John Lewis, Galileo in France. French Reactions
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John Lewis, Galileo in France. French Reactions
Francia-Recensio 2008/2 Frühe Neuzeit – Revolution – Empire (1500–1815) John Lewis, Galileo in France. French Reactions to the Theories and Trial of Galileo, New York, Berne, Berlin (Peter Lang) 2006, XX–276 S., 3 Abb. (Currents in Comparative Romance Languages and Literatures, 109), ISBN 0-8204-5768-X, CHF 99,00. rezensiert von/compte rendu rédigé par Fabien Chareix, Paris Comment Galilée a-t-il été lu et discuté en France? C’est pour répondre à cette question que John Lewis, spécialiste de littérature française à la Queen’s University de Belfast, réunit dans ce livre des analyses informées, toujours suggestives, des figurations (c’est le titre du premier chapitre) et représentations de Galilée dans le contexte de la violente bataille qui l’opposa aux anti-coperniciens. Le choix de la France s’impose, selon l’auteur, en raison d’un contexte politique gallican, traditionnellement libéré de la tutelle des décrets romains, et qui pourtant ne fait guère écho aux premiers éclats de la lutte copernicienne. Au début du XVII e siècle, l’auteur pointe ainsi le paradoxe très juste entre une relative indifférence, en France, à la révolution astronomique, et une tradition déjà fort établie de critique de l’aristotélisme, héritage de Ramus et de Montaigne. On ne sait ce que l’auteur entend déduire de cet anti-aristotélisme qui n’aboutit pas à un copernicianisme, mais on retient du moins l’idée selon laquelle le contexte intellectuel aurait dû logiquement »convaincre [les savants français] d’adopter une attitude plus positive face au copernicianisme« (p. 11). Après l’exposé, parfois trop sommaire, des idées et théories galiléennes (chapitre 2, p. 15 à 62), l’auteur développe le cœur de son argumentation: un exposé raisonné et convaincant des motifs nationaux qui permettent de comprendre la nature très singulière de la lecture française de l’affaire Galilée (Ch. 3, »The National Context«). L’auteur s’entend parfaitement à exposer la situation particulière de la France qui, avec l’Angleterre, doit être considérée comme la seule nation qui ait subi entièrement les transformations induites par la Renaissance, la Réforme et la Contre-Réforme. La manière dont la révolution scientifique (catégorie qui n’est pas discutée par l’auteur) a été perçue dans les grands ensembles politiques européens est conditionnée par l’entrecroisement de contextes techniques, sociaux, stratégiques ou militaires et, par des facteurs liés à la »liberté de pensée et d’expression« (p. 63). C’est là le thème fondamental du livre: les savants français ont agi, face à Galilée, avec la diversité induite par la liberté qu’ils avaient en partage. On peut s’étonner de comprendre, à ce moment du livre, que des causes internes, liées à la maturation des concepts scientifiques eux-mêmes, ne sont pas inclus dans le cadre d’étude. Située entre l’analyse littéraire (vient alors l’étude de l’influence des auteurs français renaissants tels que Rabelais, Montaigne ou Ramus) et l’histoire contextualisée des idées, la méthode de John Lewis fait, de manière à peu près constante, l’impasse sur une histoire internaliste des sciences. Dans son genre, cette analyse peut convaincre et on peut accorder à l’auteur le résultat qu’il avance, à la fin de ce chapitre, contre Stillman Drake: la France n’a pas été plus hostile aux idées galiléennes que ne l’a Lizenzhinweis: Dieser Beitrag unterliegt der Creative-Commons-Lizenz Namensnennung-Keine kommerzielle Nutzung-Keine Bearbeitung (CC-BY-NC-ND), darf also unter diesen Bedingungen elektronisch benutzt, übermittelt, ausgedruckt und zum Download bereitgestellt werden. Den Text der Lizenz erreichen Sie hier: http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/de été l’Angleterre. L’hypothèse de Drake, fondée sur une recension purement quantitative des écrits anti-galiléens publiés dans l’un et l’autre pays, ne rend pas justice au fait que les idées galiléennes, dans le double contexte de l’indépendance intellectuelle et religieuse spécifiques à la culture française, a fait »s’élever la température des débats« (p. 89). Par déterminisme historique, en quelque sorte, le sort fait à Galilée et le contenu révolutionnaire même de son œuvre ont rencontré en quelque sorte dans un réseau de savants français un écho et une libre diffusion qui ne ressemblent à aucune autre des réceptions qui lui ont été faites. Après avoir évoqué des contacts précoces (au nombre desquels ceux, déjà bien connus, de J. Tarde et de E. Diodati), John Lewis se consacre à l’étude séparée de quatre savants qui ont joué un rôle dans la lecture et dans la diffusion des idées galiléennes: Mersenne (ch. 5, p. 113–140), Pereisc et Gassendi (ch. 6, p. 141–156) et Descartes (ch. 7, p. 157–179). Pourquoi ces savants et pas d’autres? L’explication nous est donnée dès les premières pages de l’ouvrage. »Qui sont«, demande l’auteur, »les personnages les plus importants de la réception des théories de Galilée en France?« (p. 12). Mersenne, sans doute, Gassendi ainsi que Pereisc, sont deux autres candidats. Descartes, enfin, est présenté (p. 13) comme possédant des vues cosmologiques radicalement opposées à celles de Galilée, bien que se fondant sur mêmes principes. Or cette présentation pose deux difficultés. D’une part, on regrette l’absence de représentants, en France, de l’école galiléenne tels que G. W. Leibniz (dans les années 1670) ou Christiaan Huygens (de 1666 à 1683). Ce dernier est un véritable témoin central de la diffusion des idées galiléennes. Son nom n’est mentionné qu’une fois. Or une foule de personnage s’imposeraient, à côté de ceux que John Lewis choisit de mettre en évidence ici. Comment, du coup, penser que l’on peut rendre compte d’un phénomène aussi complexe qu’est la réception d’une doctrine, si on la réduit à quelques monographies – si habiles soient-elles? D’autre part, si Descartes est tant opposé à Galilée, quel rôle peut-il jouer dans la réception de celui dont, de son propre aveu, il n’a pas lu une seule ligne ? John Lewis prend acte de l’hétérogénéité des opinions, symbolisée par celle des quatre protagonistes reconnus ici, mais la position de Descartes, très spécifique, semble introduire un déséquilibre dans la démonstration de l’auteur. Est-il par ailleurs certain, comme cela est dit p. 13–14, que la croyance de Descartes à »la raison et au bon sens comme [à] de puissants outils épistémologiques« (sic) soit réductible à »une réaction envers l’argument de l’omnipotence divine élaborée par Simplicio à la fin du Dialogo« (ibid.)? C’est historiquement et philosophiquement discutable. Si l’on s’en tient aux »Principia« de Descartes, l’écrit qui s’est véritablement substitué, dans ses Troisième et Quatrième Parties, au »Monde« dont Descartes ajourne sine die la publication après avoir pris connaissance de la condamnation de Galilée, la liaison entre physique et puissance divine est bien plus affirmée chez Descartes que chez Galilée. Enfin, comment peut-on affirmer que Descartes et Galilée s’opposent en cosmologie? L’un et l’autre sont coperniciens avoués et Descartes le confie dans la lettre qui annonce à Mersenne en novembre 1633 le refus de publier un Traité qui contient … les mêmes hypothèses que celles pour lesquelles Rome a désirer condamner le savant florentin. John Lewis évoque cette lettre (p. 165) tout en refusant, à l’appui d’un argument désarmant, l’idée traditionnelle selon laquelle Descartes aurait Lizenzhinweis: Dieser Beitrag unterliegt der Creative-Commons-Lizenz Namensnennung-Keine kommerzielle Nutzung-Keine Bearbeitung (CC-BY-NC-ND), darf also unter diesen Bedingungen elektronisch benutzt, übermittelt, ausgedruckt und zum Download bereitgestellt werden. 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On peut l’admettre, mais on ne comprend toujours pas la présence de Descartes, réduit à de telles approximations, dans la démonstration d’ensemble, qui possédait pourtant une certaine force dans les chapitres 5 et 6. La pensée de Galilée en mécanique théorique, la subtilité des problèmes soulevés par la géométrie, bref, les aspects scientifiques qui fondent traditionnellement ce qu’il est convenu d’appeler la révolution galiléenne, sont ici quelque peu escamotés, tout au long du livre, au profit d’une approche plus littéraire que véritablement historique, plus culturelle, pour tout dire, qu’authentiquement philosophique. Le choix méthodologique d’une approche socio-littéraire conduit l’auteur à éviter ce qui ressemble de près ou de loin à un raisonnement mathématique, et parfois cette approche conduit à des impasses. Le livre de John Lewis est une contribution originale à la connaissance de la pensée classique. D’une vaste érudition, il se signale par une information précise et son champ d’étude, aux confins de l’histoire littéraire et de l’histoire de la pensée scientifique, éclaire bien des points. Même s’il laisse de côté, pour des raisons qui sont inhérentes aux choix méthodologiques clairement affirmés, des pans entiers de ce que pourrait être l’histoire de la réception immédiate de la pensée galiléenne, c’est un livre à recommander chaudement tant il parvient à donner corps et figure au Galilée qui s’échange, se lit et se discute, en France, après le procès de 1633. Lizenzhinweis: Dieser Beitrag unterliegt der Creative-Commons-Lizenz Namensnennung-Keine kommerzielle Nutzung-Keine Bearbeitung (CC-BY-NC-ND), darf also unter diesen Bedingungen elektronisch benutzt, übermittelt, ausgedruckt und zum Download bereitgestellt werden. Den Text der Lizenz erreichen Sie hier: http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/de