levier économique de la supply chain
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LM276_P028-P039_Assises_05-Entrprise 26/06/13 12:52 Page28 ( ) Stratégies ÉVÉNEMENT Le Carrefour Assises de la Logistique, animé par Catherine Fournier, s’est tenu le 4 décembre à Paris, au Centre de conférences Paris Victoire (9e). Les Assises de la Logistique Massifier et mutualiser les transports : levier économique de la supply chain Un des grands enjeux de la supply chain est d’arriver à massifier des transports de plus en plus segmentés, mais également de les mutualiser afin de les rendre plus rationnels et économiques. Les conférences > Transports : quels coûts, pourquoi les mutualiser ? Interventions d’Alain Borri et Xavier Villetard, directeurs associés, cabinet bp2r. .......................................................................................... > Unilever : mutualisation du transport avec Stef Interventions de Philippe Roche, directeur de la distribution chez Unilever et Dominique Thenault, directeur comptes clés du groupe Stef. ........................................................................................... > Mutualisation des flux entre Mars, United Biscuits et Saupiquet Interventions de Christophe Vicente, customers development manager du groupe Mars, Valérie Picq, logistics & distribution manager du groupe United Biscuits, Hubert Hecquet, responsable logistique du groupe Saupiquet. 28 LOGISTIQUES MAGAZINE // JANVIER-FÉVRIER 2013 // N° 276 @ Retrouvez les interviewes audio des conférenciers des Assises de la Logistique sur la Newsletter Hebdo de Logistiques Magazine (parution tous les vendredis). HUBERT HECQUET, responsable logistique, groupe Saupiquet. CHRISTOPHE VICENTE, customers development manager, groupe Mars. ALAIN BORRI, directeur associé du cabinet bp2r. DOMINIQUE THENAULT, directeur comptes clés, groupe Stef. http://www.wk-transportlogistique.fr/ outils/upload/ newsletter-log-mag.html N ° 276 \ \ JANVIER-FÉVRIER 2013 \ \ L O G I ST I Q U E S M A G A Z I N E 29 LM276_P028-P039_Assises_05-Entrprise 26/06/13 12:53 Page30 ( ) Stratégies ÉVÉNEMENT La mutualisation s’impose ! A près trois ans déjà difficiles, l’année 2013 s’annonce encore plus compliquée et problématique pour l’activité du transport routier de marchandises en France. Tel est le triste constat qu’ont d’abord dressé Alain Borri et Xavier Villetard, directeurs associés du cabinet conseil bp2r, spécialisé en transport. Selon la dernière étude du cabinet, tous les indicateurs conjoncturels du secteur en 2012 ont été au rouge. « Depuis 2010, l’indice des coûts est supérieur à l’indice des prix du transport et l’écart ne cesse de s’accentuer », a exposé Xavier Villetard. La raison ? Le recul de la demande de transport couplé à une offre qui reste soutenue. « Le transport de marchandises est à l’image de la dégradation de la situation économique mondiale. Il Sur la base d’un constat peu reluisant sur la situation du transport routier de marchandises en France, le cabinet conseil bp2r a délivré ses conseils, exemples à l’appui, pour mener à bien la mutualisation du transport, levier d’optimisation des coûts et de la qualité de service pour les transporteurs auprès de leurs clients chargeurs. y a eu moins de trafics à distribuer en Europe, ce qui est lié à la baisse des volumes de conteneurs en provenance d’Asie. Les clients chargeurs ne sont pas euphoriques. Leurs activités ont stagné ou régressé. Du coup, ils cherchent à réduire leur charge et notamment le coût de leurs achats de transport. Jamais les transporteurs n’ont ainsi été aussi fragilisés et inquiets », a analysé Alain Borri. « Passée en dessous des 35 milliards de tonnes kilomètres, la demande de transport est en baisse pour trois raisons principales : la diminution de la production industrielle, la perte d’activités du pavillon français dans le transport international au profit des Polonais, Espagnols et Allemands, moins chers, et le développement du cabotage des transporteurs étrangers dans l’Hexagone », a précisé Xavier Villetard. Alors qu’en même temps, l’offre de transport reste assez soutenue. « Avec 4 000 nouvelles immatriculations de véhicules enregistrées par mois, les transporteurs ont poursuivi leur logique de modernisation de leur flotte sur un marché français qui compte 40 000 entreprises de transport dont 80 % sont des TPE de moins de 10 salariés souvent en grande difficulté », a-t-il ajouté. encore pénaliser les transporteurs tricolores au profit de leurs homologues étrangers », s’est inquiété Alain Borri. Meilleure compétitivité des entreprises. Dans une telle Un marché surcapacitaire. Les transporteurs sont ainsi d’autant plus pessimistes pour 2013 qu’ils l’étaient pour 2012. C’est ce qui ressort d’un sondage de bp2r effectué auprès de 222 entreprises de transport routier. Les résultats sont éloquents : 76 % d’entre eux s’attendent à une stagnation ou à un recul des volumes dans les six prochains mois, contre 65 % consultés en 2011 pour 2012. 73 % ne prévoient pas de recruter de conducteurs au cours du premier semestre 2013, contre seulement 54 % pour les six premiers mois de 2012. 58 % des transporteurs interrogés considèrent que le marché sera sur-capacitaire en 2013, contre 41 % pour 2012. Enfin, pour couronner le tout, 2013 sera une période charnière « Mutualiser ses opérations de transport permet de réduire le nombre de kilomètres parcourus à vide, d’améliorer le taux de chargement des véhicules et d’augmenter les fréquences de livraisons », Xavier Villetard, directeur associé du cabinet bp2r. qui verra émerger trois nouvelles contraintes qui ne sont pas de nature à arranger la situation du transport. « La généralisation des gros camions de 44 tonnes au 1er janvier 2013, qui contribuera certes à réduire le nombre de véhicules sur les routes, conduira à des gains de productivité de 15 % mais fera chuter la demande de transport. La mise en place de l’écotaxe pour les poids lourds au premier juillet sera une fiscalité de plus supportée par les transporteurs, même si on s’oriente vers sa répercussion totale dans le prix du transport. Et le projet de libéralisation totale du cabotage en Europe au premier janvier 2014 devrait » perspective défavorable, seule la mutualisation peut constituer un réel levier d’optimisation pour les acteurs du transport routier de marchandises. « Mutualiser ses opérations de transport permet de réduire le nombre de kilomètres parcourus à vide, d’améliorer le taux de chargement des véhicules et d’augmenter les fréquences de livraisons », a rappelé Xavier Villetard. L’équation de la mutualisation qui tient à l’amélioration du taux de service, associée à la réduction des coûts et à la diminution des émissions de CO2, se solde par une meilleure compétitivité des entreprises. Or le niveau des expériences et des opérations de mutualisation en France est très avancé par rapport aux autres pays européens. « La France, où beaucoup d’initiatives de la sorte ont émergé, est plutôt leader dans le domaine en Europe. Le secteur agroalimentaire en est le principal moteur », a souligné Xavier Villetard. Des réalisations concrètes et des projets avancés. Pour illustrer son propos, le dirigeant de bp2r en a profité pour présenter six cas concrets de scénarii de mutualisation dans l’Hexagone, parmi plusieurs dizaines d’opéra- bp2r, le conseil expert sur le transport de marchandises Fondé en 2005 par Laurent Recors, Alain Borri et Xavier Villetard, trois associés qui ont longtemps évolué dans l’univers de la supply chain, bp2r est un cabinet conseil positionné exclusivement sur le transport de marchandises. Il intervient dans ce domaine auprès des industriels et des distributeurs présents dans différents secteurs d’activités tels que le bâtiment, l’automobile, les produits de grande consommation, l’agroalimentaire, le high-tech, la chimie, le textile… Son expertise porte sur tous les modes de transport : route, mer, air, rail et fluvial et sur tous les 30 LOGISTIQUES MAGAZINE // JANVIER-FÉVRIER 2013 // N° 276 segments : plis, colis, palettes, lots et charges complètes. Sa couverture est nationale, européenne et internationale. bp2r a ainsi effectué plus de 80 missions de conseil et estime apporter à ses clients 7 % à 20 % de réduction des budgets transport par ses conseils d’optimisation. Sa démarche de conseil collaboratif continue vise en effet à développer les bonnes pratiques du transport par l’amélioration simultanée des performances en qualité de service, en optimisation de coûts et en développement durable. Bruno Mouly N ° 276 \ \ JANVIER-FÉVRIER 2013\ \ L O G I ST I Q U E S M A G A Z I N E 31 LM276_P028-P039_Assises_05-Entrprise 26/06/13 12:53 Page32 ( ) Stratégies ÉVÉNEMENT tions en cours et beaucoup de projets de la sorte plus ou moins avancés. « Le plus souvent ces scénarii sont imaginés et mis en œuvre par des chargeurs de tous types et de toutes tailles sur des secteurs divers », a-t-il remarqué. Le premier cas est celui d’une mutualisation du transport entre plusieurs industriels à partir d’un entrepôt commun à destination des mêmes clients, avec des profils d’expédition complémentaires et le tout piloté par une cellule de gestion mutualisée des approvisionnements (GMA). « Ce schéma permet d’optimiser au maximum le taux de remplissage des camions à hauteur de 95 %. Il nécessite des horaires de livraison fixes par des camions quasi complets », a noté Xavier Villetard. L’exemple née de livraison successivement présenté a été celui de l’union de aux magasins destinataires des deux quatre industriels de PGC (proindustriels. « C’est le cas de deux duits de grande consommation), distributeurs de textile, qui livrent dont trois grands groupes et une ainsi 650 000 colis par an pour desservir 130 magasins en centre-ville », PME, qui livrent ainsi 80 000 palettes a-t-il illustré. La mutualisation, seupar an sur douze plates-formes de lement en multipick, à la grande distribution. Le partir de plusieurs entredeuxième en est une pôts proches d’industriels variante. Il s’articule toumais cette fois à destinajours au départ d’un entretion des mêmes clients pôt commun mais en insdemande, elle, « d’homotaurant des synergies sur généiser les contraintes la construction du plan de logistiques des clients, à transport pour des clients savoir trouver un consennon mutualisés de façon sus sur des jours et des à massifier le transport horaires spécifiques de pour desservir un même livraison ». C’est ce que département. « Sept indusfont une dizaine de PME triels agroalimentaires se et de TPE agroalimensont regroupés, trois grands taires pour livrer une trengroupes et deux PME, pour Il y a eu moins de trafics taine de magasins. livrer ainsi un million de à distribuer en Europe palettes par an sur 38 platesliés à la baisse des Sécuriser les formes de la GMS », a glissé données. La mutualile directeur associé de bp2r. volumes de conteneurs sation du transport peut Xavier Villetard a ensuite en provenance d’Asie, aussi s’organiser au sein présenté quatre types Alain Borri, d’une même filière profesd’exemples de mutualisadirecteur associé du cabinet sionnelle à destination des tion différents. La mutuabp2r. mêmes clients. « C’est une lisation en multipick et mutualisation à grande échelle, qui multidrop consiste, à partir de deux implique 650 distributeurs de proentrepôts de deux industriels sépaduits culturels qui traitent 366 000 rés mais à proximité l’un de l’auexpéditions par an destinées à 3 000 tre, à collecter les marchandises points de vente, via une plate-forme dans un même camion via un réseau commune de cross-dock », a ajouté de transporteurs et effectuer la tour- « 32 LOGISTIQUES MAGAZINE // JANVIER-FÉVRIER 2013 // N° 276 » Stef regroupe les flux d’Unilever avec ceux de Bel et de Tropicana S Xavier Villetard. Enfin, la mutualisation peut s’appuyer sur l’outil logistique d’un chargeur leader qui met à disposition son entrepôt pour plusieurs autres plus petits industriels. « Ce cas s’applique à des chargeurs éloignés des plates-formes de la grande distribution où l’un d’entre eux le plus proche de ces platesformes joue un peu le rôle de prestataire logistique pour les autres », a-t-il indiqué. Ces différents exemples et scenarii montrent que mutualiser son transport s’applique à tout type d’entreprise (distributeurs, industriels…), à tout type de transport (ambiant, température dirigée, lot complet, messagerie…) et à tout type d’organisation (avec ou sans entrepôt mutualisé, avec ou sans GMA…). « L’idéal, dans ces divers schémas de mutualisations, est de confier à un tiers la partie transport et à un prestataire uniquement la partie de gestion de l’entrepôt », a-t-il préconisé. « La règle d’or dans ces initiatives est de bien cloisonner les informations des différents acteurs et de sécuriser les données pour respecter leur confidentialité. C’est ainsi qu’une opération de mutualisation bien menée peut apporter un gain de plus de 10 % sur les coûts du transport et sur l’amélioration du taux de service », a conclu Alain Borri. oixante mille palettes livrées par an à 130 magasins de la GMS et à 120 points de vente de la restauration hors domicile (RHD) sur des délais de livraison le jour même ou à J+1/J+2 à raison de 5 à 6 livraisons par semaine… C’est sur de tels volumes et de tels rythmes qu’Unilever opérait jusqu’en 2011 à partir de ses usines dédiées, la distribution en France de ses produits frais, essentiellement ses marques de margarine Tendre Mousse, ProActiv et Fruit d’Or. Problème : « Nos tailles de livraison de l’ordre de 4 à 5 palettes en moyenne étaient faibles. Nous cherchions donc à massifier nos flux de façon à optimiser le transport de nos Le logisticien des produits frais a intégré dans son entrepôt du Plessis-Belleville dans l’Oise les flux des marques de margarines du géant mondial des produits de grande consommation et les a mutualisés dans ses livraisons à la GMS avec les fromages de Bel et les jus de fruits de Tropicana. Le résultat est gagnant pour tout le monde : amélioration du taux de service, réduction des coûts et diminution de l’impact carbone. produits frais », a expliqué Philippe Roche, directeur de la distribution du groupe en France. Raccourcir les délais de livraison. Le groupe se lance alors dans un projet d’optimisation qui avait deux principaux objectifs : raccourcir ses délais de livraison en se rapprochant de ses clients et accroître ses volumes de livraison tout en maintenant une fré- quence élevée. Pour se rapprocher de ses clients, Unilever décide alors de faire passer ses flux par deux entrepôts, un au nord de l’Hexagone pour couvrir 75 % de la GMS et un autre au sud pour desservir les 25 % restants. Le groupe ouvre donc son entrepôt sud à Chaponnais (Rhône) pour desservir ses clients du Sud-Est et cherche un entrepôt au Nord, surtout dans le but de massifier ses livraisons auprès Bruno Mouly N ° 276 \ \ JANVIER-FÉVRIER 2013 \ \ L O G I ST I Q U E S M A G A Z I N E 33 LM276_P028-P039_Assises_05-Entrprise 26/06/13 12:53 Page34 ( ) Stratégies ÉVÉNEMENT Stef, un logisticien européen approprié à la massification de ses clients de la grande distribution de la moitié nord du pays. Fin 2010, Unilever lance un appel d’offres « pour trouver un prestataire logistique dont la plate-forme peut être partagée avec d’autres clients de façon à mutualiser le stockage et le transport des flux respectifs », selon Philippe Roche. Le logisticien des produits frais Stef est sélectionné en proposant son entrepôt multichargeur du Plessis-Belleville dans l’Oise. « En septembre 2011, nous avons ainsi rejoint Bel, le spécialiste des fromages et Tropicana, celui des jus de fruit, dans cette plate-forme en cross-dock gérée par Stef et renforcé, du coup, un pool de mutualisation des flux déjà existant. Pour notre entrepôt sud, nous avions déjà trouvé un partenaire pour mutualiser nos flux », a indiqué le direc- « teur de la distribution d’Unilever en France. « C’est grâce à notre offre globale de prestation logistique et de transport ainsi que de copacking qu’Unilever nous a retenu », a précisé Dominique Thenault, directeur des comptes clés chez Stef. Cette opération s’inscrit en fait dans la Cela fait 1 500 camions en moins sur les routes. Notre ambition est de diviser par 2 les émissions de CO2, Philippe Roche, directeur de la distribution du groupe Unilever pour la France. » stratégie plus générale de Stef sur son approche client, qui consiste à regrouper des chargeurs par contraintes compatibles en fonction des exigences de la GMS (créneaux horaires et fréquences de livraison) et de la nature du conditionnement des produits (températures correspondant aux viandes, à la margarine, à la charcuterie et aux produits secs). « À partir de là nous proposons des solutions de livraisons directes multi-industriels, avec un à trois destinataires par camion, la planification et l’optimisation du transport en fonction du potentiel d’expéditions du site concerné et l’appui de notre réseau de groupage lorsque la mutualisation des flux n’est pas possible. Il s’agit des petites livraisons non massifiables, de livraisons impératives hors plan de transport et des dépannages ou livraisons urgentes », a ajouté Dominique Thenault. Gain de 11 % sur les coûts de transport. Après avoir ana- lysé un potentiel de clients communs de 82 % d’Unilever avec ses Unilever, un géant mondial des produits de consommation courante La multinationale néerlando-britannique est le troisième groupe mondial en produits de grande consommation et le premier producteur de glaces et de thés au monde. Présent dans une centaine de pays, Unilever emploie quelque 171 000 personnes pour un 34 chiffre d’affaires réalisé en 2011 de 46,5 milliards d’euros. Il commercialise quatre grandes catégories de produits : les produits alimentaires, de soin de la personne, d’entretien de la maison et les boissons et les glaces. En France, le groupe emploie 2 800 collaborateurs LOGISTIQUES MAGAZINE // JANVIER-FÉVRIER 2013 // N° 276 et a réalisé un chiffre d’affaires de 2,5 milliards d’euros en 2011. Unilever dispose de 7 sites de production sur le territoire français et y commercialise 32 marques de produits alimentaires, de soin de la personne et d’entretien de la maison. Le groupe a récemment défrayé la chronique en annonçant la fermeture de l’usine Fralib de Gemenos (Bouches-duRhône) dont la production des thés Lipton et des infusions Elephant doit être délocalisée en Pologne. Mais les salariés du site résistent depuis plus de 700 jours… B.M. deux autres partenaires, débouchant sur un potentiel de gain de 11 % sur les coûts du transport, Stef s’est ainsi attaché à massifier les flux des trois industriels sur l’entrepôt du Plessis-Belleville et dans le transport mutualisé vers la GMS. « Nous nous occupons de tout, du pilotage des contraintes interindustriels aux relations avec leurs destinataires et nous prenons même le risque de garantir les gains économiques que nous estimons au départ ainsi que celui de la défection d’un partenaire industriel », a souligné Dominique Thenault. Pour ce dernier, la massification apporte ainsi beaucoup de valeurs ajoutées : optimisation des chargements, baisse des niveaux de stocks chez les distributeurs, diminution des coûts et des émissions de CO2… En attendant, Stef a déjà obtenu de bons résultats pour Unilever. « Nous sommes parvenus à un taux de massification de 57 % en positions mais ce taux est plus élevé en nombre de palettes. Ce sont les derniers pourcentages de remplissage qui sont les plus difficiles à acquérir. Mais la mutualisation des moyens logistiques et du transport est une solution gagnante pour tous. Elle s’inscrit dans une logique de développement durable et de véritable travail collaboratif », a précisé son directeur de la distribution France. La satisfaction est également de mise chez Unilever. Le groupe en tire certains bénéfices, notamment dans l’amélioration du service client, avec une meilleure réactivité aux exigences de la GMS liée à une plus grande proximité, des réceptions groupées et une augmentation de la fréquence de livraison de 20 %. Trouver des partenaires compatibles. « Les coûts sont également optimisés grâce aux synergies de stockage, à un bon remplissage des camions et à un re-packing sur site », a estimé Philippe Roche. Enfin, l’impact carbone est significativement réduit, conduisant à une économie de 1 000 tonnes de CO2 par an. « Cela fait 1 500 camions en GMS en région parisienne et en région lyonnaise ainsi qu’un troisième en projet au sud de Paris et un autre à Tours qui dessert la RHD », a indiqué Dominique Thenault, son directeur des comptes clés. Stef sert également trois typologies de clients, ceux du mid-market envers lesquels le logisticien se positionne, adossé à de grands groupes ou comme prestataire de transport. Mais aussi les clients nationaux, pour lesquels il répartit son activité sur trois sites, l’un couvrant la logistique d’entrepôt pour un tiers du budget et le transport pour deux tiers, et deux autres qui couvrent pour moitié la logistique et pour moitié le transport. Pour traiter les gros volumes, Stef envisage d’ouvrir un site supplémentaire. En Europe, le prestataire logistique des produits frais dispose de 223 sites (1,1 million de mètres carrés), emploie 15 000 collaborateurs dans 9 pays et utilise 4 000 véhicules dont la moitié en propre. En 2011, l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 2,3 milliards d’euros. Mais c’est surtout en France que le logisticien excelle dans la mutualisation des flux, avec un dispositif qui s’y prête particulièrement. Il possède 7 sites dédiés aux produits frais s’étendant en tout sur 47 000 m2 et destinés à livrer 500 000 colis par jour à partir de deux principaux pôles d’activités en Île-deFrance et en Rhône-Alpes. « Nous avons deux types de sites, ceux qui sont à proximité des usines de nos clients et les entrepôts de massification, deux dédiés à la « Nous proposons des solutions de livraisons directes multi-industriels avec un à trois destinataires par camion, Dominique Thenault, B.M. » directeur des comptes clés chez Stef. moins sur les routes. Notre ambition plus générale est de diviser par deux les émissions de CO2 de l’ensemble de nos flux », a-t-il ajouté. Pour Philippe Roche, la mutualisation comporte ainsi cinq clés de réussite. « Il faut d’abord un potentiel de départ pour que les flux s’y prêtent et que les volumes soient suffisamment bas. On doit ensuite se mettre en mode projet de recherche de partenaires et d’un prestataire qui joue le rôle de pivot. On doit également s’armer de persévérance pour trouver les bons partenaires compatibles. Pour Unilever, cela a demandé plus d’un an. Il faut aussi franchir les difficultés pour trouver la plate-forme adéquate et une situation géographique qui satisfasse tous les partenaires du projet. Enfin, la mutualisation nécessite un prestataire pilote qui présente une offre complète », a-t-il énuméré. L’exemple d’Unilever, Bel et Tropicana, dont la mutualisation est pilotée par Stef, ouvre de belles perspectives sur le potentiel encore important qu’ont les industriels pour améliorer et optimiser leurs flux à destination de la grande distribution. « Les solutions collaboratives de la sorte ont beaucoup d’avenir. Nous continuerons à travailler dans ce sens sur d’autres de nos activités. Elles permettent aux industriels d’être proactifs vis-à-vis de la GMS et conduisent à rééquilibrer les relations entre industriels et enseignes de la grande distribution », a conclu Philippe Roche. B.M. N ° 276 \ \ JANVIER-FÉVRIER 2013 \ \ L O G I ST I Q U E S M A G A Z I N E 35 LM276_P028-P039_Assises_05-Entrprise 26/06/13 12:53 Page36 ( ) Stratégies ÉVÉNEMENT Mars, United Biscuits et Saupiquet s’unissent pour livrer la GMS Les trois industriels agroalimentaires stockent leurs produits dans un entrepôt commun et national pour livrer en camions mutualisés complets, désormais, quatre enseignes de la grande distribution. Ce processus de mutualisation s’est construit étape par étape et s’appuie sur un partenariat poussé avec plusieurs prestataires logistiques, un gestionnaire d’entrepôt, un pilote de la GMA, un coordinateur de l’organisation du transport et une douzaine de transporteurs. C’ est une belle aventure commune que connaissent en France Mars, le spécialiste des produits alimentaires, de confiserie et d’aliments pour animaux domestiques (riz Uncle Benz, croquettes Whiskas, barre chocolatée Mars, M&Ms…), United Biscuits, le fabricant de biscuits et gâteaux (Choco BN, Biscuits Delacre…) et Saupiquet, l’un des leaders du poisson en conserve (thon, sardines, filets de maquereaux, etc.). L’aventure s’est construite étape par étape et a commencé fin 2008. « Nous avions à l’époque deux entrepôts de massification, dont l’un à côté d’Orléans en région centre géré par Norbert Dentressangle dans lequel nous nous sommes retrouvés avec United Biscuits pour livrer la grande distribution », a indiqué Christophe Vicente, customers « Nous apportons aux quatre enseignes un véritable service intégré, de la proposition de commandes jusqu’à la livraison, avec un gisement d’économie pas négligeable, Christophe Vicente, customers development manager du groupe Mars. » development manager du groupe Mars. Les deux industriels agroalimentaires en profitent alors pour mettre en place à l’été 2009 une structure pluridisciplinaire commune et pour lancer simultanément une gestion mutualisée des approvisionnements (GMA) en coopération avec l’enseigne cliente. « Puis fin 2009 début 2010, nous avons démarré ensemble avec une opération pilote pour mutualiser nos livraisons sur quatre entrepôts de notre client de la grande distri- Une mutualisation peu étendue à l’international chez les trois industriels Pour les groupes Mars, United Biscuits et l’entreprise Saupiquet, cette mutualisation des flux à destination de la grande distribution est-elle unique en Europe ? C’est manifestement le cas pour Mars et Saupiquet. « Cette initiative commence à être 36 observée et étudiée par les autres structures européennes du groupe », a exposé Christophe Vicente, customers development manager chez Mars. « Nous sommes le seul industriel qui pratique la mutualisation au sein de notre maison mère, LOGISTIQUES MAGAZINE // JANVIER-FÉVRIER 2013 // N° 276 l’italien Bolton Alimentari, filiale du Bolton Group, société internationale qui produit et commercialise un large éventail de marques de produits de grande consommation », a révélé Hubert Hecquet, responsable logistique de Saupiquet. Chez United Biscuits, « des initiatives de mutualisation existent déjà au Benelux, mais elles ne s’appuient que sur un unique prestataire », selon Valérie Picq, sa logistics & distribution manager. B.M. bution », a-t-il ajouté. Mars et United Biscuits passent ensuite à la vitesse supérieure jusqu’en août 2011 en « industrialisant leur process de mutualisation pour l’étendre à 100 % des plates-formes de l’enseigne ». À la rentrée 2011, par le biais d’un changement de prestataire logistique, Saupiquet fait également entrer ses conserves dans l’entrepôt commun géré par Norbert Dentressangle. « Nous avons rapatrié à la même période, dans le même entrepôt, les confiseries de Wrigley, filiale de Mars, qui étaient stockées dans une plate-forme en Alsace », a précisé au passage Christophe Vicente. Les produits de Saupiquet et de Wrigley sont alors intégrés au pro- C’est dans le cadre des Assises de la Logistique de décembre 2012 que Christophe Vicente, Valérie Picq et Hubert Hécquet se sont exprimés ensemble pour la première fois sur leur réalisation de mutualisation logistique. cessus de GMA, déjà opéré par Mars et United Biscuits. Enfin, en mars 2012, « le premier camion mutualisé transportant ensemble les catégories de produits des quatre industriels livre l’enseigne cliente ». Mais mener à bien une telle mutualisation, à quatre industriels, qui connaît aujourd’hui un franc succès, n’est pas le fruit du hasard. Il faut que les protagonistes aient un certain nombre de prérequis servant de base solide au lancement d’une opération de la sorte. « L’adhésion et le soutien des directions générales de chaque entreprise concernée à un tel projet sont indispensables. Si chacun a dû adapter ses outils de système d’information et ses pro- cess, la maturité de chaque supply chain a permis au départ de faciliter et d’accélérer le démarrage du projet », a exposé Valérie Picq, logitics & distribution manager du groupe United Biscuits. Autres conditions sine qua non : la compatibilité des quatre catégories de produits appropriée au remplissage des camions, la desserte des mêmes plates-formes du client et « un état d’esprit collaboratif pour prendre des décisions collégiales », selon Valérie Picq. Une collaboration entre industriels qui a d’ailleurs été étendue à d’autres partenaires logistiques que Norbert Dentressangle tels qu’IPS Europe, qui s’occupe d’organiser la GMA N ° 276 \ \ JANVIER-FÉVRIER 2013 \ \ L O G I ST I Q U E S M A G A Z I N E 37 LM276_P028-P039_Assises_05-Entrprise 26/06/13 12:54 Page38 ( ) Stratégies en synchronisant les besoins et les livraisons et Gols, qui coordonne le transport mutualisé autour des 12 transporteurs du pool des quatre industriels. « Cette collaboration poussée a permis à chaque industriel d’adapter ses process, d’atteindre une grande agilité pour imbriquer les systèmes les uns dans les autres grâce à la flexibilité des outils et de s’inscrire dans un processus d’amélioration continue via la convergence opérationnelle de tous à l’intérieur et à l’extérieur de l’entrepôt commun », a expliqué Hubert Hecquet, responsable logistique de Saupiquet. « Nous avons bâti notre réseau logistique sur la GMA et sur un seul entrepôt central voué à stocker tous les produits de chacun et dédié à une distribution nationale », a poursuivi Christophe Vicente. Concrètement, la GMA est d’abord guidée par les besoins des magasins qui en informent IPS Europe. Celui-ci envoie alors les commandes aux services clients des trois indus- ÉVÉNEMENT « Les trois livraisons mutualisées hebdomadaires, contre une tous les 15 jours, ont entraîné une baisse de 15 % à 30 % des stocks chez notre client, Valérie Picq, » logistics & distribution manager du groupe United Biscuits. triels qui les transmettent ensuite à Gols. Ce dernier s’attache alors à préfacturer le transport des produits et à l’organiser de façon mutualisée en communicant à Norbert Dentressangle les lignes de préparation de commandes multichargeur à effectuer dans son entrepôt. Puis, celles-ci sont expédiées en camions complets si possible vers les plates-formes de l’enseigne cliente. Pour fluidifier ce processus de mutualisation il a fallu que tous les partenaires s’entendent sur certains choix. Celui d’abord de créer une cellule de transport spécifique pilotée par Gols. Une cellule de ce type existait déjà chez Saupiquet, liée à de gros volumes à livrer. Mais le taux de service n’était que de 95 %. « L’idée d’externaliser la coordination du transport à un spécialiste apporte beaucoup dans la mutualisation, notamment dans l’amélioration du taux de service et du SAV pour en faire bénéficier l’ensemble des partenaires industriels », a estimé Hubert Hecquet. Autre choix commun : séparer la logistique d’entrepôt et les prestations de transport. « Chacun est venu avec ses propres transporteurs », a glissé Valérie Picq. Enfin, les trois industriels ont mis un an à échanger avec Norbert Dentressangle pour que le cahier des charges de la prestation logistique soit conforme aux attentes de la mutualisation des flux. « La principale difficulté a été d’interfacer les WMS de l’entrepôt avec les systèmes SAP », a résumé Hubert Hecquet. En attendant, le succès de ce pool de mutualisation est au rendez-vous au regard des avantages et des bénéfices apportés. « Nous sommes parvenus à effectuer trois livraisons mutualisées hebdomadaires, contre une tous les 15 jours lorsque nous agissions seuls. Ce qui a entraîné une baisse de 15 % à 30 % des stocks chez notre client. On a réussi à mettre en place une fréquence de 20 camions complets par jour pour livrer 30 entrepôts de notre client et éliminer ainsi 400 t d’émissions de CO2 », a révélé Valérie Picq. Mais pour les trois industriels, la réus- 38 LOGISTIQUES MAGAZINE // JANVIER-FÉVRIER 2013 // N° 276 « Cette collaboration poussée a permis de s’inscrire dans un processus d’amélioration continue via la convergence opérationnelle de tous à l’intérieur et à l’extérieur de l’entrepôt, Hubert Hecquet, responsable logistique de Saupiquet. » site de leur mutualisation se ressent d’abord dans la satisfaction client. « Les quatre enseignes pour lesquelles nous travaillons aujourd’hui donnent des signes encourageants en retour. Il faut dire que nous leur apportons un véritable service intégré, de la proposition de commandes jusqu’à la livraison, avec un gise- ment d’économie pas négligeable. On s’achète ainsi une véritable liberté en travaillant sur les stocks et la qualité de service », s’est enthousiasmé Christophe Vicente. « Notre partenariat logistique multiple avec IPS, Gols et la douzaine de transporteurs qui ont des contraintes de livraison à respecter est une réussite », a ajouté Valérie Picq. « C’est un projet gagnant/gagnant entre nous industriels, le logisticien Norbert Dentressangle et les transporteurs dont la mutualisation des flux leur donne la garantie de volumes conséquents », a noté à son tour Hubert Hecquet. L’objectif désormais de ce pool d’industriels est d’étendre son modèle de mutualisation à un maximum de plates-formes de la GMS, dans le but de livrer d’abord les 100 platesformes des quatre enseignes clientes actuelles avant d’étudier la possibilité d’ouvrir leur mutualisation à d’autres enseignes et à d’autres partenaires industriels. B.M. N ° 276 \ \ JANVIER-FÉVRIER 2013 \ \ L O G I ST I Q U E S M A G A Z I N E 39