THESE DIPLOME D`ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE

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THESE DIPLOME D`ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE
Année 2015
THESE
pour le
DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE
Qualification en : MEDECINE GENERALE
Par
Anne-Lucie CHAUDET LEJEUNE
Née le 03/11/1985 LE MANS
Présentée et soutenue publiquement le : 13/10/2015
ATTITUDES ET REPRESENTATIONS DE FEMMES D'ORIGINE IMMIGREE
DE LA REGION MANCELLE CONCERNANT LE DEPISTAGE DU CANCER
DU COL DE L'UTERUS
Président : Monsieur le Professeur HUEZ Jean-François
Directeur : Madame le Professeur BARON Céline
1
SERMENT D’HIPPOCRATE
« Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être
fidèle aux lois de l’honneur et de la probité.
Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans
tous ses éléments, physiques et mentaux ,individuels et sociaux.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune
discrimination selon leur état ou leurs convictions.
J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées
dans leur intégrité ou leur dignité.
Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les
lois de l’humanité.
J’informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs
conséquences.
Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des
circonstances pour forcer les consciences.
Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera.
Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.
Admis(e) dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés.
Reçu (e) à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma
conduite ne servira pas à corrompre les mœurs.
Je ferai tout pour soulager les souffrances.
Je ne prolongerai pas abusivement les agonies.
Je ne provoquerai jamais la mort délibérément.
Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Je
n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les
perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés.
J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité.
Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes
promesses ; que je sois déshonoré (e) et méprisé(e) si j’y manque ».
2
LISTE DES ENSEIGNANTS DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE
D’ANGERS
Doyen
Pr. RICHARD
Vice doyen recherche
Pr. PROCACCIO
Vice doyen pédagogie
Pr. COUTANT
Doyens Honoraires : Pr. EMILE, Pr. REBEL, Pr. RENIER, Pr. SAINT-ANDRÉ
Professeur Émérite : Pr. Gilles GUY, Pr. Jean-Pierre ARNAUD
Professeurs Honoraires : Pr. ACHARD, Pr. ALLAIN, Pr. ALQUIER, Pr. BASLÉ, Pr. BIGORGNE, Pr. BOASSON,
Pr. BOYER, Pr. BREGEON, Pr. CARBONNELLE, Pr. CARON-POITREAU, Pr. M. CAVELLAT, Pr. COUPRIS, Pr. DAUVER,
Pr. DELHUMEAU, Pr. DENIS, Pr. DUBIN, Pr. EMILE, Pr. FOURNIÉ, Pr. FRANÇOIS, Pr. FRESSINAUD, Pr. GESLIN,
Pr. GINIÈS, Pr. GROSIEUX, Pr. GUY, Pr. HUREZ, Pr. JALLET, Pr. LARGET-PIET, Pr. LARRA, Pr. LE JEUNE, Pr. LIMAL,
Pr. MARCAIS, Pr. PARÉ, Pr. PENNEAU, Pr. PENNEAU-FONTBONNE, Pr. PIDHORZ, Pr. POUPLARD, Pr. RACINEUX,
Pr. REBEL, Pr. RENIER, Pr. RONCERAY, Pr. SIMARD, Pr. SORET, Pr. TADEI, Pr. TRUELLE, Pr. TUCHAIS, Pr. VERRET,
Pr. WARTEL
PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS
ABRAHAM Pierre
Physiologie
ASFAR Pierre
Réanimation
AUBÉ Christophe
Radiologie et imagerie médicale
AUDRAN Maurice
Rhumatologie
AZZOUZI Abdel-Rahmène
Urologie
BARON Céline
Médecine générale
BARTHELAIX Annick
Biologie cellulaire
BATAILLE François-Régis
Hématologie ; Transfusion
BAUFRETON Christophe
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
BEAUCHET Olivier
Gériatrie et biologie du vieillissement
BEYDON Laurent
Anesthésiologie-réanimation
BIZOT Pascal
Chirurgie orthopédique et traumatologique
BONNEAU Dominique
Génétique
BOUCHARA Jean-Philippe
Parasitologie et mycologie
CALÈS Paul
Gastroentérologie ; hépatologie
CAMPONE Mario
Cancérologie ; radiothérapie
3
CAROLI-BOSC François-Xavier
Gastroentérologie ; hépatologie
CHABASSE Dominique
Parasitologie et mycologie
CHAPPARD Daniel
Cytologie et histologie
COUTANT Régis
Pédiatrie
COUTURIER Olivier
Biophysique et Médecine nucléaire
CUSTAUD Marc-Antoine
Physiologie
DARSONVAL Vincent
Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique
de BRUX Jean-Louis
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
DESCAMPS Philippe
Gynécologie-obstétrique
DIQUET Bertrand
Pharmacologie
DUVERGER Philippe
Pédopsychiatrie
ENON Bernard
Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire
FANELLO Serge
Épidémiologie, économie de la santé et prévention
FOURNIER Henri-Dominique
Anatomie
FURBER Alain
Cardiologie
GAGNADOUX Frédéric
Pneumologie
GARNIER François
Médecine générale
GARRÉ Jean-Bernard
Psychiatrie d’adultes
GOHIER Bénédicte
Psychiatrie
GRANRY Jean-Claude
Anesthésiologie-réanimation
GUARDIOLA Philippe
Hématologie ; transfusion
HAMY Antoine
Chirurgie générale
HUEZ Jean-François
Médecine générale
HUNAULT-BERGER Mathilde
Hématologie ; transfusion
IFRAH Norbert
Hématologie ; transfusion
JEANNIN Pascale
Immunologie
JOLY-GUILLOU Marie-Laure
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
LACCOURREYE Laurent
Oto-rhino-laryngologie
LASOCKI Sigismond
Anesthésiologie-réanimation
LAUMONIER Frédéric
Chirurgie infantile
LEFTHÉRIOTIS Georges
Physiologie
LEGRAND Erick
Rhumatologie
LERMITE Emilie
Chirurgie générale
LEROLLE Nicolas
Réanimation
4
LUNEL-FABIANI Françoise
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
MALTHIÉRY Yves
Biochimie et biologie moléculaire
MARTIN Ludovic
Dermato-vénéréologie
MENEI Philippe
Neurochirurgie
MERCAT Alain
Réanimation
MERCIER Philippe
Anatomie
MILEA Dan
Ophtalmologie
NGUYEN Sylvie
Pédiatrie
PELLIER Isabelle
Pédiatrie
PICHARD Eric
Maladies infectieuses ; maladies tropicales
PICQUET Jean
Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire
PODEVIN Guillaume
Chirurgie infantile
PROCACCIO Vincent
Génétique
PRUNIER Fabrice
Cardiologie
REYNIER Pascal
Biochimie et biologie moléculaire
RICHARD Isabelle
Médecine physique et de réadaptation
RODIEN Patrice
Endocrinologie et maladies métaboliques
ROHMER Vincent
Endocrinologie et maladies métaboliques
ROQUELAURE Yves
Médecine et santé au travail
ROUGÉ-MAILLART Clotilde
Médecine légale et droit de la santé
ROUSSEAU Audrey
Anatomie et cytologie pathologiques
ROUSSEAU Pascal
Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique
ROUSSELET Marie-Christine
Anatomie et cytologie pathologiques
ROY Pierre-Marie
Thérapeutique
SAINT-ANDRÉ Jean-Paul
Anatomie et cytologie pathologiques
SENTILHES Loïc
Gynécologie-obstétrique
SUBRA Jean-François
Néphrologie
URBAN Thierry
Pneumologie
VERNY Christophe
Neurologie
WILLOTEAUX Serge
Radiologie et imagerie médicale
ZAHAR Jean-Ralph
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
ZANDECKI Marc
Hématologie ; transfusion
5
MAÎTRES DE CONFÉRENCES
ANNAIX Claude
Biophysique et médecine nucléaire
ANNWEILER Cédric
Gériatrie et biologie du vieillissement
AUGUSTO Jean-François
Néphrologie
BEAUVILLAIN Céline
Immunologie
BELIZNA Cristina
Médecine interne
BELLANGER William
Médecine générale
BLANCHET Odile
Hématologie ; transfusion
BOURSIER Jérôme
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
BRIET Marie
Pharmacologie
CAILLIEZ Éric
Médecine générale
CAPITAIN Olivier
Cancérologie ; radiothérapie
CASSEREAU Julien
Neurologie
CHEVAILLER Alain
Immunologie
CHEVALIER Sylvie
Biologie cellulaire
CONNAN Laurent
Médecine générale
CRONIER Patrick
Chirurgie orthopédique et traumatologique
de CASABIANCA Catherine
Médecine générale
DINOMAIS Mickaël
Médecine physique et de réadaptation
DUCANCELLE Alexandra
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
DUCLUZEAU Pierre-Henri
Nutrition
FERRE Marc
Biologie moléculaire
FORTRAT Jacques-Olivier
Physiologie
HINDRE François
Biophysique
JEANGUILLAUME Christian
Biophysique et médecine nucléaire
JOUSSET-THULLIER Nathalie
Médecine légale et droit de la santé
KEMPF Marie
Bactériologie-virologie ; Hygiène hospitalière
LACOEUILLE Franck
Biophysique et médecine nucléaire
LETOURNEL Franck
Biologie cellulaire
MARCHAND-LIBOUBAN Hélène
Histologie
MAY-PANLOUP Pascale
Biologie et médecine du développement et de la reproduction
MESLIER Nicole
Physiologie
MOUILLIE Jean-Marc
Philosophie
6
PAPON Xavier
Anatomie
PASCO-PAPON Anne
Radiologie et Imagerie médicale
PENCHAUD Anne-Laurence
Sociologie
PIHET Marc
Parasitologie et mycologie
PRUNIER Delphine
Biochimie et biologie moléculaire
PUISSANT Hugues
Génétique
SIMARD Gilles
Biochimie et biologie moléculaire
TANGUY-SCHMIDT Aline
Hématologie ; transfusion
TURCANT Alain
Pharmacologie
7
COMPOSITION DU JURY
Président du jury :
Monsieur le Professeur HUEZ Jean-François
Directeur de thèse :
Madame le Professeur BARON Céline
Membres du jury :
Madame le Professeur BARON Céline
Monsieur le Professeur SENTILHES Loïc
Monsieur le Docteur LACOMERE Jean-Luc
8
Remerciements
A ma directrice de thèse, Madame le Professeur BARON. Merci pour vos conseils
constructifs dans la réalisation de ce travail.
Au Président du Jury, Monsieur le Professeur HUEZ. Merci d’avoir accepté de présider ce
jury.
A Monsieur le Professeur SENTILHES et Monsieur le Docteur LACOMERE. Merci de
participer à l’évaluation de ce travail.
A toutes les personnes qui ont permis la réalisation de cette étude.
A mon mari et mon fils,
A mes parents,
A toute la smala qui s’agrandit,
A ma belle famille.
9
Table des matières
Introduction…………………………………………......................................................12
Méthode…………………………………………………………………………………...15
A-Mode de recrutement…………………………………………………………………........15
B-Population………………………………………………………………………………….15
C-Guide d’entretien…………………………………………………………………………..15
D-Conditions de recueil………………………………………………………………………16
E-Méthode de retranscription et d’analyse…………………………………………………...16
F-Aspects éthiques…………………………………………………………………………....16
Résultats…………………………………………………………………………………..11
A-Données générales sur les entretiens………………………………………………….........11
B-Description de l’échantillon………………………………………………………………..11
C-Guide d’entretien (Annexe1 CD-Rom)
D-Analyse…………………………………………………………………………………….12
1-La prévention: une notion parfois nouvelle et questionnée………………………………...19
1-1- Le dépistage du cancer du col de l’utérus dans le pays d’origine: une pratique peu
connue des femmes, rarement proposée et confiée à des spécialistes
1-2-Un dépistage jugé non pertinent en l’absence de symptômes
1-3-Un dépistage qui vient heurter l’habitude de soins dirigés
2-Une pratique de dépistage qui s’intègre difficilement à l’histoire de la patiente et/ou à sa
culture ………………………………………………………………………………………...22
2-1-Un dépistage qui n’est pas une priorité
2-2-Un dépistage influencé par l’expérience personnelle ou transmise du vécu de
l’examen gynécologique
2-3-Un dépistage marqué par le tabou de l’intime et la culture
2-4-Un dépistage freiné par la barrière de la langue
2-5-Un geste plutôt réservé aux femmes mariées
2-6-Le dépistage en rupture avec l’idée d’un destin et de l’ “histoire naturelle”
2-7-Un geste mieux accepté si c’est un médecin femme mais non rejeté pour des
raisons religieuses si c’est un homme
3-Un geste accepté à condition d’être expliqué et accompagné……………………………...26
3-1-Un besoin d’explications et d’informations sur les modes d’accès au dépistage
dans un système de santé méconnu
3-2-Une attente d’information rassurante et adaptée à leur niveau de connaissance
3-3-Le frottis, une opportunité à saisir pour garantir sa santé
3-4-Le frottis, un geste banal pour les femmes ayant eu un suivi de grossesse
3-5-Le frottis, un conseil prodigué par l’entourage
10
4- Un dépistage d’une maladie nommée « cancer » qui a des représentations limitant le
dépistage……............................................................................................................................31
4-1-Un cancer perçu comme incurable qui fait peur
4-2-Un cancer parfois attribué à des comportements ou à des évènements de vie qui
mettent en doute l’intérêt du dépistage
4-3-Un cancer évalué comme rare dans le pays d’origine qui remet en cause l’utilité
du dépistage
5-Propositions des enquêtées pour améliorer le dépistage………………………………..….32
5-1-Une priorité: contourner l’obstacle linguistique
5-2-Des supports adaptés au niveau de compréhension
5-3-Des émissions télévisuelles proposées pour leur accessibilité au plus grand
nombre
5-4-Des formats d’information facilitant la confiance et l’expression
5-5-L’amélioration d’informations “en ligne” et l’utilisation des réseaux sociaux
Discussion
A-Discussion sur la méthodologie……………………………………………………………35
1-Biais de sélection de l’échantillon………………………………………………….35
2-Biais d’intervention lié à l’enquêteur……………………………………………….35
3-Biais liés à la méthode d’analyse…………………………………………………...35
B-Discussion sur les résultats………………………………………………………………...36
1-Validité interne de l’étude…………………………………………………………..36
2-Validité externe de l’étude………………………………………………………….36
a-Comparaison des résultats à la Littérature………………………………….36
b-Eléments de la Littérature complétant l’étude……………………………...37
c-Discussion sur les propositions des participantes…………………………..38
Conclusion……………………………………………………………………………….40
Bibliographie……………………………………………………………………………37
Annexes (cf CD-Rom)
Annexe 1 Guide d’entretien
Annexe 2 Verbatims, Grille d’analyse
Annexe 3 Lettre d’information aux patientes et aux recruteurs
11
Introduction
Les médecins généralistes sont en première ligne du dépistage du cancer du col de l’utérus,
une maladie qui a touché près de 3000 femmes en France en 2011. Près de 1000 femmes en
meurent chaque année [1].
Le dépistage du cancer du col par le frottis cervico-utérin (FCU) préviendrait 90 % des
cancers du col utérin à condition qu’il soit réalisé chez toutes les femmes de 25 à 65 ans et
qu’un suivi adéquat des lésions détectées soit proposé [2].
Actuellement, 40% des femmes sont dépistées trop fréquemment et 50% le sont trop peu
souvent. Parmi elles, les femmes d’origine immigrée représentent une population où il est
nécessaire d’adapter le dépistage [2]. Les programmes régionaux d’intégration des
populations immigrées visent à faire émerger la connaissance des situations sociales,
familiales, du parcours de vie des femmes immigrées pour mettre en place des campagnes de
prévention de santé adaptées à leurs réalités.
En effet, les freins d’ordre culturel et économique sont plus importants chez les femmes
d’origine migrante et/ou en situation de précarité1 [3].
Un immigré des pays tiers2 a 77 % de risque d'être en sous-emploi3 par rapport à un Français
de parents nés français. Les femmes immigrées sont deux fois plus touchées que leurs
homologues masculins. Elles sont donc directement exposées à la précarité [4].
Le Plan cancer 2009-2013 avait notamment pour objectif de réduire les inégalités sociales
d’accès au dépistage en renforçant les actions auprès des femmes à risque et des femmes en
situation de précarité. D’après l’Organisation Mondiale de la Santé, les inégalités sociales en
santé sont liées à différents déterminants que sont, entre autres, le niveau de revenu, le réseau
de soutien social, l’emploi, le niveau d’étude, les services de santé et la culture.
1
Absence d'une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et familles d'assumer leurs responsabilités élémentaires
et de jouir de leurs droits fondamentaux. Les situations de précarité économique et sociale sont diverses et souvent
cumulatives. Elles sont liées en grande partie à la dégradation du marché de l'emploi
2
Pays ou territoires hors de l’Union européenne
3
Avoir un contrat précaire, être à temps partiel sans l’avoir choisi ou être considéré comme inactif alors que l'on souhaite
travailler Breem.Y, Sous emploi et précarité chez les immigrés, Infos migrations n°17, Décembre 2010
12
Une étude de 2010 en Ile de France montre que l’origine migratoire est un facteur d’inégalité
important concernant le recours au moins une fois dans sa vie au dépistage du cancer du col.
Le risque de ne jamais en avoir bénéficié est 4 fois plus élevé chez les femmes immigrées [5].
Le risque de mourir d’un cancer du col de l’utérus est presque dix fois plus élevé en Afrique
subsaharienne qu’en Amérique du Nord [6]. Cette différence est liée à l’absence de dépistage
de masse et de vaccination anti-papillomavirus (HPV) dans les pays subsahariens, mais
également à l’absence de service de détection par manque de personnel qualifié ou de
traitement [7].
83% des nouveaux cas de cancer du col de l’utérus surviennent dans les pays en voie de
développement4. C’est la deuxième cause de mortalité par cancer chez la femme dans ces
pays, et la première chez la femme africaine [8].
Les femmes immigrées5 en France, pour la plupart issues de pays en voie de développement
[9], font partie de la population cible où il est nécessaire de renforcer les actions en faveur du
dépistage [3].
La prise en compte des spécificités socioculturelles en matière de santé est une dimension qui
se développe dans le monde, en Europe et en France.
Le dépistage du cancer du col de l’utérus, mené à l’aide de méthodes adaptées à une
population cible, est une pratique qui se développe aux Etats-Unis notamment pour accroître
la participation des femmes hispaniques. Elles sont contactées en espagnol par téléphone pour
leur proposer d’être dépistées.
En Europe, le projet Migrant-Friendly Hospital vise à prendre en compte les spécificités
socioculturelles des patients migrants dans les pratiques de soins. Ce programme regroupe
4
Pays qui a enclenché un processus, sur les plans économique et social, pour relever le niveau de vie de ses habitants, en
tentant de mettre fin, notamment, au faible développement de son industrie, à l'insuffisance de sa production agricole, au
déséquilibre entre la rapidité de sa croissance démographique et l'augmentation de son revenu national.
5
Selon la définition adoptée par le Haut Conseil à l'Intégration en 1991, un immigré est une personne née étrangère à
l'étranger et entrée en France en cette qualité en vue de s’établir sur le territoire français de façon durable.
13
différents hôpitaux dans 12 pays de l’Union Européenne. En France, l’hôpital Avicenne à
Bobigny en fait partie.
Une étude auprès de la population immigrée en région Provence-Alpes-Côte d’Azur sur les
représentations et les pratiques en matière de dépistage des cancers met en évidence
l’importance de la relation de l’individu à la maladie, modelée par ses références culturelles,
sa religion, son histoire personnelle, son niveau de connaissances [10].
Dans les Pays de la Loire, la population immigrée représente 3,2 % de la population régionale
en 2011. Cette proportion croît régulièrement de 4,5% en moyenne par année. 63 % des
immigrés de la région appartiennent à la classe d'âge des 20 à 55 ans.
Les communes de Nantes, Saint-Nazaire, Angers, Cholet et Le Mans regroupent 45 % des
immigrés de la région, dont plus de la moitié sont originaires du Maghreb et de l'Afrique
subsaharienne [11]. La Sarthe accueille 15 % de la population immigrée des Pays de la Loire,
essentiellement dans les pôles urbains et leur périphérie.
Notre étude se situe dans la Sarthe, dans une ville de taille moyenne, Le Mans (140 000
habitants), et dans deux de ses communes périphériques, Allonnes (11 000 habitants) et
Coulaines (7500 habitants).
Dans ce contexte d’accueil de population immigrée, l’amélioration de la qualité des soins
nous amène à nous interroger sur la participation des femmes au dépistage du cancer du col de
l’utérus. Ainsi l’étude des attitudes6 et des représentations7 concernant le frottis cervico-utérin
chez des femmes immigrées de la région mancelle permettra d’explorer les leviers ou au
contraire, les freins à la prévention dans cette population.
6
Elle exprime un positionnement, une orientation générale, positive ou négative par rapport à l'objet de la représentation.
7
Ce sont des systèmes de références qui permettent d’interpréter ce qui nous arrive, voire de donner un sens à l’inattendu.
Elles servent à classer les circonstances, les phénomènes, les individus auxquels nous avons à faire. En matière de santé, ce
sont les idées ou théories que les personnes entretiennent sur les maladies, leurs causes, plus ou moins éloignées des
connaissances médicales. “Les représentations de la santé et du corps différent de celles des médecins. Les représentations,
leur évolution et leur fonction adaptative ont un impact sur les comportements. Ces représentations peuvent rester cachées
si le médecin n’arrive pas à dire « ici on peut tout dire même les choses du village. Nous connaissons ces choses –là »
(Tobie Nathan). A.Begue-Simon, “Approche socio-anthropologique et cancer”
14
Méthode
Il s’agissait d’une étude qualitative par entretiens individuels semi-dirigés.
A-Mode de recrutement
La saturation théorique des données a permis d’apprécier le nombre d’entretiens nécessaires.
16 femmes d’origine immigrée, âgées de 25 à 65 ans, volontaires pour cette étude ont
participé.
Elles ont été recrutées au sein de différentes structures: cabinet de Médecine Générale, cabinet
de sage femme libérale, antenne de Protection Maternelle et Infantile (PMI), associations de
femmes immigrées. Après information orale du thème de l’étude et demande de consentement
des femmes, le recrutement a été fait par des professionnels de santé (médecins, sages
femmes, puéricultrices) ou par des animateurs en santé travaillant pour des associations de
femmes.
B-Population
Il s’agissait d’un échantillonnage raisonné en variation maximale sur les variables suivantes :
âge, profession, niveau variable en français, situation maritale, nombre d’enfants, moyen de
contraception, niveau d’étude, type de couverture sociale, langue maternelle, nombre
d’années vécues en France, âge à l’ arrivée en France, vivant au Mans, à Coulaines ou
Allonnes.
C-Guide d’entretien
Il a été élaboré à l’aide d’hypothèses et de constats issus de la littérature dans le domaine de la
Médecine [12], de la Santé Publique [13], de la Sociologie [14], des Sciences Humaines [15],
de l’Anthropologie [16].
Le guide d’entretien était organisé sur quatre axes d’exploration : l’information et la réception
de l’information de la proposition de frottis, le recueil de l’ expérience personnelle,
l’influence de l’origine étrangère sur l’attitude de la patiente, et enfin les propositions de la
participante pour améliorer le dépistage du cancer du col de l’utérus.
15
Il y a eu un entretien préalable pour tester les questions et la compréhension de la première
participante.
D-Conditions de recueil
Le jour de l’entretien a été fixé en tenant compte des disponibilités de la patiente. Les
entretiens été réalisés dans un local attenant au cabinet du professionnel de santé que la
patiente avait l’habitude de consulter. Les entretiens ont été menés par le même enquêteur et
enregistrés intégralement avec enregistreur numérique, après consentement de la patiente.
E-Méthode de retranscription et d'analyse
Les informations brutes recueillies ont été
transcrites intégralement sous Word pour
constituer le corpus du verbatim. Le discours hors contexte et hors sujet, n’a pas été
retranscrit.
Ensuite, une grille d'analyse a été construite avec différents thèmes et sous-thèmes avec le
choix d'un codage ouvert ; approche inductive de généralisation et d’abstraction des données.
Le codage ouvert a permis de repérer les sous-thèmes qui ont été comparés puis regroupés en
thèmes plus généraux.
L’analyse des thèmes émergeant du verbatim a permis d’en faire une lecture compréhensive.
Une triangulation a été faite avec la Directrice de thèse pour la partie analyse et interprétation
afin de limiter les biais et améliorer la compréhension des entretiens.
F-Aspects éthiques
L’avis du Comité d'Ethique a été sollicité pour cette étude qui concernait l'intimité des
patientes. Les caractéristiques de la population étudiée
composée de femmes d'origine
immigrée imposaient les règles de précautions évitant toute stigmatisation.
16
Résultats
A- Données générales sur les entretiens
Les entretiens ont été menés pour la plupart dans un cabinet vacant attenant au cabinet du
professionnel de santé recruteur. Ils ont duré en moyenne cinquante minutes.
B-Description de l’échantillon
L’échantillon était constitué de 16 femmes de 27 à 62 ans, pour la plupart issues de quartiers
populaires.
17
Tableau: Caractéristiques de la population étudiée
Variables
Age (années)
Nombre
Variables
Niveau d’étude
Nombre
27-45
12
Supérieur
9
46-62
4
Secondaire
3
Primaire ou inférieur
Professions
Cadres et professions
intellectuelles
supérieures
Employées
Sans activité
professionnelle
Retraitée
Couverture maladie
4
4
7
1
Situation maritale
Mariée
Divorcée
Concubinage
Célibataire
12
1
AME
7
1
Sécurité sociale seule
2
Sécurité sociale+complémentaire
6
Maroc-Algérie
Tchétchénie-Ouzbékistan
4
3
1
Iran-Irak
2
2
Vietnam
1
Roumanie
2
Pas d'enfant
3
3 et plus
CMU
Pays d’origine
Nombre d’enfants
Entre 1 et 2
4
9
4
Afrique de l’Ouest (Mali, Madagascar, Congo,
Côte d’Ivoire)
4
Age à l’ arrivée en France (années)
10 à 20
2
21 à 30
Moyen de
contraception
10
Aucun
9
31 à 40
3
Implant
1
> 40
1
Stérilet
2
Nombre d’années vécues en France
Pilule
2
0-5
3
Préservatif
1
6-15
9
Ménopause
1
> 15
4
18
D-Analyse
1-La prévention: une notion parfois nouvelle et questionnée
1-1- Le dépistage du cancer du col de l’utérus : une pratique peu connue des
femmes, rarement proposée et confiée à des spécialistes dans le pays d’origine
Elles découvrent un système de santé différent qui propose des dépistages alors qu’elles ont
l’habitude que la demande de soins soit à leur initiative.
“Mais, chez nous, en Ouzbékistan, on ne fait pas le frottis. Il faut que la personne demande.” Entretien G
Il n’y a pas ou peu de propositions par les professionnels de santé d’un dépistage
systématique.
“Dans mes amies au Maroc, personne l’a fait. Parce que là-bas, elles reçoivent pas de courriers, de conseils comme ça
(...) C’est rare qu’on parle de faire des analyses, du dépistage. On n’ a pas l’habitude. “ Entretien D
“En Afrique, on n’a pas l’habitude de se faire dépister, pas l’habitude de faire des visites.” Entretien E
“Mais qui m’en parlerait? en Irak, il faut être atteint d’un cancer pour aller voir un cancérologue. Y a pas de campagne
d’information sur la santé.” Entretien H
L’existence du dépistage du cancer du col de l’utérus leur était jusque là inconnu.
“Avant d’arriver en France, j’en n’avais pas entendu parler.” Entretien F
“Non, j’en n’ai pas entendu parler. J’ai entendu parler que du sein au Congo.” Entretien E
“Les médecins généralistes, ils ne font pas beaucoup d’examens gynécos parce que tout simplement l’accès aux spécialistes
est beaucoup plus facile. Quand elles arrivent en France, elles ne savent pas que ça existe.” Entretien A
Quand elles le connaissent, le dépistage est organisé différemment et leur repère de suivi est
perturbé.
“Il y a des centres de dépistage du cancer du col et du sein dans mon pays (Maroc), ils sont rares et c’est pour les femmes
de 30 à 49ans. Moi, j’ai 27 ans, je n’y suis jamais allée.” Entretien D
Il existe parfois des centres spécialisés dans les cancers féminins dans le pays d’origine. Ces
lieux sont des endroits de référence qui délivrent informations et prise en charge des cancers.
Cette unité de lieu est facilement identifiée.
En revanche, en France, le dépistage étant proposé dans une grande variété de lieux (cabinet
du médecin généraliste, de la sage-femme, centre IRSA, service médical d’universités, centre
19
de planification, laboratoires d’analyses médicales…), cela ne facilite pas la lisibilité du
dépistage du cancer du col de l’utérus.
Leurs références dans le suivi gynécologique n’identifient pas le médecin généraliste comme
le professionnel habilité dans ce domaine.
“Si on a un problème gynécologique, on va voir le gynécologue. Là-bas y a beaucoup de spécialistes. Mais y a pas de suivi.
(...) Ce n’est qu’ici que j’ai vu que si on a un problème gynécologique on peut aller voir le médecin généraliste.“ Entretien H
Elles découvrent en France que le médecin généraliste a des compétences en matière de
gynécologie et notamment en matière de dépistage du cancer du col. Ceci dit, quelques
femmes ont l’idée que solliciter le spécialiste, “c’est mieux”.
Le gynécologue est identifié comme celui qui traite les maladies gynécologiques, évalue et
“valide” la fécondité d’une femme au cours d’un examen pré-nuptial, et assure le suivi de la
grossesse. Il n’a pas de rôle préventif.
Le gynécologue est l’unique référent en matière de gynécologie. Mais, compte tenu de son
accessibilité difficile en France, le médecin généraliste peut devenir l’interlocuteur pour les
questions de santé sexuelle de la femme.
“Avez vous fait le frottis?
Oui, je le fais, oui. Avec le médecin traitant, parce qu’ il n’y a pas beaucoup de gynécologue et Mme F. le fait très bien, donc
voilà… “ Entretien C
1-2-Un dépistage jugé non pertinent en l’absence de symptômes
La proposition de frottis a questionné leurs références en matière de santé car la démarche de
consulter un médecin est liée à l’existence d’un ressenti, d’une possible maladie, de signes
d’alerte.
“Y a pas de prévention, c’est à dire qu’on va chez le médecin que si on est malade. “ Entretien H
“Les centres de dépistage, c’est celles qui veulent qui y vont. Elles se présentent si elles ont des symptômes si elles se sentent
pas bien, elles viennent se faire dépister. “ Entretien D
“Elles se sentent en forme, donc elles pensent qu’il y a rien” Entretien C
La notion de dépister une maladie en l’absence de symptômes est troublante, voire
inimaginable, voire constitutive d’un effet magique.
“Comment peut-on trouver une maladie qui n’existe pas encore?” Entretien H
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La proposition du frottis est une pratique de soin qui demande une adaptation à une nouvelle
culture de médicalisation puis une appropriation de cette prévention.
“Accepter le dépistage c’est s’adapter à une culture européenne. Une société qui organise le dépistage de la
population.”Entretien J
La notion de prévention est pour certaines un concept nouveau: réaliser des examens pour
découvrir les signes précoces d’une maladie à venir ne fait pas partie de leurs références en
matière de santé.
“Elles n’ont pas d’information sur ce sujet là. Elles se disent: “je ne sens rien, pourquoi je vais aller”, “je ne suis pas
malade!” Entretien D
“Les gens consultent que si y a un problème”. Entretien G
“Si je sens rien, je crois pas que moi je l’ai.” Entretien E
1-3-Un dépistage qui vient heurter l’habitude de soins dirigés
La relation médecin-patiente est différente dans le pays d’origine. Habituées à avoir des
directives concernant leur santé, la seule proposition du frottis peut être insuffisante à la
réalisation du dépistage. Cela vient heurter leurs habitudes de soins “dirigés”. L’adhésion au
frottis nécessiterait, pour elles, que le professionnel donne du poids à cet examen, en tout cas
que ce ne soit pas qu’une simple proposition. Laisser choisir la patiente, peut avoir des
résultats émotionnels imprévus et la confronter à une décision qu’elle ne pourra prendre seule.
“La plupart de mes copines disaient, c’est pas la peine d’y aller parce que c’est pas obligé.” Entretien D
“ Mais si vous proposez, elles vont peut être refuser, alors que si c’est obligé, elles vont le faire. Elles ont été éduquées
comme ça dans leurs familles. Les femmes Tchétchènes ou Ouzbèks, c’est un peu pareil.
(...)Il faut donner des ordres.
Quel serait le meilleur moyen d’améliorer le dépistage chez les femmes Ouzbèks?
C’est de leur donner une ordonnance pour faire le frottis, en leur disant, “ça fait pas mal”, et c’est tout. “ Entretien G
“A chaque rendez-vous, il faut proposer à chaque fois. Je pense pas qu’elles vont avoir peur, c’est rien!” Entretien E
“Il faut leur faire peur, cette maladie là c’est grave! (...) C’est un cancer, ça peut s’aggraver! ça peut les inciter à faire le
frottis.” Entretien H
Le caractère obligatoire de l’examen pourrait parfois en faciliter l’adhésion.
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2-Une pratique de dépistage qui s’intègre difficilement à l’histoire de la
patiente et/ou à sa culture
2-1-Un dépistage qui n’est pas une priorité
La priorité en matière de santé est donner à l’éventuelle maladie en cours, qui fait souffrir.
Pour les femmes arrivés récemment en France, il y a d’abord nécessité de trouver un logement
et un travail avant de s’occuper des questions de santé, et a fortiori de prévention.
2-2-Un dépistage influencé par l’expérience personnelle ou transmise du vécu de
l’examen gynécologique
Une expérience personnelle positive du frottis conforte et rassure par rapport à la réalité d’un
geste méconnu et appréhendé. Si la réalisation du premier frottis est bien vécue, cela valide
l’intérêt de l’examen et induit la nécessité d’en informer les proches, perçues comme
manquant d’informations.
Le bénéfice d’un geste bien vécu est donc double: pour la patiente elle-même mais aussi pour
les femmes de son entourage. La transmission de l’information d’un dépistage au sein de la
famille a un effet positif sur la patiente et est source de confiance pour la réalisation du geste.
2-3-Un dépistage freiné par la barrière de la langue
L’impossibilité à comprendre et à s’exprimer en français empêche les patientes d’accéder à la
connaissance du frottis, sa réalisation, son importance.
L’incompréhension du geste conduit à une attitude d’évitement.
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2-4-Un dépistage marqué par le tabou de l’intime et la culture
Le manque d’informations sur le frottis peut s’expliquer par l’absence de dépistage dans le
pays d’origine, le manque d’éducation à la santé, mais aussi par la dimension intime et
taboue de cet examen.
Le frottis est directement lié à la relation que chaque femme a avec sa sexualité.
“Je pense que c’est un manque d’informations, tout simplement. (...)La sexualité et le sexe féminin est un peu tabou. J’en suis
la preuve flagrante! Parce que quand je me suis mariée je connaissais pas du tout la pilule “ Entretien C
Le col de l’utérus, contrairement au sein, perçu comme appareil nourricier, touche à l’appareil
reproducteur. Plusieurs femmes rapportent, que l’utérus renvoie à l’idée d’une descendance
et donc à l’honneur de la famille, mais il peut aussi être objet du déshonneur et de la honte
dans le cas de relations hors mariage. Le frottis s’inscrit donc dans cette ambivalence de la
fonction de l’utérus.
L’utérus est une partie du corps qui est invisible, c’est un organe caché. Une pathologie de
l’utérus peut être liée à une mauvaise conduite qui aurait été dissimulée, un fait inavouable.
“Dans notre culture, on pense que la maladie du cancer du col, c’est la même que le SIDA. On pense que c’est très grave et
qu’il n’y a pas de traitement. Si ça existe chez quelqu’un, on se dit, mais d’où c’est venu? Surtout si la femme est pas mariée
et qu’elle est malade, on se dit: mais la maladie, elle arrive de quoi? Comment ça se fait qu’elle est malade de cet endroit là?
Parce qu’on l’attrape avec des relations sexuelles, c’est ça. Y a d’autres manières?
Chez nous, c’est la honte d’avoir un cancer du col. Si une femme a le cancer du col, elle va pas parler à d’autres gens, elle
va pas le dire, elle va rester enfermée. “ Entretien D
Le cancer du col a un statut différent des autres cancers, puisqu’il est parfois perçu comme
une maladie honteuse.
“ Le cancer du poumon par exemple c’est normal, ça arrive du tabac. Alors que le cancer du col, c’est pas pareil. On pense
que la personne a mal agi. C’est pour ça que c’est mal vu.” Entretien D
La religion est plusieurs fois évoquée comme étant un facteur influençant les comportements
et rendant le thème de la sexualité difficile à aborder.
“La sexualité en général, on n’en parle pas. Chez les musulmans, c’est tabou. Alors que l’Islam conseille les gens d’en
parler…au moins pour protéger! mais c’est tabou, on n’en parle pas par pudeur.” Entretien C
“Je pense que comme c’est un peu tabou, au niveau de notre religion, c’est pour ça .”Entretien D
““Oui, ça a été un tabou. Parce que l’éducation était plutôt centrée par l’éducation chrétienne. On ne parlait pas trop de ça,
c’était quelque chose d’intime. Et du coup, voilà... C’était pas un sujet très abordé. C’était la génération de mes parents. “
Entretien A
Il est également évoqué la dimension sacrée de la sexualité.
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“On n’en parle pas, on touche pas , le sexe est sacré dans la culture orientale.” Entretien I
Il existe parfois une gène à parler des questions de la santé de la femme. Evoquer le frottis
renvoie à l’image d’un examen gynécologique, une image qui met mal à l’aise.
“J’ai jamais osé parlé de ça. On parle de tout mais pas d’examen. C’est plus difficile. “ Entretien G
“Les parents ne parlent pas de “ces choses là” à leurs enfants”. Entretien H
“En famille, non, on n’en parle pas mais entre femmes, oui, c’est normal, avec des copines aussi.
(...)Ma soeur ça fait 10 ans qu’elle habite ici mais elle l’a jamais fait. Je vais lui dire d’aller le faire. “ Entretien D
“Je peux en parler avec ma grande fille, mais pas avec les autres. Si il y a un problème, ma fille, elle m’en parle tout de
suite. Parce que je connais pas mal de maladies, et je peux expliquer pourquoi ça, on cause et tout ça, on parle de tout, y a
pas de choses secrètes entre nous.” Entretien G
2-5-Un geste plutôt réservé aux femmes mariées
La réalisation du frottis n’est concevable qu’après le mariage. Le frottis s’inscrit dans
l’histoire “d’être femme”, c’est-à-dire être mariée. Elles rappellent que dans leur pays
d’origine, la sexualité débute après le mariage, avec un unique partenaire. La virginité avant le
mariage est un code social encore très présent même s’ il existe des changements de mœurs.
Le mariage marque donc l’entrée dans le suivi gynécologique.
“En Irak, on va voir le gynécologue une fois qu’on est mariée. C’est ça qui fait qu’on est une femme. Chez nous la virginité
est très précieuse. On doit pas aller voir le gynécologue avant d’être mariée(...). Ce serait mal vu je pense. (..) C’est dans les
codes (...)” Entretien H
La place du mari peut être déterminante, selon qu’il est opposé au geste, favorable ou ne
prenant pas part aux questions de santé sexuelle de sa femme.
La consultation du médecin traitant est vécue comme le lieu d’une certaine ouverture. La
consultation n’est pas « identifiée » comme étant rattachée à un problème gynécologique.
Pour les femmes non mariées, ceci constituerait un moyen plus facile d’exposer un problème
gynécologique et donc d’entendre parler du frottis.
Les femmes mariées, passé un certain âge, ne se sentent plus concernées par le frottis.
“Pour les femmes un peu plus âgées, souvent elles se disent: “mmh, ça c’est pas la peine, je suis vieille, j’ai mon
mari”...C’est aussi une question de génération.” Entretien A
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2-6-Un dépistage en rupture avec l’idée d’un destin et de l’“histoire naturelle”
Dépister, c’est aussi contredire le destin. C’est ne pas se résoudre à la fatalité. Le cancer est
perçu comme une pathologie dont on ne guérit pas. Pour les femmes plus âgées, découvrir un
cancer, c’est annoncer une mort prochaine. Il est préférable de vivre dans l’ignorance de ce
diagnostic vécu comme effroyable.
Le frottis suscite aussi de la peur qui peut s’expliquer par la crainte d’un examen qui “va
chercher” le cancer et qui dans son insistance ou sa répétition pourrait finir par le trouver.
Ce concept vient s’opposer à l’idée d’une “vie naturelle”, vient déranger le cours “normal” de
l’existence, vient rompre un équilibre. Cet examen peut changer un destin, une fatalité.
L’origine du cancer du col peut tenir du mystère, ou s’expliquer par une conception de la vie
et du corps différente d’une approche rationnelle et anatomique.
“Selon vous, quelles sont les causes d’un cancer de l’utérus?
Moi, je dirais par manque d’hygiène… ou par fatalité (rires). La 1ère chose qui me vient à l’esprit, c’est peut être par
manque d’hygiène, mais je sais aussi que le, comment dire, le sexe de la femme, se nettoie lui même par les pertes, je
pense…” Entretien C
Le cancer du col de l’utérus est perçu parfois comme invisible, et en cela, il a un statut
différent des autres cancers, et notamment du cancer du sein.
“C’est invisible… c’est pas comme une infection urinaire…(...)le cancer du sein, il y a des petites boules qui se forment, on
les sent… “Entretien C
Le cancer est déterminé par le destin, mais la fatalité n’est pas une fin en soi.
“Mais la nouvelle génération qui a fait des études, notre génération, c’est différent. Mais nos parents, ils se disent je vois pas
en quoi ça va changer que je le fasse ou que je le fasse pas. Si ça doit arriver, ça arrivera.” Entretien C
“Les Arabes, d’une façon générale, s’inscrivent dans la fatalité, c’est écrit, donc ça doit arriver: mektoub, c’est le destin.
Pourquoi aller changer le destin?
Mais dans le Coran, même si c’est écrit, on peut changer le destin, Dieu dit: on peut changer son destin par des prières et
des actes, on est pas obligé de subir la fatalité.” Entretien C
La survenue d’un cancer peut être attribuée à un sort, à une punition suite à une mauvaise
conduite.
“Chez moi, tout ce qui est cancer, tout ce qui est maladie incurable, c’est un sort, c’est la fatalité, un destin tragique…
Un sort…
Oui, mais ça va dépendre de la population, des classes. C’est pas tout le monde qui va te dire que c’est une punition. Mais
quand tu vas aller au village, c’est sûr, ils vont te dire c’est une punition, c’est un sort, c’est une tragédie, peut être parce
que t’as été une femme infidèle…C’est une punition quoi.” Entretien P
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2-7-Un geste mieux accepté si c’est un médecin femme mais non rejeté pour des
raisons religieuses si c’est un homme
Le fait que le professionnel de santé réalisant le dépistage soit un homme peut se révéler être
un frein au dépistage. Cette réticence n’est pas toujours liée à un interdit religieux. Les raisons
seraient propres à la patiente : sa pudeur, son histoire personnelle.
“Quand je suis arrivée, mon 1er médecin traitant, c’était à la maison médicale là haut , et c’était un homme. Donc ça a un
côté plus difficile à se laisser euh… Il me l’avait proposé, mais il avait compris que j’avais un peu d’appréhension et il
m’avait demandé d’aller vers un médecin femme.” Entretien C
“S’il y a pas de médecin femme dans sa ville, elle va pas le faire. C’est ça notre culture.” Entretien D
Mais, la plupart du temps, la pratique du frottis s’envisage avec un médecin homme, vécu
comme un scientifique qui a toute légitimité à pratiquer cet examen.
“C’est un scientifique, il en a tellement vu que voilà. Mais la plupart des femmes sont gênées. Et c’est pas une histoire de
religion. C’est une mentalité personnelle. C’est pas un code.” Entretien H
«C’est pas parce qu’on est une femme voilée qu’on va forcément refuser d’être examinée par un homme. »Entretien P
Quelques femmes évoquent le rôle du mari au sein du couple comme source de frein à la
réalisation du frottis si le médecin est un homme.
3-Un geste accepté à condition d’être expliqué et accompagné
3-1-Un besoin d’explications et d’informations sur les modes d’accès au dépistage
dans un système de santé méconnu
Le frottis est vécu comme onéreux car l’examen est payant (28,40 euros). 8
Par référence à ce qu’elles ont connu dans leurs pays d’origine où tout acte médical a un coût,
et a fortiori lorsqu’il s’agit d’un examen complémentaire, elles pensent qu’il en est de même
en France.
8
La Sécurité Sociale prend en charge 70% de l’examen (sur la base du tarif conventionné), reste à charge 9,37 euros,
remboursé par la complémentaire santé. Pour les bénéficiaires de l’AME et de la CMU-C, la Sécurité Sociale prend en charge
l’intégralité du coût.
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“Mais quand je dois payer, c’est ça qui freine.”Entretien E
L’existence de cliniques privées dans le pays d’origine, qui pratiquent des actes médicaux très
onéreux et inaccessibles à une majorité de la population, renforce cette idée d’un acte
coûteux, surtout si le geste est réalisé en secteur libéral.
La complexité du système de soin avec la réalisation d’une carte vitale, la déclaration d’un
médecin traitant qui accepte une nouvelle patiente, la prise de rendez-vous, sont également un
frein pour l’accès au frottis.
3-2-Une attente d’informations rassurantes et adaptées à leur niveau de
connaissances
Émissions de télé ou brochures alarmistes sur le cancer du col de l’utérus sont vécues comme
effrayantes et entraînent un comportement d’évitement.
“La première fois que j’en ai entendu parler, c’était à la télé. C’était un débat, une personne pour et une personne contre.
C’est une émission qui a débuté sur une jeune fille qui avait contracté un cancer du col de l’utérus et elle était encore
vierge je crois, et qui avait été vaccinée… je ne me souviens plus très bien..Bon, ça fait toujours un peu peur! Déjà qu’il y
avait une polémique autour du vaccin de l’hépatite B, donc on se dit il y a encore une autre polémique. Donc on est toujours
septique, on se dit voilà, bon, en fait on saura jamais la vérité! on sait pas si on est des cobayes ou si vraiment la médecine
fait avancer les choses en fait! ça pose question! “ Entretien C
Un lien direct avec un professionnel de santé semble plus apprécié et permet d’obtenir plus
d’informations sur la réalisation pratique du geste et les questions que les femmes se posent:
où, quand, qui, comment?
La manière dont la patiente reçoit l’information peut influencer son attitude par rapport au
dépistage.
Les participantes déplorent toutes un manque d’éducation à la santé de la femme dans leur
pays d’origine.
“Au Maroc, y a des cours au collège sur le corps, la puberté du corps, tout ça, y a ça.(...) Mais c’est plus technique, c’est
vraiment scolaire, on rentre pas dans les détails.” Entretien C
Elles rapportent toutes une ignorance ou une méconnaissance du frottis avant l’arrivée en
France.
“J’ai pas la connaissance de la maladie donc j’aurais pas aussi l’idée d’aller me faire dépister.
On peut pas deviner. Pour les maladies, comme malaria, typhoïde, là, on connaît, on peut y aller. Comme le col, on n’en a
jamais entendu parlé...” Entretien E
“J’ai pensé que c’était un prélèvement de sang “ Entretien D
27
“Au début, j’avais pas vraiment compris en fait… on cherchait des mycoses?...non, je savais pas en fait…” Entretien B
Pour les femmes qui ne sont pas allées à l’école, l’anatomie de l’appareil génital féminin est
une notion abstraite. La représentation du col de l’utérus et de surcroît d’une maladie pouvant
s’y développer est donc inconcevable.
“Moi, je sais par exemple, dans ma famille, euh, je pense qu”il doit y en avoir du côté de ma mère, c’est à dire 4-5 qui ont
fait le frottis, parce que y en a qui sont mariées avec des médecins, des directeurs de cabinet d’ingénieurs ou à la banque.
Mais par exemple du côté de mon père, elles ont la plupart pas trop été à l’école. Je suis la 1ère à avoir eu le bac depuis des
générations et des générations…! je suis la 1ère à avoir eu le bac! je suis certaine, du côté de mon père, aucune n’a jamais
fait un frottis. C’est sûr! “ Entretien C
Les femmes ne maîtrisant pas ou peu la lecture se trouvent en difficulté pour comprendre des
brochures d’informations sur le cancer du col de l’utérus. Le dépistage motivé par leur seule
initiative semble compromis.
Il est rapporté une différence de niveau de connaissances sur la santé sexuelle entre les
femmes issues de milieu rural et les femmes vivant en ville, qui impacte directement le
rapport au frottis.
“Et en campagne, je pense qu’elles connaissent moins cette maladie qu’en ville. “ Entretien A
Les femmes qui ont fait des études ou qui travaillent dans le domaine de la santé ont plus de
connaissance sur la maladie.
“J’ai fait des études pour être médecin. Bon, je suis devenue infirmière (...) c’est quand on change souvent de partenaires
qu’il y a des risques (...)“ Entretien G
Mais elles déplorent tout de même leur manque de connaissances sur le cancer du col, ses
facteurs de risque, les symptômes, l’évolution de la maladie, les traitements et les moyens de
prévention. Cette méconnaissance est source d‘inquiétude et laisse place à l’imaginaire de la
patiente qui peut envisager le pire.
Toutes insistent donc sur l’importance d’informer les patientes sur le cancer du col de
l’utérus. Le manque d’information est, selon elles, le principal frein au dépistage.
“ Parce que si aujourd’hui, tout le monde était informé de la maladie, de la gravité de la maladie et que cela peut être
dépisté en avant, je crois que tout le monde va courir pour le faire.” Entretien E
Leurs propos révèlent que les médecins ne communiquent pas toujours clairement sur les
objectifs du dépistage, la procédure elle-même et la signification des résultats.
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Il est ainsi rapporté des expériences de prélèvements gynécologiques en France sans que la
participante soit sûre qu’il s’agissait bien d’un frottis.
“J’ai vu qu’il a prélevé le liquide au niveau du vagin et puis je l’ai vu mettre dans un bol, et il m’a dit c’est bon.” Entretien E
Le frottis est parfois réalisé en début de grossesse ou après l’accouchement, sans que les
patientes n’en aient perçu l’intérêt.
“Avec la 1ère génération arrivée en France, avec nos mères, c’est beaucoup tabou, elles faisaient le dépistage parce qu’elles
étaient tombées enceintes en France, donc forcément, il y avait un suivi.” Entretien C
La méconnaissance du frottis peut durer plusieurs années après l’arrivée en France.
“ Moi, ça fait même pas 15 jours que ce sujet m’intéresse, avant je savais pas que ça existait.” Entretien D
“Moi, j’ai attendu 2008 pour le faire, et je suis arrivée en 2002.” Entretien G
Une fois que la patiente a compris l’intérêt du dépistage, que son niveau de connaissances sur
la réalisation de l’examen et les résultats attendus est suffisant, l’adhésion au frottis est
facilitée.
“Oui, quand je suis venue en France il y a 8 ans, je me suis faite dépistée puis ensuite régulièrement.” Entretien H
“Et après, je l’ai fait régulièrement parce que c’est bien.” Entretien G
“Mais comme ma gynécologue est partie en retraite en 2014; normalement je vais le faire cette année avec ma sage
femme” Entretien F
Etre bien informée, c’est pouvoir intégrer le dépistage dans la durée, en réalisant un frottis
régulièrement.
3-3-Le frottis, une opportunité à saisir pour garantir sa santé
La proposition de frottis est vécue comme une opportunité de prendre soin de sa santé.
Malgré la méconnaissance de la notion de prévention, la proposition de dépistage est vécue
positivement. C’est une “ chance”, un “plus”, facilement réalisable, et peu coûteux
contrairement à ce qu’elles connaissent dans leurs pays d’origine.
Le frottis est d’autant plus une opportunité à saisir qu’il existe des traitements en France, ce
dont elles ne sont pas assurées dans leurs pays d’origine.
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“Au niveau de l’Afrique c’est pas encore bien développé. (...)Quelque part on est rassurée parce qu’on est là aussi, en
France, ou on a la chance d’avoir un traitement.” Entretien E
3-4-Le frottis, un geste banal pour les femmes ayant eu un suivi de grossesse
L’acceptation du frottis semble corréler à l’antériorité d’un suivi gynécologique, notamment
pour la grossesse. Il peut donc être un geste banal, qui ne pose pas questions. Il s’inscrit dans
la continuité d’un examen gynécologique perçu comme routinier, habituel.
“Moi, j’ai accepté, j’ai même pas réfléchi, comme pour le diabète il faut vérifier, il faut faire la prise de sang, pourquoi ne
pas faire le frottis? “ Entretien G
“Pour une femme, on a souvent l’habitude d’être examinée, comme pour la grossesse, d’être exposée. Moi je vois mal
comment le dépistage du cancer du col puisse gêner. Cela ne change rien par rapport à d’ habitude. “ Entretien E
“Et c’est pour ça en fait, automatiquement, que je me suis dit c’est pour me protéger donc direct j’ai accepté de le faire.”
Entretien F
Le frottis est mis en balance avec la vaccination vécue comme l’intrusion d’un corps étranger,
contrairement au frottis qui est un “simple prélèvement, comme une prise de sang” et donc
bénéficie d’un caractère banal.
3-5-Le frottis, un conseil prodigué par l’entourage
La transmission de l’information au sein des familles est une valeur importante pour mieux
sensibiliser au dépistage.
Quand la patiente a fait l’expérience d’un frottis, elle juge important d’en informer ses
proches.
“J’ai pensé à ma mère, parce qu’elle est âgée et elle l’a jamais fait. Si ça se trouve elle a déjà quelque chose. Donc je l’ai
poussée à le faire. Mais elle a refusé, parce qu’elle a dit “non, j’aime pas ça”. Elle a eu peur qu’on lui trouve quelque chose
et qu’elle puisse pas guérir..” Entretien D
“J’ai recommandé à une copine qui était ici, une colocataire (...) d’origine chinoise de le faire.” Entretien K
“Je me souviens ma cousine, elle est décédée en 2000 à cause d’un cancer du col de l’utérus. Et on a parlé avec ma mère,
mon père, notre famille… “ Entretien G
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Les mères de jeunes filles sont particulièrement attachées à leur transmetttre l’information sur
le dépistage du cancer du col de l’utérus.
4- Un dépistage d’une maladie nommée cancer qui a des représentations
limitant le dépistage
4-1-Un cancer perçu comme incurable qui fait peur
Le cancer est ressenti comme étant d’une gravité extrême.
“C’est plus qu’une maladie. ” Entretien D
“Le cancer, c’est pas une maladie, c’est quelque chose de pire!” Entretien G
“De toute façon, le cancer, je crois qu’on l’a en nous tous, et ça tout le monde se dit c’est une fatalité. En tout cas, au
Maroc, c’est comme ça. C’est une fatalité. C’est au petit bonheur la chance. On l’a je pense en nous, soit il se réveille, soit il
se réveille pas...et puis, c’est un mot tabou aussi: c’est LE grand mot, quoi, c’est LE CANCER… c’est le mot tabou.
Le cancer, on l’a, on l’a. C’est pas parce qu’on a fait quelque chose de mal et le cancer est le résultat de ça. Non, c’est
vraiment la fatalité. Je pense que c’est une maladie qu’on ne contrôle pas. C’est pas comme le diabète ou comme
l’obésité...C’est pas quelque chose qui en amont a des solutions.” Entretien C
“ ça ronge le corps et l’esprit. “ Entretien C
La peur du résultat est partagée par toutes. Le résultat est attendu comme une sanction: la
découverte ou l’absence de cancer.
« C’est bon ou c’est pas bon »Entretien E
Ce résultat est vécu comme effroyable et la peur peut empêcher la participation au dépistage.
“ D’abord, j’ai eu peur… peut être qu’on va me trouver quelque chose. “ Entretien D
“Déjà, entendre le mot cancer, ça fait peur.” Entretien F
“...d’entendre le mot cancer déjà, c’est déjà la peur. Après, on n’a pas le choix, vaut mieux se faire dépister avant pour avoir
des traitements bien avant que de rester comme ça, dans la peur de laisser la maladie s’aggraver, si elle était là.”
Entretien E
“Le fait que ce soit un cancer de l’appareil génital, on a peur d’avoir une aspiration, de se faire retirer l’utérus. c’est la peur
comme si on passait un examen”. Entretien H
31
En effet, la notion de lésion pré cancéreuse est inconnue. La peur du résultat serait sans doute
moindre si elles avaient connaissance de la notion de dysplasie qui, dépistée tôt, peut être
guérie et stopper l’évolution vers le cancer.
4-2-Un cancer parfois attribué à des comportements ou à des évènements de vie
qui mettent en doute l’intérêt du dépistage
L’hérédité, le stress, une mauvaise alimentation, ou encore avoir réalisé de nombreux
avortements sont identifiés comme étant des causes éventuelles de cancer.
4-3-Un cancer évalué comme rare dans le pays d’origine qui remet en cause l’utilité
du dépistage
Le cancer du col de l’utérus est considéré comme une maladie rare dans leur pays d’origine.
Elles se sentent donc moins concernées par le dépistage.
“Mais dans mes amies au Maroc, personne l’a fait.
Pourquoi?
Elles pensent qu’elles sont pas concernées, ça les intéresse pas. Mais au Maroc, le cancer du col c’est rare, y a pas
beaucoup de cas! Même mes soeurs ici en France l’ont pas fait. “ Entretien D
Elles considèrent que le cancer est une maladie très répandue en France qui justifierait
l’importance de la politique de prévention.
“C’est rare d’entendre quelqu’un qui est mort d’un cancer ou atteint d’un cancer. Et quand je suis venue ici, j’ai entendu, et
donc je me suis dit, ben, en France il y a beaucoup de cas de maladie de cancer. Nous, en Afrique, c’est rare, l’autre jour je
me suis demandée pourquoi il y avait tant de cas en France, mortels, graves quoi.” Entretien E
5-Propositions des enquêtées pour améliorer le dépistage
5-1-Une priorité: contourner l’obstacle linguistique
Informer la patiente dans sa langue d’origine est d’autant plus important qu’il s’agit de sa
santé et qu’elle a besoin de comprendre l’enjeu de cet examen, en saisissant les termes
compliqués.
32
“Donc, il vaut mieux leur parler en russe, parce qu’elles ont appris le russe. C’est pareil pour les Ukrainiens, les Arméniens,
ils ont tous appris le russe. Parler dans la langue d’origine, ça peut aider. Parce que la plupart n’ont pas fait d’étude, donc
elles ne comprennent pas. Entretien G
“Son ancienne gynéco c’était une femme marocaine et puis dans sa langue, elle lui a expliqué les choses en arabe de but en
blanc. Le déclic, c’était qu’on lui fasse comprendre.” Entretien C
“ Il faudrait informer en arabe avec un langage facile.” Entretien D
“Pour les gens qui ne parlent pas français, il y a un barrage. Si je vois un document en lingala (langue du Congo) , cela
m’interpelle.” Entretien E
Cette proposition de traduction est contestée. En effet, parler en français au cours d’une
information au dépistage est un bon moyen de laisser la patiente s’approprier le vocabulaire.
Lui parler uniquement dans sa langue, c’est la « mettre à l’écart », la déposséder de ce qui se
passe. La langue française est la langue de communication, il est donc nécessaire de la
maîtriser même si cela représente des difficultés. C’est un facteur d’intégration que d’essayer
de s’approprier les termes en français.
5-2-Des supports adaptés au niveau de compréhension
Le support écrit semble plus spontanément proposé par les femmes ayant fait des études, les
autres privilégiant un support vidéo ou audio (télévision, radio, téléphone).
Les informations simples et didactiques sont plébiscitées pour les rendre accessibles au plus
grand nombre.
5-3-Des émissions télévisuelles proposées pour leur accessibilité au plus grand
nombre
Une émission de télévision sur le cancer du col de l’utérus est une proposition de support
d’informations mise en avant. La télévision, présente dans la majorité des foyers, est perçue
comme un bon moyen de délivrer une information claire et accessible à tous.
“Le mieux, c’est peut être la télé. Les gens regardent beaucoup la télé. Il faudrait une longue émission qui dure 2 heures,
pour bien expliquer.” Entretien D
33
5-4-Des formats d’informations facilitant la confiance et l’expression
Le groupe peut permettre d’entendre et d’avoir des informations sans se sentir directement
visé. Mais le colloque singulier peut aussi ouvrir la parole autour de questions d’interdits et de
la santé sexuelle de la femme.
5-5-Amélioration des informations en ligne et utilisation des réseaux sociaux
Chercher des informations sur internet est considéré comme courant. Mais quand il s’agit de
sa santé, des informations validées par des organismes reconnus sont préférées aux
discussions circulant sur les forums.
Relayer l’information sur le frottis par les réseaux sociaux et notamment Facebook a été
évoqué.
“Par exemple à la télé en France, on parle beaucoup du cancer du sein, mais pas du cancer du col, c’est rare que j’ai vu des
publicités là dessus ou des gens qui parlent de ce sujet. En fait, si on veut savoir quelque chose, on cherche sur internet. “
“Par téléphone, mais aussi par interne, le facebook, tout ça... il faut leur parler de la maladie.” Entretien E
34
Discussion
A-Discussion sur la méthodologie
1-Biais de sélection de l’échantillon
Plus de la moitié des participantes ont fait des études supérieures ce qui facilitait l’expression
de leurs idées et témoignait d’un bon niveau de connaissances sur la santé. La plupart vivait
en France depuis plus de 5 ans. Des participantes, arrivées plus récemment en France, auraient
pu apporter d’autres informations sur leurs représentations du dépistage.
La majorité des femmes interrogées sont originaires de pays en voie de développement. Parmi
les femmes immigrées dans la population générale, il y a aussi des ressortissantes de pays
développés qui n’ont pas été interrogées dans cette étude.
Le biais de sélection a pu être limité en constituant un échantillon divers et de manière
aléatoire (sélection de patientes par différents professionnels de santé qui ne se connaissaient
pas).
2-Biais d’intervention lié à l’enquêteur
Au cours des premiers entretiens, les interventions de l’enquêteur, notamment pour donner
des précisions sur le dépistage du cancer du col de l’utérus, ont pu interférer sur le discours de
la patiente en induisant une relation pédagogique. Dans ce cas, la patiente, a pu modifier un
peu son discours sur son vécu réel du frottis pour éviter de montrer son ignorance. Pour
limiter ce biais, il a été décidé de ne plus faire référence à l’aspect pratique de la réalisation
du frottis afin de se focaliser entièrement sur la représentation et l’attitude de la patiente vis-àvis du dépistage.
3-Biais liés à la méthode d’analyse
Dans cette étude, l’analyse des résultats a pu être influencée par les représentations de
l’enquêteur. Ce biais a été limité par la triangulation avec la Directrice de Thèse.
35
B- Discussion sur les résultats
1-Validité interne de l’étude
En constituant un échantillon de manière aléatoire et en sélectionnant des femmes aux
caractéristiques différentes le risque d’un échantillon trop uniforme a été minimisé. Les
entretiens ont été retranscrits minutieusement. Dans la partie « Méthode », le processus
d’analyse a été décrit. La présentation adoptée permet au lecteur de distinguer les données du
verbatim en italique de celles de l’interprétation.
2-Validité externe de l’étude
a-Comparaison des résultats à la Littérature
L’importance de la culture d’origine dans le dépistage du cancer du col de l’utérus est une
notion retrouvée dans les études Sofres9 qui identifient les femmes “culturellement de
valeurs traditionnelles” comme étant les plus difficiles à toucher pour le dépistage cervical.
L’idée que le dépistage est plutôt réservé aux femmes mariées apparaît dans l’étude Szarewski
et al. (2009) [17]. 28 femmes musulmanes vivant à Londres ont été interrogées à propos de
l’auto-dépistage. Les femmes non mariées sont considérées comme inactives sexuellement,
par interdit culturel et donc non concernées par le dépistage.
Une barrière liée à la religion a été identifiée, ce qui est retrouvé dans une étude menée en Ile
de France en 2005. Les femmes d’origine musulmane nées hors de France sont moins suivies
sur le plan gynécologique que les autres [18].
Une autre notion est abordée dans notre étude : la réalisation d’un frottis par un médecin
femme est préférée. En effet, d’après la Cochrane Collaboration de 2006, le taux d’adhésion
au dépistage est multiplié par 2,5 si le professionnel est une femme. D’autre part, il était
rapporté un faible niveau de connaissances sur le cancer du col de l’utérus et sur le rôle de
l’HPV, comme ce qui a été relevé dans notre étude.
9
Sofres: Société française d’enquêtes par sondage
36
La représentation du cancer du col de l’utérus limite l’adhésion au dépistage alors que
l’information ou l’expérience personnelle ou d’un proche favorisent l’acceptation du
dépistage. Ces notions sont à prendre en compte car la communication d’informations par les
autres, le processus d’inférence10 et l’expérience directe font évoluer une représentation
profane du cancer [16].
Des facteurs limitant le dépistage, identiques à ceux mentionnés par les participantes de notre
étude, sont relevés dans une étude américaine publiée en 2011 [19] sur les femmes immigrées
Asiatiques résidant aux Etats-Unis : le manque de connaissances, la représentation du cancer
du col, le fait de se considérer comme étant à faible risque d’avoir la maladie, le fait
d’attribuer la bonne santé à la chance, considérer que l’absence de symptômes équivaut à
l’absence de maladie, et attribuer différentes causes au cancer: le stress ou une mauvaise
alimentation.
D’autres barrières au dépistage relevées dans notre étude sont aussi retrouvées dans une étude
sociologique menée en Suisse en 2010 [20] sous la forme d’un focus group regroupant des
femmes Suisses et d’origine immigrée: le manque d’informations, la difficulté d’accès au
gynécologue, la gène associée à l’examen gynécologique, le tabou de la sexualité, la barrière
de la religion.
Les difficultés de compréhension du fonctionnement du pays d'accueil abordées dans notre
étude, et la priorité donnée à la résolution des difficultés d'ordre administratif, économique et
social avant de prendre soin de sa santé est un constat de l’INPES11. Le système de soins
paraît opaque aux primo-arrivants et la communication avec les professionnels de santé est
rendue difficile par la confrontation de représentations et d'expressions différentes de la
maladie [21].
b-Eléments de la Littérature complétant l’étude
.
D’autres facteurs influencent la réalisation du dépistage, comme l’évoque le Rapport final de la Ligue
Suisse contre le Cancer [20]: les croyances du partenaire, les raisons liées à la situation de vie de la
10
11
Raisonnement déductif
Institut National de la Prévention et d’Education à la Santé
37
femme: grossesses en cours, séparation, absence de vie sexuelle, des évènements de vie (divorce,
chômage), le fait que le mot dépistage renvoie aussi bien au geste qu’à la politique de prévention
(source de confusion). Ce rapport illustre également la situation particulière des migrantes en situation
irrégulière, situation qui constitue une barrière supplémentaire dans l’accès aux soins en général, et au
frottis en particulier.
Il existe des particularités, dans la représentation du cancer du col de l’utérus, selon les
origines ethniques, ce que nous n’avons pas exploré dans cette étude. Dans une revue de la
littérature publiée en 2008, il apparaît que les Hispaniques pensent que l’accouchement, les
menstruations, la sexualité et le stress ont un rôle dans la susceptibilité au cancer du col de
l’utérus. Les Afro-Américaines considèrent que la difficulté d’accès aux soins est le principal
obstacle au dépistage. Enfin, les immigrées Asiatiques mettent en avant la stigmatisation de
l’individu par la communauté si le cancer du col de l’utérus était diagnostiqué [22].
c-Discussion sur les propositions des participantes
Contourner l’obstacle linguistique est une priorité, en délivrant une information claire et
adaptée. Parmi les projets de l’Institut National du Cancer, il est proposé la mise à disposition
d’un support éducationnel ainsi que la diffusion de dépliants éducatifs sur l’appareil génital
féminin en français et en langues étrangères dans un langage simple.
Les participantes accordent une importance particulière au support vidéo pour diffuser
l’information du dépistage, sous la forme d’ émissions de télévision. Deux méta-analyses
publiées par la Cochrane Collaboration en 2002 et 2006 ont montré que les actions
d’éducation avec un support vidéo ou en diaporama multipliaient par 4,6 le taux d’adhésion
au dépistage du cancer du col.
Par ailleurs, le programme OMNI/Rogers12 mené à Toronto en 2005 a ciblé les femmes
d’origine persane, ukrainienne et punjabi pour les sensibiliser aux cancers féminins grâce à
des messages vidéos de 10 minutes diffusés dans leur langue par des chaînes de télévision à
caractère ethnique. Plus de 80% des femmes des communautés visées ont déclaré être
davantage susceptibles de réaliser un frottis après avoir vu les messages vidéo [23].
12
OMNI Television est un ensemble de chaînes de télévision multilingue et multiculturel gratuit, qui se donne pour mission
de refléter la diversité culturelle canadienne en diffusant une programmation ethnoculturelle en plusieurs langues.
38
Dans les difficultés d’accès au dépistage, le coût semblait être un frein à la réalisation du
frottis. Or les campagnes expérimentales de dépistage menées dans les quartiers Nord de
Marseille entre 2001 et 2005 auprès des femmes migrantes et/ou en situation de précarité ont
montré que la gratuité n’était pas suffisante pour augmenter la participation. Seulement 6,9%
des femmes sur les 16638 femmes concernées en 2005, ont réalisé un frottis.
Les femmes suggéraient que le dépistage du cancer du col de l’utérus devienne un dépistage
organisé, comme pour le cancer du sein, ce dernier étant considéré comme mieux connu et
donc mieux suivi. En effet, les résultats de la cohorte du programme Santé Inégalités Ruptures
Sociales13 révèlent que le dépistage organisé du cancer du sein semble réduire les inégalités
entre les femmes immigrées et les femmes nées de parents français. [24]
Une meilleure information par entretien individuel ou collectif est une proposition des
participantes de notre étude. L’Institut National du Cancer propose en effet de développer des
actions de sensibilisation au niveau des associations et ONG qui interviennent plus
spécifiquement auprès des populations précaires ou émigrées. L’objectif est de favoriser leur
coordination avec les structures proposant des FCU et/ou les réseaux de médecins
généralistes.
13
Programme de recherche pluridisciplinaire associant des chercheurs en épidémiologie, en santé publique, en sociologie, en
démographie et en géographie.
39
Conclusion
Le dépistage du cancer du col de l’utérus est une proposition mal connue par les femmes
d’origine immigrée. La demande spontanée de frottis de leur part est donc moins évidente.
Ce dépistage les questionne et vient parfois heurter leurs références en matière de santé.
Néanmoins, elles sont désireuses de connaître le cancer du col de l’utérus et de comprendre
l’intérêt du dépistage pour mieux y adhérer et pouvoir le conseiller à leurs proches.
Contourner l’obstacle linguistique est une priorité pour délivrer une information adaptée au
niveau de connaissance, facile à intégrer et ainsi favoriser l’acceptation du frottis.
La représentation que les patientes d’origine immigrée ont du cancer du col de l’utérus
influence leur attitude face au frottis. Cette maladie fait peur et est parfois attribuée à des
comportements ou à des évènements de vie qui mettent en doute l’intérêt du dépistage. De
nouveaux supports de diffusion tels que des émissions de télévision ou l’utilisation des
réseaux sociaux permettraient par leur accessibilité au plus grand nombre une meilleure
information. Développer les propositions d’échange sur les questions de santé de la femme au cours
d’entretiens individuels ou collectifs encouragerait les femmes d’origine immigrée à s’exprimer et à
interroger la pratique du frottis.
Connaissant la patiente dans son environnement social, son histoire personnelle, son rapport à la santé
et à la maladie, le médecin généraliste a une place singulière et peut adapter son discours à la patiente,
en faisant d’un dépistage standard, une proposition sur-mesure bien acceptée. Les professionnels de
santé sont en première ligne pour décoder ces systèmes d’interprétation14 qui sont déterminants dans
l’acceptation de cet examen.
14
“Système qui organisent les pratiques sociales et symboliques. Ils renvoient non seulement à la maladie et à la médecine
mais aussi au travail, à l’éducation, à la famille et permettent de dégager des logiques de vie ou du moins des sens donnés à la
vie.” Janine Pierret, sociologue, Directrice de recherche au CNRS
40
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