Les Feuillets de REALISE

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Les Feuillets de REALISE
Les Feuillets de REALISE
N° 11 - Janvier 2013
Numéro Spécial SHERPA
Service Habilité Educatif Renforcé
Pour Adolescents
Association REALISE : Sauvegarde de l'enfant – de l'adolescent – de l'adulte
Siège social
4, Boulevard Lyautey – 54600 Villers-Lès-Nancy Siret 775 615 370 00381 – NAF 9499Z
Tél : 03 83 41 50 72 / Fax : 03 83 90 13 49
E-mail : [email protected]
Web : www.realise.asso.fr
EDITORIAL
TOUT EST POSSIBLE ! par Patrick CAISSIAL, Président de REALISE
C’est par cette affirmation qu’une des plus importantes entreprises hexagonales (la SNCF) voulait faire savoir qu’elle était à l’écoute attentive de ses usagers pour répondre au mieux à leurs attentes quelle qu’en soit l’expression.
Permettez-moi de reprendre, au nom de REALISE, cette expression pour notre
Association de ne pas « s’endormir » sur ses acquis et rester en permanence
prête à trouver une réponse adaptée aux besoins des jeunes qu’elle accueille.
Si tout est possible à un individu désireux d’avancer et de faire évoluer son environnement…c’est encore plus vrai à plusieurs individus et plus encore plusieurs partenaires. Ce numéro des Feuillets de REALISE consacré au SHERPA est l’illustration même de ce que la coordination de volontés, de différents
acteurs poursuivant le même objectif, peut permettre de réaliser – de « co-construire » comme l’exprime le Président Michel DINET – quand il veut faire évoluer, entre autre, la protection de l’enfance en Meurthe et Moselle.
Pour co-construire, il faut plusieurs Acteurs-Partenaires qui souhaitent atteindre le même objectif et mettre en
commun les compétences et responsabilités. Cette mise en commun permet d’obtenir un résultat beaucoup
plus important qu’une simple addition car, par l’échange permanent, elle déclenche un enrichissement global.
Dans cette démarche de co-construction du service SHERPA, le point de départ est l’interrogation permanente du Conseil Général (élus et opérateurs) de la PJJ et de REALISE, de faire évoluer les réponses existantes sachant qu’aucune ne peut être « la » réponse à l’accompagnement.
L’accueil en MECS, le suivi en Milieu Ouvert et l’Accueil de Jour, conservent toute leur valeur et il faut les améliorer en permanence. Toutefois ils ne peuvent répondre à toutes les situations et à tous les jeunes auxquels les acteurs de leur accompagnement veulent apporter une réponse personnalisée et adaptée : le
SHERPA est donc une réponse complémentaire sachant qu’à l’usage, il faudra l’adapter et la faire évoluer.
REALISE pour sa part, est fière d’avoir permis la mise en place du SHERPA qui après quelques mois de fonctionnement semble répondre à l’attente de ses Partenaires-Mandants. L’ensemble des professionnels
a, par sa compétence, son sérieux, son partenariat actif et volontaire, sa réactivité constructive, su répondre à l’attente de Conseil Général de Meurthe-et-Moselle et de la Protection Judiciaire de la Jeunesse.
Je conclurai volontiers ces propos par des remerciements à nos Partenaires-Mandants qui par leur confiance et leur implication dans cette démarche de co-construction motivent encore plus les professionnels de REALISE dans leur marche
en avant et bien évidemment par des souhaits de bonne et heureuse année 2013 ! n
Inauguration des locaux du PFS à Maxéville le
12 juillet 2012.
Le Président du Conseil Général de Meurthe
et Moselle, M. DINET coupe le ruban symbolique, en présence de M. PISSENEM, Vice
Président du CG54 chargé de l’Enfance et de
la Famille, de M. CAISSIAL, Président de REALISE et Mme CAREL, ex directrice du PFS.
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BILLET DE LA DIRECTION
LE SHERPA, « Une approche novatrice »
Par Jacques LE PETIT, DGA
De prime abord, je vous adresse au
nom de la Direction Générale de
REALISE, une bonne et heureuse année pour 2013.
Pour le numéro 11 de notre revue associative, nous
avons choisi de parler du nouveau service SHERPA.
Après un démarrage en début d’année 2012, et une
montée en charge progressive, le moment est venu
de présenter cette nouvelle prise en charge éducative d’adolescent(e)s.
Le numéro 10 des feuillets de REALISE, consacré au dispositif du Placement Familial Spécialisé, a été largement diffusé. Il
a suscité beaucoup d’intérêt et a été accueilli avec
curiosité.
C’est un document dense, destiné à l’interne comme
à l’externe. C’est le fruit de la volonté des administrateurs de l’association et de la direction générale de
mettre en avant les structures de REALISE au moyen
d’une communication professionnelle. Le dispositif
PFS et ses nouveaux locaux inaugurés en juillet dernier à MAXEVILLE se devait d’être à l’honneur. Les
articles du dossier ont permis à plusieurs salariés de
l’association, mais aussi en externe de découvrir la
mission du placement familial. Encore une fois, félicitations aux rédacteurs et à toute l’équipe pour leur
disponibilité. Les informations concernant la vie de
l’association, les nouvelles rubriques ont été appréciées. La large diffusion, bien au-delà des « frontières
de REALISE », a reçu, elle aussi, un écho très favorable.
Issu d’une commande conjointe de la Direction Enfance Famille du Conseil Général de Meurthe et
Moselle et de la Direction Territoriale de la Protection Judiciaire de la Jeunesse Lorraine Sud, ce projet
novateur prend appui sur les nouvelles possibilités
offertes par la loi de mars 2007, rénovant la protection de l’enfance. Au gré des articles qui présentent
cette structure, il sera ainsi possible de mieux comprendre les objectifs et finalités du projet pédagogique et partant, de saisir les nouvelles pratiques qui
sont mises en œuvre. En effet, la diversité des compétences humaines, les interventions éducatives
intensives et variées au plus près du mineur, des
modalités d’intervention nouvelles (hébergement,
restauration), des accompagnements en vue d’une
insertion sociale, scolaire et préprofessionnelle en
lien avec l’environnement du jeune et enfin une
proximité avec les titulaires de l’autorité parentale,
sont autant de paramètres qui permettent une approche novatrice. n
7 rue Frédéric Chopin à Nancy
Quartier Mon Désert / Jeanne d’Arc
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PRESENTATION DU SHERPA
Le Service Habilité Educatif Renforcé Pour Adolescents (SHERPA) constitue une nouvelle offre de service de REALISE. Pierre Yves HEURTEL, son directeur
en expose les grandes lignes.
à pallier les limites de ces deux modes d’intervention
à l’égard du public adolescent dont tous les professionnels du secteur s’accordent à dire qu’il est l’un
des plus complexes à prendre en charge.
En effet, les AED en protection sociale ou AEMO en
protection judiciaire ne sont pas suffisamment intensives (une rencontre toutes les trois semaines en
moyenne) pour permettre une prise en charge des
différents facteurs de vulnérabilité familiale et un accompagnement pluridimensionnel de l’adolescent.
La Mesure Educative et Sociale de
Soutien à l’Adolescent et sa Famille
(MESSAF) s’inscrit dans l’action éducative à domicile et précisément, dans
les 3 grands champs de la protection
de l’enfance, protection sociale ou administrative,
protection judiciaire civile & protection judiciaire pénale. Le SHERPA répond aux orientations fixées par
la Direction Enfance et Famille du Conseil Général
de Meurthe et Moselle et la Direction Territoriale de
la Protection Judiciaire de la Jeunesse Lorraine–Sud
dans une note de cadrage portant sur « la mise en
place d’un nouveau service d’accompagnement et
de soutien des adolescents et de leur famille » en
date du 21 décembre 2010.
De plus, lors de situations de crises familiales, les
mises à l’abri ou l’éloignement de l’adolescent ne
peuvent se faire que dans le cadre d’un placement
souvent difficile à mettre en place et qui interrompt
le plus souvent la relation avec le professionnel ou le
service qui exerçait la mesure éducative.
Quant au placement, il permet certes de protéger
le mineur, mais les parents se retrouvent alors souvent seuls ou sans une intervention professionnelle
suffisante pour faire évoluer leur situation afin d’envisager un retour de l’enfant. Par ailleurs, certaines
situations de danger ne nécessitent pas toujours
une séparation continue enfant-famille et certains
jeunes ne comprennent plus les raisons d’un placement, n’investissent plus cette modalité et au final
ne donnent plus sens à cette séparation.
Ce service s’inscrit clairement comme une nouvelle
réponse dans le schéma départemental conjoint
de protection de l’enfance de Meurthe et Moselle.
Cette mesure d’accompagnement spécifique trouve
sa place tout naturellement dans la diversification
des modes d’intervention prévue dans la loi du 5
mars 2007 réformant la protection de l’enfance et
l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance
délinquante.
Le SHERPA propose un nouveau mode d’accompagnement et de soutien des adolescents pour une
intervention au domicile et dans l’environnement
familial et social.
Faisant appel à l’innovation dans le champ des interventions socio-éducatives, cette offre de service
consiste à proposer une alternative en s’inscrivant
sur un terrain situé entre Action Educative à Domicile
/ Action Educative en Milieu Ouvert et placement et
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Les références théoriques et déontologiques
Les références théoriques sont celles du champ des
sciences humaines. Le SHERPA considère les interventions socio-éducatives mises en place comme
adaptables et adaptées à chacune des situations
pour lesquelles il est missionné. Elles sont fondées
sur les principes suivants :
• protéger le mineur
• mettre fin au danger ou aux risques de danger
• favoriser ou soutenir l’exercice de l’autorité parentale autant que la situation le permet
• assurer des mesures ou actions personnalisées
et fondées sur l’intérêt de l’adolescent, dans une
recherche de sécurité physique, psychique et affective permettant au jeune sa socialisation et
les apprentissages nécessaires à la construction
de son autonomie.
Ces principes ne se traduisent pas dans une démarche d’accompagnement ou d’intervention standardisée mais au contraire, ils font appel à une diversité des modes d’intervention qui tient tout autant
aux conditions de réalisation de ces interventions
qu’aux profils des jeunes.
Une approche intensive et pluridisciplinaire de l’intervention socio-éducative
A destination de 70 adolescents âgés de 13 à 18 ans
et de leur famille, le SHERPA fonctionne depuis le 1er
janvier 2012 et intervient sur le territoire de Nancy et
de sa couronne ainsi que sur les bassins d’habitation
de Neuves Maisons et de Pompey. L’action socioéducative intensive, « renforcée » et pluridimensionnelle
du SHERPA s’exerce donc au domicile des familles et
dans le milieu social et environnemental de l’adolescent pour résoudre des problèmes rencontrés par
le jeune et sa famille. Elle s’appuie sur des priorités
d’action identifiées et fixées au départ de la mesure
d’une durée comprise entre 6 et 12 mois, sur la base
des décisions administratives ou judiciaires qui en
fixent le cadre.
En protection sociale cela concerne l’aide à domicile
et la nature des interventions socio-éducatives accordées par décision du Président du Conseil Général (Articles L222-1, L222-2 et L222-3 du CASF).
En protection judiciaire civile, il s’agit de l’article 3752 du code civil qui stipule que chaque fois qu’il est
possible, le mineur doit être maintenu dans son mi5
lieu actuel avec l’intervention d’un service d’éducation en milieu ouvert. Le magistrat peut autoriser ce
service à assurer un hébergement exceptionnel ou
périodique à condition qu’il soit spécifiquement habilité.
Enfin quelques jeunes peuvent être concernés dans
le cadre de l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance
délinquante et plus précisément dans le cadre de
mesures pénales (Liberté surveillée, Mise sous PJ,
Contrôle Judiciaire, SME, Mesures d’activité de jour,
Sanctions éducatives, Aménagements de peines) ou
encore dans le cadre de Mesures Judiciaires d’Investigation Educative.
L’intervention socio-éducative du SHERPA est dénommée Mesure Educative et Sociale de Soutien à
l’Adolescent et sa Famille. Cette appellation traduit
le souci et la volonté d’engager une démarche d’accompagnement individuel pluridimensionnel adapté
et évolutif auprès des adolescents et de leur famille.
Accompagner l’adolescent dans un dispositif modulable et évolutif et assurer un étayage des fonctions
parentales sont les 2 axes stratégiques d’intervention d’une équipe pluridisciplinaire (éducative, sportive, insertion scolaire et professionnelle, économie
sociale et familiale, accompagnement social,
médiation familiale, santé physique et psychique) composée de 13 professionnels encadrés par un chef de service et un directeur,
assistés d’une secrétaire et d’un comptable.
La conjugaison de leurs actions, leur intensité, s’effectue en fonction des caractéristiques de l’adolescent, de sa famille, de leurs potentialités et compétences, et des interrelations présentes au sein de la
cellule familiale et également dans l’environnement
proche. Au sein de l’équipe, un référent est désigné pour chaque jeune accompagné. Il est chargé
notamment de la communication à l’adolescent et à
ses parents du planning des interventions programmées auxquels contribuent les autres intervenants,
du suivi et du bilan des actions pour les autorités
mandantes (services de l’Aide Sociale à l’Enfance
ou de la Protection Judiciaire de la jeunesse).
au vendredi, l’accueil téléphonique est assuré par le
personnel administratif durant les horaires de bureau.
Pour autant, la réponse du service doit être permanente, c’est pourquoi 2 intervenants de l’équipe
assure chacun durant deux tranches horaires, une
présence physique au service de 7h30 à 21h00
de manière à prendre en charge les urgences soit
par téléphone, soit auprès de l’adolescent. Cette
permanence permet ainsi au jeune de pouvoir
s’adresser physiquement au service en cas de préoccupations, de tensions fortes qu’il souhaiterait évoquer, elle contribue au maintien du lien.
La continuité du service est également assurée,
chaque nuit, par une astreinte organisée autour d’un
binôme cadre/travailleur social de 21h00 à 8h00.
Durant les week-ends, l’activité du service se maintient auprès du jeune et de sa famille soit parce
que des interventions sont programmées au regard
des spécificités des situations, soit parce qu’elles
permettraient de désamorcer une situation de
tension ou de crise. Dans ce dernier cas, une intervention est déclenchée à partir de l’astreinte
assurée par le binôme cadre/travailleur social.
L’accueil d’adolescents en hébergement au service
reste une réponse ponctuelle, l’objectif n’étant pas de
créer une structure supplémentaire d’accueil continu.
Au cas où un accueil hors domicile s’avère indispensable, le binôme d’astreinte cadre/
travailleur social s’attache à l’organiser :
- soit chez un membre de la famille élargie,
identifié et évalué au préalable comme une
ressource fiable et dans ce cas, le service se
charge de l’accompagnement et du relais
- soit au sein du service avec la présence du travailleur social d’astreinte.n
Il s’agit pour chacun des professionnels de l’équipe
d’assurer un important travail d’accompagnement
de proximité du jeune et de sa famille où le « faire
avec » prévaut par des interventions pluri hebdomadaires adaptées et évolutives avec des objectifs qui
s’appuient à chaque fois sur le concret de la situation, ses spécificités et sur les ressources présentes
dans l’environnement. Les formes de l’intervention
font appel aussi bien à l’accompagnement individualisé des adolescents et des parents, qu’à de l’animation d’activités collectives ou encore de groupe.
Une part importante de l’accompagnement vise à
solliciter l’adolescent dans une réflexion personnelle sur la place qu’il occupe au sein de sa famille
et du rôle qu’il joue dans les enjeux et les tensions
familiales. Il est invité à poser un regard plus distancié et à trouver des stratégies pour évoluer
de manière plus apaisée au sein de sa famille
et dans son environnement proche (scolarité, groupe de pairs, réseaux sociaux, etc…).
Un autre point essentiel de l’accompagnement proposé à l’adolescent est de lui fixer
un cadre, des repères clairs et précis et des
exigences acceptables. Ce principe d’autorité passe par un rappel des règles et de la loi
par l’intervenant socio-éducatif, à chaque
fois que nécessaire, en y incluant les parents.
Le cadre de fonctionnement du SHERPA
Le service est ouvert de 7h30 à 21h00 du lundi
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ENFANCE - FAMILLE / AIDE SOCIALE A L’ENFANCE
Le Conseiller Territorial de l’ASE
est le correspondant privilégié du
SHERPA pour le suivi des mineurs
confiés à REALISE dans le cadre des
MESSAF. Thierry VIDART a plus particulièrement en charge les dossiers
des mineurs confiés à l’ASE dans le
cadre de la protection judiciaire sur
l’antenne Est du territoire de Nancy et Couronne. Il
est le responsable d’une équipe composée de huit
travailleurs sociaux, deux psychologues et une rédactrice.
décision judiciaire face à l’obstination et la détermination d’un adolescent qui va alors engager un véritable « bras de fer » avec l’autorité judiciaire. Le
danger consécutif à son errance peut conduire à une
situation beaucoup plus préoccupante que celle qui
était censée incarner une protection pour le mineur.
Il s’agissait aussi de rompre avec une logique qui
consiste à ce que le conflit, la crise ou l’incident soit
le motif qui actionne le placement, ces situations où
ce sont les conséquences et non la problématique
familiale elle-même qui fonde la séparation. Nous
sommes alors dans une confusion, un amalgame
forcément trompeur : l’adolescent se souviendra
que l’unique responsable de son placement, c’est
lui, au motif de l’acte qu’il a posé. Associé le passage à l’acte de l’adolescent à la décision, participe
au brouillage des enjeux relationnels au sein de la
famille. Combien d’adolescents ont fait l’objet d’un
accueil au REMM, en urgence, dans le prolongement
d’une intervention de la police au domicile de leurs
parents, pour avoir menacé, retourné une table, saccagé leur chambre ou commis une violence…
Enfin, et très naturellement, la mesure de placement a pour effet d’apaiser les tensions entre les
protagonistes : apaisement temporaire qui au final ne résout rien. Très rapidement, d’autres phénomènes s’instaurent entre parents et enfants, qui
renforcent la difficile mission des collègues du territoire et des établissements dans l’exercice de leurs
fonctions. Ainsi, la défiance de l’adolescent vis-à-vis
de ses parents est parfois démultipliée par la décision d’éloignement avec en prime un sentiment de
trahison et/ou d’abandon exacerbé.
A d’autres moments, le retrait des parents s’amorce,
ces derniers, soulagés, « délèguent » la prise en
charge de leur enfant aux services éducatifs, posture
Les Feuillets : En quoi consiste le travail de votre
équipe ?
Les équipes territoriales de l’Aide Sociale à l’Enfance,
en Protection Judiciaire, sont plus particulièrement
chargées de l’élaboration et la mise en œuvre des
projets en faveur des enfants et leurs familles pour
lesquels le Juge des Enfants a ordonné une mesure d’Assistance Educative. Ce travail se réalise et
s’élabore avec nos collègues et partenaires : MECS,
REMM, Assistantes Familiales, Accueils de Jour, REPE
et bien sûr le SHERPA.
Pouvez-vous nous parler de la manière dont la mesure SHERPA a été mise au point avec l’ASE ?
En 2011, la Direction Enfance Famille du Conseil Général a eu pour ambition de réfléchir au contenu et à
la mise en œuvre d’une prestation novatrice auprès
du public adolescent. Plusieurs constats d’insatisfactions étaient à l’origine de cette volonté.
L’accueil des adolescents au sein des structures,
sans distinction des problématiques, est un exercice
complexe : les dynamiques de groupes, le contexte
de crise lié au placement, l’affirmation de soi et la
recherche identitaire, inhérentes à cet âge, sont autant de phénomènes qui participent à la difficulté de
prendre en charge l’adolescent au sein d’un collectif.
La MECS+15 a parfois dû faire face à des débordements comportementaux d’adolescents qui ont mis
fortement à l’épreuve les autres jeunes accueillis
ainsi que l’équipe éducative.
Par ailleurs, les fugues récurrentes ou continues de
certains mineurs traduisent leur refus de la décision de placement. On touche ici les limites d’une
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parentale qui restreint alors considérablement l’espace
de travail, pourtant essentiel dans la perspective de restaurer les liens.
L’enjeu, face à ces observations, consistait donc à réfléchir à la mise en place d’une nouvelle prestation pour
ce public spécifique, qui prenne en compte la singularité des problématiques familiales, et en offrant aux
intéressés, un accompagnement intensif et pluridisciplinaire.
Il s’agissait de concevoir une mesure alternative au
placement quand les mécanismes familiaux ou individuels sont de nature à conduire aux dérives relatées
précédemment.
Le projet présenté par REALISE a retenu toute l’attention
du comité de pilotage départemental dans le cadre d’un
redéploiement de moyens.
la
Protection
Judiciaire. J’insiste sur le versant administratif car c’est
un des enjeux
majeurs auquel
nous allons être
confrontés
:
une démarche
préventive,
d ’a m p l i t u d e
courte auprès
des
familles,
demeure toujours la meilleure formule
afin d’éviter des
situations où la dégradation des relations est parfois irréversible.
Je considère qu’il est nécessaire d’envisager la MESSAF
à chaque instant du parcours de l’enfant et sa famille :
c’est-à-dire, soit en amont d’une mesure AEMO ou AED,
d’accueil de Jour, de placement ou Accueil Provisoire,
soit à l’issue de ces dernières.
C’est l’évaluation sociale et éducative des professionnels
qui doit mettre en perspective les hypothèses de travail et l’intérêt que recouvre l’intervention de l’équipe
du SHERPA en faveur de l’adolescent et sa famille. Des
campagnes d’informations auprès des prescripteurs ont
déjà été réalisées. Je pense que nous serions bien inspirées de rééditer ces démarches de communication.
Comment s’articule cette nouvelle mesure MESSAF
dans le dispositif de la protection de l’enfance ?
Avant de vous répondre, simplement se redire que cette
prestation s’inspire des préconisations qui figurent dans
la Loi de 03/2007 réformant la Protection de L’Enfance.
Le législateur a souhaité promouvoir l’émergence de
nouvelles réponses qui conjuguent différentes compétences et champs théoriques et qui privilégient, autant
que faire se peut, le maintien du lien dans une démarche préventive.
C’est aussi, la poursuite d’une politique départementale
visant à diversifier les prestations, et dont la démarche
est engagée depuis plus de 15 ans au sein de notre département, et qui s’inscrit dans les orientations définies
par le schéma départemental de la Protection de l’Enfance.
Pour revenir à votre question, la MESSAF va devoir trouver sa place dans le paysage des dispositifs de la Protection de l’Enfance en Meurthe et Moselle. Comment
la situer par rapport aux autres mesures et comment
à terme les pratiques des acteurs (service social, SSFE,
services AEMO et SI, équipes territoriales ASE, Juge des
Enfants) qui concourent à la mission de l’Enfance vont
donner à cette prestation sa coloration définitive ?
Difficile de répondre aujourd’hui mais surtout gardons
nous d’y mêler nos représentations initiales. Le risque,
par exemple, serait de penser qu’il s’agit simplement
d’une mesure AEMO renforcée, et par voie de conséquence qu’on n’est censé mobiliser cet outil que lorsque
tout l’arsenal des autres mesures, en amont, s’est révélé
inefficient.
La MESSAF est une prestation qui a vocation à s’exercer aussi bien dans le cadre de la Protection Sociale que
Au vu des premières situations suivies au SHERPA,
comment jugez-vous le travail réalisé ?
Je souhaite souligner que la plus value du plateau technique élargi réside dans la capacité à proposer une guidance et parfois une suppléance en lien très étroit avec
les potentialités des familles mais aussi ses défaillances.
C’est l’idée de réaliser à chaque fois du « sur mesure »
en associant une fréquence d’intervention qui s’ajuste
aux besoins de l’adolescent et de ses parents. Ce pari,
cette équipe est en passe de le réussir. Les situations qui
ont été adressées au SHERPA sont très diverses, souvent
très complexes, parfois très dégradées. Elles requièrent
une approche à chaque fois renouvelée où l’innovation
s’inspire de la spécificité de ce que nous donnent à voir
l’enfant et ses parents. La motivation des professionnels
qui composent cette équipe est très convaincante. Cette
capacité à « aller chercher le jeune » (en dépit des
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mécanismes de défenses et de mise à distance vis-à-vis
de l’adulte), constitue une force de persuasion qui est
fondamentale. Cette pugnacité, cette abnégation devra
être cultivée afin de garder cette mobilisation et cette
réactivité, qui de ma place, sont les atouts majeurs de
leur intervention et déjà de leur savoir faire et savoir
être.
Sur les 32 situations émanant de l’Antenne EST, et en
dehors de trois situations qui ont fait rapidement l’objet
d’un placement dans le cadre de l’ordonnance 45, les
autres situations familiales ont pu bénéficier d’espaces
de paroles et d’accompagnement qui ont contribué à
une stabilisation notable des relations familiales. Par
ailleurs, le retour d’adolescents à leur domicile relevait
pour certains d’une hypothèse hasardeuse. Ainsi, toujours sur l’équipe de Jarville, sur 19 adolescents précédemment accueillis en établissements ou en Lieu de Vie,
seuls, deux, ont fait l’objet d’une nouvelle admission au
sein d’une structure collective. C’est incontestablement
une réussite.
Il reste toutefois d’autres enjeux qui interrogent
moins nos articulations avec nos partenaires mais qui
concerne davantage l’absence de réponse institutionnelle. Je fais ici, par exemple, référence à l’impasse à
laquelle nous sommes confrontés quand l’adolescent
doit intégrer un ITEP et qu’aucune place n’est possible
avant les douze prochains mois. Nous « bricolons » !!!
Mais, soyons honnête, nous gagnons du temps, nous
occupons le temps, sans être en mesure de construire,
seul, un étayage ou un accompagnement constructif et
salvateur pour la famille. Il est illusoire de penser pouvoir se substituer à des dispositifs spécialisés. A ce titre,
nous devons poursuivre nos actions auprès de nos partenaires en vue de mailler nos complémentarités et nos
compétences afin d’offrir une offre de service adaptée
aux problématiques les plus complexes. Nos marges de
progressions sont réelles, nos réponses perfectibles.
Actuellement 70 mesures sont déjà en cours, est-ce le
maximum qu’ils peuvent accompagner ?
Le nombre d’adolescents est un indicateur, mais qui, pris
isolément, est insuffisant pour mesurer l’équilibre ou
qualifier les charges de travail d’une équipe. Il convient
de croiser ce chiffre avec le parcours des enfants suivis
(antécédent de placement par exemple), la complexité des situations et le nombre d’interventions hebdomadaires nécessaires auprès de la famille. L’opération
consiste à positionner le curseur de telle façon que les
collègues puissent toujours exercer leurs fonctions avec
la même réactivité, la même mobilisation et disponibilité à tous les instants. Ces caractéristiques fondent la
spécificité de la MESSAF et confèrent aux interventions
du SHERPA, l’efficience actuelle. C’est cet équilibre qui
doit prévaloir si l’on souhaite préserver les atouts de
cette prestation. n
VISITE DES LOCAUX DU SHERPA
Après avoir «squatté» pendant quelques mois divers bureaux et salles de réunions au siège de REALISE, l’équipe du
SHERPA a intégré ses locaux actuels rue Frédéric Chopin à Nancy, une petite rue idéalement située, arrêt de tram à 100
m, centre ville, gare SNCF et gare routière à 500 m. Les locaux sont vastes et clairs et sont répartis sur 3 niveaux. Un
immense jardin arboré permet toutes sortes d’activités avec les jeunes accueillis. n
Chambre d’accueil
Vue depuis le jardin
Hall d’entrée
Salle de réunion
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Espace détente
Objectifs opérationnels de l’intervention du SHERPA
Mobiliser l’adolescent dans la construction d’un
Soutenir l’adolescent dans son parcours scolaire ou
projet personnel
professionnel
• Accompagner l’adolescent dans une démarche
• Travailler à son inscription scolaire et/ou profes-
d’appropriation de la mesure
sionnelle avec le soutien des parents
• Identifier et valoriser ses compétences person-
• Utiliser les ressources et dispositifs d’insertion
nelles et sociales
locaux (Mission locale, E2C, EDI, Chantiers édu-
• Développer sa capacité à construire son projet
catifs, …)
personnel
• Si nécessaire et en concertation avec les parents,
rencontrer les enseignants, formateurs, em-
Aider l’adolescent à prendre en compte les réalités
ployeurs,…
sociales du vivre ensemble et favoriser son ancrage
• Proposer des solutions de soutien scolaire
socioculturel dans l’environnement
Accompagner l’adolescent dans la prise en compte
• Faire connaître et utiliser les ressources et ser-
de sa réalité financière et de celle de sa famille
vices de proximité
• Aider l’adolescent à regarder et à comprendre
• Evaluer avec lui son mode de relation à l’argent
son environnement
et ses capacités à gérer
• Le sensibiliser à la citoyenneté
• L’aider à construire et à gérer un budget
Amener l’adolescent à prendre soin de lui, en colla-
Proposer le cas échéant un hébergement exception-
boration avec ses parents
nel et temporaire
• Amener le jeune à s’occuper de sa santé et de
• Proposer une solution d’hébergement face à une
son hygiène de vie
situation de crise
• Communiquer sur les questions du corps et de la
• Apaiser les tensions familiales
santé avec lui et ses parents
Réfléchir sur l’expérience de la parentalité
Construire l’intervention auprès de l’adolescent
• Permettre aux parents l’expression de leurs re-
dans une logique de coéducation
présentations de leur enfant et des affects en
• Négocier avec l’adolescent et ses parents les mo-
jeu.
dalités de la mesure : élaboration du PAP et du
• Les inviter à réfléchir sur leur expérience sub-
contrat de coéducation
jective de parents, à exprimer leurs sentiments,
• Identifier et valoriser les compétences paren-
leurs souffrances
tales
• Les accompagner dans de probables remanie-
• S’associer aux parents dans tous les domaines
ments dans leur vie de parents
concernant l’adolescent : scolarité, formation,
Soutenir la pratique de la parentalité
santé, loisirs, budget…
• Inviter les parents à réfléchir sur le quotidien à
partir de situations concrètes
• Aider les parents à construire et à tenir des positions éducatives
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LES METIERS DU SHERPA / ISE EDUCATRICE-EDUCATEUR
Le métier d’Intervenant Socio-Educatif est un pivot
central de la mise en œuvre d’une mesure comme
le MESSAF. Deux d’entre eux nous parlent de leur
métier au sein de cette nouvelle structure.
en allant chez eux aussi souvent qu’il le faut, avec
une marge de manœuvre assez large. Les parents
se rendent vite compte qu’il leur faudra du temps
pour réussir, le plus important étant qu’ils prennent
conscience que le premier bouton à actionner, c’est
eux-mêmes » ajoute -t-elle.
Au SHERPA , Erik confirme qu’on retrouve avant tout
des jeunes issus de familles monoparentales, en
grande majorité de mères qui se retrouvent seules
avec 2 ou 3 enfants, parfois plus, mais on y rencontre
aussi des couples classiques ou séparés. La réalité
c’est une grande diversité de conditions sociales et
une grande diversité de précarités. Pour lui comme
pour Maryse, parmi les problèmes rencontrés, le
plus sérieux est dans aucun doute la déscolarisation
conséquence d’un éducatif pas ou mal posé dès le
départ, des choses qui ont été laissées à l’abandon,
sans apprentissage des contraintes ou des limites
mal définies. Cela donne des jeunes qui sortent ou
jouent sur leur ordinateur jusque tard dans la nuit
et ne sont plus capables de se lever le matin. Aboutissement logique, des retards cumulés, puis l’abandon et la désertion du collège.
« Notre rôle est de conforter et d’accompagner les
parents dans la nécessité de redonner au jeune un
rythme qui lui est indispensable, savoir manger à des
heures régulières, vivre avec des horaires qui collent
avec son environnement, éviter les dépendances et
les addictions en particulier à internet, au téléphone
mobile, à l’alcool et aux drogues. » n
Entretiens avec
Maryse FREYERMOUTH et Erik JACQUINOT
Le SHERPA, une expérience et une aventure
« Le SHERPA, c’est une aventure intéressante, une
expérience tout à fait particulière, une expérimentation et un changement assez radical avec la double
préoccupation, vers les jeunes et vers les parents »
disent en chœur Erik et Maryse. Il y a accord sur le
fait qu’il faut traiter les deux en même temps. Il n’est
pas rare qu’au démarrage les ISE soient amenés à
s’occuper plus de la famille que de l’adolescent luimême. Mais c’est toujours dans l’optique de revenir
vers l’adolescent et on peut penser que ce qui a été
construit avec la famille va servir de support.
Maryse apprécie ce travail auprès des familles «afin
de repositionner les parents, de manière concrète,
Amy BONNEVAL, Secrétaire du SHERPA
11
LES METIERS DU SHERPA / ISE ASSISTANTE SOCIALE
L’approche des problèmatiques dans le cadre du
SHERPA nécessite parfois d’apporter une aide matérielle aux familles. Amina SCHILTZ connait bien
cette filière, elle nous parle de sa mission.
aux difficultés financières, demandes de secours,
relations avec les organismes caritatifs, les mairies
ou les CCAS. « J’ai aussi un rôle d’édcatrice comme
tous mes collègues intervenants socio-éducatifs. »
ajoute-t-elle.
Comme tous ses collègues, Amina SCHILTZ a intégré comme ISE
l’équipe du SHERA début janvier
2012. Elle a une formation d’assistante sociale et a commencé sa
carrière par un poste dans l’administration. C’est évidemment une
toute autre ambiance qu’elle a trouvée au SHERPA.
Elle y apprécie la souplesse et la flexibilité dans le
travail. « Pour moi c’est une vraie renaissance car
j’avais vraiment envie de changer de métier. » Ses
collègues la consultent dès qu’il s’agit de trouver
une aide financière, résoudre un problème par rapport au logement ou pour tout ce qui touche au travail de l’assistante sociale, recherce de solutions face
Amina a aussi apporté au SHERPA un avantage non
négligeable puisqu’elle parle couramment l’arabe.
D’origine algérienne elle est également traductrice
assermentée. Par rapport à certaines mères de familles maghrébines qui s’expriment peu ou pas en
français, elle apporte une aide précieuse par sa traduction lorsqu’il s’agit de remplir des documents ou
de faire des choses un peu pointues. «Nous avons eu
quelques familles arabes, dit-elle, et le fait de s’exprimer dans leur langue a créé un contact différent. De
plus, compte tenu de mon âge, je peux leur dire des
choses que mes collègues n’auraient jamais pu faire
passer, c’est un éclairage très différent. » n
LES METIERS DU SHERPA / ISE en ORIENTATION SCOLAIRE
ET PROFESSIONNELLE
Issu du milieu de la Formation Professionnelle,
Fouad OUDGHIRI nous raconte avec enthousiasme
ses découvertes et l’action qui est la sienne au sein
de l’équipe du SHERPA.
rent. Les moins de 16 ans doivent obligatoirement
être scolarisés ; mais on a souvent des jeunes qui refusent de retourner à l’école. Le blocage se fait sur
leur incapacité à se concentrer pendant un cours,
à rester assis calmement sans bouger pendant une
heure. Dans ce cas on essaye de négocier avec les
collèges un programme adapté à leur personnalité.
On va donc les orienter plutôt vers des stages, méthode plus vivante, plus dynamique, plus concrète et
si possible vers des activités à l’extérieur pour qu’ils
puissent bouger, aller et venir. Pour les plus de 16
ans, ceux pour lesquels la scolarité n’est plus obligatoire, la démarche est claire. On les inscrit immédiatement à la mission locale pour l’emploi ce qui leur
permet de travailler sur un projet d’insertion professionnelle incluant des rendez-vous et des rencontres
d’information avec des professionnels. C’est un accompagnement important qui peut les aider à réaliser un projet. n
Quand on m’a présenté le projet, je
l’ai trouvé passionnant. Ici on va
parler souvent du scolaire à propos
des jeunes mais on est aussi amenés à s’occuper très directement
de l’insertion professionnelle des
parents. On travaille également sur
ce sujet avec les jeunes lorsqu’ils sont en recherche
d’apprentissage ou de recherche active de travail.
Les Feuillets : La déscolarisation précose semble
être très présente. Qu’en est-il réellement ?
La déscolarisation est évidemment un sujet récur-
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LES METIERS DU SHERPA / ISE INFIRMIER
La plupart des adolescents concernés par les mesures SHERPA n’accordent aucune attention à leur santé. Michel
MOREL nous fait partager sa réflexion au sein du SHERPA.
Infirmier de formation, Michel MOREL est venu sur le tard à l’éducation. En rejoignant l’équipe du
SHERPA son projet c’est d’apporter ses spécificités de soignant, une vision et une réflexion complémentaire aux analyses plus éducative de ses collègues. Dans le concret, Michel constate : « Les fonctions
de tous les intervenants ont beaucoup de choses communes . J’ai, comme mes collègues, un certain
nombre de jeunes en référence. J’y apporte un regard qui m’est spécifique mais je n’ai pas vraiment,
même si ça reste une idée à approfondir, de jeunes qui me soient attachés seulement à cause de mes
fonctions d’infirmier. » Mais on est encore très près du début de l’histoire et le poste est en train de se
définir et de se construire.
« J’assure actuellement le suivi de 9 à 10 jeunes. Par contre on peut évidemment venir me voir pour le cas particulier
d’un jeune qui ne serait pas dans mes références tout comme je n’hésite pas à aller voir mes collègues pour parler d’une
situation éducative sur laquelle j’ai besoin de leurs spécificités.»
Pour Michel il y a largement nécessité et matière à une réflexion plus approfondie aujourd’hui sur la santé et sur les
manques constatés dans les familles à ce sujet car, par défaut, la tendance est d’aller naturellement au plus urgent. Il
a d’ailleurs proposé un projet dans ce sens. Ses interventions dans le domaine de l’éducation à la santé sont variées.
Michel confirme que l’action au quotidien est tournée vers les conseils concernant l’hygiène en général, qu’il s’agisse
d’hygiène corporelle ou d’hygiène alimentaire. n
13
UN PEU D’HISTOIRE
Par Jacques LE PETIT, DGA
Dans le précédent numéro, nous indiquions que la Société des Condamnés Libérés, « ancêtre » de notre Association actuelle, a débuté son activité en 1875. Devenue en mars 1893 la Société de Patronage de l’Enfance
Coupable et Malheureuse et des Condamnés libérés.
Pour bien comprendre ce qui a amené des personnes
bénévoles à s’intéresser alors à « l’enfance coupable
et malheureuse » à cette période, faisons d’abord un
détour historique.
quel précise les conditions du bénéficie de la charité
publique, les obligations envers les enfants durant le
placement, les moyens financiers attribués et la nécessité d’un contrôle des placements.
Abandon d’un enfant dans une « tour » créée à cet effet en 1821 suite
au décret du 18 Janvier 1811
Dès le début du 19ème siècle apparait dans les textes la
distinction entre les mineurs délinquants et les mineurs
non délinquants. Cette dichotomie perdurera et marquera l’évolution de la protection de l’enfance. On observe aussi que le législateur s’est d’abord préoccupé du
sort des délinquants avant de se pencher sur l’enfance
malheureuse. Si on excepte les lois de la Révolution et
de l’Empire sur l’assistance, il faudra attendre la troisième République pour que de nouveaux textes relatifs
à la protection de l’enfance soient publiés.
Extrait du «Recueil des Fondations et Établissements faits par le Roi
de Pologne Duc de Lorraine et de Bar » 1762
Si la tradition veut que la protection de l’enfance ait été
initiée par Saint Vincent de Paul au 17ème siècle, avec
la création d’établissements de « secours aux enfants
trouvés, vagabonds » des historiens proposent la date
du 27 juin 1793, sous la Convention, comme la première
loi sur la protection de l’enfance: « la nation se charge
alors de l’éducation physique et morale des enfants désignés sous le nom d’enfants abandonnés ».
Pour l’enfance délinquante, le Code Pénal de 1791 mentionne le mineur (moins de 21 ans) en tant que personne auteur de violence potentielle. Ce même Code
prévoit pour le mineur délinquant « le placement » en
« maison de détention » et établit la notion d’expertise pour apprécier son degré de discernement. En fait,
seul le magistrat apprécie le degré de discernement. Le
Code de 1810 reprend pour partie les articles du code
de 1791, et crée une section qui regroupe les atteintes
aux mineurs. A propos du discernement, le Code fixe à
16 ans l’âge de la majorité pénale en matière criminelle
et correctionnelle.
Le système d’assistance aux enfants, jusque là d’obédience religieuse, devient laïc. Plusieurs textes en date
des 20 mars 1797, du 27 novembre 1795, du 23 juin
1796 prolongent et étoffent ce premier texte ainsi que
le décret du 18 janvier 1811 « concernant les enfants
trouvés ou abandonnés et les orphelins pauvres », le-
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Il subordonne la responsabilité pénale du mineur à la
question du discernement : si les juges estiment que
le jeune a agi avec discernement, celui-ci doit être
condamné aux peines prévues par la loi, sous réserve
d’une excuse légale atténuante.
Vingt ans après la loi, « seules trois colonies » publiques
du type prévu en 1850 existaient. En revanche, plus de
35 établissements privés existaient en 1871 bien que
leur rôle n’eut alors rien d’officiel. Comme l’indique le
Docteur MEIGNANT dans sa thèse de droit, « l’initiative
privée était donc largement en avance sur les réalisations publiques : inspiratrice des mouvements législatifs,
elle apparaissait aussi comme un modèle pour l’administration, tant par le nombre d’institutions que par le
dévouement des personnalités qui s’occupaient des problèmes ».
Après 1850, la protection des enfants victimes, exploités
ou soumis à de mauvais traitements devient au même
titre que l’enfance délinquante, une préoccupation du
législateur. Un arsenal législatif est progressivement
constitué.
Après 1810, les débats sur la question des mineurs incarcérés sont surtout centrés sur deux points : la nécessité de les séparer des adultes, la création de maisons
d’éducation correctionnelle. Beaucoup de discussions
mais peu d’avancées jusqu’à la circulaire du 3 décembre
1832 du Ministre d’Argout (en charge de l’administration
pénitentiaire) lequel propose le placement des mineurs
non-discernants chez des « cultivateurs pour y être élevés, instruits, éduqués. Il s’agit de les assimiler aux enfants de l’Assistance. Cette préconisation sera très peu
suivie. Plus préoccupé par des questions d’ordre public,
le gouvernement apportera d’autres réponses du type
de la Maison d’Education Correctionnelle de la Petite
Roquette (en fait une prison avec isolement de nuit,
puis permanent) en 1836.
C’est donc à partir d’initiatives privées que se développent de nouveaux établissements (OULLINS, 1835 ; METTRAY, 1840 ; …) et la première société de patronage pour jeunes
détenus libérés (PARIS, 1833). Ces comités
de patronage avaient pour but de favoriser
à la sortie de prison, la réadaptation à la vie
sociale, après un séjour carcéral particulièrement éprouvant et parfois long..
Directement inspirée par les efforts de
l’initiative privée, la loi du 5 aout 1850
entendit instituer pour les mineurs
condamnés une éducation morale, religieuse et professionnelle dans des «
nouvelles structures » : les colonies pénitentiaires et colonies correctionnelles, ainsi que
des établissements pénitentiaires accueillant les mineurs enfermés au titre de la correction paternelle.
Les conséquences de la réglementation des heures de
travail pour les enfants (1841, 1847, 1874), mais surtout
la loi scolaire de Jules Ferry du 28 mars 1882 ont été des
avancées considérables pour les mineurs. Mais c’est la
loi du 24 juillet 1889 sur la protection des enfants maltraités et moralement abandonnés dans
laquelle le législateur prévoit la déchéance
de la puissance paternelle (notamment
lorsque père et mère compromettent la
santé, la sécurité ou la moralité de leurs
enfants) qui est une grande nouveauté.
Sans ambigüité, l’État affiche sa volonté de
s’engager dans l’intérêt de l’enfant. L’enfant
peut alors être considéré comme victime
et non plus comme uniquement coupable.
A côté de cet essor législatif, les sociétés
de patronage continuent à se développer,
celui fondé par Henri ROLLET à PARIS étant
le plus connu. Des organismes d’études se
créent, des conférences, colloques et voyages d’études
sont organisées en France et à l’étranger, des bulletins et
journaux paraissent , des quotidiens nationaux écrivent
des articles sur l’enfance, etc…
Nous verrons dans un prochain numéro comment l’initiative nancéienne en matière de protection de « l’enfance
coupable et malheureuse » a pris forme sous l’impulsion
de juristes, médecins, magistrats et philanthropes.n
Dans ces nouvelles structures, les mineurs seraient «
élevés en commun sous une discipline sévère et appliqués aux travaux de l’agriculture, ainsi qu’aux principales
industries qui s’y rattachent». Cette nouvelle législation
constituait un progrès considérable par rapport aux
systèmes antérieurs, mais par scepticisme quant aux
objectifs affichés, l’administration pénitentiaire ne s’en
empara pas.
Eduquer et punir : la colonie agricole et pénitentiaire de Mettray par Luc Forlivesi, Georges-François Pottier et Sophie Chassat
Presse Universitaires de Rennes (Novembre 2005)
15
REALISE POURSUIT SA DEMARCHE QUALITE
Par Jacques LE PETIT, DGA
Par une décision en date du 17 novembre 2011, les membres du Bureau ont décidé que l’Association s’engageait
dans la mise en œuvre d’une démarche d’amélioration continue de la qualité des prestations et des services. Chargé
du pilotage de ce dossier, Jacques LE PETIT poursuit sa présentation.
En juin dernier, les référents qualité des structures de REALISE ont terminé la session de formation avec le cabinet
ABAQ sur la réalisation de l’évaluation interne dans les structures des secteurs social et médico-social. Cette formation
a aussi été l’occasion d’élaborer un référentiel commun à toutes les structures de l’association. Cet outil servira donc
dorénavant de trame générale pour permettre aux établissements et services de réaliser leur deuxième évaluation
interne.
Aujourd’hui, six rapports ont été envoyés aux autorités de contrôle (ITEP/SESSAD ; SIOE ; SES ; SAEMO ; SRP ; AJES). A
la lecture des ces rapports, on observe évidemment une hétérogénéité puisque les références et les critères n’étaient
pas identiques, laquelle disparaîtra avec l’utilisation d’un référentiel unique.
Le 24 janvier dernier, les rapports d’évaluation de la Maison d’Enfants du PFS, de la MECS ADOS, du Centre Éducatif
Renforcé et du Centre Éducatif Fermé ont été présentés au Conseil d’Administration de REALISE.
Validés, ces rapports accompagnés d’un plan d’actions d’améliorations de la qualité, seront transmis aux autorités de
tarification et de contrôle.
Concernant l’ITEP, qui est aujourd’hui dans une phase de réécriture de son projet d’établissement, une évaluation
interne est prévue en 2013 puisque la précédente a eu lieu il y a déjà cinq ans.
Lorsque l’ensemble des évaluations internes des établissements et services seront terminées et validées par le Conseil
d’Administration, un cahier des charges sera rédigé, puis envoyé aux « cabinets d’évaluateurs externes » dans le cadre
d’un appel d’offres. Il faudra aussi obtenir les financements des autorités de contrôle et de tarification. n
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ASSEMBLEE GENERALE - 24 MAI 2012
L’Assemblée Générale annuelle de REALISE s’est tenue le 24 mai 2012 au Château de Remicourt à Villers-les-Nancy en
présence de nombreux salariés de l’Association et de Personnalités représentant les Mandats/Financeurs de ces actions (Aide Sociale à l’Enfance du Conseil Général, Protection Judiciaire de la Jeunesse, Éducation Nationale et Agence
Régionale de Santé).
Le Président Patrick CAISSIAL a rappelé dans son rapport moral l’importance de cette démarche annuelle d’analyse
permettant d’envisager une démarche de progrès. L’association veut se poser en acteur responsable de la Protection de l’Enfance en conduisant une amélioration de l’utilisation des fonds publics au travers d’une optimisation des
moyens mis en œuvre. Il a insisté sur la « démarche de co-construction conduite avec le Conseil Général afin que soit
préservée la possibilité d’innover sans contrainte des procédures » comme l’avait récemment souligné le Président
DINET dans la revue Forum de la CNAPE. C’est dans cet esprit de co-construction avec le Conseil Général et la PJJ que
REALISE a pu mettre en place une nouvelle mesure innovante, un suivi éducatif renforcé du jeune dans son environnement familial, lequel est mis en œuvre par un nouveau service, le SHERPA.
Patrick CAISSIAL a également souhaité mettre en avant l’évolution positive et encourageante des relations qui existent
à ce jour entre REALISE et ceux qui lui confient les jeunes. Le Président a en outre salué la démarche de qualité entreprise au sein de REALISE pour une meilleure efficience, la qualité du travail effectué par les 420 professionnels de
l’association, les efforts et la fierté de ceux qui, parmi eux, ont conclu avec succès une formation diplômante ainsi que
les 67 actions de formation menées au profit de 225 salariés et représentant 10 500 heures, un véritable investissement pour l’avenir.
Enfin, REALISE a accueilli 4 nouveaux administrateurs qui, par leur implication, contribueront à travailler dans le sens
de l’objectif prioritaire : positionner le jeune accueilli au centre des préoccupations et l’accompagner efficacement.
La remise de Médailles du Travail à 27 salariés de REALISE pour 15, 25 et 35 ans de fidélité et la mise à l’honneur des
retraités de l’année 2011-2012 ont conclu cette Assemblée Générale. n
De gauche à droite : Claude GUILLERME, Patrick CAISSIAL, Nicole CHARPENTIER-BAJIC,
Laurent JUPILLE, François RICHARD JOUBERT et Pierre AMADIEU.
17
LES MEDAILLES DU TRAVAIL - 2012
La remise des médailles du travail est toujours un moment important dans une entreprise, encore plus lorsqu’il s’agit
d’une association qui récompense 27 salariés pour leur fidélité depuis 15, 25 et 35 ans !
C’est donc au château de Remicourt de Villers, à la suite de l’Assemblée Générale, que 21 salariés présents sur 27 élus
ont reçu, de la main des administrateurs, la médaille bien méritée. Ce fut l’occasion de mettre à l’honneur, sous les
applaudissements, les retraités de l’année qui ont reçu un cadeau offert par le Comité d’Entreprise. n
15 ans
Séverine BOCKHORNI
Corinne CHEVALME
Maria DE CARVALHO
Juan Manuel GARRID
Christine GELLENONCOURT
Valérie MALEY
Patricia THIRIET
Retraités 2011-2012
Danielle DESEAU
Gérald GARATTI
Françoise GUDIN
Chantal GUIRAUD
Serge JULIEN
Alain NOWICKI
Jean PIERREL
Christian ZANNIER
Françoise DEBART
35 ans
25 ans
Catherine BENEDETTI
Véronique CHASSIGNEUX
Luisa FOMBUENA
Véronique GALMICHE
Fabienne MARCHAL
Isabelle MARTIN
Fabien NEU
Emmanuelle VENTURI
Maryse GALILEE
Johnyka GRACE
Josette HAMARD
Edith KOBLER
André MANSUY
Claude MARTIN-MARCHAL
Claude GARNIER
Hugues SPLINGARD
18
Marie-France BARBAISE
Bernard BARBIER
Sylvie BRUNNER
Alain CHARTIER
Françoise DEBART
Maryse GALILEE
Monique GUILLET
Josette HAMART
Andrée KLEIN-RUF
Yves MOTZ
Evelyne MULLER
Jean PIERREL
NOUS LEURS SOUHAITONS LA BIENVENUE !
Notre association continue de croître et les équipes de s’étoffer. Nous souhaitons donc une chaleureuse bienvenue
aux nouveaux arrivants en CDI. n
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Nouvelles brèves
ANNIVERSAIRE REALISE
Les 29 et 30 mai 2013, l’association REALISE organisera plusieurs manifestations
au Domaine de l’Asnée pour commémorer son engagement depuis presque 140
ans pour les enfants et adolescents en
Meurthe-et-Moselle. Des expositions
retraçant l’histoire de l’association, des
conférences, des présentations des
missions actuelles auront lieu. Le programme définitif vous parviendra prochainement. Retenez bien ces dates. Si
vous possédez des documents anciens
(photos, vidéos, témoignages écrits,…)
qui pourraient contribuer à enrichir les
expositions, merci de prendre contact
par mail auprès de Jacques LE PETIT à
l’adresse suivante :
[email protected]
REVES DE GOSSE
Une journée inoubliable
Pour la 7ème année consécutive, la Caisse d’Epargne soutient l’association des Chevaliers du Ciel et son opération Rêves de Gosse qui fêtera son
15ème anniversaire cette année. Créée par l’association les Chevaliers
du Ciel, cet engagement confirme le soutien de la banque auprès des
enfants exclus par la maladie ou défavorisés par la vie.
L’édition du Tour 2012 passait par la Lorraine avec pour base l’aérodrome
de Lunéville où se déroulaient une animation et les baptêmes de l’air offerts aux enfants.
Pour REALISE, ils étaient huit à profiter de cette inviation transmise au
PFS, à la maison d’Enfants du PFS, à l’AJES et au SHERPA. Nous vous proposons donc de partager quelques photos prises par les accompagnateurs de cette journée.
2 MECENES POUR LE STUDIO
«GRIMM»
Le studio Grimm, l’un des ateliers éducatifs de l’ITEP-Escale, va pouvoir être
prochainement rénové (probablement
pendant les vacances de la Toussaint)
grâce à un don de 4 500 € attribué
par «Écureuil et Solidarité» Fonds de
Dotation de la Caisse d’Epargne Lorraine-Champagne-Ardennes. De son
côté le Club Rotary-Nancy Emile Gallé a
offert un don de 500 € qui permettra de
compléter la dotation en matériel. Nos
remerciements et notre reconnaissance
à ces deux donateurs pour leur soutien.
Le Fonds de dotation de la Caisse d’Epargne
Lorraine Champagne-Ardenne
Les Feuillets de REALISE - N° ISSN en cours
Les Feuillets de REALISE : bulletin d’informations de l’Association REALISE, 4 boulevard Lyautey, 54600 VILLERS LES
NANCY. Directeur de la publication : Patrick CAISSIAL.
Ont collaboré à ce numéro : Patrick CAISSIAL, Nicole CHARPENTIER-BAJIC, Lise FAUSSABRY, Vincent FRANCOIS, Maryse FREYERMOUTH, Pierre-Yves HEURTEL, Erik JACQUINOT, Jacques LE PETIT, Claire MATHIS, Michel MOREL, Fouad
OUDGHIRI, Amina SHILTZ, Thierry VIDART...et tous ceux qui apparaissent sur les photos et que nous remercions.