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LES ALPAGES
Le pastoralisme en Savoie
Définition
L’unité pastorale est une portion de territoire toujours en herbe, exploitable par pâturage
extensif. Elle doit répondre aux critères suivants :
- utilisation saisonnière : le cheptel est présent de façon saisonnière pour des raisons d’altitude
ou de climat.
- pas de retour journalier possible : le cheptel ne peut pas retourner chaque soir au siège de
l’exploitation pour des raisons d’éloignement (1/2 heure de marche minimum du siège de
l’exploitation).
- unité géographique : elle recouvre une portion de territoire continue. Seules sont recensées
dans l’étude les unités de plus de 10 ha.
- unité de gestion : elle est dirigée sur toute sa superficie par un seul gestionnaire.
Le champ géographique de l’étude sur le pastoralisme est constitué par la zone de montagne,
élargie à la zone de piémont contiguë.
Les alpages savoyards occupent 157 000 hectares, soit près de la moitié du domaine pastoral
rhônalpin, ou le quart de la surface de la Savoie. Les alpages d’altitude, le plus souvent audessus de l’habitat permanent, sont au nombre de 745, répartis sur 916 unités pastorales. Ils
représentent la quasi-totalité des surfaces utilisées. Ils sont situés surtout en Maurienne et Tarentaise, mais sont aussi bien présents dans le Beaufortain et le Val d’Arly. Les unités de plus de
100 hectares, situées essentiellement en Maurienne et en Tarentaise, occupent 90% des surfaces pastorales.
Maurienne et Tarentaise concentrent chacune un peu moins de la moitié des surfaces du domaine pastoral savoyard, le Beaufortain et le Val d’Arly, près de 10%. Les unités situées dans
les Bauges ou en Chartreuse, plus petites, représentent à peine 4% des surfaces. La part en
herbe représente sept dixièmes des surfaces pastorales.
En Savoie, 171 parcours d’intersaison, présents surtout à l’est du département, jouent le rôle de
terre de transit pour les troupeaux. Ils sont nettement moins étendus que les unités d’altitude.
Le nombre d’unités d’altitude est en régression de 8% entre les recensements de 1983 et 1996.
Leur surface totale, comme leur surface en herbe, est en baisse de 20%. Cette baisse n’est
qu’apparente, puisqu’elle est due à une meilleure prise en compte en 1996 des contours réels
des unités En réalité, la baisse due à des abandons ou à des inutilisations est inférieure à 4%.
A l’instar de Rhône-Alpes, la Savoie est caractérisée par un domaine pastoral appartenant en
majorité aux communes, mais géré le plus souvent par des éleveurs. La location, souvent verbale, est le mode de faire-valoir qui prédomine.
Peu d’unités réellement abandonnées
Le domaine pastoral savoyard est occupé de façon optimale ; les parties non occupées (4,8 %
des surfaces) sont :
- des unités potentielles, qui nont jamais été utilisées,
- 21 unités pastorales, abandonnées depuis 1983,
- des unités - souvent assez vastes - inutilisées ponctuellement au moment de l’enquête (1996).
Les unités inutilisées temporairement en 1996 représentent la plus grande partie du domaine
pastoral inoccupé en 1996 à l’échelle de la Savoie, tandis que les abandons réels concernent à
peine 15% des surfaces inoccupées en Maurienne, et les deux tiers en Tarentaise.
Observatoire Savoyard de l’Environnement N° 6 déc. 1999
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Nombres et superficies des unités pastorales en Savoie
Bauges Beaufortain Chartreuse Combe Maurienne Tarentaise
Val d’Arly
de Savoie
Unités pastorales utilisées
en hectares
dont parcours d’intersaison
En hectares
Unités inutilisées ou abandonnées
En hectares
Unités potentielles
En hectares
Superficie totale du massif
82
3 370
6
118
0
0
0
0
35 141
190
12 433
21
508
2
60
0
0
47 502
10
575
1
30
0
0
0
0
14 675
17
1 692
3
40
0
0
1
50
47 330
321
68 813
64
3 528
12
5 051
2
133
197 602
296
70 119
76
2 797
16
1 947
2
383
181 842
Savoie
916
157 002
171
7 021
30
7 058
5
566
627 000
Source : DDAF
Une activité
pastorale intense
Plus d’un tiers des bovins et un
peu moins de la moitié des
ovins inalpés en Rhône-Alpes
se retrouvent en Savoie. Les
alpages savoyards accueillent
principalement ces deux espèces. Les 130 000 ovins présents constituent le plus souvent de grands troupeaux. On
les trouve presque uniquement en Maurienne et en Tarentaise, dans des alpages
d’altitude étendus, en marge
des meilleures pelouses réservées aux bovins.
En Savoie, deux bovins
inalpés sur cinq sont des vaches laitières. Leur nombre a
augmenté d’un quart entre les
recensements des unités pastorales de 1983 et 1996. Elles sont majoritaires en zone Beaufort –Beaufortain, Val d’Arly et la plus grande partie de la Maurienne et de la Tarentaise - où leur lait est mieux rémunéré. Le
lait provenant d’alpages contribue également à l’image de marque d’autres fromages, qu’ils bénéficient ou non d’une AOC,
comme la Tomme de Savoie, la Tome des Bauges ou le Reblochon du Val d’Arly. Tous ces fromages de qualité font de l’activité pastorale une composante essentielle de l’agriculture savoyarde.
Transhumance : d’importants
mouvements d’animaux
On associe souvent le pastoralisme aux grandes transhumances de troupeaux. Celles-ci ne concernent que les ovins. Les
troupeaux proviennent de nombreux départements. Plus de la
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moitié des ovins inalpés en Savoie viennent traditionnellement de la Provence, et plus particulièrement de la plaine de la Crau. La grande transhumance des bovins est limitée à 10% des
animaux, en provenance le plus souvent des départements voisins ou d’Italie. Mais les mouvements d’animaux à l’intérieur du département sont fréquents : un peu moins de la moitié du
troupeau bovin est originaire d’une autre commune de Savoie.
Contribution à l’attractivité touristique de la
Savoie
L’attractivité touristique des alpages savoyards est réelle : la grande majorité des unités sont
traversées par des sentiers balisés, certaines sont équipées de refuges, de gîtes, ou offrent des
possibilités de restauration. Plus de la
moitié des alpages est parcourue en période de pointe par au moins une cinquantaine de personnes chaque jour.
Les touristes visitent le plus souvent les
alpages de la Vanoise. La vente de fromages sur place et les activités du
gestionnaire liées au tourisme
sont plus fréquentes que lors
du recensement de 1983. A
côté de ces éventuels compléments de revenu dans le cadre de leur activité pastorale,
les alpagistes ont souvent une
activité secondaire liée au
tourisme. Ils sont généralement moniteurs ou pisteurs
dans les stations de ski en hiver.
Les
deux
activités,
pastoralisme et tourisme, cohabitent généralement bien et
se complètent. Si le tourisme
peut parfois constituer une
gêne pour le troupeau, c’est
sur un nombre limité d’unités
situées sur des sites fréquentés.
Des unités toujours mieux
équipées
Les politiques d’aménagement et de gestion ont permis de
mener à bien de nombreux travaux depuis 1983, conduisant à
une amélioration visible de l’état du domaine pastoral. Près
des deux tiers des unités sont concernées. Les travaux ont porté
sur les surfaces dans une unité sur quatre, et sur les équipements dans 40% des unités. La proportion d’alpages ayant bénéficié d’améliorations est plus importante dans les Bauges,
dans le Beaufortain, le Val d’Arly et la Chartreuse, que dans le
reste de la Savoie.
Les projets fermes dans les cinq ans concernent moins d’unités, compte tenu de l’important travail d’amélioration déjà fait.
Ils touchent les mêmes domaines que les travaux déjà réalisés.
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L’habitat et la création ou l’aménagement d’accès ont été l’objet de travaux sur le tiers des unités. Près des deux tiers des
alpages savoyards possèdent aujourd’hui un accès goudronné
ou carrossable. On compte 500 bâtiments utilisés par les gestionnaires, dont la plupart sont en bon état. En revanche, peu
d’unités sont équipées en logements pour animaux : rentrer
les animaux provoquerait des déplacements trop importants
sur les grands alpages et une baisse de la production laitière.
Restauration d’anciens
chalets d’alpage
Contexte et cadre juridique
La loi montagne du 9 janvier 1985 a pour objet de protéger les territoires de la zone montagne.
Dans cet objectif, le législateur a limité la possibilité de construire de façon isolée en montagne
et ce faisant, empêché la plupart des interventions sur d’anciens chalets d’alpage. Sur initiative
parlementaire, un texte correctif a été voté en février 1994. Il permet d’autoriser la restauration
des anciens chalets, dans un objectif de protection du patrimoine. Pour garantir l’atteinte de
cet objectif, ce texte institue un passage en commission des sites et un arrêté préfectoral.
Pratiques en Savoie
Dès la mi-1994, la commission des sites de Savoie a commencé à travailler sur ces thèmes. Elle
a déjà traité plus de 200 dossiers en 5 ans. Le tableau ci-contre détaille les avis rendus par cette
commission au 1er janvier 1999, et repris par le Préfet.
Nombre de dossiers examinés
Avis favorable
Avis favorable avec réserve ou prescription
Deuxième passage en commission
Avis défavorable
Dossier ne relevant pas de la procédure
164
26
52
33
32
21
Sur 131 dossiers sans double compte, il y a donc 32 avis défavorables (24%), 21 dossiers à
traiter par une autre procédure (16%) et 78 avis favorables (60%), avec ou sans prescriptions
particulières.
Pour permettre de traiter dans de bonnes conditions les dossiers, et établir progressivement des
éléments de doctrine, un petit groupe de personnes reçoit pétitionnaires et élus, et prépare la
discussion au sein de la commission des sites.
Les éléments suivants sont d’ores et déjà apparus comme des points forts à respecter pour agir
dans l’intérêt du patrimoine :
• le patrimoine ne correspond pas seulement à l’aspect visible du bâtiment, mais aussi au
mode de construction, aux matériaux utilisés et à l’environnement du bâtiment. Ainsi, plantations, clôtures, terrassements, constructions annexes sont en général à proscrire, car considérés
comme déplacés dans le paysage des alpages.
• aux termes de la loi, les ruines peuvent être reconstruites. Mais, cette reconstruction ne
constitue une action de protection du patrimoine que si le bâtiment ruiné manque dans un
hameau structuré, ou si des documents photographiques ou iconographiques attestent de la
fidélité au patrimoine ancien. Il faut s’entourer de nombreuses précautions pour que cette
intervention soit la reconstitution d’un patrimoine passé, et non pas la construction d’un pastiche.
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• le respect du volume et de la géométrie du bâtiment est essentiel, et concerne notamment la
pente de toiture, ses dépassements, les hauteurs de murs, les balcons.
• sont également considérés avec attention :
- le nombre, la taille et la répartition des ouvertures ;
- les protections contre l’intrusion, à réaliser grâce à des grilles, des volets intérieurs, amovibles ou à un seul vantail, plutôt que des volets à deux vantaux de type trop urbain ;
- le traitement des bois (les bois non traités vieillissent en harmonie avec l’environnement
du chalet)
• l’existence d’accès véhicule et même la possibilité d’accès piéton en hiver ne sont naturellement pas un droit attaché à une telle autorisation, qui s’inscrit dans une continuité avec les
usages traditionnels.
Ces orientations forment une sorte de « doctrine », qui sert de cadre à l’instruction des dossiers.
Mais l’instruction se fait toujours de façon individuelle, et la doctrine est de ce fait susceptible
d’‡évolution le cas échéant.
L’autorisation préfectorale de restauration permet ensuite d’instruire le permis de construire.
Les questions relatives à l’eau, l’assainissement et les risques naturels sont examinées à ce stade
de la procédure.
Cette politique nouvelle mérite d’être appliquée avec attention, mais le traitement administratif
des dossiers n’est pas à lui seul garant d’un résultat conforme aux objectifs. D’autres actions
sont indispensables :
• sensibilisation et formation des professionnels (architectes, artisans et entreprises du bâtiment, mais aussi notaires et agents immobiliers),
• communication et sensibilisation des élus et des propriétaires,
• contrôle sur le terrain des réalisations, et notamment du respect des prescriptions de l’arrêté
préfectoral.
Ce dernier point permet d’ailleurs un regard sur des portions de territoire qui échappent un peu
à l’observation par les services de l’Etat.
Données sur
inventaires
Plusieurs communes, conscientes du patrimoine que représentent les nombreux chalets ou constructions présentes dans leurs alpages, ont fait
réaliser un inventaire de ce
patrimoine (et parfois même
réfléchi aux conditions architecturales de leur restauration). Par ailleurs, l’Etat a demandé que soit étudié, sur
l’ensemble du département,
le patrimoine représenté par
les constructions d’alpage
présentes dans les seules unités pastorales utilisées.
Les résultats sont localisés sur
la carte ci-contre.
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