texte #2 27 mai 2016 - esad

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texte #2 27 mai 2016 - esad
texte #2
27 mai 2016
LUCIE DÉGUT
23 970 signes
Je ne sais pas si je vais parler de race, de mixité sociale, de mixité
ethnographique, de culture, d’identité, de diversité, ou encore d’héritage, d’influence, de métissage, ou justement croiser chacun de ces
mots.
Je me souviens lors d’un échange avec Dominique Cunin, qu’il fallait
que je fasse attention à la façon dont j’emploie le mot « race ». Celui-ci pouvait être péjoratif ou mal vu mais me semblait anodin.
J’ai commencé à faire des recherches sur ce mot race. Selon la définition anthropologique du Centre National de Ressources Textuelles et
Lexicales (CNRTL), la race définit un groupement naturel d’êtres humains, actuels ou fossiles, qui présentent un ensemble de caractères
physiques communs héréditaires, indépendamment de leurs langues et
nationalités.
L’émission « Les nouvelles vagues » sur France Culture, met à l’honneur
un mot chaque semaine. Je me suis intéressée à la semaine où l’équipe a
travaillé sur le mot « blanc » et précisément la mardi 30 septembre 2014
où le thème traite du concept de « blanchité ». Maxime Cervulle sociologue, invité du jour, commence par rappeler qu’en mai 2013, le mot
race est retiré de la Constitution par François Hollande. Ce choix attire la foudre d’un bon nombres de sociologues, dont Nathalie Heinich
qui rédige un article comme une sorte de commandement des six naïvetés
à propos du mot « race » .
« 1. S’insurger contre l’idée
qu’existeraient des races humaines
sous-entend que c’est leur réalité
objective qui serait en question.
Or, comme toute représentation,
les races sont des conceptions
de l’esprit humain consistant à
agréger d’une certaine façon les
faits observés (couleur de peau
ou types de chevelures). Elles
existent donc bien, mais seulement
à titre de modes de catégorisation
- exactement comme les « classes »
sociales. Vouloir supprimer le mot
pour tuer une chose qui n’existe
que dans les esprits, c’est partir
à la chasse aux fantômes (ou aux
moulins à vent). Première naïveté.
c’est-à-dire à des regroupements flous, de l’ordre du « plus
ou moins » - de sorte qu’un être
humain appartient plus ou moins
à tel ou tel type racial (blanc,
noir, asiatique, indien…). La
notion de catégorie relève plutôt
de la logique, alors que celle de
type est plus adaptée à la réalité observée. Ceux qui « croient » à
l’« existence » réelle de « catégories » raciales regardent aussi peu
autour d’eux dans la rue que ceux
qui n’y « croient » pas : les uns
comme les autres confondent tant
le type avec la catégorie que la
réalité avec les représentations.
Deuxième naïveté.
2. Nier qu’il existerait des catégories « raciales » suppose de
considérer que la notion de race
renverrait à des regroupements non
seulement réels (voir ci-dessus)
mais aussi clairement différenciés,
avec des frontières discontinues - de sorte qu’un être humain
appartiendrait ou n’appartiendrait
pas à telle ou telle race. C’est
oublier qu’en matière de condition humaine les « catégories » sont
rarissimes, alors qu’on a beaucoup
plus souvent affaire à des « types »,
3. Vouloir supprimer le mot race
parce qu’il ne renverrait pas à
une réalité génétique, donc à un
fait de « nature », n’a de sens
qu’en vertu du raisonnement implicite selon lequel tout ce qui
est « naturel » serait nécessaire et
intangible, alors que tout ce qui
est « social » serait arbitraire,
donc modifiable. Pour pouvoir modifier un phénomène contraire à nos
valeurs, il faudrait donc prouver
qu’il est « socialement construit »
- et donc, par exemple, que la
race n’a aucun fondement génétique, ce qui rendrait cette notion arbitraire et le mot inutile.
Classique méprise : en matière
humaine, le « social », les institutions, les règles de vie commune,
le langage etc., sont des réalités
autrement plus contraignantes - ou
« nécessaires » - que les réalités
présumées « naturelles ». Vouloir
dénier tout fondement naturel à la
perception des différences raciales
(comme, sur un autre plan, des
différences sexuées) n’enlève rien
à la réalité, ni aux éventuels effets problématiques de ce phénomène
social qu’est la perception des
différences d’apparence. Troisième
naïveté.
4. La dénégation des différences
(de race, de sexe ou de catégorie
sociale) repose sur un raisonnement implicite : toute différence
impliquerait forcément une discrimination. C’est là la classique
confusion entre similitude et
égalité, qui plombe également une
grande part du mouvement féministe
actuel, persuadé qu’il faut nier
la différence des sexes pour lutter
contre les inégalités sexistes.
Mais le racisme, contrairement
à ce qu’on entend souvent, ne
consiste pas à « croire que les
hommes sont différents entre eux » :
il consiste à croire qu’il existe
entre eux des inégalités fondées
sur la race. Vouloir remonter de
l’inégalité à la différence pour
mieux combattre la première est
aussi intelligent que d’utiliser
un marteau pour venir à bout d’une
colonie de mouches dans un magasin
de porcelaine. Quatrième naïveté.
5. Les opinions racistes ne sont
pas fondées sur des arguments
scientifiques, mais sur des affects, comme tout ce qui touche à
l’amour et à la haine du prochain.
Si ces opinions utilisent à l’occasion le langage de la « preuve »
et la caution de la « science », ce
n’est qu’à titre de rationalisation et d’argument de persuasion
d’une opinion déjà constituée. Les
spécialistes de psychosociologie
des représentations savent bien
qu’il ne sert à rien de combattre
des croyances, des affects ou des
rapports aux valeurs avec des
contre-arguments scientifiques :
on ne les combat qu’avec d’autres
valeurs et, s’il le faut, avec
des lois (qui, en matière de lutte
contre le racisme, existent déjà).
S’imaginer que la science génétique serait à même d’éradiquer le
racisme est tout aussi irréaliste
que d’imaginer qu’elle serait à
même de le conforter. Cinquième
naïveté.
6. Pour lutter contre une chose,
il faut disposer de mots adéquats.
Pour lutter contre la réalité du
racisme, il faut bien pouvoir se
considérer comme « antiraciste »,
stigmatiser les « racistes », et expliquer que quel que soit le degré
d’existence ou de non-existence de
différences fondées sur des types
« raciaux », le comportement moral exige qu’on ne juge et traite
les individus qu’en fonction des
caractéristiques dont ils sont
personnellement responsables, et
non en fonction de propriétés avec
lesquelles ils sont nés, telles
que l’appartenance à un type racial, à un sexe, à une religion ou
à un milieu social. Se priver de
ces mots, c’est se priver des instruments pour combattre la chose.
Sixième naïveté.
Arrivés à ce point, la conclusion
s’impose : animé des meilleures
intentions mais digne des pires
régimes totalitaires, ce projet
« politiquement correct » de modification autoritaire de la langue
est simplement stupide. »
Le fait de s’appuyer sur la suppression de ce mot est, entre autre,
dans le but d’en éradiquer l’usage parait assez utopique en pratique,
donc le mot « race » est supprimé de la Constitution mais que fait-on
pour lutter non pas contre le mot mais contre la chose ?
Le propos de Colette Guillaumin (également sociologue) en 1981, s’accorde avec celui de Nathalie Heinich, qui affirme « Non, la race n’existe
pas. Si, la race existe. Non certes, elle n’est pas ce qu’on dit
qu’elle est, mais est néanmoins la plus tangible, réelle, brutale des
réalités » nous comprenons donc que son impact à une réalité dans les
rapports sociaux.
La race est un phénomène de partition sociale, de césure, alors comment
y penser sans avoir recours à ce terme ? Maxime Cervulle nous parle du
mot « éthnicité » comme substitut. L’éthnicité renvoie à une identité
commune, à un langage commun, une culture commune partagée, mais nous
pouvons nous demander ce qu’ont en commun les individus racialisés,
mise à part l’expérience d’oppression ?
Le racisme, le mot « racisme » a deux dimensions : une face culturelle,
idéologique, question du langage, structure des réalités et une face
matérielle et économique et une inscription du racisme dans les rapports sociaux.
Selon Maxime Cervulle, en France nous avons tendance à dissocier les
deux aspects. En effet, l’un des points principaux évoqués par plusieurs
sociologues s’appuie sur l’absence en France des statistiques éthnoraciales, également appelé « référenciel statistique ». Ces études permettraient de comprendre la composition française en terme d’éthnicité et
en terme d’identification raciale, c’est à dire comment nous nous percevons nous même, ou comment nous sommes perçu.
Ces statistiques, autorisées aux États-Unis permettent d’observer des
faits. Par exemple, nous savons qu’être noir aux États-Unis c’est avoir
trois fois plus de risque de vivre sous le seuil de pauvreté.
Dans le livre, Mixité sociale, et après ? , coordonné par Eric Charmes
et Marie-Hélène Bacqué, tous deux sociologues, est dressée une comparaison entre les villes françaises et américaines pour questionner
l’idéal de la « mixité sociale », un mot-valise, au concept flou qui s’impose de plus en plus dans le débat public pour justifier les politiques
urbaines actuelles. Cet ouvrage détermine pourquoi l’obsession pour la
mixité sociale ne permet pas de bien appréhender les réalités.
Nous comprenons que la façon de penser la racialisation des rapports
sociaux dans le présent et dans l’histoire est différente en France et
aux États-Unis. En France, la question post-coloniale est très importante mais elle n’est pas abordée comme peut l’être l’esclavage
aux États-Unis. La dimension racialisée des rapports sociaux est très
étudiée par les Américains, mais en France nous en sommes qu’au tout
début.
Marie-Hélène Bacqué évoque une sorte de complexe français. L’histoire
coloniale et postcoloniale reste encore un non-dit. Entre déni dans le
but de ne pas stigmatiser une partie de la population et rejet.
Selon CRNTL, on entend par la mixité le caractère de ce qui est mixte.
Ou encore la réunion de personnes, de collectivités, d’origines, de
formations ou de catégories différentes.
Qu’est ce qui nous rend différent alors que nous avons tous la même
identité ?
Certaines déclarations identitaires sont ancrées dans l’actualité comme
en témoignent, par exemple, les émeutes dans les banlieues en 2005.
Après ces événements, le président Jacques Chirac prend la parole. Voici un extrait de ses commentaires :
« C’est dans les mots et les regards, avec le cœur et dans les
faits, que se marque le respect
auquel chacun a droit. Et je veux
dire aux enfants des quartiers
difficiles, quelles que soient leurs
origines, qu’ils sont tous les
filles et les fils de la République.
Nous ne construirons rien de du-
rable sans le respect.
Nous ne construirons rien de durable si nous laissons monter,
d’où qu’ils viennent, le racisme,
l’intolérance, l’injure, l’outrage.
Nous ne construirons rien de durable sans combattre ce poison
pour la société que sont les dis-
criminations.
Nous ne construirons rien de durable si nous ne reconnaissons
pas et n’assumons pas la diversité de la société française. Elle
est inscrite dans notre Histoire.
C’est une richesse et c’est une
force. »
Ce discours montre deux choses contradictoires, la fracture qu’il y a
entre la société et la banlieue. On sent le besoin et la volonté du
président d’affirmer une identité nationale des filles et fils, donc citoyens de la République, ainsi que leur égalité peu importe leurs origines.
Dans l’article des Inrocks « Certaines politiques de mixité sociales
ouvrent la voie à la gentrification », Marie-Hélène Bacqué, explique
que effectivement aujourd’hui en France, il y a une sorte de crispation
identitaire sur le fait d’être Français. Être Français, c’est quoi ?
Eric Fassin également sociologue livre à Isabelle Boni‑Claverie dans
son documentaire « Trop noire pour être Française ? » que normalement être
Français c’est d’abord une question de droit, ce sont d’abord des papiers. Mais il se trouve que de plus en plus on a le sentiment que cela
ne suffit pas. Autrement dit, la nationalité ne serait plus véritablement
le critère d’appartenance à la nation. Si ce n’est pas la nationalité
c’est quoi ? Si on commence à considérer que parmi les Français il y en a
de différentes natures on voit bien qu’on retrouve la race.
Dans l’article des Inrocks, Didier Lapeyronnie affirme « Oui, il existe
un apartheid en France ». Le sociologue, évoque cette crispation : « La
population des quartiers, discriminée, marginalisée, est placée symboliquement hors de la société. Les habitants ont l’impression de ne
pas appartenir à la même société ». Suite aux attentats contre Charlie
Hebdo et l’Hyper Cacher en janvier 2015, cette crispation a été exacerbée : quand vous dites « je suis Charlie », vous dites « je suis Français ».
Quand vous dites « je ne suis pas Charlie », vous dites « je ne suis pas
Français ».
Suite aux émeutes de 2005, et par rapport à une politique qui se veut
basée sur la diversité, des associations contre les discriminations
voient le jour, comme le Cran (Conseil représentatif des associations
noires) ou encore les Indigènes de la République. Mais leurs actions
sont encore insuffisantes, là où l’on observera une évolution pour la
lutte contre les discrimination sera au niveau de l’audiovisuel, c’est
à dire la représentation des minorités dans les médias.
Combien de personnes métisses, noires ou maghrébines dites « non-blanc »
par Maxime Cervulle seront représentées à l’écran ? Ceci suscitera une
vérification plus méticuleuse par le Conseil supérieur de l’audiovisuel
(CSA) pour lutter contre les inégalités.
En revanche, Rachid Benzine (enseignant, islamologue, politologue)
parle d’une obsession des médias français. Par exemple, à propos de
Sadiq Khan, nouveau Maire de Londres depuis le 8 mai 2016. Les médias
français sont focalisés sur le fait qu’il est de confession musulmane
et cela conditionne la façon dont il est perçu, puisqu’à Londres il est
surtout quelqu’un qui a réussi. On peut dire que cette convergence accroit la discrimination.
Quelles sont les bases qui nous permettent de nous identifier à une société plutôt qu’à une autre ? Sa population ? La reconnaissance ? Est-ce
que ce sont des valeurs ancrées dans la conscience collective ? Comment
s’identifie-t-on à un individu plutôt qu’à un autre ?
Les mesures concrètes du CSA pour pallier les inégalités de l’affichage
des « non-blancs » apportent-elles un changement ?
Alors je repense à la légère évolution de « non-blanc » à la télévision,
ainsi qu’aux propos de Rachid Benzine dans l’émission de France Culture,
« Les nouvelles batailles identitaires, islam européen : entre fantasme
des origines et sécularisation ». Il nous explique que, pour lui, en
France, il n’y a pas de communauté musulmane, car il n’y a pas de télé
musulmane, il n’y a pas de journaux musulmans et que c’est certainement
la population la plus sécularisée d’Europe dans la mesure où elle ne
s’inscrit pas dans une communauté et que le vote musulman n’existe pas.
Finalement suite, à ce propos, non communautaire, je m’interroge fautil avoir une télé x, un journal x pour former une communauté ? À partir
de quel moment un groupe d’individus est-il reconnu comme une communauté ? Est-ce que le fait de partager une alimentation, une prière, une
langue avec un groupe d’individus n’est pas déjà une forme communautaire ?
Selon le CNRL, une communauté désigne un ensemble de personnes vivant
en collectivité ou formant une association d’ordre politique, économique ou culturel.
Est-ce que des émissions à l’image de notre société, mélant des personnes « non-blanches » et blanches pourraient permettre une identification ?
Je ne peux pas m’empêcher de faire un parallèle, avec l’aspect communautaire et multiculturel que je connais à la Réunion. Et précisément
sur la télé « non-blanche » et « métissée ».
Les chaînes réunionnaises axent leur programmation précisément sur des
feuilletons quotidiens de type bollywoodien, nom donné à l’industrie du
cinéma indien, ou encore des telenovelas, venant des pays hispanophones
et lusophones. Il me semble que les différentes communautés présentes
sur l’île, y trouvent un certain interêt.
Le Journal de l’île publie en 19 mars 2016 : « Les telenovelas séduisent
toujours ». Voici les premières phrases de l’article : « Octobre 2001.
Tous les soirs de la semaine, à partir de 18 heures, La Réunion s’arrête. Tous les Réunionnais, du moins, une grande partie d’entre eux,
s’installent devant RFO (Réunion 1ère) pour un rendez-vous télévisuel
qu’ils ne manqueraient pour rien au monde… »
Ces feuilletons passent sur des chaînes phares. Il existe trois chaînes
locales et plusieurs autres satellites. À l’heure métropolitaine (décalage horaire Réunion-Paris -3 heures. Si les Réunionnais souhaitent voir
le 20h de TF1, ils doivent attendre 23h une heure à laquelle bon nombre
de Réunionnais dorment déjà), les chaînes comprennent qu’elles tiennent
là un excellent moyen de faire de l’audience. Elles réservent une place
de choix à ces feuilletons dans leurs grilles de programmation qui plus
est avant le journal télévisé local. « On a constaté que la série diffusée
avant le JT du midi peut dépasser les 50% de part d’audience », assure
Nicolas Delacroix, directeur de l’antenne chez Antenne Réunion.
Benjamin Morel, directeur d’antenne chez Réunion 1ère, porte une attention particulière aux thématiques développées afin qu’elles soient « en
phase avec nos publics » : « certaines séries marchent mieux que les sagas
françaises » ajoute-il.
On comprend l’engouement des Réunionnais pour ces feuilletons ; feuilletons qui montrent des personnages métissés, des décors et paysages familiers, des pratiques magico-religieuses proches de celles qui sont pratiquées sur l’île, une bande-son et des chants appréciés qui également
traitent de thèmes en résonnance profonde avec le vécu et les attentes
des téléspectateurs.
Ces séries venues d’ailleurs permettent à la population réunionnaise
de trouver le moyen de s’identifier à des personnages qui partagent une
culture semblable, des intérêts communs.
Est ce que cela bouleverse pour autant la question de leur appartenance
à la nation française ? Certaines d’entres elles ne se sentiront pas
forcément concernées par un feuilleton de type boolywoodien car elles
n’appartiennent pas à cette communauté.
Est ce qu’on a besoin de vivre ensemble pour accepter les communautés ?
Géraldine Smith dans son livre « Rue Jean-Pierre Timbaud, une vie de famille entre bobos et barbus » dit à propos de la rue Jean-Pierre Timbaud
que : « on vit les uns à côté des autres mais pas ensemble, on ne se
mélange pas ». Peut-on vivre à côté et faire partie d’une société ?
J’ai tendance à penser que cela apporte une richesse à ce qu’ils possèdent déjà. Marie-Hélène Bacqué affirme qu’en France nous avons souvent
confondu l’intégration (phase où les éléments d’origines étrangères
sont complètement assimilés au sein de la nation tant au point de vue
juridique que linguistique et culturel, et forment un seul corps social) et l’assimilation, (l’action de rendre semblable et même identique à quelqu’un ou à quelque chose, soit par intégration complète
dans un autre être ou une autre substance, soit par une comparaison
procédant d’un acte de jugement ou de volonté). Or ce n’est pas comme
cela que ça fonctionne. Il y a une hybridation. Lorsque de nouvelles
populations émigrent, elles se transforment mais elles transforment
aussi la société qui les accueille.
Ayant moi-même regardé quelques épisodes de ces feuilletons avant le
journal télévisé, j’essais d’établir une liste des telenovelas diffusé à la Réunion. Je me retrouve vis-à-vis de l’un d’entre eux : Muñeca
Brava (Poupée courageuse), je m’aperçois qu’il s’agit d’une telenovela
argentine. Muñeca Brava m’évoque quelques souvenir lointain, la sonorité de la prononciation me fait directement penser à une chanson qui a
été très populaire aux moments de la diffusion du programme à la Réunion
2004-2005. Rebaptisée Monika Brava, il s’agit d’une chanson réalisé par
un chanteur local et populaire de ragga Sergio.
La chanson parle de l’héroïne, Muñeca Brava, une belle femme pour qui
on oublierait presque le repas du soir sur le feu pour pouvoir la regarder à la télé, entre autre.
Intro
Hihi
Té na inn ti match football, la le
frèr
Hé il y a un petit match de foot
la les mecs
Monika Brava
Monika Brava
Ah tire sa, té met match football
Ah enlève ça met le match de foot
Non m’ve pa !
Non je veux pas
Refrain 1 (x2)
Monika o Brava
Monika oh Brava
Asoir lé ga i larg pa
Ce soir les mecs ne lâchent pas
6h25 la soné
6H25 a sonné
tout domoun dovan télé
tout le monde est devant la télé
mi èm atwé, mwin sé Sergio
je t’aime, moi c’est Sergio
Couplet 1
Refrain 1 (x2)
Milagro ou lé bel,
Milagro tu es belle,
min sera fidèle jus pou ou min sra
aboné,
je te serais fidèle, juste pour toi
je serais abonné,
kolé devan télé Milagro, Mili, Monika Brava, bravo
scotché devant la télé Milagro,
Mili, Monika Brava, bravo
mèm si kari i san brilé,
même si le « carry » sent le brûler,
mi boujra pa dou sèt mi lé,
je ne bougerais pas d’où je suis
installé,
kom m’a la fini di atwé Mili,
comme je t’ai déjà dit Mili,
Couplet 2 (x2)
Min la pou gard football,
Je suis entrain de regarde le
foot,
dann kanapé m’a pou apréssié,
dans le canapé je suis bien installé,
fanm-la la débarké, i sa fé shié
anpluss manjé p’ankor paré
ma femme a débarqué, elle va me
faire chier, en plus le repas
n’est pas encore prêt.
Refrain 2
Oh-la Milagro mon kari la-pou bri-
lé
Oh la Milagro mon carry est en
train de brûler
Oh-la Milagro mi sortra pa dvan
télé
Oh la Milagro je ne sortirais pas
de devant la télé
Couplet 3 (x2)
Milagro i èm Ivo mé ou voi pa ke
li la pou fé tourn out tèt,
Milagro elle aime Ivo, mais elle
ne voit pas qu’il est en train de
la prendre pour une idiote
mintnan i fo ou arèt ou lé mon
konkèt,
maintenant il faut que tu arrêtes,
tu es ma conquête,
la ou la-pou kass mon tèt
et là tu es en train de me rendre
fou.
Refrain 1 (x2)
Couplet 3 (x2)
Refrain 1 (x2)
Couplet 1
Refrain 1 (x2)
Couplet 2
Après avoir lu le mémoire d’Esther Folleas et relever le terme « acculturation », j’ai l’impression de me trouver à cet endroit entre acculturation et intégration, où l’on croise une telenovela d’Argentine
et la musique, la langue réunionnaise.
Comment l’influence de plusieurs pays a toujours été présente sur l’île ?
Ce schéma à l’air d’évoluer et de façon je dirais innocente. Peut-être
même connecté. Le philosophe réunionnais Jean-Claude Carpanin Marimoutou parle dans une conférence sur « une identité culturelle plurielle »
de l’interaction des mondes, l’imaginaire des mondes, la transformation
violente et apaisée des mondes. Éliane Wolff, ethnologue, nous parle de
la plateforme des « Réunionnais du monde » qui met en connexion justement
la diaspora réunionnaise, comme un vecteur pour revendiquer sa réussite. La réussite qui pour Rachid Benzine a du mal à être mesurée en
France dans sa dimension physique, il nous dit que nous savons mesurer
l’échec car nous disposons d’outils pour mesurer cette invisibilité de
l’immigration.
La « plateforme réunionnais du monde » est-elle l’amorce d’un outil qui
pourrait permettre de mesurer cette invibilité à une échelle nationale ?
Éliane Wolff, spécialiste en usages et pratiques, famille, pratiques
juvéniles des médias, flux, migration, e-diasporas, territoires, localité, nous prouve que nous disposons des mêmes outils, et que la nouvelle
technologie nous permet justement ces croisements. Qu’est ce qu’on va
apporter pour enrichir notre culture?
Je me rends compte qu’à cet endroit, j’ai sûrement mis le doigt sur un
phénomène précis, qui me fascine : l’influence, l’héritage et le croisement d’expériences, de connaissances.
En Argentine, où je suis depuis quelques mois mon but premier était de
m’imprégner/d’observer une culture, une langue, des us et coutumes avec
lesquels il m’arrive de faire quelques rapprochements naïfs avec mon
expérience culturelle réunionnaise ou métropolitaine. Et finalement essayer de savoir, moi, ce que je vais pouvoir en rapporter et essayer de
le transmettre à ceux qui ne seront pas venu ?
ARTICLES
LIVRES
La blanchité comme mensonge
socialement partagé, comme
œillères cousues de fil d’or ,
par Didier Epsztajn.
Publié le 28 octobre 2013
Maxime Cervulle, Dans le blanc
des yeux : diversité, racisme
et médias, Paris, édition
Amsterdam, 2013.
www.entreleslignesentrelesmots.wordpress.
com/2013/10/28/la-blanchite-comme-mensongesocialement-partage-comme-oeilleres-cousues-de-fildor/
Certaines politiques de mixité
sociale ouvrent la voie à la
gentrification , par Hélène
Gully.
Publié le 24 avril 2016
www.lesinrocks.com/2016/04/24/actualite/certainespolitiques-de-mixite-sociale-ouvrent-voie-agentrification-11821846/
Didier Lapeyronnie : « Oui, il
existe un apartheid en France »
par Mathilde Carton.
Publié le 23 janvier 2015
www.lesinrocks.com/2015/01/23/actualite/didierlapeyronnie-oui-il-existe-un-apartheid-enfrance-11549751/
Six naïvetés à propos du mot
« race » par Nathalie Heinich
(sociologue au CNRS)
Publié le 25 juillet 2013
www.sociologie974.wordpress.com/2015/01/06/sixnaivetes-a-propos-du-mot-race-nathalie-heinich/
www.liberation.fr/societe/2013/07/25/six-naivetes-apropos-du-mot-race_920835
Les Réunionnais et les
telenovelas - Extrait du
magazine MédiaMorphoses De Marimar à Rosalinda péi,
l’expérience réunionnaise article paru dans la revue
MédiaMorphoses « Les raisons
d’aimer les séries télé »,
numéro Spécial de janvier 2007
Publié en avril 2009
www.reunionnaisdumonde.com/spip.php?article1231
Les telenovelas séduisent
toujours par Clicanoo
Publié le 19 mars 2016
www.clicanoo.re/?page=archive.consulter&id_
article=515345
DOCUMENTAIRE
Trop noire pour être française ?
réalisé par Isabelle
Boni‑Claverie, 2013
Éric Charmes et Marie-Hélène
Bacqué, Mixité sociale, et
après ?, Paris, édition PUF,
2016
ÉMISSIONS RADIO
Les nouvelles batailles
identitaires (2/4) « Islam
européen : entre fantasme des
origines et sécularisation » par
Florian Delorme.
France Culture - 10.05.2016
www.franceculture.fr/player/exportreecouter?content=34b4018e-adde-4b21-850193933e389937
www.franceculture.fr/emissions/culturesmonde/
culturesmonde-mardi-10-mai-2016
Les nouvelles vagues « Le
blanc (2/5) : Le concept de
blanchité » par Marie Richeux.
France Culture - 30.09.2014
www.franceculture.fr/player/exportreecouter?content=438c9bef-4861-11e4-ab8d782bcb73ed47
www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-vagues/
le-blanc-25-le-concept-de-blanchite
Dimanche, et après ? « Mixité
sociale, constat d’échec, et
après ? » par Olivia Gesbert.
France Culture - 08.02.2015
www.franceculture.fr/player/exportreecouter?content=8994f176-ae21-11e4-adec005056a87c89
www.franceculture.fr/emissions/dimanche-et-apres/
mixite-sociale-constat-dechec-et-apres
CONFÉRENCES
Réunionnais-es du monde,
Réunionnais-es dans le monde :
Éliane Wolff at TEDxRéunion
Ajoutée le 7 janv. 2013
www.youtube.com/watch?v=YPdxzD7Abds
Une identité culturelle
plurielle : Jean-Claude
Carpanin Marimoutou at
TEDxRéunion
Ajoutée le 5 janv. 2013
www.youtube.com/watch?v=SITseAABdhY
bibliographie

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