Les causes de la fonte des glaciers tropicaux enfin identifiées

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Les causes de la fonte des glaciers tropicaux enfin identifiées
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COMMUNIQUÉ DE PRESSE NATIONAL I PARIS I 10 JUIN 2011
Les causes de la fonte des glaciers tropicaux
enfin identifiées
Les causes de la fonte des glaciers tropicaux sur les 10 000 dernières années sont enfin
dévoilées par une équipe de chercheurs français1 du CNRS, du CEA, de l’IRD, de
l’Université Joseph Fourrier et un chercheur américain de l’Université d’Albany. Ils ont
montré que le recul du glacier Telata en Bolivie sur cette période est avant tout lié à une
hausse de température atmosphérique de 3°C et au réchauffement de l’océan Pacifique
tropical en réponse à une augmentation de l’insolation2. Les travaux ont été publiés le 09
juin 2011 sur le site de la revue Nature.
Dans l’imaginaire collectif, parler de glaciers sous les Tropiques semble contradictoire. Pourtant, il existe
bel et bien des glaciers tropicaux, dans les Andes principalement. Pour identifier les causes du recul de
ces glaciers, la connaissance de leur histoire récente est nécessaire.
L’équipe de chercheurs a étudié l’un des glaciers de haute altitude de la Cordillère Royale de Bolivie: le
Telata. Les moraines (roches déposées par le glacier témoignant de ses positions antérieures) du Telata,
très bien conservées et en grand nombre, rendent ce site unique sous les Tropiques. Elles offrent en effet
un enregistrement quasi continu des stades glaciaires successifs. Datées en mesurant dans les roches la
concentration d'éléments3, elles permettent de reconstituer, pour la première fois, l’histoire du glacier au
cours de l’Holocène, c’est-à-dire sur les 10 000 dernières années. Pendant cette période, la surface du
glacier a diminué et son front a reculé de 3 km. Ce recul glaciaire, d’abord lent, s’est accéléré depuis le
début du 19e siècle, avec 2 km de recul de 1820 à aujourd'hui.
Les chercheurs des différents laboratoires se sont penchés sur le lien pouvant exister entre le volume
glaciaire et les valeurs du couple température/précipitation qui prévalaient pour différentes positions
passées du glacier. Les calculs montrent que le recul du glacier est avant tout lié à un réchauffement des
températures d’environ 3°C sur l’ensemble de l’Holocène. L’augmentation très progressive de la quantité
de rayonnement solaire reçue à la surface terrestre a eu des répercussions sur la température de surface
de l’Océan Pacifique tropical et sur le climat à proximité du glacier. L’augmentation de la température
modifie le comportement du glacier et explique de son recul. En revanche, les simulations numériques
avec des modèles de climat montrent que les précipitations n’auraient pas varié de façon suffisamment
importante depuis 10 000 ans pour influencer l’évolution du glacier.
Laboratoire de géographie physique "Pierre BIROT" (LGP-CNRS, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/UPEC/INRAP), Laboratoire des sciences
du climat et de l'environnement (LSCE-CNRS/CEA/UVSQ), Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement (LGGE-CNRS/UJF
GRENOBLE 1), Laboratoire d'Océanographie et du Climat : Expérimentations et Approches Numériques (LOCEAN-CNRS/IRD/MNHN/UPMC),
Institut des sciences de l'évolution de Montpellier (ISEM-CNRS/IRD/Université MONTPELLIER 2), Centre de recherches pétrographiques et
géochimiques (CRPG-CNRS/Université Henri Poincaré Nancy 1/INPL Nancy), Laboratoire d'étude des transferts en hydrologie et environnement
(LTHE-CNRS/UJF GRENOBLE 1/INPG/IRD/CEMAGREF)
2Quantité de rayonnement solaire reçu.
3Le 10Be(Beryllium) apparaît dans certains minéraux lors de réactions nucléaires induites par le rayonnement cosmique.
1
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C’est la première fois qu’une étude montre que la fonte de ces glaciers au cours de l’Holocène était
étroitement liée aux variations des températures de surface de l’Océan Pacifique tropical. Cette étude
confirme donc le caractère exceptionnel de la fonte rapide, observée depuis le début de l’ère industrielle.
Cette fonte, depuis 1820, n’est pas liée aux variations d’insolation mais à d’autres mécanismes. Ces
travaux montrent aussi combien les glaciers tropicaux, situés à haute altitude, là où le réchauffement prévu
pour le 21e siècle devrait être le plus élevé (4 à 5°C dans le cas de la région du Telata), seront
extrêmement vulnérables au cours des prochaines décennies.
Vérification du DGPS. En arrière-plan le glacier Zongo
qui est suivi depuis plus de 15 ans par les
glaciologues de l'équipe. Les mesures sur ce glacier
de la Cordillère Royale ont servi à calibrer un modèle
glaciologique utilisé pour déterminer les variations de
température évoquées dans l'article.
©Daniel Brunstein
Photo du glacier Telata (5190m, Bolivie, Cordillère
Royale) en 2008 avec ses nombreuses moraines qui
ont permis de reconstruire l’histoire du glacier depuis
10 000 ans.
©Vincent Jomelli
Bibliographie
Irregular tropical glacier retreat over the Holocene epoch driven by progressive warming, Vincent
Jomelli, Myriam Khodri, Vincent Favier, Daniel Brunstein, Marie-Pierre Ledru, Patrick Wagnon, Pierre-Henri
Blard, Jean-Emmanuel Sicart, Régis Braucher, Delphine Grancher, Didier Louis Bourle, Pascale Braconnot
et Mathias Vuille, Nature, 09 juin 2011.
Contacts
Chercheur l Vincent Jomelli l T 33 (0) 4 67 83 95 41 l [email protected]
Presse CNRS l Laure Mégas l T 33 (0) 1 44 96 46 42 l [email protected]

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