[Le Règne de Buonaparte. Satires en vers français. Par un imitateur

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[Le Règne de Buonaparte. Satires en vers français. Par un imitateur
PROYECTO OLE 11
ARCHIVO ELECTRÓNICO DE FUENTES PRIMARIAS
POESÍA PATRIÓTICA PROESPAÑOLA EN INGLÉS, FRANCÉS, ALEMÁN Y PORTUGUÉS (1808-1814)
TEXTO INDIVIDUAL DE OBRA FRA 154
[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
FRA 154
[Bertrand Verlac]
[Le Règne de Buonaparte. Satires en
vers français. Par un imitateur de
Juvénal.] Satire septième. Dialogue
Lutecius - Veridicus
1810
Cítese como: [Verlac, Bertrand]. [Le Règne de Buonaparte. Satires en vers français. Par un
imitateur de Juvénal.] Satire septième. Dialogue Lutecius – Veridicus. 1810. Edición Proyecto
OLE 11, 2012. Archivo Electrónico de Fuentes Primarias, Cód. FRA154.
http://www.uniovi.es/proyectole11/index.php
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POESÍA PATRIÓTICA PROESPAÑOLA EN INGLÉS, FRANCÉS, ALEMÁN Y PORTUGUÉS (1808-1814)
TEXTO INDIVIDUAL DE OBRA FRA 154
[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
LUTECIUS
Toujours enseveli dans vos sombres pensées.
VERIDICUS
Toujours prêt à chanter vos victoires passées.
LUTECIUS
Lorsqu’on tient sous sa loi tant de peuples divers,
Des accents du triomphe on peut frapper les airs.
VERIDICUS
Lorsqu’on veut tout soumettre à son obéissance,
Dans le cœur du plus faible, on souffle la vengeance ;
L’esclavage répugne au dernier des humains.
LUTECIUS
L’empereur a conçu de plus nobles desseins.
De l’Océan, bientôt, il brisera les chaînes.
VERIDICUS
Toujours, toujours des mots et des menaces vaines.
LUTECIUS
De l’Inde les chemins nous sont-ils inconnus ?
VERIDICUS
Argonautes, partez et ne revenez plus.
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TEXTO INDIVIDUAL DE OBRA FRA 154
[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
LUTECIUS
L’Empereur… l’Empereur est un fin politique.
VERIDICUS
L’avenir… l’avenir par le passé s’explique.
LUTECIUS
Ne comptez-vous pour rien son génie et son bras ?
VERIDICUS
Je compte pour beaucoup les vertus qu’il n’a pas.
LUTECIUS
Oseriez-vous ainsi parler en sa présence ?
VERIDICUS
Bientôt nous ne verrons plus un Français en France.
LUTECIUS
Pourquoi s’avisaient-ils de se coaliser ?
VERIDICUS
De les détrôner tous, pourquoi les menacer ?
LUTECIUS
Il fallait, n’est-ce pas, leur ouvrir les barrières ?
VERIDICUS
Il fallait les attendre et garder nos frontières.
LUTECIUS
Il est fâcheux qu’on n’ait pas demandé vos conseils.
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[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
VERIDICUS
Qu’on ait suivi le vôtre et ceux de vos pareils.
LUTECIUS
Les Anglais n’ont-ils pas fomenté ces querelles ?
VERIDICUS
Est-ce en mettant aux fers leurs alliés fidèles ?
LUTECIUS
Je vous entends… je vois votre ingénuité.
Cette affaire d’Espagne est une atrocité,
Une trame infernale, un horrible mystère.
Un fils devrait pouvoir assassiner son père,
Et lorsque la Discorde, à l’oeil farouche, hagard,
Menaçait nos conscrits du stylet, du poignard,
Nos aigles dédaignant ces complots homicides,
Le laisser achever cet odieux forfait,
Que pour régner sous main, Albion ourdissait.
VERIDICUS
Superbe plaidoyer, tiré d’une gazette !
Certes, je vous croyais plus de sens dans la tête.
Oui, vous fûtes prudents, autant que généreux,
Aussi les résultats sont-ils des plus heureux ;
Dites, donc, que la soif, que l’ardeur du pillage,
Vous firent concevoir et commencer l’ouvrage.
Mais l’Eternel, qui lit au front des imposteurs,
En sursaut vous tira de ces rêves flatteurs.
LUTECIUS
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[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
Ce n’est point raisonne, que d’épancher sa bile ;
A ce débordement, la réponse est facile ;
Mais ce serait du temps mal employé, perdu.
Lorsqu’on parle à des sourds, en est-on entendu ?
VERIDICUS
Une guerre insensée, infâme, nous consume,
Et vous ne voulez point que la bile s’allume ?
De tous ces grands projets, ces pénibles efforts,
Que vous restera-t-il ? Des blessés, des morts.
O Français en délire ! O faiseurs de conquêtes !
A quel point un seul homme a-t-il tourné vos têtes ?
VERIDICUS
Et l’impôt… l’avez-vous réduit ? Est-on plus riche ?
Ah ! ce règne est aimable ! Il est plus que gentil,
Bientôt ils taxeront la feuille de persil.
Depuis qu’ils ont fondu de Henri la statue,
Hélas ! la poule au pot, qu’est-elle devenue ?
Non ce n’est plus ce temps où l’aimable étranger,
Sous notre ciel d’azur aimait à voyager ;
Le temps où les louis roulaient dans les boutiques,
Où notre goût, nos arts, nos modes, nos fabriques,
Courant d’un vol léger de Madrid à Moscou,
Sans nous expatrier nous offrait le Pérou.
LUTECIUS
Le plus noble des arts, c’est celui de la guerre,
Et bientôt nous serons les maîtres de la terre.
VERIDICUS
Et la France, bientôt, longtemps en pâtira.
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[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
LUTECIUS
L’an dernier, fûtes-vous au bal de l’Opéra ?
Vous connaissez Brunet…Vous préférez le Bouffe…
Avouez que, partout, on s’y porte… On étouffe.
Des fêtes et des jeux… dans Paris, il en pleut.
L’Etat en fait les frais… Là, s’amuse qui veut.
Voit-on, dans ce tableau, quelque ombre de misère ?
VERIDICUS
On y voit ce qui sert à doubler ma colère,
Ces jours de décadence, où le peuple Romain
S’écriait… donnez-nous des spectacles, du pain.
Cette époque fatale où Rome, hélas ! déchue,
N’osait plus de Brutus contempler la statue.
Où le Sénat romain, noblement convoqué,
Décide d’un Turbot…
LUTECIUS
C’est fort bien répliqué.
Du Juvénal tout pur. Mais, Monsieur, des satires
Ne terniront jamais l’éclat des grands Empires.
Assez d’autres, sans vous, disent que tout va mal.
C’est qu’on ne gagne rien à lire Juvénal.
J’aime assez un auteur qui censure avec grâce,
Tel écrivit Boileau… tel écrivait Horace.
Horace, qui, longtemps auprès d’Auguste assis,
Y trouvait le moyen d’obliger ses amis.
Vous avez beau, paré du nom de philosophe,
Manier le sarcasme et lancer l’apostrophe,
Vous n’y changerez rien aux vices de la cour.
Tandis qu’il vil grabat, que l’exil, que la tour,
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[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
Seront de vos travaux la récompense austère.
Vous n’aimez point Paris… allez bêcher la terre…
Vous y ferez venir de l’huile, du froment :
Vous y vivrez de lait… Pourquoi tardez-vous tant ?
Partez, ne craignez point que d’insolents croates
Viennent vous y ravir vos grains, vos dieux pénates,
Eux qui tremblent au nom du grand Napoléon.
Ah ! nos aigles ont su les mettre à la raison.
VERIDICUS
Ainsi parlait Horace… et moi, qui lis Virgile,
J’appréhende toujours une guerre civile,
Dont un feu ma éteint nous couve le flambeau,
Ne soit le dénouement de ce drame nouveau.
Tant son art de régner est cruel et perfide.
Alors, et qui vous dit qu’un Antoine, un Lépide,
Voulant disputer l’honneur du premier rang,
Ne nous couvriront pas de lambeaux et de sang.
D’une guerre sans fin, qui peut prévoir les suites ?
Etes-vous des Français, ou de vils satellites,
Venez-vous pour sauver ou pour perdre l’état,
Vous qui montez la garde aux portes du sénat ?
Ne verrez-vous jamais, dans ces métamorphoses,
Que l’épine est pour vous, que pour eux sont les roses.
Que ceux qui vous sont chers, qui vous tendent les bras,
De lui n’obtiennent plus qu’un illustre trépas.
Qu’une guerre finie, une autre recommence,
Que ce n’est que pour eux qu’ils déciment la France.
Que prétendre dicter à l’Europe la loi,
C’est le projet d’un fou plutôt que d’un grand roi.
LUTECIUS
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TEXTO INDIVIDUAL DE OBRA FRA 154
[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
Avez-vous dit, enfin, ou bien je me retire.
Quel est ce malheur qui menace l’empire ?
Prophète Jérémie… ainsi, donc, dans trois jours,
Ninive va périr… Ah ! quel homme ! quel ours !
Sont-ils prêts à crouler les fondements du trône ?
Joseph a-t-il perdu ses états, sa couronne ?
Vous est-il défendu de jouir, d’être heureux ?
Ou bien ne fait-on pas assez pour vos neveux ?
La guerre vous impose un léger sacrifice ;
Mais, qu’est-ce que la guerre ? une bonne nourrice,
Qui de son lait nourrit ses tendres nourrissons.
Que feraient nos cadets, sans elle ? et nos garçons…
VERIDICUS
Ils prendraient la charrue… ou, bravant les tempêtes,
Ils iraient conquérir nos antiques conquêtes,
Du Japon, de la Chine, et parcourant les mers,
Leur riche pavillon flotterait dans les airs ;
Et la paix, qui toujours amène l’abondance,
De Tyr et de Sidon redirait l’opulence.
LUTECIUS
Modérez-vous, ce temps bientôt reparaîtra.
VERIDICUS
Oui ! ce jour où d’Anvers la flotte sortira ;
Le jour, où de Boulogne une armée imposante
Fondra sur la Tamise et fera la descente.
LUTECIUS
Vous aurez beau railler, chaque chose a son temps.
Un peu de patience…
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[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
VERIDICUS
Oui, vos appointements
Sont prêts au bout du mois… je reste sans réplique,
Et ne suis qu’un sot… qu’un rustre, un satirique,
Indigne de chanter la gloire et les bienfaits
Que l’empereur et roi…
LUTECIUS
Sont-ils mieux les Anglais ?
VERIDICUS
Fi donc… regardez-vous… la fable est votre histoire.
A force de mentir on ne veut plus vous croire.
Je lis sur votre front l’épitaphe d’un mort
Entendant proclamer la soupe à la Rumfort,
La parque en a souri, sur son trône d’ébène.
Voilà de ces beaux jours de Jupiter, d’Alcmène !
Ce règne tant vanté… ce bonheur tant promis ?
Que ne suis-je auditeur, sous-préfet ou commis,
J’irais, en attendant que ma tasse fût prête,
Au café du caveau demander la gazette,
Et d’un beau commentaire, illustrant cet écrit,
J’irais m’entendre dire… ô qu’il a de l’esprit !
LUTECIUS
Aristaque éternel ! critique atrabilaire !
Parlez, et dites-nous ce qu’il eût fallu faire ?
VERIDICUS
Au lieu de le guinder sur ce haut piédestal,
Il fallait renverser et l’homme et le cheval ;
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[Bertrand Verlac], [Le règne de Buonaparte. ...] Satire septième (1810)
Au lieu de tant prôner ses fureurs, ses conquêtes,
D’aller tous ébahis voir couronner ces têtes,
De fatiguer les dieux par les cris de bravo,
Il fallait le honnir… sur lui crier haro.
LUTECIUS
Et passer par-dessus les canons à mitraille.
VERIDICUS
Faites mieux… que vos corps lui servent de muraille.
J’en rougis et me tais de honte et de dépit,
Tant j’abhorre ce siècle infernal et maudit.
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