Forum africain sur la prévention et la gestion des conflits sociaux

Transcription

Forum africain sur la prévention et la gestion des conflits sociaux
République du Cameroun
Paix – Travail – Patrie
Ministère de la fonction publique
et de la reforme administrative
Centre Africain de Formation et de
Recherche Administratives pour le
Développement
Republic of Cameroon
Peace – Work – Fatherland
Ministry of Public Service and
Administrative Reform
‫اﻟﻤﺮآﺰ اﻹﻓﺮﻳﻘﻲ ﻟﻠﺘﺪرﻳﺐ‬
‫و اﻟﺒﺤﺚ اﻹداري ﻟﻺﻧﻤﺎء‬
African Training and Research
Centre in Administration for
Development
Forum africain sur la prévention et la gestion
des conflits sociaux dans l’administration
publique
Analyse de la situation, Causes structurelles et
déclencheurs des conflits sociaux dans la fonction
publique camerounaise
par
Emmanuel BONDE,
Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme
Administrative du Cameroun
22 – 24 Septembre 2008
Yaoundé (Cameroun)
Forum africain sur la prévention et la gestion des conflits sociaux dans l’administration publique
PLAN DE L’EXPOSE
INTRODUCTION
- L’environnement actuel de la fonction publique
- Définitions
•
La notion de fonction publique
•
La notion de conflits sociaux
- Annonce du plan
I.
ANALYSE DE LA SITUATION DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA FONCTION
PUBLIQUE CAMEROUNAISE
- L’existence des conflits sociaux dans la fonction publique
camerounaise
- La réalité et la portée des conflits sociaux dans la fonction publique
camerounaise
- Exemples de conflits sociaux récents :
• conflits individuels
• conflits collectifs.
II.
LES CAUSES STRUCTURELLES DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA FONCTION
PUBLIQUE CAMEROUNAISE
A- L’HERITAGE SOCIO HISTORIQUE
1.
L’héritage de la colonisation
•
La fonction publique camerounaise pendant la période coloniale
•
La fonction publique pendant la période post coloniale
2.
La construction de l’idéal national
3.
Les sources de conflits s'appuient de plus en plus sur des valeurs
symboliques
B- LE CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL
1. Le statut juridique
a) La diversité des règles applicables
•
Aux fonctionnaires
•
Aux non-fonctionnaires
b) L’évolution de carrière et l’état des dysfonctionnements
a.
•
•
•
•
•
b.
2. Les organes de gestion
Organes décisionnels de la fonction publique
Le Président de la République
Le Premier Ministre
Les ministres utilisateurs
Le Ministre de la Fonction Publique
Organes décisionnels déconcentrés de la Fonction Publique
Les Organes consultatifs de la fonction publique camerounaise
1
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•
•
Organes classiques
¾ Les Organes de gestion
¾ Les Instances disciplinaires
Organes auxiliaires de la fonction publique
¾ Les syndicats
¾ Les ordres professionnels
C. LES PRINCIPES DE GESTION
1. Quelques principes cardinaux de gestion
- le principe de la subordination hiérarchique
- le principe d’égalité
- le principe de la neutralité de l’administration
- le principe de promotion des agents publics
- du principe de la continuité du service public
- du principe de la participation des agents publics
2. La résolution des problèmes de gestion
- Risques potentiels de déséquilibres
- Le rôle du chef ou du responsable du service
D. LES CONDITIONS DE TRAVAIL
1. Quelques droits des agents publics
2. les sources de frustrations et d’antagonismes au niveau des
conditions de travail des agents publics :
• un système de rémunération peu motivant qui expose les
agents publics à toutes sortes de déviances.
• un cadre de travail qui ne garantit pas toujours des conditions
d’hygiène et de sécurité optimales
• une couverture des risques professionnels insuffisante ;
• un régime de protection sociale plus ou moins hétéroclite qui
présente quelques disparités.
III.
LES DECLENCHEURS ET LES MANIFESTATIONS DES CONFLITS SOCIAUX
DANS LA FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
A.LES DECLENCHEURS DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA FONCTION
PUBLIQUE CAMEROUNAISE
1. Les déclencheurs subjectifs
- certains facteurs psychosociologiques
- l’ignorance des textes juridiques
- le climat au sein et en dehors de l’Administration
2. Les déclencheurs conjoncturels
- les réformes structurelles
- la récupération politique des revendications sociales
- le changement peut être la source de conflits
2
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B.
LES MANIFESTATIONS DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA
FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
1. les conflits du travail ont changé de nature
2. les conflits du travail mobilisent désormais moins les acteurs
sociaux
3. les conflits de travail peuvent être :
- réel ou imaginé ou perçu comme tel ;
- manifeste (ouvert) ou dissimulé (latent).
- Quelques exemples de manifestations de conflits ouverts et
latents.
CONCLUSION
- Perspectives d’évolution de la prévention des conflits sociaux dans la
fonction publique
- facteurs permettant de réduire la portée d’un conflit social
- facteurs de nature à aggraver un conflit social
- importance des aptitudes managériales dans la prévention des
conflits sociaux
•
Mesdames et Messieurs les Ministres,
•
Mesdames et Messieurs les représentants du Corps diplomatique et des
organisations internationales,
•
Monsieur le Directeur Général du CAFRAD,
•
Mesdames et Messieurs les représentants des pays Membres du CAFRAD,
•
Chers Séminaristes,
Dans un contexte marqué par une plus grande perméabilité du marché du
travail du fait de la mondialisation, la globalisation croissante des échanges et
des valeurs, la démocratisation de la vie sociale, l’influence du secteur privé,
l’instauration des systèmes participatifs et l’adoption des technologies de
l’information et de la communication, souvent associées à de nouvelles
méthodes
d’organisation
et
management,
le
fonctionnement
des
administrations connaît des mutations profondes.
Cependant, en dépit du foisonnement des voix qui réclament au niveau
international, la réduction des prérogatives de puissance publique dans la
conduite des actions de développement, l'Etat demeure, surtout dans les
jeunes nations comme les nôtres, un acteur majeur.
En effet, il continue de jouer, à travers son instrument essentiel qu'est
l'Administration, son rôle d'orientation, de protection, de promotion et
3
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d'impulsion du développement. De ce fait, l'Administration Publique en
général et la Fonction Publique en particulier occupent encore une place
importante dans la vie de nos pays. Ne serait-ce que parce qu’il est le plus
gros employeur avec dans le cas du Cameroun, quelques 120 000 agents
publics.
Cette importance lui vaut une attention particulière et commande que l'on
adapte ses règles de fonctionnement au contexte très changeant du
développement.
Comme vous le savez, l’administration publique, bras séculier de l’Etat, est au
cœur de notre organisation sociale. Il en résulte que lorsque pour une raison
quelconque, l’administration est paralysée ou en proie à des soubresauts, c’est
toute la société qui en pâtit : ce sont les fondements même de l’Etat qui sont
menacés. Dans ce contexte, la gestion des conflits sociaux dans la Fonction
Publique n’est pas sans rapport avec la préservation de la paix sociale et la
stabilité dans nos Etats.
Pour nous arrimer à tous ces changements, le gouvernement camerounais a
entrepris depuis quelques années un ensemble de réformes administratives
visant à aménager des marges de manœuvre aux agents publics pour leur
permettre de participer à l’organisation de la vie professionnelle.
L'une de ces réformes porte sur la révision du Statut Général de la Fonction
Publique de l’Etat et a entre autres pour objectif, la transformation progressive
des relations professionnelles. Fondées à l’origine sur une conception
autoritaire des relations humaines, ces relations font de plus en plus une place
à la consultation et à la participation du fonctionnaire à la vie de
l’administration camerounaise.
Malgré toutes ces avancées, le cadre juridique et institutionnel de la Fonction
Publique au Cameroun ne semble pas, dans son état actuel, avoir trouvé des
réponses satisfaisantes à un certain nombre de demandes sociales des
fonctionnaires, qui peuvent à la longue être à l’origine d’affrontements entre
groupes sociaux.
Par ailleurs, à la faveur de divers facteurs, parfois exacerbés par un contexte
économique défavorable, nous assistons à une manifestation des intérêts
divergents qui minent les relations de travail dans les services publics.
DEFINITIONS
•
La notion de fonction publique
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Au Cameroun, la notion de fonction publique recouvre les organes de gestion
et l’ensemble des personnels de l’Etat. Egalement appelés agents publics,
ces derniers (fonctionnaires, contractuels de l’Administration, décisionnaires)
ont un lien juridique avec l’Etat. L’on y adjoint selon la jurisprudence mais sous
un régime particulier, les collaborateurs (auxiliaires) qui sont des personnes
spécifiques participant d’une manière permanente ou occasionnelle à
l’accomplissement des multiples tâches qui incombent
à l’administration
publique.
•
La notion de conflits sociaux
En termes simples, le conflit est défini comme étant la perception d’un
affrontement d’intérêts menant à un comportement compétitif ou à une
opposition. Il peut s’agir aussi d’une opposition entre plusieurs groupes sociaux
antagonistes, l'objet de tout conflit étant de modifier le rapport de forces
existant entre les parties.
Le conflit se manifeste dans une relation lorsque :
•
les aspirations des parties opposées ne peuvent pas ou sont
perçues comme ne pouvant pas être réalisées simultanément ;
•
Les valeurs, les besoins et/ ou les intérêts des parties concernées
divergent ou sont perçus comme étant divergents.
Les conflits sont "normaux" au sens sociologique du terme, c'est à dire que
toute vie en société débouche inévitablement sur des conflits. De plus, à
l'intérieur des groupes en conflit, ce dernier renforce leur identité commune. Le
conflit a de ce point de vue un aspect intégrateur.
Le présent exposé qui s’articule autour de trois (3) grands axes, tend à
présenter l’expérience camerounaise en matière de conflits sociaux dans la
fonction publique à travers l’analyse de la situation (I) les causes structurelles
(II) puis les déclencheurs (III) desdits conflits.
I. ANALYSE DE LA SITUATION DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA
FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
Depuis 1990, la fonction publique camerounaise est de plus en plus en proie à
des conflits sociaux, tirant leur force d’une syndicalisation qui s’enracine et
s’affermit de mieux en mieux.
Au départ, liés aux revenus et aux conditions de travail, les conflits sociaux
concernaient des personnes ayant déjà un emploi et voulant l'améliorer.
Aujourd'hui, les nouvelles formes de conflits sont orientées vers la création
et la conservation des emplois. Ceux-ci ne concernent plus uniquement des
salariés dans la crainte de perdre leur statut social. Ils concernent aussi des
personnes en situation précaire, qui aspirent à un emploi permanent et sûr.
5
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A titre illustratif, nous pouvons énumérer parmi les nombreux conflits sociaux
auxquels les services publics ont eu à faire face ces douze derniers mois:
comme conflits individuels, le cas de deux enseignants de l’Université de
Douala (MONKARE Abdoulaye et Jean GATSI1), le cas de certains
fonctionnaires dont l’évolution de la carrière administrative est bloquée ou
retardée, soit en raison des lenteurs administratives, soit en raison d’une
interprétation subjective des textes2 ;
comme conflits collectifs, le cas des Instituteurs vacataires (IVAC), le cas
des Instituteurs vacataires de l’Enseignement Technique (IVET), celui des
Temporaires de la Cameroon Télécommunications (CAMTEL), celui des
personnels d’appui du Ministère de la Santé Publique, etc.
II. LES CAUSES STRUCTURELLES DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA
FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
Individuels ou collectifs, les conflits sociaux dans la fonction publique trouvent
leurs sources autant dans les textes de lois et règlements que dans
l’organisation, le fonctionnement et l’activité de l’administration, sans oublier
l’héritage socio historique.
A. L’HERITAGE SOCIO HISTORIQUE
Les principes d’organisation et de gestion de la fonction publique camerounaise
tirent leur source aussi bien des us et coutumes que de l’héritage des
influences successives allemande, française et anglaise.
1.
L’héritage de la colonisation
L’Administration et la Fonction publique ont été introduites au Cameroun par
les puissances impériales, d’abord l’Allemagne puis la France et l’Angleterre.
•
La fonction publique camerounaise pendant la période
coloniale
Pendant le protectorat allemand (1884-1916), le système de la fonction
publique au Cameroun est celui d’une fonction publique de métier
embryonnaire. D’aucuns parleraient de fonction publique non spécifique ou
ouverte. Soucieux de rentabilité par rapport aux objectifs fixés, les Allemands
géraient le peu de personnel dont ils disposaient sans particularisme, selon des
règles similaires à celles en vigueur au sein des firmes étrangères installées
1
Les intéressés ont entamé une grève de la faim après un sit in à l’entrée de leur Université en protestation l’un de l’absence
d’avancement d’échelon depuis son recrutement (MONKARE) l’autre de la non prise en compte de son admission au concours
d’agrégation (GATSI). Le Recteur de ladite Université s’est refusé à toute négociation avec les concernés.En définitive, après une
confrontation par média interposés, une décision du Ministre de l’Enseignement Supérieur est venue mettre un terme à ce conflit en
prescrivant le rétablissement des intéressés dans leurs droits.
2
Exemple d’un agent qui bien qu’autorisé à effectuer une formation à l’Etranger n’a pu être régulièrement integré dans le corps de
la Documentation que dix huit ans après moults requêtes et sit in, en raison d’un mauvaise interprétation des dispositions du décret
N°86/752 du 6 juin 1986 régissant les fonctionnaires de ce corps.
6
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sur le territoire camerounais. Les ramasseurs, porteurs, interprètes, guides et
secrétaires n’ayant pas de grandes qualifications à présenter, seule était prise
en compte leur aptitude à accomplir les tâches envisagées. Leur gestion,
fortement décentralisée parce que locale, ne nécessitait pas une armature
juridique spéciale : ni statut, ni carrière.
Pendant le mandat puis la tutelle franco-britanique, le système de la
fonction publique bénéficiera d’une certaine structuration3 même si l’on a
observé quelques différences entre le système en vigueur dans la zone
francophone (fonction publique de service, fonction publique spécifique ou
fonction publique fermée gérée depuis la France) et celui en vigueur dans la
zone anglophone (fonction publique de métier, non spécifique, ou ouverte avec
comme pôle de référence le Nigéria).
•
La fonction publique pendant la période post coloniale
Représentant la puissance impériale et non le Cameroun, la fonction
publique durant la période précédant l’indépendance et parfois longtemps
après, éprouvait de nombreuses difficultés pour s’intégrer dans la culture et la
société locales. L’identification fonction publique-société était en effet entravée
par l’image de répression que véhiculait l’Administration et la fonction
publique.
Après l’indépendance, les statuts de 1960 et de 1961 ont consacré un
système de fonction publique de service. En raison de la persistance de deux
fonctions publiques mais aussi et surtout, de deux cultures administratives,
une première tentative d’harmonisation sera esquissée à la réunification puis
consolidé par le statut de 1974.
En 1994, l’introduction de la notion de poste de travail au sein de ce
système n’en modifiera pas fondamentalement la nature.
2. La construction de l’idéal national
L’Administration coloniale au Cameroun a été marquée par une gestion directe,
empreinte de déconcentration et d’interventionnisme économique.
Le Cameroun a hérité de son passé colonial deux systèmes d’administration
respectivement d’inspiration anglophone et d’origine francophone. Cette double
culture va avoir des impacts sur l’organisation et la structuration actuelle de
notre fonction publique, mais aussi nourrir quelques antagonismes. D’où la
recherche constante de l’unité nationale, dans son pendant administratif.
L’avènement de l’Etat du Cameroun et le maintien de la cohésion impliquent la
mise en commun de réalités sociales différentes. Il est en effet établi que les
chefferies traditionnelles (là où elles sont organisées) et les coutumes locales
préexistantes influencent le comportement psychosociologique des agents de
1. Dès 1921, deux (2) actes du Commissaire de la République française au Cameroun
organisaient les cadres locaux européens et indigènes au Cameroun.
7
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la fonction publique. La prise en compte de cette donnée est une exigence
dans le fonctionnement de l’Administration et de la fonction publique.
3. Les sources de conflits s'appuient de plus en plus sur des valeurs
symboliques
Cette évolution se fait au détriment des conflits portant sur des allocations
matérielles. Le pouvoir et le prestige sont ainsi devenus une source importante
de conflits dans le monde du travail : par exemple, un ministère qui souhaitait
faire porter des badges à son personnel (cadres y compris) et faire remplir
les fiches de présence ses cadres, c'est-à -dire les munir d'une carte
magnétique qui enregistre leurs heures d'entrée et de sortie dans les services,
s'est heurté à un refus catégorique pour des raisons symboliques : les cadres
dépassaient largement les horaires légaux de travail, donc ils ne craignaient
pas qu'on leur reproche de ne pas travailler assez, mais ils ne voulaient pas
être "rabaissés" au niveau des autres agents en étant obligés d’émarger
comme tout le monde. Cela ne signifie cependant pas que les conflits portant
sur les conditions matérielles (rémunérations en particulier) aient disparu.
B. LE CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL
1-
Le statut juridique
a) La diversité des règles applicables
•
Aux fonctionnaires
En
dehors des textes législatifs et réglementaires spécifiques, les
fonctionnaires sont régis par des statuts. On distingue en effet le Statut
Général de la Fonction Publique de l’Etat (SGFPE) et les différents statuts
particuliers.
Le statut général tend à régir la situation juridique de la majorité des agents
publics, soit directement pour les fonctionnaires titularisés, soit indirectement,
par analogie, pour les personnels recrutés et gérés par l’Assemblée Nationale,
les auxiliaires de l’Administration, les Magistrats, les militaires, les
fonctionnaires de la Sûreté Nationale et ceux de l’administration pénitentiaire.
Son application rationne personae concerne les institutions de la fonction
publique, les règles de recrutement et de gestion des personnels concernées,
ainsi que leurs droits et obligations.
Les statuts spéciaux sont des textes d’application du statut général qui
aménagent un régime dérogatoire propre à certains corps investis de missions
spéciales et exclus formellement de son champ d’application. Sont ainsi dotés
d’un statut spécial, les personnels de l’Enseignement Supérieur, de la Sûreté
Nationale, de l’Administration pénitentiaire, de la Magistrature et de
l’Assemblée Nationale.
8
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Les statuts particuliers sont des textes d’application du statut général dont ils
respectent les dispositions et en permettent l’adaptation aux différents corps
de fonctionnaires. Sous peine d’illégalité, les statuts particuliers doivent être
conformes au statut général. Seules quelques dérogations mineures sont
tolérées notamment lorsqu’elles sont rendues nécessaires par la spécificité de
certaines fonctions remplies par le corps de fonctionnaires que le statut
particulier est censé régir. Au 1er janvier 2008, il existait 25 statuts particuliers
en vigueur.
•
Aux non-fonctionnaires
Par ailleurs, au sein de la Fonction publique de l’Etat, certains agents,
notamment les agents contractuels, sont régis par des dispositions du Code du
Travail qui, lui, est de nature législative. Il y a là, deux régimes juridiques au
sein d’une même organisation et pour des personnels appelés à occuper des
fonctions similaires. Le régime de ces agents est plus diversifié et hétérogène
que celui régissant les fonctionnaires.
A l’origine, les contractuels indiciaires n’existaient pas dans le droit
camerounais de la fonction publique. Actuellement, les contractuels indiciaires
ont été fondus parmi les agents de l’Etat relevant du Code du Travail (agents
décisionnaires de la 1ère à la 6ème catégories ; contractuels de la 7ème à la
12ème catégories).Ces agents sont certes régis par le décret n°78/484 du 9
novembre 19784 fixant les dispositions communes applicables aux agents de
l’Etat relevant du Code du Travail, modifié par le décret n°82/100 du 3 mars
1982,mais également, par la législation du travail (Code du Travail et textes
d’application y afférents) dans les aspects non régis par des textes particuliers.
A ce régime de droit commun, il convient de distinguer le cas des domestiques
et employés de maison, régis par le décret n°68/DF/253 du 10 Juillet 1968 et
celui des chercheurs régis par le décret n° 80/275 du 18 juillet 1980 portant
statut des chercheurs.
b) L’évolution de carrière et l’état des dysfonctionnements
L’absence de perspectives et de profil de carrière est généralement décriée à
l’exception de quelques corps (Police, Magistrature, Armée…). L’Etat se doit de
présenter des débouchés intéressants à ses meilleurs agents dont la carrière
évolue poste par poste, en gravissant les échelons alors que, le personnel se
plaint généralement de ne pas ressentir que la fonction publique peut lui
fournir une évolution vers plus de responsabilités ou de nouveaux horizons.
Sous le prisme de la gestion managériale, il s’agit de répertorier toutes les
occasions où l’organisation sociale de la fonction publique a pu être défaillante
par le passé. À cette fin, il convient au Ministre compétent d’instaurer un
dialogue avec son personnel, permettant de recenser leurs réflexions et
d’établir un diagnostic, puis un plan d’actions, en vue de remédier aux lacunes.
2. Ce texte a remplacé le décret n°72 /DF/110 du 28 février 1972 fixant les dispositions communes applicables aux
agents de l’Etat relevant du Code du travail, modifié par le décret n°74/952 du 23 novembre 1974.
9
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2. Les organes de gestion
Parmi les institutions de gestion de la Fonction Publique Camerounaise, on
distingue celles qui sont détentrices d’un pouvoir de décision au niveau
central ou local, de celles qui participent, par leurs avis, aux propositions ou à
la prise de décisions en matière de fonction publique.
a. Organes décisionnels de la fonction publique
Le pouvoir de décision en matière de Fonction Publique n’est pas sans
similitude avec le
pouvoir de
décision en matière administrative.
La
différence majeure étant qu’il n’existe pas en matière de Fonction Publique
un pouvoir de décision décentralisé. La reconnaissance de ce pouvoir
décentralisé donne naissance à des Fonctions publiques
spécialisées ou
spécifiques, à l’instar de celle de l’Assemblée Nationale ou celle en gestation
des communes et régions. Le pouvoir de décision au sein de la Fonction
Publique se répartit ainsi entre les organes centraux et les organes
déconcentrés.
•
Le Président de la République :
Il détient, à l’échelon suprême, le pouvoir de décision en ce qui concerne la
gestion de la Fonction Publique camerounaise. D’une manière spécifique l’art.
8 de la Constitution précise qu’en plus du pouvoir réglementaire qu’il exerce, le
Président de la République crée et organise les services publics de l’Etat et
nomme aux emplois civils et militaires de l’Etat. C’est ainsi qu’il détermine par
décret le statut général de la Fonction Publique, les statuts spéciaux et
les statuts particuliers des corps des fonctionnaires de l’Etat.
Quant à lui,
le Secrétaire Général de la Présidence de la République
notamment en vertu de la grande délégation permanente de signatures dont il
dispose, intervient dans la gestion de certains grands corps de l’Etat, à
l’instar du corps des fonctionnaires de police.
•
Le Premier Ministre :
Il détient également d’importantes prérogatives en matière de gestion des
personnels de la fonction publique. D’une part, l’article 12 de la Constitution
reconnaît qu’il exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils
.De même, il dirige tous les services administratifs nécessaires à
l’accomplissement de sa mission. D’autre part, il prend des textes d’application
du statut général de la Fonction publique ainsi que des actes individuels de
gestion de certains agents (fonctionnaire
de catégorie
A, contractuels
d’administration à partir de la 8e catégorie).
Le Secrétaire Général des Services du Premier Ministre dispose aussi d’une
délégation de signature en ce qui concerne certains actes de gestion de la
Fonction Publique.
•
Les ministres utilisateurs
Les compétences des autorités ministérielles en matière de fonction publique
sont assez complexes.
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Il y a, d’un côté, les compétences qui reviennent à tous les ministres en
tant que chefs hiérarchiques des personnels sous leur autorité. C’est ainsi
que tous les ministres disposent d’un pouvoir disciplinaire, d’un pouvoir de
notation,
d’un pouvoir de mutation et à un certain degré d’un pouvoir de
nomination sur les personnels relevant du ministère (certains personnels
tels que le contrôleur financier ou l’agent comptable échappent cependant
généralement au pouvoir
de leur ministre d’affectation car
ils sont
directement rattachés au ministère des finances).
De l’autre côté, il ya des compétences qui reviennent à certains ministres à
l’instar du Ministre chargé du travail et surtout celui chargé de la fonction
publique.
• Le Ministre de la Fonction Publique
Le Ministre chargé de la fonction publique joue ainsi un rôle prépondérant
dans la gestion de la fonction publique camerounaise. Certaines attributions
lui sont dévolues de manière quasi exclusive. C’est par exemple lui qui assure
la défense du contentieux de la fonction publique devant les juridictions, fixe
les modalités de notation des fonctionnaires, arrête le tableau d’avancement,
organise les concours donnant droit à un emploi dans la fonction publique,
initie certaines sanctions ou récompenses, constate la mise en stage des
fonctionnaires.
• Organes décisionnels déconcentrés de la Fonction Publique
Ils sont représentés d’une part, par la chaîne les autorités administratives
relevant de l’administration territoriale5 qui ont une compétence générale sur
l’ensemble des personnels des administrations civiles en service dans leurs
circonscriptions administratives à l’égard desquels elles disposent d’un certain
pouvoir disciplinaire, d’un pouvoir de notation et de mutation et même d’un
pouvoir de recrutement en ce qui concerne les agents décisionnaires. D’autre
part, par la chaîne les responsables des services déconcentrés des ministères
techniques qui ont une compétence spécialisée, limitée au personnel de leur
administration à l’égard duquel ils disposent d’un certain pouvoir disciplinaire
et d’un pouvoir de notation en 1er ressort.
b. Les Organes
camerounaise
consultatifs
de
la
fonction
publique
Dans la catégorie des organes consultatifs de la fonction publique, il convient
de distinguer les organes classiques des organes auxiliaires.
• Organes classiques
Parmi les organes classiques ayant une compétence consultative en matière
de fonction publique, on peut distinguer les organes de gestion des
instances disciplinaires.
5
Conformément au décret n° 78/485 du 09 novembre 1978 fixant les attributions des chefs de circonscriptions
administratives et des organismes et personnels chargés de les assister dans l’exercice de leurs fonctions, ces
autorités administratives représentent aussi bien le Chef de l’Etat que l’ensemble du Gouvernement dans leur
circonscriptions administratives de commandement.
11
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Les Organes de gestion sont : le Conseil Supérieur de la Fonction
Publique, les Commissions Administratives Paritaires et les Conseils de
Santé.
Les Instances disciplinaires sont : le Conseil de Discipline Budgétaire et
Comptable et le Conseil Permanent de Discipline de la Fonction Publique.
Alors que le premier a une compétence en matière budgétaire et comptable,
donc une compétence financière, le second est le gardien de
l’éthique
professionnelle et administrative dans la fonction publique.
• Organes auxiliaires de la fonction publique
Ils sont constitués par un ensemble d’organismes qui contribuent par leur
action à la gestion de la fonction publique. Il s’agit principalement des
syndicats et des ordres professionnels.
Les syndicats sont chargés de la défense des intérêts des différents corps et
professions de la fonction publique. Leur activité ne s’insère que dans le cadre
de l’exercice de la liberté syndicale dès lors que, depuis la loi du 22 juillet
1958 fixant le statut général des fonctionnaires du Cameroun, aucun régime
juridique n’est venu adapter le cadre juridique de l’exercice de la liberté
syndicale au sein de la fonction publique. Ce qui fait que les syndicats
actuels s’appuient sur les dispositions générales de la loi n° 68/LF/19 du 18
novembre 1968 relative aux associations des syndicats professionnels non
régis par le code du travail.
Quant à eux, les ordres professionnels sont des organismes coopératifs dotés
de prérogatives de puissance publique bien qu’aménagés selon les règles de
droit privé. Les ordres professionnels sont autonomes dans leur
fonctionnement et exercent des compétences variées dans l’intérêt de leurs
adhérents pour la préservation de l’éthique
professionnelle ainsi que
l’organisation de la profession.
Généralement, l’adhésion aux ordres professionnels est obligatoire, alors que
l’adhésion aux syndicats est facultative.
C. LES PRINCIPES DE GESTION
1. Quelques principes cardinaux de gestion
Le fonctionnement de l’Administration Publique Camerounaise repose sur un
certain nombre de principes hérités du Droit Administratif Français, parmi
lesquels l’on peut citer :
- le principe de la subordination hiérarchique, qui puise sa source
dans la structure pyramidale de l’administration et en vertu duquel les
échelons administratifs inférieurs doivent se conformer aux instructions
individuelles ou générales des échelons supérieurs qui, cependant ne
peuvent évoquer la défaillance de leurs subalternes pour dégager leur
responsabilité ;
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le principe d’égalité, consacré dans différents instruments juridiques
internationaux et dans la Constitution camerounaise. Appliqué à
l’administration, ce principe recouvre à la fois l’égalité d’accès aux
emplois publics, l’égalité de traitement des agents publics, et enfin
l’égalité d’accès au service public.
A ces deux principes s’ajoutent d’autres qui leur sont complémentaires, à
l’instar :
-
du principe de la neutralité de l’administration qui découle de
sa vocation essentielle à rechercher et à préserver l’intérêt général ;
du principe de
promotion des agents publics dans leur
carrière ; le droit à la carrière étant lié au fait que, par sa titularisation dans un
grade, le fonctionnaire restera tout au long de sa vie professionnelle au service
de l’Etat. Ainsi, « il est de règle que toute nomination dans un cadre doit avoir
lieu au grade du début de ce cadre en qualité de stagiaire »6.
Du grade dépendront le traitement, l’avancement et plus généralement
tous les avantages de carrière auxquels le fonctionnaire peut prétendre. Une
autre conséquence de la titularisation est le rattachement à un corps dans
lequel s’inscrit le grade.
Le droit pour le fonctionnaire titulaire d’un grade de se voir conférer un
emploi correspondant à sa qualification professionnelle est assoupli en
jurisprudence. En vertu de la distinction entre le grade et l’emploi, l’autorité
administrative peut, si l’intérêt du service l’exige, confier à un agent des
fonctions qui seraient ordinairement assurées par un agent d’un grade
supérieur7 ou d’un grade inférieur8.Il s’agit là d’une source potentielle de
conflit, surtout lorsque le supérieur hiérarchique est moins gradé. Le principe
de la subordination hiérarchique est ainsi mis à rude épreuve.
du principe de la continuité du service public ;
du principe de la participation des agents publics9 à la prise
des décisions qui les concernent, par le biais notamment des Commissions
administratives paritaires, du Conseil Supérieur de la Fonction Publique, des
Commissions d’avancement catégoriel, les délégués du personnels, etc.
Cependant, l’on relever que, pour des raisons diverses, ces organes n’ont pas
toujours atteint les objectifs qui leur ont été assignés. Par ailleurs, le
Gouvernement conserve le droit de reformer, par voie réglementaire, les corps
et donc de modifier les grades sans être tenu de maintenir les distinctions et la
hiérarchie qui pouvaient exister antérieurement ou de consulter les organes de
représentation lorsque les circonstances le commandent.
2. La résolution des problèmes de gestion
6
7
Tribunal d’Etat, 12 AVRIL 1963 SYNDICAT NATIONAL DES ADMINISTRATEURS CIVILS.
Conseil d’Etat, 10 JANVIER 1958 PORTES.
Cour Fédérale de Justice, 31 MARS 1971 BABA YOUSSOUFA
9
La reconnaissance formelle du droit à la participation consacré par l’article 34 du Statut Général de la Fonction Publique de l’Etat
qui dispose : « Les fonctionnaires participent par l’intermédiaire de leurs représentants élus et siégeant dans les organes
consultatifs, à l’élaboration des règles statutaires relatives à leur carrière ou au fonctionnement des services publics ».
8
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Moins les salariés sont nombreux, et plus ils sont polyvalents. Mais cette
polyvalence ne doit pas conduire à établir des déséquilibres, qui seraient
qualifiés d’inégalités, entre les salariés. Trop souvent, les meilleurs éléments
cumulent diverses fonctions ou missions, parfois jusqu’à saturation.
Le chef doit donc veiller à rétablir un équilibre, soit en redistribuant le
travail (nouvelle procédure, embauche, etc.), soit en établissant des
différences de rémunération fondées sur ces gains de productivité.
D. LES CONDITIONS DE TRAVAIL
1. Quelques droits des agents publics
Au Cameroun, l’agent public bénéficie d’un certain nombre de droits pendant
sa période d’activité (le droit à la rémunération après service fait ; le droit à la
protection dans l’exercice de ses fonctions ; le droit à la santé ; le bénéficie
des prestations familiales ;…) et même après (le droit à la pension après 15
ans de service ininterrompus, pension de réversion pour veuve et orphelin,
cercueil et frais funéraires, etc.). L’exercice effectif de ces droits n’est pas
toujours évident en raison soit de l’ignorance des agents, soit du caractère
prohibitif des procédures, soit des contraintes budgétaires.
2. Les autres sources de frustrations et d’antagonismes au niveau des
conditions de travail des agents publics
Les principaux problèmes rencontrés en la matière portent sur :
-
un système de rémunération peu motivant qui expose les agents
publics à toutes sortes de déviances. De fait, la rémunération est au
centre des problématiques de management dans la fonction publique.
Le système de primes sur objectif parfois utilisé pourrait motiver les
meilleurs agents publics. Encore faut-il qu’une procédure stricte encadre
l’attribution de ces primes. Le hasard ne doit pas intervenir, sous peine
d’être taxé de favoritisme ou de discrimination. Chaque salarié doit être
informé en détail des critères à remplir pour bénéficier de ce supplément
de rémunération. Cette lacune donne lieu à de nombreux conflits qui,
dans certains cas peuvent paralyser le fonctionnement du service.
-
un cadre de travail qui ne garantit pas toujours des conditions
d’hygiène et de sécurité optimales en raison notamment de
l’existence de ce que certains croient percevoir comme étant un climat
de harcèlement moral, le non respect des règles d’hygiène et de sécurité,
la qualité approximative des locaux de travail et du niveau d’entretien
des sanitaires, la gestion irrationnelle du temps de travail,....
-
une couverture des risques professionnels insuffisante ;
un régime de protection sociale plus ou moins hétéroclite qui
présente quelques disparités, source potentielle d’inégalités et de
frustrations.
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III. LES DECLENCHEURS ET LES MANIFESTATIONS DES CONFLITS
SOCIAUX DANS LA FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
Lorsque le conflit se manifeste (affrontement ouvert), il ne peut être éradiqué
par l’évitement. Par contre, il peut être géré par le dialogue et la négociation,
la médiation ou la conciliation…
A.LES DECLENCHEURS DES CONFLITS
FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
SOCIAUX
DANS
LA
1. Les déclencheurs subjectifs
A l’observation, il demeure constant que les conflits sociaux sont généralement
déclenchés par certains facteurs psychosociologiques tel que : le sentiment
d’iniquité et les frustrations, les inégalités de traitement, la précarisation des
emplois, des attentes démesurées, la crainte du changement/du risque, le non
respect du profil de carrière, les préjugés, le manque de temps, les
antécédents liés à un conflit non résolu dans le passé, le manque de
consultation ou d’information.
Quelques fois, l’ignorance des textes juridiques, la méfiance et le manque de
respect mutuels, l’usage des stratégies ou des tactiques opposées, les divisions
au sein de l’Administration, ou le simple manque de considération pour les
besoins d’autrui, sont des éléments déclencheurs.
Par ailleurs, la situation ambiante de chômage pèse sur la conflictualité car elle
réduit les grèves et en modifie les objectifs.
Il y a également une méfiance vis-à-vis des syndicats car on ne sait pas s'ils
travaillent pour eux-mêmes, ou pour les salariés. L’influence syndicale est
ainsi réduite sauf dans certains secteurs dits sociaux à l’instar de l’Education
ou de la Santé où la mobilisation des syndicats est régulière.
2. Les déclencheurs conjoncturels
a. Les effets de la conjoncture économique
Il s’agit principalement des effets induits de la situation économique qu’a
connue le Cameroun depuis la fin des années 80. Cette situation a entraîné
des réformes structurelles profondes et l’édiction des mesures drastiques dont
les conséquences sociales ont été pernicieuses. Il s’agit notamment du gel des
concours professionnels, du gel des effets financiers des actes de promotion,
de la réduction du train de vie de l’Etat, etc qui ont généré de nombreux
conflits latents avec le retour de l’embellie.
b.
La récupération politique des revendications sociales
La manipulation politique n’est pas souvent étrangère à l’explosion des
conflits sociaux dans la fonction publique. Ainsi, certains leaders politiques
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n’hésitent pas à susciter et à porter les revendications sociales. De même, ils
n’hésitent pas à récupérer les résultats des mesures d’apaisement ou de
résolution.
c. Le changement peut être la source de conflits
Des conflits naissent parfois pour s'opposer au changement social. Celui-ci
peut être issu de réformes structurelles, de l’avènement d’un nouveau style
managérial ou d’une nouvelle autorité à la tête de l’organisation.
B.LES MANIFESTATIONS DES CONFLITS SOCIAUX DANS LA
FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
Lorsque l'on observe les conflits du travail, on constate :
1. Qu’ils ont changé de nature : ils portent de plus en plus sur
l'organisation du travail et de moins en moins sur le rapport
salarial. Par exemple, un conflit actuel porte sur l’âge de départ à
la retraite, jugé inique par certains agents qui pour diverses
raisons souhaitent une harmonisation pour tous les corps de la
fonction publique.
2. Qu’ils mobilisent désormais moins les acteurs sociaux
comme en témoigne la difficulté à regrouper beaucoup de monde
lors des manifestations des Instituteurs vacataires ou les retraités
des entreprises publiques liquidées.
Le conflit peut être réel ou imaginé ou perçu comme tel ; manifeste (ouvert)
ou dissimulé (latent). Cependant, il est plus commode d’en présenter les
manifestations lors qu’il est réel.
Quelques exemples de manifestations de conflits :
•
Les conflits ouverts : ils se manifestent par le sabotage, le boycott des
corrections des examens par des enseignants, les grèves des personnels
médico-sanitaires, le blocus, l’arrêt de travail, les marches de protestation,
les Sit-in devant les Services du Premier Ministre des Instituteurs vacataires
ou des retraités des entreprises publiques liquidées, les intimidations,
menaces, agressions ou insultes, etc.
•
Les conflits latents : ils se caractérisent par la baisse de la ponctualité et de l’assiduité,
le moral bas, l’insubordination, un taux d’absentéisme élevé, le refus des heures
supplémentaires, le rendement décroissant, le ralentissement de la cadence de
travail, la faible productivité, la rétention des dossiers, les revendications intempestives,
les pétitions, les tracts, les graffitis, etc.
CONCLUSION
L’institutionnalisation des plans de carrière, le respect systématique des profils
de carrière et des cadres organiques, la gestion rationnelle des ressources
humaines et la responsabilisation des agents publics sont les principaux
chantiers sur lesquels la nouvelle fonction publique camerounaise devrait se
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consolider. Car, bien que disposant d’un régime juridique favorable et
moderne, l’agent public ne saurait donner une satisfaction optimale s’il ne
bénéficie d’un environnement qui développe ses capacités et l’incite à la
performance et à l’auto sanction. Ainsi, ne pourront véritablement émerger
que des agents qui ont su s’ajuster et donner à l’Administration le meilleur
rendement.
Il convient cependant de relever que certains facteurs peuvent permettre de
réduire la portée d’un conflit social. Notamment, un diagnostic précoce, un
travail d’analyse des problèmes, l’accord des parties sur le principe de
résoudre le conflit de bonne foi ou à l’amiable, la consécration des
organisations homogènes et unies, la fluidité et l’échange des informations, le
fonctionnement harmonieux du dispositif de négociation collective, le respect
des délais de notification, la considération accordée au traitement des requêtes
et doléances formulées par les agents.
Il reste cependant que d’autres facteurs sont de nature à aggraver un conflit
social. L’on peut énumérer, dans cet ordre d’idées, la recherche d’un gain
personnel, les divisions dans le groupe des responsables, les antécédents de
confrontation, le langage agressif, les menaces ou les intimidations, les
agendas et intérêts cachés, les revendications exigeantes, le refus des
concessions, les positions fermes ou figées, l’absence de dialogue ou de
négociateur, les discriminations de classe, de genre ou de niveau, l’impatience,
etc.
En l’absence d’un organe dédié à la gestion des conflits sociaux, de
mécanismes d’exorcisation ou de conciliation interne tel que le médiateur,
seules les aptitudes managériales des dirigeants permettent de prévenir et de
juguler les conflits sociaux potentiels dans la fonction publique camerounaise.
Je vous remercie de votre bienveillante attention.
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