et l’interaction entre les parties et les totalités, entre la couleur et la forme, entre la
représentation et le représenté. Braque déclarait : « Je ne crois pas aux choses, je ne crois qu’à leurs
relations.17 »
15. A. Einstein, « Principles of Research », in Einstein, Ideas and Opinions (fondé sur Mein Weltbild, éd. Carl Seelig),
retraduit et revu par Sonja Bargmann, New York, Crown Publishers, Inc., 1954, pp. 224-227. [Comment je vois le monde,
nouvelle éd. revue et augmentée, trad. de l’allemand par M. Solovine, Paris, Flammarion, 1958.]
16. Albert Einstein et Michele Besso, Correspondance 1903-1955, traduction, introduction et notes par P. Speziali, Paris,
Hermann, 1972, p. 309. [Nous reproduisons ici la traduction française de P. Speziali (N.d.T.).]
17. Ces lignes ont été écrites au seuil des années soixante pour conclure mon livre Selected Writings, La Haye, Mouton,
1962, vol. I, p. 632. [Elles ont été traduites en français par P. Hirschbuhler dans R. Jakobson, Essais de linguistique générale
II. Rapports internes et externes du langage, Paris, Éditions de Minuit, 1973, p. 133. C’est cette traduction que nous reproduisons
ici (N.d.T.).]
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
Ce passage semble être en totale affinité avec les expressions ferventes qu’emploie Einstein dans son
allocution prononcée en 1918 en l’honneur de Max Planck : « La tâche suprême du physicien est d’arriver
à ces lois élémentaires universelles à partir desquelles on peut construire le cosmos par déduction pure. Il
n’y a aucun chemin logique qui conduise à ces lois, seule l’intuition, s’appuyant sur la compréhension
sympathique de l’expérience, peut les atteindre15. »
Son disciple d’Aarau a toujours conservé un souvenir exalté de l’« esprit clairvoyant » de Winteler. Parmi
toutes les précieuses lettres qu’Albert Einstein et Michele Besso, ces deux amis de toujours, ont échangées
entre 1903 et 195516, on rencontre un message désarçonnant envoyé de Princeton à Berne le 16 février 1936,
avec des images fiévreuses comme : « le lutin mathématique me harcèle sans cesse », « les affaires humaines sont moins que réjouissantes » et « die Narren in Deutschland » (des fous qui se trouvent en
Allemagne). Ce message dramatique comporte une référence capitale à « l’esprit prophétique du professeur
Winteler, qui avait reconnu si tôt et si complètement le danger imminent ». La lettre se conclut de manière
abrupte sur des mots d’espoir : l’autarcie transitoire de la physique statistique sera en fin de compte
surmontée par l’esprit spéculatif universel.
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 7
7
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
En dépit des formes quelque peu différentes que la notion d’« affinités fondamentales » a prises dans
les arts et les sciences, la prédominance de la recherche des rapports sur celle des faits en relation rattache
le noyau topologique de l’art de ce siècle et la science d’Einstein. Quelque aliénation personnelle que
l’homme de science puisse ressentir en face de certaines formes d’innovation artistique, on ne peut
pas négliger des témoignages éloquents de solidarité tels que les professions de foi des grands inventeurs
modernes de l’art, par exemple la déclaration faite par Piet Mondrian en 1920 et publiée dans Néo-plasticisme
(Paris) : « Les plans colorés, tant par position et dimension que par la valorisation de la couleur n’expriment
plastiquement que des rapports et non des formes. »
Quand je me remémore, quand je relis les différentes choses qui montrent que les avant-gardes artistique,
littéraire et scientifique des années vingt et trente à Moscou étaient étroitement entrelacées, je me rends
compte combien la connaissance fascinée qu’elles avaient des écrits d’Einstein et de ses partisans a été
importante et féconde. Et le Cercle linguistique de Moscou, jeune association expérimentale qui s’efforçait
de trouver une théorie rénovée du langage et de la poésie, et le rameau historiquement plus tardif de cette
même tendance, ce qu’on a appelé l’École structurale de Prague, se sont explicitement référés aux tentatives
méthodologiques faites par Einstein pour mettre en relation les problèmes centraux de la relativité et de
l’invariance. Un des exemples qui illustrent cette relation proclamée est le Projet de terminologie normalisée, préparé et publié par le Cercle linguistique de Prague pour la Conférence de phonologie de 193018. Dans
la liste des «notions fondamentales », la première place appartient à l’opposition phonologique et cette entrée
est suivie par une référence aux éléments opposés eux-mêmes, appelés unités phonologiques. Cette hiérarchie
architectonique s’est encore rapprochée du « nouveau point de vue physique » du fait que l’analyse structurale
de l’univers verbal a remplacé l’ancienne approche mécanique. Dans la « Théorie de la relativité d’Einstein »,
telle que la conçoit le philosophe Ernst Cassirer, « il n’existe que l’unité de certaines relations fonctionnelles,
qui sont désignées de manière différente selon le système de références dans lequel nous les exprimons »19.
Deux des linguistes américains les plus originaux, Edward Sapir (1884-1939) et Benjamin Lee Whorf
(1897-1941), ont essayé d’évaluer la relativité de la forme de pensée et Sapir se réfère directement à la
« relativité physique d’Einstein »20 : c’est un autre exemple significatif d’une initiative linguistique
audacieuse qui a abordé à dessein le cadre conceptuel d’Einstein et la question directe, quoique restrictive,
qu’Einstein a posée dans son allocution radiodiffusée de 1941 : « dans quelle mesure le même langage
signifie-t-il la même mentalité ». Tout impact implique nécessairement des similarités, mais aussi des clivages d’opinion fort instructifs.
Peut-être les concordances les plus parlantes entre l’innovation en physique et l’innovation en linguistique
contemporaine sont-elles ces coïncidences qui semblent dues à une évolution purement indépendante et
convergente. Ce genre de correspondances latentes révèle que ces sciences différentes suivent des cours qui
sont dans une grande mesure parallèles. Et l’exigence d’Einstein, qui demande au physicien théoricien de
s’efforcer d’atteindre le plus haut niveau possible de précision rigoureuse dans sa description des relations
pures (comme dans son discours prononcé en 1918 pour le soixantième anniversaire de Max Planck, que
nous avons cité plus haut), et le pendant exact de cette exigence, qui est de procéder à une investigation
toujours plus stricte dans le monde physique considéré comme un réseau de composantes reliées entre elles
– ces deux exigences correspondent éloquemment aux tâches de la linguistique de pointe. Lorsqu’on
18. In Travaux du cercle linguistique de Prague 4 (1931), pp. 309323, en particulier p. 311.
19. E. Cassirer, Substance and Function and Einstein’s Theory of Relalivity, New York, Dover, 1923, p. 398.
20. E. Sapir, Selected Writings, Berkeley, University of California Press, 1949, p. 159.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 8
8
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
compare attentivement les concepts fondamentaux de la physique relativiste et les constituants du langage
tels que la linguistique contemporaine les analyse et les définit, on découvre un isomorphisme frappant dont
il est facile de trouver des exemples aux différents niveaux de la structure verbale.
Un petit nombre d’exemples phonologiques très répandus suffiront à montrer que le problème est
général. Les traits distinctifs qui remplissent la principale fonction des sons du langage sont, comme les
appellerait Einstein, des idées rigoureusement relationnelles, connues intuitivement comme des oppositions
binaires. C’est ainsi, par exemple, que dans les systèmes consonantiques qui font un usage sémantiquement
discriminatoire du trait dit « bémol », les consonnes bémolisées sont phénoménologiquement équivalentes ;
dans notre perception, la principale chose qui les distingue, c’est un abaissement particulier de leur formant
inférieur. Dans différentes langues, nous observons certaines différences dans les modalités sensi-motrices
de ce processus. Par exemple, on peut obtenir un effet auditif assez semblable par la labialisation et par la
pharyngalisation, ou, en d’autres termes, en rétrécissant soit l’extrémité antérieure, soit l’extrémité postérieure
de la cavité buccale. Mais, puisque la différence entre ces deux cas particuliers n’est jamais utilisée à des
fins sémantiquement discriminatoires, le dénominateur commun l’emporte sur la différence (ainsi que sur
quelques autres modalités tout aussi superficielles). La typologie des langues pose l’invariance structurale
du trait en question et les lois universelles du langage montrent qu’elles n’admettent pas plus d’une seule
opposition de bémol (présence ou absence)21. En linguistique, le principe d’équivalence (au lieu de l’identité
mécanique) impose des limites à la signification qu’on peut attendre d’une étude des détails séparés, non
coordonnés, d’une expérience et bien plutôt nous fait découvrir progressivement que les relations
fondamentales qui sous-tendent l’univers verbal (aussi bien que l’univers physique) sont en très petit
nombre, et que ce petit nombre est réglé par des lois.
« Nun fiel mir ein » (Alors il m’apparut) : cette phrase des « Notes autobiographiques »22 d’Einstein est
comme un premier aperçu de la théorie générale de la relativité et comme un slogan commun aux sciences
contemporaines, tendant toutes à transformer une abondance de matériaux bruts en un petit nombre de lois
générales. Le problème de l’équivalence s’est révélé aussi pertinent pour le principe de la relativité que pour
la découverte des universaux linguistiques. Une révision substantielle du modèle de l’espace-temps, quelles
que soient les différentes manières d’exposer ces questions dans les différentes sciences, nous entraîne loin
de l’ancienne routine mécanique. Parmi ces vues nouvelles en linguistique qui doivent entraîner une
discussion interdisciplinaire essentielle, on peut mettre en avant la notion de synchronie dynamique, le
cours réversible des événements en train de s’accomplir et l’idée que tout changement en cours est une
simultanéité intrinsèque d’oscillations sensibles.
Niels Bohr a insisté à de nombreuses reprises sur le lien profond qui attache à présent la physique et la
linguistique ; nous avons consacré ensemble à cette question un séminaire commun au Massachusetts
Institute of Technology, à la fin des années cinquante. Nous avons étudié avec une grande attention les
« exigences de l’invariance relativiste », pour prendre l’expression favorite de Bohr23, en ce qui concerne
la recherche et la structure des constituants ultimes à la fois de l’univers physique et de l’univers linguistique,
les « quanta élémentaires », nom que la physique leur a donné et que les linguistes ont emprunté à la
physique. Les linguistes de notre génération se sont efforcés de concevoir la masse verbale comme une
21. Cf. R. Jakobson et L. Waugh, The Sound Shape of Language, Bloomington, Ind., Indiana University Press, 1979,
p. 113 sqq.
22. « Autobiographical Notes », pp. 64-65.
23. N. Bohr, Atomic Physics and Human Knowledge, New York, Wiley, 1958, pp. 71-72. [Traduit en français par E. Bauer
et R. Omnes : Physique atomique et connaissance humaine, Paris, Gauthier-Villars, 1961.]
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson
09 Jakobson.qxd
18/10/2004
13:15
Page 9
9
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
matière « discontinue » qui est composée de quanta élémentaires et révèle ainsi sa structure « granulaire »;
cette tentative prolonge pour une part un ensemble d’efforts plus anciens. Cependant, elle fait preuve en
même temps d’une évidente dépendance à l’égard du développement des sciences exactes, qui a été, j’en
suis témoin, une authentique source d’inspiration pour la linguistique d’avant-garde du premier tiers de notre
siècle, à la fois dans les centres scientifiques de l’Ouest et de l’Est24.
Enfin, mentionnons que deux problèmes polaires et inséparables ont pénétré les différentes sciences :
il s’agit de la symétrie (avec ses diverses transformations) et de l’asymétrie, d’une part, et de la rupture de
symétrie, de l’autre. Dans son ouvrage Thematic Origins of Scientific Thought, Gerald Holton a fait
remarquer que les arguments de symétrie ont pris dans la physique d’Einstein un rôle initiateur et vital. Des
concepts dans une grande mesure analogues trouvent une application encore plus étendue dans l’analyse de
toute structure linguistique. Mais il faut bien voir qu’en recherche linguistique tout l’ensemble symétrieasymétrie, à la fois dans son engagement ontologique et dans son rôle de dispositif purement formel,
appartient plus aux victoires de demain qu’aux solutions trouvées hier ou aujourd’hui. Pourtant, nous
pouvons peut-être nous consoler sur ce point avec une pensée qu’Einstein n’a notée que quatre semaines
avant sa mort : « Pour nous... cette séparation entre passé, présent et avenir ne garde que la valeur d’une
illusion, si tenace soit-elle25. »
Une théorie scientifique qui fait époque peut se régénérer dans la poésie de son temps en un mythe
élémentaire. C’est ainsi, par exemple, que le poète russe d’avant-garde Vladimir Maïakovski a loué l’« esprit
futuriste d’Einstein » dès les premiers regards inquiets qu’il a jetés en 1920 sur la théorie de la relativité
et jusqu’à la veille de son suicide en 193026, et qu’en 1929 il a consacré son dernier drame, Banja (Les Bains),
à la victoire écrasante de cet esprit si exceptionnel sur le prétendu absolu du temps.
Roman Jakobson.
Traduit de l’anglais par Catherine Malamoud.
Gerald Holton and Yehuda Elkana, éd., Albert Einstein, Historical and Cultural Perspectives : The Centennial Symposium
in Jerusalem. ©1982 by Princeton University Press.
Essay by Roman Jakobson, pp. 139-150, reprinted by permission of Princeton University Press.
24. A. Einstein et L. Infeld, The Evolution of Physics, New York, Simon and Schuster, 1942, pp. 263-313. [Traduit en
français par M. Solovine : L’Évolution des idées en physique, Paris, Flammarion, 1938, pp. 243-289.]
25. Einstein et Besso, Correspondance, p. 539.
26. Voir Victor Ehrlich, Twentieth-Century Russian Literary Criticism, New Haven, Yale University Press, 1975, p.151.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - LECOMTE Alain - 82.67.72.42 - 19/10/2011 14h58. © Gallimard
L’humain dans l’homme
Roman Jakobson

Documents pareils