Istanbul au XIXe Siècle

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Istanbul au XIXe Siècle
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MARS 1950
Istanbul au X IX e Siècle
İstanbul — 1853 de Sultan Ahmed meydanının alınmış ilk fotoğrafı
Istanbul — La place de Sultan Ahmed
(photo prise en 1853)
La vie sur le mode européen, qui a commence à
Istanbul. Beaucoup de m ilitaires firen t venir leur f a ­
p artir de la fin du X V IIIe siècle, a pris de l ’extension
m ille et cela a contribué
au début du X IX e siècle et surtout ap rès l'ab o litio n
d a va n ta g e à la population le genre de vie de l'O c ­
aussi à
fa ire co nn aître
des Ja n issaire s.
La nouvelle tenue vestim entaire, adoptée pour
cident.
l’arm ée et l ’adm inistration, imitée p ar le public, n'a
à bord du navire de guerre a n g la is « B la d e » . Avec
pas tard é à s'y rép and re. De grandes transform ations
l’autorisation du « P a d ic h a h » , le grand v izir, le mi­
Le premier bal à Istanbul a été donné en 18 29,
ont été apportées au x relatio ns so ciales, au x am use­
nistre de la M arine, celui de la G uerre et leur suite y
ments, à la vie cultu relle, au x transports, au x métho­
ont assisté, ainsi que d ’autres im portantes p erso n na­
des d 'e n tr'aid e so ciale.
lités. Les hommes d 'Etat ottom ans avaie n t été fort s a ­
L’ancienne vie tran q u ille d’ Istanbul a chang é. Le
tisfaits de ces réunions de type o ccid en tal. Hüsrev
public a commencé à prendre goût à se trouver plus
p ach a, quittant le n avire à une heure très ta rd ive ,
souvent ensem ble, à p arcourir la v ille plus ra p id e ­
a v a it exprim é l'intention d 'o rg an iser une p a re ille ré ­
ment, à co nn aître de plus près
union, à la prem ière occasion dans son « y a li»
les
p ays étrangers
du
par la voie du commerce.
Les gens du Tanzim at ont imprimé un élan accru
Bosphore.
à ce mouvement. Les vézirs qui avaie n t connu l'Europe,
o rg aniser à leur tour des b als. On cite ceux de 1854
ont commencé à substituer, dans leurs “ k o n ak ”
au x am bassades de France
et
Puis, les am bassades étrangères ont commencé à
et d 'A u trich e, ceux de
vieu x
1856 au x am bassades de France égalem ent et d ’A n ­
usages d 'O rie n t. L'aspect de notre existence quoti­
gleterre. Ju sq u ’alo rs, il n’était pas d'usage que le
dienne s'est m odifié.
Sultan se rendit à une invitation chez des étrang ers,
leurs « y a li» , le genre de vie d ’O ccident
au x
Les spécialistes, les artistes, les m ilitaires ch a r­
qu’il se trouvât au milieu d ’un groupe étrang er. Ab-
gés de la réform e et de l’ entraînem ent de l’arm ée,
dülm edjid, rom pant avec cette traditio n, p articip a per­
qui ven aie n t de l ’étrang er, introduisirent dans l'a r ­
sonnellem ent au x bals au x am bassades d 'A n g leterre
chitecture de la v ille et dans ses divers autres aspects,
et de France. Ce fut là un grand événem ent tant pour
des conceptions nouvelles, un goût nouveau qui se ré­
la Turquie que pour les am bassades intéressées.
pandirent rapidem ent. En particu lier, lors de la guerre
Sous le règne d 'A b d ü la ziz, les bals devinrent en ­
de Crim ée, les arm ées alliée s étab lirent leurs bases à
core plus fréquents. L'Egyptien M ustafa Fazil pacha
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TOURING ET AUTOMOBILE CLUB DE TURQUIE
o rg an isa un bal masqué dans sa v illa de T ch a m lid ja;
Sard e venu à cet effet à Istan b ul, fit une ascension en
les Jeunes Turcs, tels que N am ik Kem al b ey, Z iy a bey,
ballo n en présence du So uverain , des dign itaires et
Ebü zziya Tevfik bey y participèrent sous des travestis­
d'une fo ule de m illiers de spectateurs à H a y d a rp a c h a .
sements divers.
Au bout d ’un certain temps, il disparut au x reg ards.
Parmi les partisans les plus désignés des moeurs
Il n’é tait plus question, dans toutes les conversations,
européennes, Kétchéd jizad é Fuad p ach a donnait des
que de cet homme v o la n t. Finalem ent, le même jour,
bals fréquents et des garden
p arty dans sa v illa
vers le soir, notre Sarde atterrit aux abords de Pazar-
de Tchoubuklou. Ces réunions où les usages o cciden­
keuy. Q uelques ¡ours plus ta rd , le ballo n et ses agrès
taux
étaient ram enés à Istanbul et lui avec naturellem ent!
se
m êlaient au x
traditions
d'h o sp italité
de
l'O rien t, charm aient les invités et suscitaient leur plus
vive ad m iratio n.
C 'est au x
X IX e siècle, sous
le
règne de M ah-
mud II, que la publication du prem ier jo urnal commen­
En ville égalem ent, on ouvrait des locaux qui
ça à Istanbul. En 1 8 3 3 , une sa lle de lecture fut ou­
étaient fréquentés en commun p ar les étrang ers des
verte pour les étrangers à Beyoglu. On y trouvait des
deux sexes, des salles de danse notamment et des
livres et revues des prin cipau x pays d ’Europe.
règlem ents de police étaient étab lis à l'ég ard de ces
Dans les cafés qui commencèrent à être ouverts
établissem ents. Il arriv a it aussi que l'on en créait sans
à
solliciter d ’auto risation. C ’est ainsi que des mesures
aussi les jo urnaux.
B eyazid , sous le règne d'A b d ülm éd jid , on lisait
policières durent être prises “ contre le nommé Djiva-
Désorm ais, les hôtels étaient créés à Istanbul au
ni, de n atio n a lité britannique, restaurateur, qui a o r­
lieu et place des « h a n s» , les fab riq u es se substituaient
ganisé un b a l, sans l'autorisation requise au lieu dit
au x métiers fo nctio nnant à la m ain, des expositions
Tép éb achi, à Beyo glu” .
étaient créées. La prem ière exposition des produits
Notre ancien train de vie com portait une certaine
non chalance, un certain laisser - a lle r. Nos logem ents,
nos v illa s , étaient ouverts à toute heure au x visiteurs.
Les
vizirs,
les
hommes d 'E ta t,
recevaien t
des fab riq u es eut lieu sous Abdülm édjid au lieu dit
«Sep etd jiler Keuchku».
L’idée des jardins publics a été introduite à Istan ­
plus de
bul égalem ent au X IX e siècle. A jours fixe s, les vastes
plaign an ts et de porteurs de requêtes chez eux qu’à
parcs et les bosquets des maisons de cam pagne d 'A li
leurs départem ents o fficie ls. Les gens du «Tan zim at»
p ach a, à Bebek, du prince héritier A bdulham id efendi
ont adopté dans ce dom aine égalem ent les usages
à T a ra b y a , de Kétchéd jizad é Fuad p a c h a , à Tchou-
o ccid entaux.O n a fix é «quelles nuits, et à quelles heu­
bouklou, étaient ouverts au public et les habitants
res, les logements des d ig n itaires, ulém as et fo nctio n ­
d ’ Istanbul y passaien t des
n aires, pourraient être ouverts, la nuit au x visiteurs.»
milieu des fleurs et des arb res.
moments
ag ré ab le s au
Des changem ents ont été apportés aussi au goût
L’ exercice de la m édecine égalem ent a v a it com ­
du public en m atière d'am usem ents. Tan dis que les
mencé à revêtir le caractè re d'une oeuvre d 'e n tr'aid e
diseurs o rientaux ou «m ed dah» continuaient à être
so ciale . «En vue d 'o ffrir une fa c ilité à ceux qui, par
en vogue, on créait
des théâtres à
Istanbul,
des
suite d'une indisposition
soudaine,
la
nuit, éprou­
troupes étrangères donnaient des représentations à
vaien t la nécessité d 'ap p e le r un médecin» on avait
Beyoglu et à C h eh zad éb ach i.
ouvert en divers lieux des
M ais les
acro b ates, qui
constituaient un des
(n eubet d ü k k ia n la ri)
qui
«m agasins de
garde»
n’étaient autres que
les
amusements traditionnels d 'Istan b u l, continuaient à
pharm acies. Il y a v a it là pendant toute la nuit des
fa ire recette sur les lieux publics et à leurs tours et à
«m édecins et chirurgiens de g a rd e » .
leurs éb ats. Le K aptan p ach a a v a it autorisé les acro ­
Le public d'Istanbul vit pour la prem ière fois un
bates arm éniens « à exercer leur art, chaque an n ée, à
bateau à vapeur en 1 8 2 6 . Et il l'a p p e la «bug ghémis-
la saison des v illé g iatu re s, sur le terrain situé derrière
si» , parcequ ’il m archait p ar ses propres m oyens. Puis
Taksim , à Beyo glu».
les vapeurs se m ultiplièrent, supplantèrent, au Bos­
Les acrobates plus h abiles étaient emmenés
d ’Europe. Mehmed II en a v a it fa it venir un d 'A utriche.
phore, les p a za r k a y ik la ri et devinrent un moyen de
comm unications d'usage g é n é ral.
Un acro bate an g lais «e xe rça it son art» à la Cour
Le commerce devint aisé , grâce au x vapeurs. Les
d ’A bdülm édjid. Le p a la is ottoman av ait d ’ailleurs un
masses de m archandises que fa isa ie n t ven ir, au début
cad re d ’acro bates et ils exécutaient divers tours sous
du siècle, les grossistes im portateurs étaient vendues
la direction du D jam bazb ach il
au x enchères, au plus
En 1844, une nouvelle attraction a lla it être o f­
ferte au public d ’ Istanbul. Pour la prem ière fo is, un
o ffran t. Ultérieurem ent, les
m agasins furent créés et les ventes organisées.
Haluk Y. ÇEHSÜVAROGLU
Kişisel Arşivlerde İstanbul Belleği
Taha Toros Arşivi