Le chapitre de Saint-Nic - Chapitre Cathédral de St

Transcription

Le chapitre de Saint-Nic - Chapitre Cathédral de St
20
Le chapitre de Saint-Ni
cinq
colas:
siècles d’histoire
Le chapitre collégial de Saint-Nicolas, à
Fribourg, célèbre cette année ses 500 ans.
L’occasion de redécouvrir son histoire et
son rôle dans la cité et le canton et de
mieux apprécier les trésors de la
cathédrale. Parmi eux, de remarquables
antiphonaires médiévaux.
Texte: Claude Ducarroz
Photos: Andrea Giovanni, Emmanuel Rey,
Valentine Brodard, DR
22
Page précédente
La cathédrale SaintNicolas, de style
gothique, a été
construite entre le
13e et le 15e siècles.
Ci-dessous, de g. à d.
Les antiphonaires
sont d’épais volumes:
ils devaient être lisibles de loin.
Les lettrines, lettres
initiales majuscules,
étaient souvent décorées de motifs floraux.
Les copistes du
Moyen Âge utilisaient
la feuille d’or.
Les décorations, souvent très colorées,
rendaient les manuscrits moins austères.
L
e pape Jules II crée le «vénérable
et exempt» chapitre collégial de
Sai nt - Nicolas à Fribou rg par une
bulle datée du 20 décembre 1512. Il
est alors doté de qu i n ze chanoi nes
autonomes par rapport à l’évêque de
Lausanne. C’est le célèbre magistr at
fribou rgeois Pe ter Falk qui obtient
ce tte fave u r, à la demande des autorités de la ville, lors d’un séjour à
Rome.
Dès lors, le chapitre de Saint-Nicolas
accompagne de près la ville et le pays
de Fribou rg dans les multiples péripéties de leur histoi re. Il suffit de
nommer, entre autres, le fameux prévôt et vicaire général Pierre Schneuwly, qui propage efficacement les
idées de la Réforme cathol ique à la
su ite du conc ile de Trente et fait veni r
à Fribou rg les Pères jésu ites, dont
saint Pierre Canisius, le fondateur du
Collège Saint-Michel.
Jusqu’à l’i nstallation de l’évêque de
Lausanne à Fribou rg, en 1613, le chapitre cathéd r al constitue «l’autorité
é piscopale de prox i mité» pour ce
canton. Des fi gu res émi nentes ont
marqué son histoi re aux plans de la
rel i gion, de la cultu re, des arts et de
la politique.
UNE COMMUNAUTÉ DE PRÊTRES
Quand la collégiale de Saint-Nicolas
devient, en 1924, la cathédrale du
d iocèse, les privilèges du chapitre collégial sont maintenus, à savoir la nomination du prévôt et des chanoines
par les autorités civiles. Même si ces
privilèges sont aujou rd’hui abandonnés, y compris la mitre et la crosse
pour le «Révérend issi me Prévôt», le
chapitre de Sai nt - Nicolas conti nue
d’exercer son office d’intercession et
de pastorale au service du diocèse, de
la cité et du canton de Fribourg.
Un chapitre est une communauté de
prêtres attachés à une gr ande égl ise
ou une cathéd r ale qui se réunissent
régul ièrement pour prier l’office divi n
et exercer le u rs activités pastor ales au
service d’un diocèse ou d’un ordre religieux. Saint Augustin, évêque
d’Hippone, en Afrique du Nord, au
tou rnant de l’an 400, av ait dé jà fixé les
règles d’u ne telle convivialité spi rituelle et pastorale pour ses prêtres.
Les chanoines actuels sont tantôt des
proches collabor ate u rs de l’évêque
quand le chapitre est cathéd r al, tantôt des membres d’un ordre religieux
su iv ant la règle de saint Augustin,
comme c’est le cas à l’abbaye de Sai ntMau rice ou à la prévôté du Saint-Bernard en Valais.
MISSIONS DU CHAPITRE
Le chapitre de Sai nt - Nicolas rempl it
quatre missions. Une mission liturgique: les chanoines assurent une part
i mportante de la vie liturgique à la
cathéd r ale. Ils prient ensemble mati n
Enluminure à l’effigie de saint Nicolas de Myre, patron de la cathédrale de la ville et du canton de Fribourg.
Enluminure aux armoiries du canton de Fribourg.
et soir l’office divin aux intentions du
diocèse, de l’évêque, du peuple et des
autorités de Fribou rg. L’e ucharistie
quotid ienne à 18h15 à la cathéd r ale
est toujou rs présidée par un chanoi ne. Certai nes célébr ations du dimanche et des fê tes incombent au
prévôt. Les chanoi nes rendent aussi
des services dans la paroisse et dans
la pastor ale fribou rgeoise. Une mission au service de l’évêque: en formant un chapitre cathéd r al de pu is
1924, les chanoines de Saint-Nicolas
sont devenus des proches de l’évêque.
I ls le sont par plusie u rs chanoi nes qu i
font partie du personnel de l’évêché
ou rendent des services de conseils ou
de célébrations, par exemple lors des
confi rmations ou par certai nes représentations.
Une mission dans le cad re des relations Eglise-Etat: de par son histoire,
le chapitre - et singulièrement le prévôt – veille aux bonnes relations entre
le monde ecclésial et la société civile,
Un programme riche et varié
Les antiphonaires, trésor inestimable
du pays de Fribourg et du chapitre cathédral, seront exposés dans le chœur
de la cathédrale de Fribourg, avec des
explications utiles par des spécialistes,
jeudi 1er novembre de 14h à 18h et samedi 3 novembre de 10h à 17h.
Le chapitre cathédral de Fribourg organise plusieurs manifestations ouvertes au public durant cette année jubilaire: une grande célébration samedi
8 décembre à 10h avec les vêpres
solennelles à 17h30.
Des visites guidées durant l’automne
à la demande de groupes sur inscription gratuite. Des visites thématiques
avec des spécialistes qui font découvrir les restaurations, les vitraux, les
pierres tombales, les cloches, le trésor,
les sculptures, les stalles et les orgues
( p rogramme sur le site internet, voir
ci-dessous)
Des ouvrages historiques et pédagogiques ainsi qu’un audioguide permettent de mieux connaître l’histoire du
chapitre et de mieux apprécier les merveilles de la cathédrale de Fribourg.
Des concerts gratuits mettent en valeur les beautés musicales qui n’ont
cessé d’enrichir les liturgies et l’ambiance de la cathédrale.
Une cuvée spéciale provient de l’ancienne vigne du chapitre, exploitée
par les chanoines de leur fondation en
1512 à 1937, le domaine du Daley,
dans le Lavaux. ■
Informations et inscriptions: site internet
www.chapitre-stnicolas.ch.
De g. à d. Saint
André est reconnaissable à sa croix,
à branches égales.
Lettrine avec personnage et motifs
floraux.
L’évêque célèbre un
office avec le chapitre cathédral.
en particul ier en assu r ant des
contacts régul iers et cord iaux avec les
autorités. Une mission au service de
la cultu re: le chapitre a hérité de richesses culturelles, notamment dans
et autour de la cathéd r ale. Les chanoines veillent sur ces trésors, les entre tiennent et les me ttent à la disposition du gr and publ ic. Au cou rs de
l’année jubilai re, ce tte tâche a été particulièrement honorée par de nombre uses propositions de visites, de publications et de mani festations à la
fois culturelles et pastorales.
Les chanoines de Saint-Nicolas se retrouv aient plusie u rs fois par jou r
pour prier l’office, y compris en le
chantant. Il fallait à cet effet de grands
l ivres comportant les tex tes litu rgiques et les notes de musique sur le
modèle du chant grégorien, les antiphonaires.
DE PRÉCIEUX ANTIPHONAIRES
Un antiphonai re est un volu me
contenant les antiennes, les répons et
les hymnes, soit la partie chantée de
l’office divin. Celui-ci variait selon les
jou rs de la semai ne et les fê tes litu rgiques. L’antiphonai re dev ait être lisible de loin, ce qui donne une dimension monu mentale à l’ouvrage, qui
était entièrement écrit et dessiné à la
main sur parchemin. Pour le confort
de lectu re, on disposait deux antiphonaires de chaque côté du chœur, soit
quatre exemplai res identiques. Le
chapitre de Sai nt - Nicolas possède
deux séries d’antiphonai res, soit 1600
pages de parchemin et 8 volumes qui
figu rent parmi les meille u rs exemplai res de ce genre en Su isse. Ils ont
été récemment restaurés aux frais du
chapitre. Ils sont conservés, avec les
archives du chapitre de Sai nt-Nicolas ,
aux Archives de l’Etat de Fribourg.
Parallèlement aux démarches qui ont
abouti à la fondation du chapitre col-
légial de Sai nt - Nicolas en 1512, et
comme pour encou r ager ce succès ,
les autorités civiles de Fribou rg ont
commandé et payé la réalisation des
antiphonai res à partir de 1509 dé jà .
Ces livres ont donc accompagné le
chapitre dès sa fondation. Les derniers volu mes ont probablement été
terminés en 1517. L’essentiel de l’écriture a été réalisée par un certain Ruprecht Fabri dont on ignore l’origine.
Les décorations artistiques, lettrines,
mi niatu res et autres bordu res à moti fs végé taux et figuratifs, sont l’œuvre
de Jakob Frank, originaire de Zofingue et moine au couvent des Augus-
ti ns de Fribou rg. Quant aux imposantes rel iu res, elles ont été confectionnées au couvent des Cordel iers de
Fribourg.
PRIÈRE EN COMMUN
Au Moyen Âge, la prière des heures,
durant la journée et la nuit, était surtout cultivée par les moi nes, mais
aussi par les chanoines des cathédrales et d’autres commu nautés du clergé
sécul ier. A partir du 16e siècle, la
prière des heures dans l’Eglise cathol ique a été dé placée dans la sphère
privée et rendue obl i gatoi re pour tout
prêtre sous le nom d’office divin, de-
voir rendu à Dieu. Le livre servant à
cette prière s’appelait le bréviaire.
Au cou rs du 15e siècle, dans un
contex te d’émulation entre communautés chrétiennes, les commu nautés
u rbai nes s’efforçaient d’égaler les cathédrales et d’imiter la splendeur du
culte qu’y célébr aient les chanoi nes .
Parmi les communautés urbaines de
Su isse romande, au rang desquelles
on trouvait Romont (avec une vi ngtai ne de membres), se ules celles de
Berne (en 1484) et de Fribou rg (en
1512) obti nrent de la papauté le privilège d’être érigées en collégiales. ■
Claude Ducarroz
De g. à d. L’Annonciation, dans un
antiphonaire contenant les offices de
la Vierge.
Le livre liturgique
est fermé par de solides ferrures.
Finesse et élégance
du trait.
Le monde animal
inspirait aussi les
copistes.

Documents pareils