Agnès Gepner dentiste à domicile pour les plus fragiles – La

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Agnès Gepner dentiste à domicile pour les plus fragiles – La
Agnès Gepner, dentiste à domicile pour les plus fragiles - La Croix
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Agnès Gepner, dentiste à domicile pour les plus fragiles
Par Lucie Gruau, le October 15, 2014 11:46
À 57 ans, Agnès Gepner a tout d’une femme d’affaires : l’allure, l’aisance oratoire, l’équipement
high-tech… Mais pas le discours. « Même si cela me coûte cher, je ne suis pas prête à tout pour gagner de
l’argent ! », lance-t-elle avec conviction. Cette philosophie de vie, elle l’a construite au fil d’un parcours
professionnel particulièrement riche, rythmé par le « hasard des rencontres ».
Agnès Gepner a passé une grande partie de sa carrière au centre hospitalier de Saint-Cloud (Hautsde-Seine). De 1992 à 2000, elle y occupe la fonction de chef du service réanimation puis ressent, « la
quarantaine arrivant », l’envie de se tourner vers le secteur privé pour exercer au sein d’une maternité du
12e arrondissement parisien. « Et puis on m’a proposé la direction de la clinique Léonard de Vinci, j’ai
tout de suite dit oui ! » complète-t-elle.
Des soins 30 % à 40 % moins chers
Le CV de cette mère de quatre enfants mariée à un psychiatre aurait pu s’arrêter là si elle n’avait pas été
un jour confrontée à l’implantologie dentaire et aux coûts très élevés des prestations. « J’ai alors été
contactée pour monter un réseau Internet, le réseau français d’implantologie dentaire, pour proposer des
soins 30 % à 40 % moins chers qu’ailleurs », explique-t-elle.
Une fois ce premier service lancé, tout s’enchaîne. D’autres acteurs du monde de la santé (Axa,
Santéclair) veulent profiter de son expertise. L’ancienne anesthésiste-réanimatrice accepte mais son
ambition est ailleurs. Elle fonde en avril 2013 Dent’Adom (pour Dentistes à domicile), un service de soins
dentaires à domicile destiné aux personnes fragiles et dépendantes. Très vite, l’initiative rencontre un
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franc succès.
L’aventure se complique
Pour « ne pas se laisser dépasser », Agnès Gepner décide alors de céder son concept à Bluelinea, une
société spécialisée dans les solutions innovantes pour la santé et le social, tout en gardant une place
décisionnaire. C’est là que l’aventure se complique, chacun ayant sa propre vision de la suite à donner au
projet. Face au conflit qui s’envenime, Agnès Gepner préfère quitter le navire. Mais loin de se laisser
abattre, elle décide, « malgré le sentiment d’échec » de redémarrer à zéro, en créant, sur le même principe
que Dentistes à domiciles, « Incisiv ».
Son premier patron en médecine, quand elle était jeune réanimatrice, a véritablement déterminé la
manière dont elle exerce. « Il était un concentré de droiture et de formation. Il réussissait à allier
beaucoup de qualités : la loyauté, le respect de la parole et l’honnêteté. Pour moi, c’était comme un
maître, il avait une humilité et une éthique irréprochables. Il m’a offert en quelque sorte une formation
psychique au métier de médecin. Quand il ne savait pas, il cherchait, il demandait, il appelait un confrère
et même quand il avait une réponse, il se disait : “Est-ce que je sais vraiment ?” C’est de lui aussi que
vient un de mes principes de base : je ne ferai pas des choses qu’on n’a pas le droit de faire pour gagner
de l’argent.»
Des bienheureux et des saints
Désormais à la tête de cette nouvelle association, elle ne veut rien lâcher des valeurs qui l’ont toujours
guidée et préfère parler de « membres d’une même famille » plutôt que « de salariés ». Son quotidien
ressemble pourtant de plus en plus à celui d’un chef d’entreprise à une exception près. « Notre activité
n’est pas rentable, reconnaît-elle. Ceux qui travaillent avec moi sont des bienheureux et des saints ! »
Elle dirige six dentistes, tous à temps partiel, qui acceptent de libérer quelques heures en dehors de leur
cabinet pour rendre visite aux « exclus » du système de soins classique. Une idée née des difficultés
rencontrées par son père, lourdement handicapé, pour se rendre chez un médecin. « Nous allons là où les
autres ne vont pas, soit parce qu’ils n’ont pas le matériel, soit parce qu’ils n’ont pas le temps ou tout
simplement parce que ce n’est pas rentable pour eux », détaille la responsable. Son personnel, « des
praticiens jeunes qui aiment la gériatrie et des dentistes en fin de carrière », se déplace dans les
institutions spécialisées et au domicile des particuliers.
De vives réflexions avec les familles
Grâce aux progrès techniques, le matériel utilisé par Incisiv tient dans un petit véhicule utilitaire, mais
l’équipe doit composer avec une difficulté supplémentaire : « Dans notre pratique, la plupart du temps, le
bénéficiaire n’est pas le payeur », argumente la responsable. Au moment d’accepter un soin, ou au
contraire d’y renoncer, de vives réflexions s’engagent alors souvent avec les familles. « Pour moi, c’est
presque un dialogue sur le sens de la vie : pourquoi un enfant peut-il décider pour son père ? », poursuit-elle.
L’association ne se déplace pour le moment qu’en Île-de-France, faute de moyens mais aussi par choix.
« Je fais attention à toujours freiner pour ne pas laisser s’emballer le système. Je ne veux pas avoir à
refuser des déplacements et ne pas pouvoir fournir », explique Agnès Gepner. L’anesthésiste espère
maintenant recevoir davantage de soutien de la part des pouvoirs publics. « Pour le moment, beaucoup
nous répondent : “Existez, durez et quand cela marchera bien, on vous aidera”, regrette-t-elle. La France
est un pays âgé et sclérosé au sein duquel il n’y a pas de place pour l’innovation. »
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