Analyse du poème “Pièce fausse”. Apollinaire n`est pas le seul

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Analyse du poème “Pièce fausse”. Apollinaire n`est pas le seul
Analyse du poème “Pièce fausse”.
Apollinaire n’est pas le seul auteur qui a tenté de produire des effets picturaux avec les vers d’un poème, et
« Pièce fausse » d’André Breton, sans prendre le nom de calligramme, présente à la foi un côté verbal et un
côté graphique. On voit le vase et on parle d’un vase, même si le reste du poème a une signification plutôt
obscure.
Pour comprendre le sens de ce poème il faut bien le situer dans son contexte historico-littéraire. Breton
l’écrit en 1920 pour l’insérer dans une pièce de théâtre dadaïste. Plus tard il le publie dans son recueil de
poèmes Clairs de terre de 1923. Il est donc dans sa phase dada, marqué par une volonté de tout détruire,
de se moquer profondément de la tradition en produisant des poèmes qui n’ont pas un sens clair et défini.
Il va donc chercher un poème écrit par lui-même dans sa jeunesse, en 1914, qui a pour titre Camaïeu, et il
en prend un quatrain :
Du vase en cristal de Bohème,
Aux bulles qu’enfant tu soufflais
C’est là, c’est là tout le poème
Aube éphémère de reflets.
C’était un poème symboliste, avec une structure très régulière et des rimes de type ABAB ; pour montrer sa
volonté de détruire la poésie traditionnelle, dont ce poème faisait encore partie, il décompose son propre
poème. Dans « Pièce fausse » il utilise les deux principes de la répétition et de la redondance avec un effet
très ironique. Cela fait penser pour certains aux bégayements des enfants, ou encore à des échos. Mais cela
ne veut pas dire que Breton ne peut rien communiquer : il utilise ces deux principes pour construire une
image visuelle, et une autre verbale. Ceci faisant il tourne en dérision ses premiers efforts poétiques et
prend comme point de départ pour la poésie les nouvelles suggestions de Guillaume Apollinaire.
Que dire de la signification des phrases ? On pourrait, peut-être, paraphraser comme cela : « Le poème,
donc la poésie en général, est un chose belle mais fragile – comme un vase en cristal – et éphémère,
comme les bulles de savon des enfants. Le dernier vers souligne l’évanescence de la poésie, semblable à
une aube avec des reflets ». Cette conception de la poésie est typique du symbolisme, qui essaie de
représenter non pas la réalité, mais les impressions suscitées par la réalité. C’est justement ce type
d’esthétique symboliste que Breton tourne maintenant en dérision ! Il veut rompre avec son passé et plus
en général avec le symbolisme (qui pour lui est démodé, vieux). Qu’est-ce donc la « fausse pièce » ? Le mot
fait penser à l’argent ; mais c’est une métaphore pour dire que ni son vieux poème Camaïeu, ni le
mouvement symboliste ont de valeur : ce sont deux pièces fausses !

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