L`eau, entre abondance et rareté

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L`eau, entre abondance et rareté
 L’eau, entre abondance et rareté
Introduction
L’eau est une ressource naturelle abondante. Pourtant, face à l’augmentation
de la consommation, elle devient aujourd’hui un enjeu majeur. Ainsi, quelles sont les
données du problème de l’eau dans le monde ? On peut alors se demander quels
sont les besoins et les ressources des sociétés humaines en eau, et de fait, quels
aménagements et quelles tensions vont en résulter ? Nous verrons pour cela un
premier point sur l’inégale répartition de l’eau, puis la maîtrise de l’eau et ses
conséquences, et enfin nous verrons en quoi l’eau est « l’or bleu » du XXIème siècle.
I-L’eau, un patrimoine naturel inégalement réparti
A)-L’eau est un patrimoine naturel globalement abondant
L’eau est tout d’abord présente dans les océans qui couvrent 71% de la
surface terrestre : c’est de l’eau salée. 57% de l’eau disponible sur terre est de l’eau
salée. Les procédés de dessalement de l’eau de mer existent, mais ils restent très
couteux. On ne compte que 3% d’eau douce sur terre. On la trouve :
-pour 75%,
dans la glace qui est difficilement utilisable par et pour l’homme ;
-pour 15% dans l’atmosphère et dans les continents, l’eau « utilisable »
est contenue dans les lacs, les fleuves, les rivières et les nappes. Cela représente
environ 0.75% de l’eau présente sur terre.
Mais la majeure partie des ressources en eau est renouvelable grâce au cycle de
l’eau. L’eau contenue dans les océans s’évapore ce qui va former des nuages de
vapeur d’eau dans l’atmosphère. Ces nuages apportent des précipitations sur
l’océan et les continents ce qui va former des cours d’eau qui vont s’infiltrer dans les
nappes pour rejoindre les océans.
L’eau est une ressource renouvelable, mais pas illimitée. L’eau douce ne
compte que 0.70% de l’eau sur terre et est donc une ressource fragile.
B)-L’eau est une ressource inégalement partagée
On peut mesurer l’eau grâce au climat, au relief, à la flore et à la densité de
population. On remarque qu’il y a des régions très arrosées : autour de l’équateur
(convergence intertropicale), le long des littoraux (Amazonie, Afrique centrale, Asie
du sud-est, Indonésie). Il y a aussi des régions bien arrosées qui correspondent aux
zones tempérées. En revanche, il y a aussi de nombreuses zones arides ou semiarides : le long des tropiques, dans les régions polaires (ouest de l’Amérique centrale
et latine, le Sahara, le Moyen-Orient, l’Australie).
Les ressources en eau sont donc inégalement réparties. La présence des nappes
fossiles non renouvelables ne permet pas de rééquilibrer cette répartition.
Certaines zones peuvent connaître des périodes d’humidité très variables
dans la même année. C’est le cas par exemple des zones tropicales en Asie du sud-
est. On appelle cela le régime de la mousson. L’inconvénient majeur est bien sûr les
inondations, mais l’eau est aussi un avantage pour les cultures. On peut aussi voir
cela en France dans les régions méditerranéennes où les pluies sont rares, mais
parfois violentes, ce qui entraîne des inondations et des écoulements de terrains sur
ces terrains secs.
Dans certains climats, en particulier dans les régions soumises à la mousson,
les précipitations sont très irrégulières au cours de l’année créant des crues
menaçantes parfois des régions sèches d’inondations ou poussant parfois les
populations à aménager les cours d’eau lors des crues.
La présence d’eau ne suffit pas à satisfaire les besoins. Pour que l’eau soit
consommable, il faut qu’elle soit salubre (c’est-à-dire saine). On la trouve dans les
pays du nord : Europe, Amérique du nord, Japon, Australie, quelques pays
d’Amérique du sud, Algérie, Égypte, Arabie Saoudite… Au contraire, on ne la trouve
pas en Afrique centrale ou au Moyen-Orient. Cette répartition ne correspond pas à
celle des disponibilités, car on remarque que des pays où il y a beaucoup d’eau n’ont
pas accès à l’eau salubre et inversement.
Comment expliquer cette apparente contradiction ? Pour les pays où l’eau
salubre manque, cela s’explique par l’absence du processus d’épuration d’eau, car il
est difficile de contrôler l’état des canalisations et difficile d’assainir assez d’eau pour
des populations en très forte croissance. C’est encore pire dans les campagnes où
les puits sont rares, malsains et où il faut plusieurs heures de marche pour aller la
chercher. Les principales maladies liées à l’eau sont le paludisme, le choléra… à
cause des vers, des parasites, des excréments (humains ou animaux). Les zones les
plus touchées sont l’Afrique, le Moyen-Orient, l’Amérique du Sud et l’Asie de l’Est. Ce
sont les pays où l’accroissement démographique est très rapide. Un tiers des décès
et 80% des maladies dans les pays du sud sont dus à l’aménagement de l’eau :
barrages, canaux d’irrigation constituent les eaux stagnantes dans lesquels se
développent des parasites. C’est pourquoi ces eaux doivent être assainies ce qui
implique des dépenses et donc des difficultés pour les pays les plus pauvres. Les
pays pauvres sont donc contraints de multiplier les aménagements pour recueillir
l’eau alors qu’ils n’ont pas les moyens suffisants pour les entretenir.
Les pays arides où il y a suffisamment d’eau salubre (Algérie, Arabie saoudite,
Égypte…) ont su maîtriser la salubrité de l’eau par des moyens techniques
(barrages…) ou financiers, par exemple en Arabie Saoudite avec les usines de
dessalement.
C’est donc bien la capacité d’investissement des états qui détermine en bonne
partie l’accès à l’eau. Les pays les plus riches sont capables de procurer une eau
saine et en quantité suffisante à leur population, même dans une situation d’aridité.
Alors que certains pays pauvres très humides ne disposent pas des moyens
suffisants pour assainir leur eau abondante. On retrouve donc la fracture Nords/Suds
dans l’accès à l’eau.
De ce fait, les sociétés du nord et du sud ont des besoins différents adaptés à leurs
ressources et à leurs capacités. On consomme beaucoup plus d’eau dans les pays
riches : par exemple, en Europe, une personne prélève en moyenne 1 000 à 3 000
m3 d’eau par an, alors qu’en Angola, une personne prélève 200 m3 d’eau par an.
C)-Des besoins en eau croissants liés à des usages multiples
Les usages de l’eau sont nombreux :
-essentiellement agricoles : l’irrigation est en plein développement à la fois pour des
motifs démographiques et pour des raisons de rendement. L’agriculture absorbe 75%
des besoins planétaires en eau. Elle concerne, évidemment, les régions arides où
elle seule permet l’agriculture, mais elle concerne aussi les pays les plus riches pour
constituer des récoltes supplémentaires, étendre les surfaces cultivées… Mais son
usage intensif est critiqué en raison des permet importantes qu’elle induit notamment
par évaporation ou par usage intensif ;
-industriels : pour le refroidissement de nombreuses installations (usines
sidérurgiques, réacteurs nucléaires…), pour le nettoyage ou comme matière
première. Ces usages sont le plus répandus dans les pays industrialisés ;
-usage domestique : pour l’hygiène, la cuisine, les loisirs (piscine, jardinage, golfe,
parcs d’attractions…). Ces usages sont plus développés dans les pays riches. On
peut qualifier ces besoins de non essentiels, car de nombreux pays du sud qui n’ont
pas accès à l’abondance en eau s’en passent (urbanisation : fontaines utilitaires qui
sont maintenant esthétiques) ;
-transport : il s’agit de creuser des canaux pour permettre une meilleure intégration
de certaines régions isolées et de favoriser le transport de matières lourdes. Il s’agit
aussi de rendre un fleuve praticable par la construction de barrages (par exemple, le
Nil).
Les usages de l’eau sont très différents, du plus utile au plus récréatif. La
demande en eau est croissante et particulièrement forte dans les pays du nord (un
américain consomme en moyenne deux cents fois plus d’eau qu’un Africain). Il faut
donc sans cesse trouver les moyens techniques pour recueillir et utiliser l’eau comme
il convient. Cette maîtrise de l’eau est depuis longtemps nécessaire d’où des
aménagements.
II-La maîtrise de l’eau transforme les espaces
A)-La maîtrise de l’eau nécessite des aménagements spécifiques
L’eau est une ressource limitée. Il convient donc de savoir la capter dans de
bonnes conditions.
L’eau a toujours été un facteur décisif dans l’organisation des sociétés
humaines. Fleuves, lacs et rivages regroupent souvent les hommes depuis des
temps très anciens jusqu’à aujourd’hui. C’est particulièrement dans les zones les
plus arides où les sociétés ont dès l’origine concentré leurs activités près des rares
points d’eau (par exemple avec l’aménagement de la vallée du Nil).
Les techniques de captation sont :
-les puits : il s’agit d’aller chercher l’eau dans des nappes peu profondes avec un
système de poulies ou de balancier. Dans les zones arides, on puise dans des
nappes qui ne sont pas toujours renouvelables ce qui conduit, à terme, à leur
épuisement. Cette technique traditionnelle est toujours utilisée dans les civilisations
agricoles dans des zines arides. Aujourd’hui, ces puits utilisent souvent une force
motrice : les motopompes ;
-pour amener l’eau d’un point à un autre, on creuse des canaux et on bâtit des
barrages de dérivation. Certains pays ont ainsi pu développer une agriculture très
compétitive depuis longtemps (la Hollande) ou plus récemment (la Californie) ;
-des barrages modernes de beaucoup plus grande ampleur offrant plusieurs
intérêts : stocker l’eau, la dériver, mais aussi recueillir l’énergie hydraulique et
stabiliser le débit d’un cours d’eau. Il ne s’agit donc plus de recueillir et répartir l’eau ;
-les forages pour atteindre l’eau des nappes souterraines ;
-les réseaux de canaux, de tubes (par exemple, les aqueducs) ;
-aujourd’hui, des techniques de captation ont vu le jour. Mais ces innovations ne sont
pas à la portée de tous. Les compagnies du nord dominent, car ce secteur requiert
beaucoup de fonds et de chercheurs d’où un prix de plus en plus élevé de l’eau.
Les sociétés humaines rejettent de plus en plus des eaux usées et impropres
à la consommation. Ces eaux doivent donc être traitées dans des usines d’épuration
utilisant des techniques performantes. La question de l’assainissement de l’eau
montre clairement une inégalité nord/sud au niveau du traitement de l’eau.
B)-Ces aménagements transforment l’espace
De nombreux paysages ont été remodelés par l’homme. On constate que
l’irrigation traditionnelle se fait sur des champs de petites tailles, soient géométriques
ou irrégulières sur les pentes, versants ou en fond de vallée grâce à un réseau de
canaux et de rigoles. Alors que l’irrigation moderne s’effectue sur des champs plus
vastes et réguliers (géométriques : rectangulaires ou circulaires selon le système
d’exploitation). L’eau est apportée par des canaux ou des réseaux de tubes.
La construction de barrages présente de nombreux avantages pour les
sociétés et l’agriculture. Mais leur gigantisme transforme les conditions naturelles au
point de, parfois, faire apparaître de nouveaux problèmes environnementaux.
III-L’eau : « l’or bleu » du XXIème siècle
A)-L’eau est une ressource convoitée et de plus en plus chère
L’eau est une ressource convoitée qui peut provoquer des tensions. Entre
états, l’eau est parfois disputée entre deux pays quand leurs disponibilités en eau
sont limitées et dépendent de la même source, c’est-à-dire la majeure partie du
temps d’un fleuve. En effet, l’eau ignore les frontières (par exemple, le Jourdain). Le
problème s’installe quand l’eau s’écoule en dehors du pays duquel elle est originaire.
Le pays en aval peut alors le débit du fleuve et la qualité des eaux baissée en raison
du pompage qui est fait en amont (c’est le cas avec la Syrie et l’Irak qui sont en aval
et la Turquie qui est en amont). Des tensions peuvent aussi apparaître quand un
pays pompe excessivement dans une nappe partagée par plusieurs états. Ces
questions peuvent atteindre des degrés très forts et provoquer des conflits. Des
conflits peuvent aussi avoir lieu entre régions déficitaires et excédentaires, mais
également au niveau des utilisateurs, par exemple entre agriculteurs et stations
touristiques.
B)-L’eau est une ressource menacée
La menace sur l’eau vient de différents niveaux : les rejets domestiques
(produits chimiques tels que la lessive, le produit vaisselle ; produits organiques), les
rejets industriels, les rejets agricoles, ou encore les infiltrations d’eau de mer dans les
nappes phréatiques littorales.
L’eau est une ressource renouvelable à condition de ne pas la dégrader. Or, la
grande majorité des usages que l’on fait de l’eau conduisent à sa dégradation. Ce
qui fait que l’eau rejetée est non seulement impropre à la consommation, mais
risquée également de polluer les eaux dans lesquelles elles se déversent. Le
retraitement de l’eau est alors une obligation, mais il n’est pas fait partout (les pays
les plus pauvres n’en ont pas les moyens).
La consommation en eau par habitant ne cesse de croître alors même que la
population croît aussi. A ce rythme, la consommation globale d’eau dans 20 ans
suppose le prélèvement d’un volume d’eau tel que cela sera impossible à réaliser,
insoutenable pour la planète.
Conclusion
Si on veut éviter l’accroissement des inégalités et les situations de pénuries
dramatiques, il faut nécessairement changer nos pratiques. Comment faire ? On peut
réaliser des économies d’eau à tous les niveaux. Dans la consommation urbaine en
essayant d’améliorer les réseaux de distribution d’eau et en limitant les gaspillages
dans l’utilisation quotidienne. Dans la consommation industrielle, par exemple
lorsqu’une petite partit de l’eau est consommée, le reste sert au refroidissement.
Cette eau peut être recyclée. Les lois anti-pollution incitent à purifier l’eau, mais aussi
à l’économiser : les industries, si elles sont incitées à le faire, peuvent réduire de 40 à
90% leurs besoins en eau. C’est donc là un choix politique à faire, mais qui présente
l’inconvénient de créer des dépenses supplémentaires. Dans la consommation
agricole, on peut essayer d’irriguer de façon plus économe. Enfin, on peut penser
que le procédé de dessalement de l’eau de mer est le plus efficace, car il puise dans
une ressource quasi illimitée, mais c’est encore très cher et peu rentable. La prise de
conscience et les actions doivent être à la fois collectives et individuelles.

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