frank alamo - JUKEBOX MAGAZINE
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FRANK ALAMO Yéyé Story A Tête De Bois & Tendres Années en janvier 1965, aux côtés de Sheila, Albert Raisner et Claude François. Jean-François Grandin, dit Frank Alamo, fils d’un fabriquant de téléviseurs, a un vrai talent yéyé, et la quasi-totalité de son répertoire est constituée de reprises. Il chante et présente bien et on le réécoute toujours avec plaisir aujourd’hui. Frank a laissé plusieurs succès intéressants dont « Da Doo Ron Ron », « File, File, File », « Allo... Maillot 38-37 » ou « Le Chef De La Bande ». LES ANNÉES YÉYÉ ans son autobiographie, « Mes Sixties, D’Hier D Et D’Aujourd’hui », ses souvenirs sont assez amusants. Frank Alamo a déjà cet enthousiasme qui ne le lâchera plus. Enfant, à la campagne, il fait boire du champagne aux poules... histoire de les voir ivres. Son grand-père lui a raconté qu’il a fait la guerre de 14-18, dans les tranchées où un rat affamé lui a arraché un petit bout d’oreille ! Quand Frank signe chez Barclay, en 1963, et devient rapidement une vedette, son père n’est pas au courant : Bien que passant sa vie à fabriquer des téléviseurs, il ne regarde jamais le petit écran. Il ne sait donc pas que l’on me voit dans les grandes émissions de variétés. La jeune idole des jeunes a la tête sur les épaules. Il ne claque pas tout son argent en futilités : J’ai fait l’acquisition d’une très belle propriété de 250 hectares à Millau, d’un étang de 230 hectares en Sologne et d’un corps de ferme du 17e siècle derrière le château de Castaings à Montmort. Frank Alamo reçoit quantité de lettres, d’amour ou d’insultes, provenant essentiellement de garçons jaloux, menaçant de me tuer si, depuis la scène, je regarde encore d’un peu trop près leur fiancée assise dans la salle au troisième rang. Frank est sympathique, mais, dans ce livre, il se valorise à l’extrême. Il se décrit presque comme le plus grand sportif de tous les temps ! C’est parfois le prototype du fils à papa. Mais, lu au second degré, son récit est assez plaisant. Par exemple, il se dépeint en champion de ski, pilote automobile, joueur de hockey sur glace. Il a perdu son pucelage à quatorze ans, a vécu à la colle avec une Anglaise à Londres à seize ans, a joué avec Cliff Richard et les Shadows alors qu’ils n’étaient pas encore connus ! Un peu menteur, un peu hâbleur ? Sûrement. Il a certainement tendance à enjoliver la réalité. En tout cas, il y a eu des précédents. Matamore dans « Le Menteur » de Corneille, Théodore dans « Le Vase Etrusque » de Mérimée, etc. Mais reprenons les choses dans l’ordre chronologique. 28 1963 Le 11 octobre 2012, à la veille de ses 71 ans, Frank Alamo décède à Paris, laissant un immense vide auprès de tous ceux qui l’ont apprécié, que ce soit dans les années 60 ou lors des tournées Age Tendre des années 2000 dont il a été l’instigateur. Jérôme Pintoux rend hommage à la première partie de sa carrière jusqu’à son départ au service militaire début 1966. Jacques Leblanc, après les Années rock & twist 1960-1964 (Vol. 1), revient sur la seconde moitié de son parcours, les années pop, 1965-69. Né le 12 octobre 1941 à Paris, Jean-François Grandin est le fils du créateur des téléviseurs du même nom. Il se produit avec les Petits Chanteurs à la Croix de Bois, tout en faisant d’excellentes études à l’École des cadres. Cela lui vaut d’étudier l’anglais à Londres et de découvrir le rock’n’roll et Cliff Richard. En 1962, à Paris, il chante à L’Épi-Club où Willy Lewis l’accompagne à la batterie. Eddie Barclay veut lui faire signer un contrat mais il préfère terminer ses études. En 1963, il change d’avis et rejoint les disques Barclay. Il prend le nom d’artiste de Frank Alamo, en référence au film « Alamo ». En mars, son premier succès, « Loop De Loop », d’après Johnny Thunder, se présente comme une variante du twist, en concurrence avec Richard Anthony, Dalida et les Fantômes. Le 22 juin, avec Richard Anthony, les Chats Sauvages, Gam’s, Danyel Gérard, Nicole Paquin, Sylvie Vartan et Johnny Hallyday en vedette, Frank débute sur scène à la fête de Salut Les Copains pour le premier anniversaire du magazine et son million d’exemplaires de tirage, place de la Nation à Paris, devant 150 000 copains. Mais le vrai succès arrive durant l’été avec son deuxième super 45 tours, même si sa version de « Da Doo Ron Ron » n’éclipse pas celle de Johnny Hallyday. Dans cette chanson, l’amour n’est pas sérieux : L’amour est un jeu. Toujours dirigé par Léo Missir avec l’orchestre de Jacques Loussier, Frank Alamo s’attaque ici à la reprise de « Da Doo Ron Ron » des Crystals, groupe vocal féminin supervisé par Phil Spector. Ce EP est doté d’un second tube avec « File, File, File » (« My Little Girl » des Crickets) qui cartonne à Salut Les Copains sur Europe N°1. Le personnage roule comme un fou : L’aiguille marque 150 au compteur/ Tiens bon, mon moteur. Tout défile, file, file, file/ Là dans mon rétroviseur/ Les grandes villes, villes, villes, villes/ Les bois, les champs, les fleurs. Il est question de Roméo, mais rien à voir avec les héros de Shakespeare : Je ne viens pas t’enlever sur mon cheval/ Comme un Roméo/ Moi je viens sur une machine infernale/ Un cabriolet trois cents chevaux. Alfa... Roméo... chez les yéyés, la machine infernale n’est plus une bombe mais un moyen de locomotion. « Ce Petit Cœur » de Françoise Hardy semble plus ou moins inspiré de « File, File, File ». En novembre, Frank Alamo continue sur sa lancée avec « Reviens Vite Et Oublie », une autre production de Phil Spector, « Be My Baby », cette fois pour les Ronettes, qu'il partage avec les Surfs et Sophie. Dans cette chanson, le délaissé se sent brisé : Tout comme un enfant perdu/ Je vais seul au long des rues/ N’ayant que le regret d'avoir tout gâché. Ce sont des paroles de déréliction : Dans la nuit je traîne. Mon âme est en peine. Ce troisième super 45 tours contient encore les tubes « Sylvie » (« Denise » de Randy & The Rainbows, futur « Denis » par Blondie) et surtout « Ma Biche » (« Sweets For My Sweet » de Mort Shuman pour les Drifters, d’après l’interprétation anglaise des Searchers), adapté par Vline Buggy. Sa version est un succès au Brésil : les gays du cru croient qu’il s’agit d’un hymne homosexuel (bicha en portugais signifie homo). Le personnage de « Ma Biche » décrit la jeune fille en train de se maquiller : Tenant d’une main ta petite glace ronde/ Tu plisses ton front enfantin/ Et de l’air le plus sérieux du monde/ Tu dessines en un tour de main/ Un œil de biche. Pourtant, le narrateur n’apprécie guère le maquillage : c’est une forme de tricherie : Je me demande pourquoi tu te maquilles. Il aime les beautés au naturel : Sans rien, tu sais, tu es très, très jolie. Laisse tes yeux sans rien autour. Mais le final est aussi plat que sentimental : Tes yeux sont les yeux de l’amour. On trouvait déjà une dénonciation du maquillage dans « Tu Peins Ton Visage » des Chats Sauvages, deux ans plus tôt, à l’automne 1961. Son père lui propose alors 500 000 francs (une très jolie somme pour l’époque) pour qu’il arrête sa jeune carrière. Mais le fils refuse. Le spectacle continue et Frank Alamo, accompagné par les Gamblers, part en tournée, avec les Surfs, en novembre 1963, en première partie de Sheila. Il sympathise avec les Surfs, qui forment d’excel-