université de nice – sophia-antipolis
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UNIVERSITÉ DE NICE – SOPHIA-ANTIPOLIS ARTS COMMUNICATION ET LANGAGE MASTER 1 LETTRES, LANGUES, ARTS Mention : Information, Communication et Culture « LE BLOG, UNE NOUVELLE FORME DE MÉDIATION ENTRE CITOYENS ET ÉLUS POLITIQUES LOCAUX EN FRANCE DE 2002 À NOS JOURS » MÉMOIRE PRÉSENTÉ ET SOUTENU PUBLIQUEMENT PAR LAURÈNE MADRU Directrice de Mémoire : BERTINI Marie-Joseph Maître de Conférence en Sciences de l’Information et de la Communication Juin 2006 Année Universitaire : 2005/2006 1 UNIVERSITÉ DE NICE – SOPHIA-ANTIPOLIS ARTS COMMUNICATION ET LANGAGE MASTER 1 LETTRES, LANGUES, ARTS Mention : Information, Communication et Culture « LE BLOG, UNE NOUVELLE FORME DE MÉDIATION ENTRE CITOYENS ET ÉLUS POLITIQUES LOCAUX EN FRANCE DE 2002 À NOS JOURS » MÉMOIRE PRÉSENTÉ ET SOUTENU PUBLIQUEMENT PAR LAURÈNE MADRU Directrice de Mémoire : BERTINI Marie-Joseph Maître de Conférence en Sciences de l’Information et de la Communication Juin 2006 Année Universitaire : 2005/2006 2 3 REMERCIEMENTS Ce travail n’aurait pu être réalisé sans le soutien de nombreuses personnes. Que soient ici remerciés tous ceux qui, sans nécessairement le savoir, m’ont communiqué l’énergie et la confiance nécessaires au déroulement de l’ensemble de mon travail de recherche pour réaliser ce mémoire. En premier lieu, je tiens à remercier Madame Marie-Joseph Bertini, pour son professionnalisme, son soutien et sa disponibilité tout au long de ces mois de travail qui m’auront permis de mener à terme ce projet. Monsieur Patrick Mottard, pour sa participation dans cette aventure en créant son blog et en me permettant de suivre l’ensemble de son parcours depuis le début. Je remercie également l’équipe du Groupe Reflect, plus particulièrement Manuel et Carlos Diaz qui m’ont initié au blog et m’ont conseillé d’en créer un, allant jusqu’à me permettre d’assister à une réunion sur les blogs politiques à Paris. Monsieur Fabrice Morenon pour son invitation à Saint-Maurice dans le Val de Marne réunissant de nombreux élus locaux pour parler du blog. Enfin, l’ensemble des personnes qui m’ont soutenu et aidé dans mes recherches via mon blog. Sans oublier tous ceux et celles qui ont eu la patience de m’entourer tout au long de cette période. Il y a d’abord mes proches et mes amis de faculté qui ont su être présents en m’encourageant et me donnant des pistes à explorer pour améliorer, argumenter mon mémoire. Pour conclure, j’exprime ma reconnaissance à tous ceux qui en offrant de leur temps ou de leurs expériences se sont prêtés à l’usage du chercheur. 4 “Nous savons bien que ce que nous faisons n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan. Mais si cette goutte n’était pas dans l’océan, elle manquerait.” Prix Nobel de la Paix 1979 1 1 François-Xavier Hussherr et.al, Le nouveau pouvoir des internautes, Boulognes, Timée-Editions, mai 2006, p.305. 5 SOMMAIRE .............................................................................................................. p. 6 INTRODUCTION GÉNÉRALE ............................................................................. p. 9 PARTIE I. BLOGS ET SPHÈRE POLITIQUE: UNE ÉVOLUTION CONSTANTE ...................................................................................................................................... p. 12 CHAPITRE I. LE BLOG : UN NOUVEL ESPACE PUBLIC ........................... p. 13 Section 1. L’ « espace public » de Jürgen Habermas ............................................... p. 13 Section 2. Un espace public modernisé par le blog ............................................... . p. 15 Paragraphe 1. Définition du blog .......................................................................... p. 16 Paragraphe 2. Historique du blog .......................................................................... p. 19 Paragraphe 3. Les différentes formes du blog sur le Web ..................................... p. 22 Section 3. Nouvel espace d’expression politique et création d’un espace citoyen ... p. 24 Section 4. La place de la « parole » dans le blog ..................................................... p. 25 CHAPITRE II. LE BLOG : UN INSTRUMENT AVANT TOUT ..................................................................................................................................... p. 27 Section 1. Moyen de communication ou moyen d’information ? ............................ p. 27 Section 2. Un contenu sans cesse mis à jour............................................................. p. 29 Section 3. Vers un nouveau média ? ......................................................................... p. 30 CHAPITRE III. LE BLOG : UNE NOUVELLE TENDANCE ........................... p. 31 Section 1. La France face aux nouvelles technologies ............................................. p. 31 Section 2. Son développement dans notre pays ....................................................... p. 32 Section 3. Evolution ou révolution ?......................................................................... p. 32 PARTIE II. LE BLOG : UN NOUVEAU MODE DE COMMUNICATION POLITIQUE .............................................................................................................. p. 33 CHAPITRE I. LA DÉMOCRATIE EN FRANCE ................................................ p. 34 Section 1. Démocratie représentative, participative ou directe ? ............................. p. 34 Section 2. Internet modifie-t-il son image « négative » ? ........................................ p. 36 Section 3. Le cas des collectivités territoriales ........................................................ p. 39 Paragraphe 1. Petite définition .............................................................................. p. 39 Paragraphe 2. Le blog et les élus locaux ............................................................... p. 40 Section 4. Le blog politique : une évolution lente ................................................... p. 41 Section 5. Nouvel outil comme approche démystificatrice de la politique .............. p. 42 CHAPITRE II. L’ÉTAT DE LA COMMUNICATION POLITIQUE LOCALEp. 43 Section 1. Une communication indispensable pour l’élu et le citoyen .................... p. 43 Paragraphe 1. La médiation politique ................................................................... p. 44 Paragraphe 2. Les instruments de base utilisés par tous les politiques ................. p. 44 A. La newsletter ............................................................................................... p. 45 B. Le tract ........................................................................................................ p. 46 C. Les réunions ou meetings ............................................................................. p. 46 D. Les présences physiques sur le terrain ......................................................... p. 47 6 E. Les passages radiophoniques ....................................................................... p. 47 F. Les passages télévisuels ............................................................................... p. 48 G. La presse ..................................................................................................... p. 51 Section 2. Son évolution .......................................................................................... p. 52 Paragraphe 1. La médiation électronique grâce à Internet .................................... p. 53 A. Le site Internet : une communication institutionnalisée ............................... p. 54 B. Le mail : une communication écourtée ........................................................ p. 55 C. Le forum : première proposition de médiation à double sens ...................... p. 56 D. Le blog : une communication de proximité ................................................. p. 58 Paragraphe 2. Changement de mentalités ............................................................. p. 61 Paragraphe 3. Vers une plus grande transparence ................................................. p. 63 Section 3. Perspectives par l’utilisation du blog ...................................................... p. 64 Paragraphe 1. Vers une médiation « directe » ....................................................... p. 64 Paragraphe 2. Une interactivité encore mal exploitée ........................................... p. 65 Paragraphe 3. Un outil de marketing politique ..................................................... p. 66 CHAPITRE III. LES BLOGS : UN INSTRUMENT DE MODERNISATION DE LA VIE POLITIQUE LOCALE ? ........................................................................... p. 68 Section 1. Une proximité évidente ........................................................................... p. 68 Section 2. La « parole » des élus .............................................................................. p. 69 Paragraphe 1. Formation d’une nouvelle identité politique .................................. p. 70 Paragraphe 2. Une image moderne de la politique ................................................ p. 70 Section 3. Une nouvelle écoute de la « parole » des citoyens .................................. p. 71 Section 4. Un besoin de s’exprimer pour tous .......................................................... p. 74 Paragraphe 1. Perte des repères entre l’émetteur et le récepteur ........................... p. 75 Paragraphe 2. D’une individualité par l’acte à une collectivité par l’échange....... p. 76 Paragraphe 3. Naissance d’une nouvelle communauté d’ « élites » ...................... p. 77 PARTIE III. LES NOUVELLES FORMES DE MÉDIATION POLITIQUE : L’EXEMPLE DE QUATRE BLOGS D’ÉLUS LOCAUX .................................... p. 78 CHAPITRE I. ANALYSE DES BLOGS D’ÉLUS LOCAUX ET INTERPRÉTATION ................................................................................................ p. 79 Section 1. Analyse d’un blog d’élus appartenant à l’UMP, au FN, au PCF et au PSp. 79 Section 2. Formulation des hypothèses et objectif de cette étude ............................ p. 79 Paragraphe 1. Présentation des auteurs des blogs analysés ................................... p. 81 Paragraphe 2. Leur mise à jour ............................................................................. p. 85 Paragraphe 3. Le genre utilisé par ces différents auteurs ...................................... p. 86 A. Le logiciel TROPES ..................................................................................... p. 87 B. Les thèmes développés ................................................................................ p. 91 C. L’emploi des personnes : les indices personnels .......................................... p. 95 Paragraphe 4. Leur enjeu principal ....................................................................... p. 98 A. Les visiteurs et les commentaires ................................................................. p. 99 B. L’identité des commentateurs ...................................................................... p. 101 C. Le ton employé pour s’exprimer .................................................................. p. 102 D. Les internautes fidèles aux blogs ................................................................. p. 103 E. Conclusion de l’analyse ................................................................................ p. 103 Section 3. Ce qui se passe autour du blog ................................................................ p. 105 Paragraphe 1. Un retour à l’écrit papier : le cas du magazine Netizen ................. p. 105 7 Paragraphe 2. Les soirées dédiées aux blogs dont les invités sont des élus blogueurs ................................................................................................................................ p. 106 Paragraphe 3. Les congrès politiques font appel aux blogueurs ........................... p. 107 Paragraphe 4. Les formations pour les élus ......................................................... p. 108 Paragraphe 5. Un militantisme de plus en plus impliqué ...................................... p. 108 Section 4. Les avantages d’avoir recours à Internet et en particuliers au blog ........ p. 109 Paragraphe 1. La place des différents partis sur Internet et sur les blogs ............. p. 110 Paragraphe 2. Les blogs des politiciens pour les élections présidentielles de 2007p. 111 Paragraphe 3. Les blogs des politiciens pour les élections municipales de 2008 .. p. 112 CHAPITRE II. BILAN ............................................................................................. p. 113 Section 1. La différence avec les blogs des élus nationaux ..................................... p. 113 Section 2. La différence avec les blogs des élus américains .................................... p. 114 Section 3. Perspectives à venir ................................................................................. p. 115 Paragraphe 1. Un outil utile pour les municipales et les présidentielles................ p. 116 Paragraphe 2. Une contrainte évidente : le manque de temps................................ p. 117 Paragraphe 3. Des règles à respecter...................................................................... p. 118 CHAPITRE III. LA « E- DÉMOCRATIE » UTOPIQUE OU NON ? ................ p. 119 Section 1. La hiérarchie disparaît par l’utilisation du blog ...................................... p. 120 Section 2. L’ « Homo communicans » de Wiener de retour .................................... p. 121 Section 3. « Je blogue donc je suis » ........................................................................ p. 122 Paragraphe 1. « Démocratisation et libéralisation de la personne » ..................... p. 123 Paragraphe 2. Un lien social renforcé ................................................................... p. 123 CONCLUSION GÉNÉRALE .................................................................................. p. 125 BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................... p. 130 8 INTRODUCTION GÉNÉRALE Depuis plus d’un an, les médias traditionnels tels que la presse, la radio et la télévision ne cessent de nous faire part d’un phénomène grandissant au fil des mois : le weblog plus communément appelé « blog ». Né aux Etats-Unis, dans les années 1990, seuls les initiés à la création d’Internet dont Tim Bernes Lee (le fondateur du World Wide Web) y avaient accès. Au début, son utilisation demandait des connaissances informatiques pour éditer des données sur le Web. Puis, au fil des années, le blog se développa au sein de la population américaine, pour atteindre son apogée à la suite des terribles attentats terroristes du 11 septembre 2001 avec l’effondrement des Twin Towers. Une floraison de petits blogs personnels ont vu le jour afin de permettre à différentes personnes de s’exprimer sur cet événement catastrophique et de partager leurs émotions avec le monde entier sans qu’aucune contrainte spatio-temporelle ne soit imposée. Quelques années plus tard, en 2004, une « explosion » de blogs verra le jour lors des élections présidentielles aux Etats-Unis, créant un duel entre les deux candidats : Georges W. Bush et John Kerry. Initialement utilisé par les informaticiens, le blog s’est simplifié et est devenu accessible à tous, grâce aux plates-formes de création qui se sont développées, permettant à quiconque d’en posséder un. Ce dernier a franchi les frontières géographiques physiques pour atteindre le territoire français aux alentours de 2002. Véritable révolution en tant que moyen de communication, le blog est devenu l’outil de prédilection pour de nombreuses personnes. On peut citer différentes catégories d’utilisateurs : les enfants, les adolescents, les adultes dont les politiques. Toutefois, on peut considérer que l’année charnière de son évolution dans le domaine politique se situe fin 2003, début 2004 suite aux élections régionales qui se déroulaient à cette époque. Depuis, le phénomène ne cesse de se développer. Un nouveau moyen de médiation via les citoyens se met en place et permet de donner une nouvelle image plus jeune, plus moderne des politiques, s’opposant ainsi à la vision désuète que l’on a tendance à se faire. 9 Moyen de transparence « utopique » ou « réelle », le blog est en voie de devenir l’instrument moderne par excellence, susceptible de toucher une population jeune délaissant souvent ce monde considéré comme trop archaïque. Cette interface devient un nouvel outil de dialogue, de rencontre avec les élus mais également entre les citoyens eux-mêmes qui n’existait pas auparavant ou très peu. Une envie de participer aux différents débats, une volonté de s’adresser directement aux élus politiques se font ressentir. L’« espace public » de Jürgen Habermas semble se modifier et se redéfinir face à l’arrivée des nouvelles technologies et tout particulièrement par l’utilisation du blog. Certains citoyens décident de créer eux-mêmes leur propre blog dit « blog citoyen » pour s’exprimer sur leur propre ville. A cela s’ajoute également, les « blogs militants politiques » qui peuvent avoir un rôle important à jouer dans la société lors de manifestations, d’élections, de crises. Son utilisation se différencie d’un journal intime. Cependant, ce qui reste en commun face à cette diversité grandissante de ce phénomène, c’est l’amateurisme qui est au cœur de la blogosphère en général. Quelques spécialistes se distinguent, mais ils ne représentent qu’une minorité de ces utilisateurs. Rien d’étonnant a priori que toute une population soit représentée. Ce qui cependant paraît moins évident, c’est de voir des élus locaux s’adonner à cette nouvelle pratique. L’objectif de cette étude est de montrer comment et pourquoi le blog politique arrive à créer une nouvelle participation du citoyen. Quel rôle joue la blogosphère dans le développement progressif de ce dialogue, modifiant les rapports entre citoyens et élus ? Une « … pluralité de l’information nécessaire au bon fonctionnement de toute démocratie » 1 , émerge par le biais de cet outil accompagné des médias classiques. Nous mettrons en évidence ce qui motive et intéresse le représentant politique et le citoyen à communiquer par ce biais. Et, nous verrons les attentes de chacun par l’utilisation conjointe de ce « média », à supposer que celui-ci en soit en un. 1 Yoann Kermet, « La blogosphère et l’information : nouveaux enjeux et nouvelles limites », Nice, 2005, p.61. 10 Nous tenterons de mettre en évidence le fait que le blog modifie nos perceptions de l’ « espace public » crée par Jürgen Habermas, dans le sens où il lui donne un nouveau souffle de vie. Ce qui va nous amener à parler du blog en général (son histoire, son développement et sa typologie), pour nous focaliser sur celui des élus politiques locaux qui furent les premiers à l’utiliser. Ceci, afin de montrer que l’émergence du blog politique n’est peut-être pas qu’un effet de mode, mais bel et bien un argument et outil supplémentaires pour se faire connaître auprès du grand public en complément des démarches traditionnelles. Ce dernier, devient un outil de médiation commençant à développer un certain attachement pour les citoyens qui les fréquentent. Le blog fait tomber les hiérarchies, crée et recrée un échange entre les citoyens. « … Internet a été présenté, soit comme un moyen de rapprocher gouvernants et gouvernés dans la perspective de la démocratie représentative, soit comme un moyen de favoriser une plus grande implication des citoyens et des citoyennes dans la vie de la Cité dans le cadre d'une démocratie participative. » 1 . Mais le blog nous conduit-il vraiment vers cette démocratie ? L’utilisation du blog va avoir un intérêt particulier autant d’un point de vue du politique qui y trouve dans cet outil une nouvelle manière de se présenter, de développer ses projets, que d’un point de vue de la citoyenneté qui découvre un dialogue ouvert et sans tabou, qui amène à l’émergence d’un lien social. Nous envisagerons d’anticiper le futur impact que les blogs joueront lors des prochaines élections présidentielles de 2007 et des élections municipales de 2008. 1 Eric George, « L'utilisation de l'Internet comme mode de participation à l'espace public dans le cadre de l'AMI et au sein d'ATTAC : Vers un renouveau de la démocratie à l'ère de l'omnimarchandisation du monde ? », Lyon, avril 2001. 11 PARTIE I. BLOGS ET SPHÈRE POLITIQUE : UNE ÉVOLUTION CONSTANTE Depuis sa création sur le continent américain, le blog ne cesse de se propager en dehors de ses frontières terrestres pour atteindre notre territoire fin 2002. Discret à ces débuts, sa propagation depuis de nombreux mois ne cesse d’augmenter, notamment par la création de blogs par des figures politiques médiatiquement connues en France. On peut citer par exemple Dominique Strauss Kahn, André Santini ou encore Alain Juppé, même si ce dernier se trouve sur le sol canadien. Nous allons montrer comment un simple outil émanant d’Internet est en train de bouleverser la sphère politique d’un point de vue local, mais également national. Il s’agira également de mettre en évidence qu’une nouvelle définition de l’ « espace public » de Jürgen Habermas est en train de prendre naissance grâce au blog. 12 CHAPITRE I. LE BLOG : UN NOUVEL ESPACE PUBLIC A partir de la définition de l’« espace public » de Jürgen Habermas, on se rend compte que l’auteur le concevait comme un lieu public où les individus se retrouvaient pour discuter. Avec le temps, l’espace public a perdu de sa valeur, mais on constate une tendance inverse avec l’arrivée d’Internet, et plus particulièrement avec le blog. Comme le dit très justement Félix Weygand : « Les technologies de l’information permettent le ‘développement remarquable d’une nouvelle sphère publique où les agoras virtuelles renouvellent les formes de la délibération et du débat politique’ » 1 . C’est ainsi, qu’on voit émerger de nombreuses pensées, opinions, prises de parole par le biais de cet outil. Les citoyens décident de ne pas laisser passer cette opportunité et espèrent être entendus grâce à ce support, mais également à travers leur « propre chef » d’où l’émergence de blogs dits « citoyens » et « militants ». Ce qui n’était pas le cas dans la plupart des médias dits traditionnels où cette liberté d’expression n’était pas présente. Section 1. L’ « espace public » de Jürgen Habermas En reprenant, les mots de Jürgen Habermas pour comprendre le plus précisément possible l’espace public, on peut dire que « La sphère publique peut être tout d’abord comprise comme étant la sphère des personnes privées rassemblées en un public. » 2 . C’est au départ par des réunions organisées dans des « salons », des « cafés », que ce nouveau public est né et que des conversations non abordées dans d’autres lieux ont commencé à se faire entendre. « La discussion au sein d’un tel public suppose en second lieu que soient mis en question des domaines qui jusque-là n’avaient pas prêté à discussion.» 3 . Cependant, cette « sphère publique bourgeoise » n’était pas ouverte à toutes les catégories de la population. Ce qui donne déjà une idée des hiérarchies sociales de l’époque. « L’idée 1 Félix Weygand, « La fin du Politique : une critique de la Cyberdémocratie », Canada, 16 septembre 2004. Jürgen Habermas, L’espace public, Traduction de Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1997, p.38. 3 Jürgen Habermas, op. cit, p. 47. 2 13 d’un accès ouvert à tous est à l’origine de la sphère publique bourgeoise, mais c’est le principe sur lequel elle achoppe. Une sphère publique dont seraient exclus ipso facto certains groupes qui représenteraient une avant-garde ne serait pas seulement en quelque sorte incomplète, elle n’aurait plus rien, au contraire, d’une sphère publique. » 1 . De nos jours, on entend souvent les individus critiquer les discours, les actions des élus politiques français. Ces personnes regrettent de ne pas pouvoir faire partager leurs opinions sur les sujets énoncés par ces élus. De ce fait, la plupart d’entre eux délaissent la politique ou bien la rejettent fermement suite aux décisions prises, sans avoir pris la peine d’écouter le public visé. « …, les représentants du pouvoir interviennent directement au sein de l’espace public : paroles sans retour, discours sans réponse, mise à distance du débat démocratique, on peut caractériser ainsi l’échange qui en résulte avec les sujets-citoyens : peu de points communs avec le schéma habermassien reposant sur l’échange d’idées et l’usage de l’argumentation pour fonder une opinion publique. » 2 . On l’aura bien compris, ceux qui s’intéressent au monde « fermé » de la politique veulent autre chose qu’un dialogue a « sens unique ». Ils désirent que s’instaure une véritable relation où leurs paroles, écrits, actes soient pris en compte. C’est ce que préconise Dominique Wolton, en donnant la nouvelle vision de l’espace public que nous souhaiterions voir s’établir en France : «…, ce que l’on appelle aujourd’hui ‘espace public’ renvoyait alors à la place publique, …, c’est-à-dire le lieu concret où les citoyens doivent se rencontrer pour débattre des affaires intéressant le gouvernement de la Cité. » 3 . L’espace public d’Habermas, évolue et change de définition par l’arrivée du blog. En effet, par le simple principe de déposer des commentaires sur les notes des politiques par le biais de cet outil, on constate que le dialogue prend naissance après des années de monologues et de discours interminables au sein des réunions. De ce fait, on s’aperçoit que se développe un véritable échange, l’élu politique va de plus en plus vers une ouverture de son « soi intérieur», en maintenant une certaine distance avec son public pour ne pas tout dévoiler de sa vie privée. Le blog cependant, devient un instrument pratique pour divulguer des informations politiques autres que celles diffusées sur des supports comme la presse ou la radio. 1 Jürgen Habermas, L’espace public, Traduction de Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1997, p.95. Bernard Miège, Société conquise par la communication. I. Logiques sociales, Grenoble, PUG, 1996, p.116. 3 Dominique Wolton, Le Nouvel Espace Public, Paris, Editions du CNRS, mai 1989, p.16. 2 14 Section 2. Un espace public modernisé par le blog. Les citoyens manquent de lieux pour se manifester librement et surtout quand ils le désirent. Internet va donc devenir le premier « remède » à la création d’un échange d’opinions sur différents sujets. Dans notre cas, les sujets en lien « direct » avec la politique seront au cœur des débats. « L’idéologie de l’Internet réclame pour le réseau la constitution d’un espace public athénien, l’agora, lieu de l’organisation de la cité que devrait être ‘le village global’, par opposition à la sphère privée réservée à l’économique. » 1 . Avec le blog, l’espace public offre à quiconque la possibilité de s’exprimer et de donner son point de vue sur différents thèmes par les élus. Dialogue quasi inexistant sur les médias traditionnels. C’est pourquoi nous pouvons dire que « Le blog s’impose comme un nouveau média, qui va permettre aux lecteurs de trouver une information alternative et de s’exprimer en ligne en toute simplicité. » 2 . Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que la simple utilisation du blog, change notre sphère publique pour un nouvel espace plus ouvert et beaucoup plus libre que celui défini par Jürgen Habermas. «… sur le Web, les idées sont exprimées par ceux qui les produisent et les pensent … le nouveau médium est donc particulièrement favorable à un dépassement de l’espace public classique. » 3 . 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Odile Jacob, mars 1999, p.169. Yoann Kermet, « La blogosphère et l’information : nouveaux enjeux et nouvelles limites », Nice, 2005, p.5. 3 Pierre Lévy, Cyberdémocratie, Odile Jacob, janvier 2002, p.62. 2 15 Paragraphe 1. Définition du blog Avant, de nous lancer dans l’exploration du blog politique, essayons de comprendre ce que signifie et ce que comporte un blog. Depuis sa création, Internet a évolué offrant une multitude de données visuelles, scripturales, vocales et musicales. On le sait depuis longtemps, le choix ne manque pas. Par sa diversité, Internet a mis en place de nouveaux moyens de communication comme : le site, le forum et le chat que nous détaillerons par la suite. Cependant, une toute dernière invention en provenance des Etats-Unis va bouleverser nos capacités à nous informer par l’utilisation du blog. « Consacré ‘mot de l'année’ 2004 par le dictionnaire américain Merriam-Webster. » 1 . Ce terme est la contraction de deux mots « Web et log » qui signifie journal de bord. Nommé « joueb » ou « blogue » pour son équivalent français, seul le terme « blog » a su s’imposer. Il pourrait être l’équivalent d’un site « interactif », cependant, il se trouve à mi-chemin entre le site statique « … ‘traditionnel et le forum de discussion’ … » 2 . Sa construction est très simple, il suffit de sélectionner une plate-forme de blogging via Internet et de choisir une mise en page selon des modèles préétablis. Cette simplicité de conception se situe également de l’autre côté de l’écran. Les internautes peuvent se rendre à leur gré sur le blog de leur choix et y déposer des commentaires selon la note mise en ligne par le propriétaire du support ou suite aux propos laissés par les visiteurs. Seul un nom, une adresse e-mail, ou bien un site s’ils en possèdent un sont demandés pour déposer un message. L’éditeur Dunot qualifie ce procédé de « courrier électronique public » 3 . Les commentaires laissés sur un billet sont alors visibles par tous. Le blog devient ainsi « … un espace d’expression publique individuelle. » 4 . 1 « Langue française- Mots anglais et mots français », Lettre du CSA, n°187, Août-Septembre 2005, http://www.csa.fr/actualite/dossiers/dossiers_detail.php?id=30804&chap=2683 2 http://over-blog.com/definition.php 3 http://www.dunot.com/pages/magazine/interview3.asp?id_interview=284 4 http://www.expert.infini.fr/article.php3?id_article=61 16 Les notes sont répertoriées de manière « ante chronologique » 1 , les plus récentes se situant en haut de la page Web. On peut donc considérer qu’il s’agit d’un « format de publication »2 via Internet aussi facile de réalisation qu’une simple lettre rédigée sous le logiciel Word. Par sa rapidité de création, le concept a fleuri et à donner naissance à une multitude de blogs différents, « ... multiples mais uniques. » 3 . Aujourd’hui, on voit apparaître sur la toile de nombreux blogs thématiques. Ces pages Web présentent des informations de toutes sortes, dont le contenu et la forme restent à l'entière responsabilité des auteurs. On y met en avant un certains nombres de nouvelles, plus communément appelées « billets » ou « posts ». On parle de tout sur les blogs : de sa vie, des sites que l'on découvre, de musique, de cuisine, de l'actualité et de politique. Son format est en général court, les notes vont de 5 à 15 lignes, mais il est possible de lire des textes beaucoup plus longs, nécessitant pour ces derniers, un certain temps d’écriture au préalable avant sa diffusion. Les blogs nous permettent de nous exprimer sous différentes formes. On peut dorénavant y déposer des formats vidéo, audio, y ajouter des photographies, on parle ainsi de « …photoblogue, baladodiffusion, videoblogue, mobiblogue,… » 4 si ces derniers ne sont composés que de ces éléments. Par sa diversité thématique, on a du mal de nos jours à cerner les limites possibles du blog. En donner une définition précise semble être une tâche perdue d’avance, face à sa rapide évolution et mutation au fil des mois. Ce que l’on peut souligner toutefois, c’est que le blog est voué à se développer. Aujourd’hui, il permet même de diffuser des photos, du texte à partir d’un téléphone portable, on parle alors de « moblogging » 5 . Malgré leurs disparités de contenus, les blogs gardent des caractéristiques communes quel que soit l’hébergeur. Chaque blog est composé d’une nouvelle entrée appelée « actualités, billets, notes, ou ‘posts’ » 6 , les archives y sont disponibles, des commentaires anonymes ou 1 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de Choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.3. Cyril Fiévet, Emily Turrettini, op. cit., p.5. 3 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Ibid., p.V. 4 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Weblog 5 Loïc Le Meur, Blogs pour les pros, Paris, Dunot, novembre 2005, p.218. 6 Ibid., p.5. 2 17 non sont possibles. Mais certains peuvent être modérés par le propriétaire, qui décidera une fois leur lecture de les rendre visibles ou non. De nombreux liens hypertextes sont présents à l’intérieur même d’une note, ou d’une colonne nommée « blogroll » qui liste l’ensemble des blogs ou sites que le propriétaire souhaite faire découvrir à ses visiteurs afin de le connaître davantage sur ses centres d’intérêts, sur l’actualité qui l’interpelle. Ce « carnet de bord » 1 se veut être le reflet de la personne qui le possède. Aujourd’hui, les blogs se comptent par millions et il est très difficile d’en donner un nombre exact. On peut cependant citer 4,8 millions de blogs 2 uniquement pour la plateforme française Skyblog au 5 juin 2006. Au 1 mai 2006, Technorati un site de référencement, publia un chiffre approximatif de la blogosphère à savoir « 37,3 millions de blogs » 3 , mais ne recensant pas tous les hébergeurs on peut estimer ce total à plus de 30 millions de blogs. Ce qui correspond aujourd’hui à la création d’un blog toutes les secondes. La blogosphère constituant l’ensemble des blogs dans le monde, cette dernière doublerait tous les six mois alors qu’on estimait son chiffre à 100 000 blogs dans le monde en Mars 2003 4 . De plus, la tranche d’âge la plus active serait celle des moins des 19 ans, en 2005 elle représentait 58,3 % de la population mondiale 5 . C’est donc sur la catégorie des blogs politiques que nous allons poursuivre notre étude et montrer vers quoi nous amène l’usage de cet instrument par les élus locaux. 1 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de Choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.8. Skyblog, 5 juin 2006, http://skyblog.com/ 3 Technorati, 1mai 2006, http://www.sifry.com/alerts/archives/2006_05.html 4 Benoît Desavoye, Les Blogs. Nouveau média pour tous, Paris, M2 Editions, avril 2005, p.25. 5 http://www.perseus.com/blogsurvey/blogsurvey.html 2 18 Paragraphe 2. Historique du blog Depuis quelques mois, la presse ainsi que certaines émissions télévisuelles et radiophoniques se font l’écho d’un nouveau phénomène « de mode » : le blog. Pourtant fin 2004, son emploi était encore peu manipulé par le grand public, Cyril Fiévet, le qualifiait même d’outil « méconnu, du moins minimisé, notamment en France.» 1 . Depuis quand existe-il ? Qui en est l’inventeur ? Quelle va être son évolution dans les prochaines années, voire même les prochains mois à venir ? C’est au travers d’un historique précis que nous tâcherons d’éclaircir ce nouveau terme anglo-saxon qui fait « fureur » dans notre pays. En créant le World Wide Web en 1990, Timothy Bernes Lee 2 employé au CERN, n’avait pas conscience qu’il allait révolutionner le monde. Il ne savait pas à l’époque, qu’il était en train de créer ce que nous appelons aujourd’hui « le blog ». Sa première interface de l’époque était considérée comme le tout « premier site Web de l’Histoire » 3 . Au début, il s’agissait d’une liste de liens hypertextes répertoriant des sites que l’auteur utilisait. D’autres pages de ce type suivront comme le montre Wikipédia : « Les premiers weblogs sont apparus aux États-Unis à la fin des années 1990, comptant parmi ses adeptes des blogueurs comme Jason Kottke, Meg Hourihan et Matt Haughey. » 4 . Initialement, le blog n’avait pas sa forme actuelle, et beaucoup d’internautes ne savaient pas qu’ils en créaient bel et bien un sur leur propre page Web. Ce terme anglo-saxon appelé « weblog en décembre 1997 par Jorn Barger » 5 , signifie « log of the Web », traduit littéralement par « journal de bord sur le Web ». Cette période est définie selon Benoît Desavoye comme celle de « l’esprit pionner » 6 du blog. Cet instrument de communication prend son envol en Juin 1994 grâce à l’un des premiers utilisateurs Justin Hall, créant sa propre page Web composée de liens à l’intérieur et qui sera intitulée Links to the Underground. 1 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de Choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.V. http://www.w3.org/History/19921103-hypertext/hypertext/WWW/News/9201.html 3 Cyril Fievet, Emily Turrettini, op.cit., p.8. 4 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Weblog#Historique 5 Cyril Fievet, Emily Turrettini, Ibid., p.8. 6 Benoît Desavoye et.al., Les Blogs. Nouveau média pour tous, Paris, M2 Editions, avril 2005, p.27. 2 19 Pendant un peu plus de trois ans, il semblerait qu’il n’y ait pas eu de véritables changements car aucun écrit ne relate d’une évolution de la situation. En Avril 1997, Dave Winer lance le blog « Scripting news » toujours d’actualité et considéré comme le plus ancien au monde. En 1998, Jesse James Garrett créateur d’Infosift, commence à compiler une liste de sites comme le sien qu’il découvre en naviguant sur la toile Web. En Novembre de la même année, il envoie cette liste à Cameron Barrett qui publie ainsi le premier inventaire de sites blogs sur Camworld. Et c’est ainsi, que d’autres individus lui enverront leur adresse URL afin d’être inscrits sur cette dernière 1 . A l’époque, le blog était destiné aux personnes connaissant le langage informatique comme le HTML, nécessaire pour coder les informations sur Internet pour créer un blog Mais 1998, va être l’année charnière pour le développement du blog à l’ensemble de la population américaine. En effet, à cette date, ils étaient une poignée de sites à avoir les caractéristiques types identifiées aujourd’hui comme des blogs. « L’esprit marchand et l’effet de mode » 2 prenant le pas sur la technique permettront son évolution dans le monde. Peter Merholz 3 invente le terme « blog » en 1999 après avoir prononcé « web blogs » comme « wee-blog ». Ce qui représentait le diminutif du blog. Il faudra attendre 2003 pour que ce terme soit le mot le plus utilisé pour définir cette interface. Par la suite, on parlera de blogger 4 dit blogueur en français pour identifier le rédacteur du blog. Dans la même année, Brigitte Eaton commence le premier portail dévoué aux blogs avec un listing de 50 noms qu’elle connaissait sur Eastonweb. Elle avait choisi comme critère de ne référencer que les blogs ayant des entrées datées. Les outils amenant à l’accroissement des blogs vont se développer à partir de cette même année. On peut citer par exemple la société Pitas qui lança le premier site gratuit de création et d’hébergement. Puis, l’entreprise Pyra d’Evan Williams développa Blogger et Groksoup qui devinrent les sites les plus populaires proposant des outils de création de blogs en quelques minutes pour les utilisateurs traditionnels d’Internet. 1 http://blockstar.com/blog/blog_timeline.html Benoît Desavoye et.al., Les Blogs. Nouveau média pour tous, Paris, M2 Editions, avril 2005, p.27. 3 http://www.blockstar.com/blog/blog_timeline.html 4 http://www.rebeccablood.net/essays/weblog_history.html 2 20 Leurs points communs étant d’être quasi gratuits et libres, ils ont tous été conçus pour permettre à quiconque d’éditer leurs propres blogs rapidement et facilement. Soudainement, une communauté de blogueurs est née, et il était déjà alors impossible de lire la quantité d’informations existantes. C’était donc par sélection, par préférence, que l’on choisissait ce qu’on voulait lire. Initialement de format très court, seuls des commentaires réduits étaient disponibles. Si, le désir était d’écrire davantage il fallait se référencer au site ou espace personnel, considéré comme un essai séparé. Les rédacteurs de blogs participaient ainsi à la diffusion et à l’interprétation de nouvelles qui leurs étaient données chaque jour par les différents médias mis à leur disposition. C’est ainsi qu’apparaissaient à cette époque les premiers blogs journalistiques. On peut considérer cette période comme la « démocratisation et la banalisation » 1 du blog. Leur permettant d’exprimer leurs idées, pensées, de parler de leur week-end, de leur travail, de mettre en avant une réflexion sur tel ou tel sujet, ces blogs sont de ce fait régulièrement mis à jour. Ils étaient dès lors utilisés comme une « archive de vie » et quiconque doté d’une connexion Internet pouvait accéder à ces données publiques. Petit à petit des liens entre blogueurs se formèrent en mettant en place une conversation publique. Ces échanges se sont développés de blogs en blogs par le référencement de liens mis sur ces pages Internet. L’afflux de blogs allait changer sa définition, puisqu’il ne s’agissait plus de mettre à jour un site Web « classique », mais bien des pages comprenant des commentaires plus ou moins personnels. Les premiers blogs francophones, apparaissent en 1996. On peut citer par exemple : La décharge, Le Couac, Mysterious Yanick D., L'organe, Le Scarabée et Ze-Woc. 2 . 1 2 Benoît Desavoye et.al., Les Blogs. Nouveau média pour tous, Paris, M2 Editions, avril 2005, p.27. Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Weblog 21 A partir de 2002, c’est au tour de la radio Skyrock de lancer sa plate-forme Skyblog qui aujourd’hui connaît un véritable succès auprès de ses auditeurs. Au fil des mois de nombreuses sociétés vont développer ce concept comme l’agence Six Apart, initiateur de la solution de blogs Movable Type qui lance sa solution clés en main Typepad 1 . D’autres plates-formes françaises comme U-blog, Dotclear connaissent un succès grandissant de nos jours 2 . En 2006, créer un blog est devenu facile et chose courante. Ce qui toutefois reste moins évident, c’est de l’alimenter de façon quasi quotidienne, car cela demande de l’investissement et une présence régulière afin de maintenir son audimat et continuer d’exister au sein de la blogosphère. Paragraphe 3. Les différentes formes du blog sur le Web La plupart des blogs, sont des journaux personnels tenus par des internautes souhaitant s’exprimer librement sur la toile du Net à une multitude de personnes pour la plupart d’entre elles inconnues. Recenser la totalité des blogs existant dans le monde serait impossible. C’est pourquoi nous allons réduire ce travail en définissant plusieurs catégories susceptibles de regrouper l’ensemble de ces blogs. On peut ainsi les diviser en 6 familles distinctes : Les journaux personnels ou intimes Représentent l’ensemble des pensées d’un ou plusieurs individus sur divers thèmes qu’ils apprécient, de leurs « coups de gueule », de l’actualité, de leurs voyages, de leur vie au quotidien. Toutes les tranches d’âge, catégories socioprofessionnelles y sont représentées. A l’intérieur de cette division, on pourrait y regrouper, les blogs collaboratifs, les « knowledge blog », les warblogs et bien d’autres encore. 1 2 http://embruns.net/blogosphere/petite_histoire_blogosphere.html Embruns, op.cit. 22 Les audioblogs Sont des blogs consacrés à la musique, à tout ce qui a attrait à la notion de fichiers son, le MP3 étant le plus souvent employé. On peut y inclure le podcast, qui est un autre moyen d’écouter du son émanant d’un blog. La seule différence vient du fait qu’on peut s’abonner au blog diffusant cet outil comme on le ferait pour un journal en ligne et le recevoir directement sur notre ordinateur connecté dès qu’une nouvelle version est disponible sans avoir à se rendre sur le blog en question pour l’entendre. On se crée ainsi « … sa propre radio, à la carte et personnalisée. » 1 . Les photoblogs Sont entièrement dédiés à la photographie, ils présentent des illustrations et très peu de textes. On peut y trouver des peintures, des illustrations diverses. Les blogs artistiques Sont des blogs rédigés par des artistes, des passionnés ou tout simplement des amateurs. Ils touchent des domaines variés comme par exemple la littérature, la bande dessinée. Les blogs d’entreprise Sont utilisés dans le cadre professionnel, et sont pour la plupart ouverts à tous les employés d’une société. Chaque individu peut donc y déposer un message en rapport avec son entreprise sans rompre le secret interprofessionnel ou bien parler sur un sujet qui pourrait intéresser les lecteurs du blog. On peut citer comme réussite le blog du Groupe Reflect 2 . Les blogs journalistiques Rédigés par des journalistes ou tout simplement par des amateurs, ces blogs émergent pour donner une version plus transparente et actualisée des médias bouleversant ainsi le « paysage médiatique mondial » 3 . Ces derniers peuvent être individuels comme celui de Dan Gillmor 4 ancien journaliste américain auteur de l’ouvrage « We the media » ou encore collectifs comme celui d’Agoravox 5 . 1 Loïc Le Meur, Blogs pour les pros,Paris, Dunot, novembre 2005, p.221. http://www.groupereflect.net/ourblog.html 3 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.114. 4 http://www.bayosphere.com/blog/dangillmor 5 http://www.agoravox.fr/ 2 23 Les blogs politiques ou « Politico Blog » 1 Venus tout droit des Etats-Unis, ils se sont développés massivement lors de la campagne présidentielle américaine de 2004. Les plus visités étant ceux de John Kerry et de Georges Bush. Aujourd’hui, leur adresse blog respective n’existe plus et renvoie directement à leur site Internet. Cependant, ils ne furent pas les pionniers de cette aventure. Puisque, cette place a le mérite d’être attribuée à Howard Dean 2 en 2003. Ce n’est qu’en 2004, qu’on verra apparaître le premier blog politique en France : celui d’Alain Rousset. Section 3. Nouvel espace d’expression politique et création d’un espace citoyen D’usage rapide et facile, le blog va permettre de créer une nouvelle relation entre les politiques et les citoyens. Autrefois définie comme distante, elle se réduit au fur et à mesure de l’utilisation de ce nouvel outil par un échange d’écrits. « On dit en effet que la liberté de parler ou d’écrire pourrait bien nous être retirée par une autorité supérieure, mais que celle-ci ne saurait jamais nous retirer la liberté de penser. » 3 . En partant de cette citation, on se rend compte en effet que par l’emploi du blog, on se trouve dans un nouvel espace d’expression ouvert à tous. Par cette ouverture d’esprit et de dialogue, le citoyen se sent enfin écouté et ose interagir. Jürgen Habermas disait : « Le public des ‘hommes’ qui font usage de leur raison se transforme en public des ‘citoyens’ lorsqu’il s’agit de débattre sur des questions qui touchent à la res publica. » 4 . Le blog va amener à ce changement et ainsi faire émerger ce nouvel espace d’expression pour le citoyen et les élus politiques. 1 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de Choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.34. http://www.blogforamerica.com 3 Jürgen Habermas, L’espace public, Traduction de Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1997, p.114. 4 Jürgen Habermas, op.cit., p.116. 2 24 Section 4. La place de la « parole » dans le blog « En français, ‘parole’ est une contraction, apparue aux alentours du XIe siècle, du mot ‘parabole’ qui est ‘une parole qui a un but’… qui appelle un changement. Elle est comme un détour qui permet d’aller vers l’autre, … La parabole est un appel. » 1 . En partant de cette définition proposée par Philippe Breton, on va dans le sens que souhaite instaurer le blog avec les participants. C’est-à-dire mettre en avant la parole des citoyens pour leur permettre de donner leur opinion sur divers thèmes. Parole qui passe par l’écrit pour les participants et pour l’auteur des notes. Certains blogs s’expriment sous forme de podcasts vidéo ou audio, audibles par tous comme celui de Thierry Solere 2 : élu UMP. « La parole se déploie aujourd’hui par l’intermédiaire de multiples moyens de communication, qu’il s’agisse de l’oral, de l’écrit, mais aussi de l’image et des supports que nous permettent les nouvelles technologies. » 3 . Cette parole qui dans notre cas, passe principalement par l’écrit sous forme de commentaires va permettre de rassembler des individus sur des sujets qui les intéressent en les illustrant de leur propre expérience personnelle. « La parole est ce qui nous lie aux autres, que nous nous adressons à eux directement ou par le biais d’outils de communication divers. Elle est aussi ce qui nous lie à nous-même : nous ne cessons en effet de nous parler. » 4 . Mais ce qui est important de souligner, c’est que cet accès à l’expression est donné à toute personne qui souhaite s’intéresser au domaine de la politique et qui peut bien évidemment se connecter sur Internet pour discuter des sujets proposés par le blogueur politique. On en revient aux écrits de Jürgen Habermas : « Les questions dont on pouvait discuter devenaient ‘générales’, non seulement en raison de leur importance, mais aussi de leur accessibilité : tous devaient pouvoir y prendre part. » 5 . A travers le blog, tout le monde peut participer à la discussion engagée. 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.18. Thierry Solere, http://www.solere.blogs.com/ 3 Philippe Breton, op.cit., p.6. 4 Philippe Breton, Ibid., p.5. 5 Jürgen Habermas, L’espace public, Traduction de Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1997, p.48. 2 25 « Grâce à la communication, et parfois malgré elle, la parole est aujourd’hui partout. Dans ce sens, la parole est une notion bien plus large que la dimension de l’oral à laquelle on l’a souvent réduite. La communication est le moyen, la parole la finalité.» 1 . Dans son ouvrage « Eloge de la parole », Philippe Breton donne trois sens pour définir la parole : « parole orale » ; « la parole est le propre de l’homme » ; et la « parole valorisée ». Nous ne retiendrons que le dernier usage à savoir « une valorisation de certains aspects de la parole » comme « parole pacifiée ou pacifique, plus douce, plus authentique, qui s’appuie sur le respect de l’autre, qui implique une certaine symétrie dans la relation et qui suppose également une certaine pudeur. Une parole en quelque sorte plus juste, qui serait la parole d’un homme plus humain. » 2 . Le blog va donner cet effet de proximité que recherchent les citoyens depuis longtemps. On va oser s’adresser à des élus, leur poser des questions. On va apprendre plus de choses sur leur vie, sur qui ils sont. La parole a donc une place prédominante dans le blog. Sans elle, il est évident que cet outil ne fonctionnerait pas. Cependant, ce qui lui permet de s’étendre dans la durée, c’est le fait que la parole prise par les internautes s’adresse à une personne en particulier. Mais elle peut et ce qui est le plus surprenant, s’adresser à des internautes qui souhaitent apporter leur point de vue, et ainsi démarrer une conversation entre les divers visiteurs. L’auteur doit pour autant rester maître des échanges et ne pas être débordé par l’ampleur et les tournures que peuvent prendre ces discussions. Pour que cet échange soit le plus productif, il faut que cette parole soit renouvelée par l’auteur. Il doit toujours se situer au centre des propos émis, se remettre en question et ainsi être amené à parler avec des individus pour la plupart inconnus. On l’aura bien compris, « … le développement de l’Internet accompagne une libération de la parole humaine. » 3 . 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.6. Jürgen Habermas, L’espace public, Traduction de Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1997, p.46. 3 Pierre Lévy, Cyberdémocratie, Paris, Odile Jacob, janvier 2002, p.65. 2 26 CHAPITRE II. LE BLOG : UN INSTRUMENT AVANT TOUT Section 1. Moyen de communication ou moyen d’information ? Il est important de faire la distinction entre ces deux termes qui sont aujourd’hui utilisés pour tout et n’importe quoi. Peut-on dire que le blog est un outil de communication ou bien un outil d’information ? Il n’est pas évident de faire un choix car on se rend compte que : « La distinction entre communication et information est cependant vide de sens dès lors qu’il s’agit de l’Internet. Nous sommes à l’orée d’un monde où tout ce qui est communiqué, voire communicable, devient information. » 1 . Aussi sommes nous en droit aujourd’hui de nous poser des questions comme le font les auteurs de la « Machine Internet » : « Pourquoi communique-t-on ? On communique pour informer, pour s’informer, connaître, se connaître, expliquer, s’expliquer, comprendre, se comprendre. » 2 . Le blogueur va plus ou moins se dévoiler, engageant de ce fait une discussion avec des intervenants sur son blog. Comme le montre Jürgen Habermas, dans son ouvrage « L’agir communicationnel », « … la communication dans les sociétés modernes » a un « rôle central »3 . « On ne peut donc pas ne pas communiquer » comme le souligne Jean-Claude Abric. Si on ne communiquait pas, on serait des personnes « aigries ». « La communication est d’abord au cœur de toute relation sociale. Sans langage, sans communication, pas de vie en commun. De plus, c’est par l’argumentation, le dialogue, la négociation, que la démocratie peut vraiment vivre. La démocratie suppose enfin la libre circulation de l’information. » 4 . La communication est primordiale pour l’humain. L’homme a besoin de parler, d’être écouté pour pouvoir exister, c’est un processus de rétroaction qui nécessite une écoute de l’autre. Et c’est ce feedback qui va créer ce dialogue. 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.14. Philippe Cabin, Jean-François Dortier, La communication : Etats des savoirs, Edgar Morin, « L’enjeu Humain de la communication », Auxerre, Sciences Humaines, février 2005, pp.19-26. 3 Philippe Cabin, Jean-François Dortier, op.cit., Jean-François Dortier, « La communication : omniprésente, mais toujours imparfaite », Auxerre, Sciences Humaines, 1998, pp.1-16. 4 Philippe Cabin, Jean-François Dortier, Ibid., pp.1-16. 2 27 « Nous communiquons aussi pour nouer des relations, pour partager des émotions et des sentiments, pour aussi agir sur autrui, pour confronter notre identité et celle des autres… ou passer le temps. » 1 . Aujourd’hui, cette communication se développe de plus en plus via Internet et le blog prend une place dominante pour cet échange. Son essor est si impressionnant qu’aujourd’hui il se développe comme ne l’a jamais fait aucun instrument de communication originaire du Web comme les sites, les forums ou encore les chats. Sur un blog, le débat s’ouvre à différents sujets. C’est pourquoi, la communication est nécessaire pour qu’il puisse fonctionner correctement dans le temps. Cette communication va faire naître une nouvelle conversation qui aura mis du temps à s’installer dans le quotidien de notre vie et qui n’est probablement pas prête de s’arrêter. Voilà pourquoi la communication prime sur l’information qui occupe le second rôle dans l’usage de cet instrument. Cette dernière n’est que le relais de la première, elle va être comme le cite si justement Daniel Bougnoux « le contenu » et la communication « le contenant » 2 . Mais l’une ne va pas sans l'autre. De nos jours, la communication touche tous les domaines de la vie publique et les premiers à l’avoir assimilée depuis de nombreuses années sont les politiques qui par leur besoin de se faire connaître ne reculent devant rien face à la modernité. Voilà pourquoi aujourd’hui, les élus politiques utilisent ce nouvel outil de communication, dans le but de toucher le maximum de personnes. « Le mot communication est à la mode. Et l’on prête à la chose toutes sortes de vertus. Des vertus politiques : augmentons les taux de communication, la démocratie ne s’en portera que mieux. » 3 . La démocratie actuelle l’a bien compris, la seule différence avec les autres instruments de communication traditionnels, c’est qu’il est utilisé dans sa majorité par des élus locaux. Par le simple fait de se démarquer par son emploi, une notoriété naît et aujourd’hui, ces personnes sont prises en exemple pour montrer l’efficacité de leur blog. C’est donc les élus de grande renommée qui vont suivre le mouvement, ils ont bien compris l’enjeu et l’impact que cet instrument pouvait véhiculer sur leur image de marque. 1 Philippe Cabin, Jean-François Dortier, La communication : Etat des Savoirs, Edmond Marc, « Le face-à-face et ses enjeux », Auxerre, Sciences Humaines, février 2005, pp.87-94. 2 Philippe Cabin, Jean-François Dortier, op.cit., Karine Philippe, « Les sciences de l’information et de la communication », Sciences Humaines, février 2005, pp.59-66. 3 Dominique Wolton, Le Nouvel Espace Public, Paris, Editions du CNRS, mai 1989, Raymond Boudon, « Petite sociologie de l’incommunication », p.53. 28 Section 2. Un contenu sans cesse mis à jour Comme nous venons de le voir 1 , la communication est au cœur de ce processus et l’information n’est là que pour le compléter. Si la communication devance l’information, ces deux termes sont indissociables. « Lorsque la communication prend le devant de la scène, prime est donnée à l’innovation : il faut sans cesse renouveler, à défaut du message, le support du message. » 2 . La communication et en particulier, la communication politique, a besoin d’innover le plus souvent possible pour « étonner » les citoyens. La dernière méthode employée étant l’utilisation du blog. Toutefois, pour que cet instrument puisse véritablement fonctionner, il est nécessaire de renouveler les informations dans des délais très courts, faute de quoi les individus délaisseront peu à peu cet outil. « …, les nouvelles se consomment toujours plus fraîches, mais l’information qui accède au direct (stade ultime de la fraîcheur et triomphe de l’appareil médiatique) se renverse en sensation, en stimulus-réponse (on ne peut pas ne pas répondre), bref en communication, dont le suspect consensus qui l’entoure montre assez la fonction communautaire. » 3 . Cette information beaucoup plus directe et sans intermédiaire nous parvient de plus en plus facilement et va donc modifier la notion même de média en élargissant son champ d’action. Car « L’information, cette grandeur impalpable, ne réside ni dans les choses ni en nous, mais au milieu ou transversalement à nos médias, mot ironique dont l’étymologie nous rappelle que la relation de communication est première, et que la bataille de l’information se livre toujours entre nous. » 4 . 1 Cf. Supra, p.22. Dominique Wolton, Le Nouvel Espace Public, Paris, Editions du CNRS, mai 1989, p.129. 3 Daniel Bougnoux, La communication contre l’information, Paris, Hachette, 1995, p.25. 4 Daniel Bougnoux, op.cit., p.34. 2 29 Section 3. Vers un nouveau média ? Le blog va permettre « De faire de la ‘retombée médiatique’ l’objet même de leur politique. » 1 . Si nous prenons le titre du livre de Benoît Desavoye, « Les Blogs. Nouveaux médias pour tous », on comprend tout de suite que les blogs sont en train de prendre une nouvelle définition, à savoir celui de « médium ». En effet, le blog par sa place sur la toile du Net est voué à être vu par l’ensemble de la planète car rien ne peut en empêcher sa visite. On peut donc considérer ce moyen comme un nouveau « média de masse » au même titre que la télévision, la radio. Avec toutefois une différence aujourd’hui, c’est qu’on peut intervenir dans l’information qui nous est proposée. On est donc en train de changer la définition même du média, car nous pouvons interagir avec l’émetteur de l’information et donner notre point de vue. Ce qui n’est pas possible avec les médias traditionnels qui nous laissent « passifs » devant leur contenu. Or, les politiques sont toujours à l’affût de nouveaux procédés pour diffuser leurs idées, être entendus par le plus grand nombre de personnes désireuses d’en savoir un peu plus sur eux. Les individus, vont donc se connecter volontairement sur leur ordinateur et aller à la recherche de nouvelles « fraîches », qui peuvent ne pas être encore diffusées sur d’autres supports. Le blog, on n’en doutera plus, est en tout état de cause : « Un nouveau format. Un nouveau terrain d’expression. Une nouvelle forme de communication. Un nouveau média. » 2 . Aujourd’hui, tous les politiques quel que soit leur renommée, donnent aux médias une place primordiale qui est « … au centre des préoccupations de nos hommes politiques. Suprême espoir, suprême recherche : la notoriété. » 3 . Même si au départ, ces personnes ne pensaient pas faire du marketing politique en créant leur blog, on tend vers cette voie. Car, « le marketing politique, pour un leader, c’est de lui permettre de se faire connaître – d’acquérir une notoriété – et de séduire au maximum de gens – de susciter une adhésion. » 4 . Alors oui, nous allons vers un nouveau média, mais beaucoup plus restreint que les « classiques » car son audimat dépend du nombre de personnes ayant accès à Internet et ayant entendu parler de leurs blogs. 1 Roland Cayrol, Médias et Démocratie : la dérive, Mayenne, Presses de Sciences Po, janvier 1997, p.44. Cyril Fievet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.V. 3 Roland Cayrol, op.cit., p.41. 4 Roland Cayrol, Ibid., p.54. 2 30 CHAPITRE III. Le BLOG : UNE NOUVELLE TENDANCE Section 1. La France face aux nouvelles technologies La France a toujours eu du mal à accepter facilement les nouvelles technologies. Internet sur notre territoire en est un exemple. Nous pouvons constater sans trop de difficultés qu’Internet n’est toujours pas accessible dans son intégralité dans le pays. L’ADSL a mis du temps à s’introduire dans les foyers, même si ce retard semble se réduire depuis quelques années et tout récemment avec les offres d’abonnements comprenant le téléphone. Cependant, le prix d’un équipement étant toujours onéreux et la connexion toujours payante, la totalité de la population ne pourra pas y accéder, plaçant leurs priorités dans des besoins vitaux nécessaires et reléguant le simple fait de pouvoir surfer sur la toile du Web au dernier plan. Toutefois, au 30 septembre 2005, on pouvait recenser 12,2 millions de foyers équipés en micro-ordinateur 1 . D’après une dernière étude faite par l’observatoire de l’Internet haut débit datant du quatrième trimestre de 2005, on compte « 9 465 600 abonnements Internet approximativement. » 2 , sur une population française estimée par l’INSEE au 1er janvier 2006 à 61 044 684 3 . Ce qui nous amène à dire que « Plus de 50 % des foyers internautes français ont une connexion haut débit. » 4 . Internet semble suivre le même parcours pour son émergence que la radio, la télévision et le téléphone dans notre pays. 1 http://www.internet.gouv.fr/information/information/chiffres/12-2-126.html http://www.art-telecom.fr/ 3 http://www.insee.fr/fr/ffc/pop_age2.htm 4 http://www.journaldunet.com/0503/050330internautes.shtml 2 31 Section 2. Son développement dans notre pays Au départ, pour cet outil on pouvait parler de révolution. On voyait émerger une quantité de blogs sans savoir de quoi il s’agissait. Aujourd’hui, même si le nombre de blogs augmente doucement de jour en jour, on peut considérer que ce phénomène n’est pas en perte de vitesse. Bien au contraire, cette évolution semble être plus impressionnante en France que partout ailleurs. On peut chiffrer le nombre de plus de 3 millions de blogs français, contre 900 000 pour la Grande-Bretagne, la Russie 800 000 1 . Et cela malgré notre retard sur notre mode de connexion. Section 3. Evolution ou révolution ? Depuis le temps que le blog existe, on ne peut plus envisager le terme de révolution. Car aujourd’hui de nombreuses personnes savent ce qu’est un blog même si beaucoup avouent ne jamais avoir été sur l’un d’entre eux. Etant dans une phase d’élargissement de ce phénomène, il serait plus judicieux de nos jours de parler d’évolution que de révolution pour les blogs politiques. Cette augmentation dépend bien évidemment de certaines catégories qu’Olivier Ertzscheid a facilement identifié : « gratuité », « facilité », « gestion automatique de l’information », « services collaboratifs » 2 . Les blogs deviennent au fil des mois de nouveaux lieux de la parole « libre » et c’est bien pour cela que leur augmentation ne cesse de croître. Non seulement, cet outil est facile de manipulation mais il a également l’avantage d’être quasi gratuit. Ce qui n’est pas le cas des autres moyens de communication que peuvent employer des élus pour se promouvoir lors d’une candidature électorale. Mais à ce jour, seule une minorité d’entre eux ont décidé de franchir le pas et de se lancer dans cette aventure. 1 http://www.pointblog.com/past/2005/06/16/combien_de_blogs_en_europe_.htm Olivier Ertzscheid, « Weblogs : un nouveau paradigme pour les systèmes d’information et la diffusion de connaissances ? », Colloque du 27 avril 2005, archives SIC. 2 32 PARTIE II. LE BLOG : UN NOUVEAU MODE DE COMMUNICATION POLITIQUE Comme nous venons de le constater, la France est le premier pays à avoir autant de blogs. Certes beaucoup d’entre eux sont laissés par leur propriétaire au bout de quelques temps d’utilisation, mais néanmoins le phénomène ne cesse de grandir et de toucher toutes tranches d’âge et de catégories sociales diverses. N’est ce pas là, un bon moyen de toucher de nouvelles personnes, notamment pour les élus qui sont toujours à la recherche de nombreuses poignées de mains supplémentaires, dans le but de conquérir de futurs électeurs. 33 CHAPITRE I. LA DÉMOCRATIE EN FRANCE Etymologiquement la démocratie est issue du « Grec Dêmos (le peuple) et Kratos (l’autorité) », qui est « ‘ le gouvernement du peuple par lui-même’ » 1 . En France aujourd’hui, elle est représentée par le chef de l’Etat, élu au suffrage universel. On peut donc dire que : « Si le Peuple exerce son pouvoir, c’est seulement par l’intermédiaire des représentants qu’il s’est choisis. » 2 . Nous allons démontrer que le blog tente d’appartenir à une démocratie mais pas forcement celle que l’on croît. En effet, on entend beaucoup parler de démocratie représentative, participative ou directe sans trop savoir ce que cela signifie vraiment. Section 1. Démocratie représentative, participative ou directe ? Le blog peut-il se trouver dans l’une de ces trois démocraties ? Pour ce qui est de la démocratie représentative, c’est un « Système politique dans lequel le peuple désigne des représentants qui incarnent la volonté générale. Les représentants votent la loi. Aujourd’hui, on peut constater qu’« … internet est une réponse à la crise – qui se manifeste notamment par un accroissement régulier des taux d’abstention aux élections, un déclin du militantisme et une défiance croissante des citoyens à l’égard des élus – de la démocratie représentative. » 3 . On peut également citer : « Pour des raisons pratiques de dimension des Etats et de complexités des affaires, il a fallu envisager des mécanismes de délégation. Dès lors, s’impose à peu près partout la notion de démocratie représentative. Les dirigeants sont les mandataires. » 4 . Mais c’est le peuple qui va choisir ses représentants lors des élections. Le blog ne peut donc pas intervenir dans cette catégorie. 1 Serge Braconi, « Enjeux sociopolitiques de la démocratie participative de proximité : étude des médiations électroniques entre élus locaux et administrés », Nice, 2002, p.7. 2 Philippe Braud, La démocratie politique, Paris, Seuil, mars 2003, p.11. 3 Jean-Yves Capul et.al, L’internet, Cahiers Français N°295, Paris, La documentation Française, mars-avril 2000, Thierry Vedel, « Une nouvelle société de l’information. L’internet et la démocratie », p.30. 4 Philippe Braud, op.cit., p.73. 34 En partant de la définition du Wikipédia, on peut dire que la démocratie participative permet « … d'accroître l'implication et la participation des citoyens dans le débat public et la prise de décisions politiques qui s'en suivent par rapport aux démocraties représentatives » 1 . Aujourd’hui, on serait tenté de dire que nous nous trouvons dans une démocratie dite participative par l’utilisation de ce procédé. Le blog va permettre aux citoyens de prendre la parole. Mais attention, tous les citoyens n’y ont pas accès et c’est à partir de cette réflexion qu’on peut dire que le blog n’appartient pas à cette démocratie. Sinon, tout le monde serait au courant de l’existence de cet outil et tout le monde pourrait le consulter. Or, ce n’est pas encore le cas actuellement. Alors peut-on envisager le blog dans notre troisième proposition, à savoir, la démocratie directe ? Par définition, celle-ci considère que « le peuple prend lui-même les décisions. » 2 . Aujourd’hui, on est loin de voir toute une population prendre position dans le domaine de notre démocratie. Certes, le blog se veut être plus direct, plus proche de l’élu, sans intermédiaire. « La grille d’analyse la plus communément acceptée oppose la démocratie représentative – reconnue comme modèle établi de la démocratie moderne – à la démocratie directe, considérée finalement comme une chance qu’offrent les nouvelles technologies. » 3 . Sauf que, toute la population d’un pays ne se connecte pas sur ces nouveaux moyens de communication. Plusieurs facteurs sont responsables de cela, soit la personne y est contre, soit elle ne sait pas que cet outil existe ou encore n’a pas les moyens de se connecter et donc d’accéder à cette nouvelle information. De ce fait, l’individu peut se sentir rejetée de la société car une inégalité apparaît. Alors qu’à la base, le blog n’a pas été conçu pour développer des différences sociales. « En fait, considérées du point de vue des citoyens, démocratie représentative et démocratie directe présentent une caractéristique commune : elles incarnent une participation intermittente. Les citoyens peuvent être appelés à désigner leurs représentants où à prendre directement des décisions : toutefois, dans un cas comme dans l’autre, leur présence est périodique, marquée par une distance dans le temps, localisée dans quelques lieux officiels. » 4 . 1 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mocratie_participative Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mocratie_repr%C3%A9sentative 3 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.12. 4 Stefano Rodotà, op.cit., p.12. 2 35 L’espace et le temps étant une marque de repère pour situer la place de cet instrument dans une démocratie. Le blog est donc un mélange de ces trois démocraties à la fois. Il fait participer des citoyens, va représenter pour certains l’image du parti idéal et va être un « semblant » de dialogue « direct » pour les individus connectés. Mais voilà, seuls les internautes peuvent y avoir accès de ce fait, le blog ne peut en aucun cas être un outil qui puisse être considéré comme démocratique à partir du moment où toute une population ne peut pas y accéder. On sait que la démocratie en France existe depuis de nombreux siècles avec des modifications importantes au fil des révolutions, manifestations et autres. Le peuple étant toujours au cœur de ces évolutions. Mais « les maîtres » des décisions restent les élus représentés par le Président de la République et son gouvernement. Même si le blog veut se donner l’image de la démocratie à savoir justement être « … un univers de pratiques politiques dominées par l’idée de négociation, d’écoute et de dialogue.»1 , on n’en est pas à ce stade de nos jours. Aujourd’hui, est-on vraiment à l’écoute de l’autre ou est-on plutôt à l’écoute de sa propre personne pour se faire davantage connaître et ainsi augmenter sa côte de popularité ? C’est pourquoi, nous sommes en droit de nous poser la question suivante : doit–on parler de démocratie acclamative pour essayer de catégoriser le blog dans une démocratie précise ? Dans l’ouvrage « La machine Internet », les auteurs nous signalent que « …, l’essentiel du succès d’Internet auprès des particuliers est là et nulle part ailleurs : il promeut la démocratie qui plaît, une démocratie acclamative, mais non participative si ce n’est à titre facultatif » 2 . Le blog ne peut pas non plus y appartenir, puisqu’on l’a vu Internet n’est pas utilisé par l’ensemble de la population et que des disparités sont toujours présentes. Alors, peut-on encore émettre l’idée, que cet instrument soit issu d’une démocratie continue comme l’évoque Stefano Rodotà « …, celle qui se dessine devant nos yeux est une forme de démocratie continue, où la voix des citoyens, quel que soit l’endroit où ils se trouvent et à tout moment, peut se faire entendre pour participer au concert politique quotidien. » 3 . A travers cette vision, on se rapprocherait plus de l’objectif du blog. Le citoyen y vient quand il le désire et non selon le « bon vouloir » de ses dirigeants. Ce qui ne fonctionnerait sans 1 Philippe Braud, La démocratie politique, Paris, Seuil, mars 2003, p.233. Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.219. 3 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.12. 2 36 doute pas dans notre pays. Cependant, la démocratie en France peut évoluer, elle est certes en train de changer et se doit de se modifier avec l’appropriation des nouvelles technologies. « Au cours de son histoire, la démocratie n’a jamais été définie une fois pour toutes : son destin – on pourrait même dire sa vocation -, est véritablement liée au changement. » 1 . Il suffit d’attendre et de voir d’ici quelques mois ce que nous venons d’évoquer se révèlera vraiment pour les prochaines élections présidentielles de 2007. Section 2. Internet modifie-t-il son image « négative » ? Jusqu’à présent Internet au sens large du terme, n’a pas modifié l’image « négative » que dégage en générale la politique. « Dans un sondage du 10 octobre 2005, … le CSA dénombrait 71% de Français avaient une mauvaise impressions des politiques … » 2 . Elle reste discréditée suite aux nombreuses « histoires » qui secouent le monde de nos politiques. Le dernier exemple en date est celui de l’affaire Clearstream impliquant Nicolas Sarkozy soupçonné d’avoir des comptes à l’étranger. La « multiplication des scandales financiers touchant les élus sans toujours les frapper d’inéligibilité totale a accéléré le processus de perte de confiance. » 3 . En revanche, et c’est la nouveauté avec le blog, l’image du politique se modifie sans « véritables miracles », premier pas vers un mieux apparent dans la participation à la vie gouvernementale. « Les critiques contre la médiatisation de la politique sont nombreuses et se situent dans des registres différents. La plus ancienne et la plus souvent reprise stigmatise la société du spectacle sous des formes plus ou moins radicales. » 4 . Cependant, avec le blog, la médiatisation est ouverte aux élus qui ont peu ou pas le droit à la parole. Représentants démocratiques qui ont beaucoup de choses à revendiquer depuis longtemps, mais n’ont pas eu jusque là l’opportunité de le faire librement. Aujourd’hui avec le blog, les « petits » élus sont de plus en plus visibles dans la sphère médiatique. Ils ont su tirer les avantages qu’offrait Internet. A contrario, les chefs du gouvernement ne semblent pas s’intéresser à cet outil, faute peut-être d’être trop impersonnels en l’utilisant. Ils ne semblent pas se préoccuper de cette attente de la 1 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.18. 2 François-Xavier Hussherr, Le nouveau pouvoir des internautes, Boulognes, Timée-Editions, mai 2006, pp.206-207. 3 François-Xavier Hussherr, op.cit., p.205. 4 Jean Mouchon, La politique sous l’influence des médias, Paris, L’Harmattan Communication, 1998, pp.9-10. 37 population pour donner naissance à un dialogue. « En termes de communication, le pouvoir autoritaire se définit par l’asymétrie de la visibilité : les dominés sont transparents tandis que le centre du pouvoir reste opaque. » 1 . Cependant, il est intéressant de noter que depuis François Mitterrand, les politiques ont compris que la médiatisation visuelle était tout aussi importante, sinon davantage, que la médiatisation écrite. « Les hommes politiques se soucient de plus en plus de leur image et de la communication de leurs messages ... En Effet, un élément essentiel de la démocratie moderne fut la représentativité des élus. » 2 . Voilà pourquoi le blog va dans le sens de la représentation mais cette fois-ci des élus qui veulent sortir de l’ombre de leur hiérarchie. Cet outil est en train de modifier la donne politique qui veut que ce soit toujours les mêmes que l’on voit, qu’on lise sur tous les médias. Le changement de situation n’est pas radical mais cela commence à se faire ressentir. Celui qui décide de se faire connaître par ses propres moyens a toutes les chances de devenir un jour aussi connu qu’un politique national. Il lui suffira de faire du « Buzz » 3 autour de lui et ainsi beaucoup de monde ira voir qui il est au départ par curiosité. A partir de cela, les médias traditionnels s’intéresseront à cette personne politique qui était autrefois dans l’ombre. Notamment pour les élus locaux, le plus souvent cachés par les grands noms de la politique locale à savoir le maire, ou encore le président départemental ou régional. On le sait, « Le discours politique n’a pas bonne réputation. Stigmatisé aussi bien pour ses lourdeurs formelles que son caractère mensonger (il suffit de penser à la fortune de l’expression ‘langue de bois’), il semble aujourd’hui condamné au mépris sinon à l’insignifiance. » 4 . Le blog va tenter de casser cette image si souvent infligée à l’ensemble de la classe politique toute catégorie confondue. Mais attention, « Le souci de bien communiquer habite si fortement les hommes politiques qu’ils se voient accuser de délaisser le monde ‘réel’ pour celui des mots »5 . Il faudra du temps encore à notre gouvernement pour faire oublier ses maladresses et, pour y arriver, un dialogue doit être engagé avec la population et pas uniquement avec une partie d’entre elle, sans quoi, cette image restera toujours figée. 1 Pierre Lévy, Cyberdémocratie, Paris, Odile Jacob, janvier 2002, p.42. Dominique Wolton, Le Nouvel Espace Public, Paris, Editions du CNRS, mai 1989, p.43. 3 Nouveau moyen de développer son influence au sein de la blogosphère en faisant parler de soi par les écrits d’autres blogueurs. 4 Christian Le Bart, Le discours politique, Paris, PUF, novembre 1998, p.3. 5 Christian Le Bart, op.cit., p.52. 2 38 Section 3. Le cas des collectivités territoriales Paragraphe 1. Petite définition On parle de collectivité territoriale ou de collectivité locale depuis la décentralisation des années 1980, plus exactement le 2 mars 1982 1 effectuée par le gouvernement de Pierre Mauroy, Premier Ministre de l’époque. Cette décentralisation appartient aux lois Deferre et va ouvrir « la voie à un profond bouleversement de la répartition des pouvoirs au profit des acteurs locaux. » 2 . Ainsi, cela a permis aux élus locaux d’être au cœur des problèmes de leur ville, de leur département ou bien de leur région. Bien que davantage exposés à des problèmes d’ordre financiers, juridiques, administratifs, la décentralisation a également été un tremplin les associant à la réussite de certains projets. C’est pourquoi, ils se doivent d’être les plus honnêtes possibles avec leurs citoyens sans quoi rien ne leur sera pardonné. Cela a permis « … d'adapter les politiques publiques au plus près des besoins de la population. » 3 . C’est ainsi que vont émerger de nouveaux postes politiques notamment celui du Conseiller Régional, du Conseiller Général et de tous les élus qui composent leur conseil. Bien évidemment les modes de scrutin sont différents les uns des autres. Aujourd’hui, c’est essentiellement le conseil municipal qui suscite le plus d’intérêts pour les citoyens locaux car c’est à partir de leurs votes qu’un élu sera à la tête de la ville pour les représenter sur une durée de 6 ans. Pour donner un ordre d’idée du nombre de ces représentants en France, en 1999, ils étaient plus de 500 000 élus locaux à représenter les collectivités territoriales4 . A ce jour, ils seraient 520 000 élus, dont font parti les élus des 38784 communes, des 100 départements, suivi des 26 régions que compte notre pays. 1 B. de Gunten et al., Les institutions de la France Ve République, Paris, Nathan, p.80. Jean-Yves Capul, et al., Les collectivités locales en mutation, Paris, La documentation Française, Michel Verpeaux, « La décentralisation depuis les lois de 1982 », octobre-décembre 1999, pp. 3-12. 3 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9centralisation 4 Jean-Yves Capul, et al., op.cit., Vincent Poitier, « Organisation et fonctionnement des collectivités locales : nouveaux enjeux. La responsabilité des acteurs locaux », octobre-décembre 1999, pp.81-88. 2 39 Paragraphe 2. Le blog et les élus locaux Les élus des collectivités territoriales ont été les premiers à manipuler cet outil de communication émanant de la toile Internet. On peut citer à ce propos, comme premier utilisateur politique français en janvier 2004 : Alain Rousset 1 , socialiste et candidat aux élections régionales d'Aquitaine 2 qu’il a remporté cette même année. Mais, depuis le 8 décembre 2005 3 il n’est plus en ligne. Son blog lui aura permis une plus grande notoriété et une visibilité sur tous les médias possibles. Il le dit sans gêne, cet instrument était bel et bien un « blog de campagne » 4 . Sa volonté aura été et il l’annonçait clairement sur un communiqué de presse : « Ici pas de censure, pas de langue de bois juste un contact direct, simple avec les Aquitains » 5 . Ses objectifs étaient : un désir de transparence et une réelle envie de partager avec ses concitoyens. Par la suite, les blogs politiques d’élus locaux et tout récemment nationaux ont vu le jour, on peut citer celui d’André Santini6 datant de décembre 2005, ou encore celui de d’Alain Lambert 7 créé en août de la même année. Il s’agit bien de blogs d’élus locaux, même si ces derniers ont été connus suite à une carrière nationale. Les collectivités territoriales de part leur statut de régions, de départements ou de communes sont devenues un autre moyen de parler de politique, plus proche des citoyens. De ce fait, c’est le Maire qui est au cœur de nos problèmes quotidiens entouré de ses élus face aux difficultés rencontrées dans notre ville et non le Président de la République. Le Maire devient le porte parole de la République Française, il est l’élu local de référence. Le rôle de l’élu local est bien évidemment d’être en premier lieu à l’écoute de ses citoyens et c’est de loin la responsabilité la plus importante. Car sans les citoyens, il ne serait pas à ce poste là. C’est un remerciement permanent qui passe par cette écoute plus ou moins active. 1 Alain Rousset, http://www.aquitaine-rousset.net/blog.php3 http://www.pointblog.com/past/2004/01/24/alain_rousset_1er_candidat_blogueur_en_france.htm 3 www.arf.asso.fr/index.php/content/download/ 2170/32322/file/2005-12-08-discours_alain_rousset_congres_arf.pdf 4 Pointblog, 24 février 2004, http://www.pointblog.com/past/2004/01/24/alain_rousset_1er_candidat_blogueur_en_france.htm 5 Pointblog.com, 24 janvier 2004, http://www.pointblog.com/past/2004/01/24/alain_rousset_1er_candidat_blogueur_en_france.htm 6 André Santini, http://www.santini-andre.com/ 7 Alain Lambert, http://www.alain-lambert-blog.org/ 2 40 Section 4. Le blog politique : une évolution lente Concernant l’évolution de cet outil concrètement, on se rend compte que les blogs ont vite été intégrés par les adolescents notamment par l’utilisation de la plate-forme Skyblog qui enregistre à ce jour plus de 4,8 millions de blogs 1 à son actif. Du côté politique, le mouvement commence peu à peu à évoluer. Mais il est vrai que le nombre actuellement ne dépasse pas une petite centaine de blogs répertoriés 2 . Cependant, le phénomène s’accélère chez les élus locaux. Cela est sûrement dû au fait que la France a plus d’élus locaux que nationaux. Et surtout, que les élus nationaux ont plus facilement accès aux médias traditionnels que les autres. Donc comme nous l’avons dit précédemment, les acteurs politiques locaux utilisent tous les moyens nécessaires pour se faire connaître auprès du public. Mais face à la réussite de cet outil les nationaux emboîtent le pas. 1 2 http://www.skyblog.com/ http://www.placedelademocratie.net/mediawiki/index.php?title=R%E9pertoire_des_blogs_politiques 41 Section 5. Nouvel outil comme approche démystificatrice de la politique « Pour être plus exact, le mythe politique diffusé par les hérauts de l’Internet est celui d’une société démocratique sans limites spatiales et vivant en temps réel. »1 . Avec le blog, on est dans un « faux temps réel » car les réponses sont espacées dans la durée, et ne sont pas immédiates. Le propriétaire du blog doit se rendre compte qu’un visiteur lui a laissé un message. Ce dernier en décidant de créer un blog, se doit de répondre à l’ensemble de ses commentaires et ainsi commencer un dialogue. Conversation qui n’existait pas auparavant de cette manière là. Pour ce qui est des limites spatiales, par l’utilisation de cet outil on peut se trouver à l’autre bout de la planète et arriver à communiquer. La politique des élus locaux, du moins de certains d’entre eux, est prête à relever le défi d’ouvrir un débat avec les citoyens à partir du moment où ils décident de créer leur propre blog. Le dialogue reste ancré dans le temps car les messages étant archivés et répertoriés dans différentes catégories peuvent être lus et commentés plusieurs jours, semaines ou mois après avoir été postés. Ainsi, le dialogue ne se rompt jamais et peut-être à n’importe quel moment remis au goût du jour tant que le blog existe. Ce qui n’est pratiquement pas possible pour les médias traditionnels, puisque les archives restent payantes alors que l’archivage sur le blog est totalement gratuit. Par ce nouveau procédé technologique, un dialogue apparaît et permet ainsi une meilleure écoute des citoyens. Alors qu’on entend souvent dire que les politiques ne pensent pas assez à leurs citoyens, par le biais d’Internet le blog va permettre à quiconque de prendre la parole et oser dire ce qu’il pense. De plus, par ce moyen d’échanges la réponse sera visible par tous dans un temps d’attente très court allant de quelques minutes à plusieurs jours. Au travers du blog, le politique ose communiquer sur des sujets variés sans faire appel à un intermédiaire qui pourrait interférer dans la conversation avec les visiteurs. Le jeu du franc parler se veut être la règle de ce support et le mythe du politicien intouchable, inabordable semble dépassé. 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.57. 42 CHAPITRE II. L’ÉTAT DE LA COMMUNICATION POLITIQUE LOCALE « S’il est vrai que l’accès à l’information est maintenant ouvert au plus grand nombre et qu’il détermine la régulation démocratique, la communication politique constitue un des maillons essentiels de la démocratie contemporaine. » 1 . Nous allons mettre en évidence l’ensemble des outils utilisés par les représentants politiques locaux pour faire passer des messages, se faire connaître du grand public et ainsi augmenter leur chance de se faire élire. « Traditionnellement, les technophiles …, comme Albert Gore … ou Pierre Lévy …, associent le développement d’Internet à l’avènement d’une démocratie renouvelée, plus active et participative, voire directe, qui renouerait avec l’agora athénienne. » 2 . Nous allons montrer comment Internet est inscrit à l’ensemble des outils traditionnellement utilisés par les élus pour leur communication. Section 1. Une communication indispensable pour l’élu et le citoyen « Qu’une ville ou qu’un département puisse mener une action volontariste de communication relevait voici encore quarante ans de l’impensable. »3 . Aujourd’hui ce qui serait inimaginable, c’est qu’on ne puisse pas communiquer dans ces entités. Sans quoi on ne pourrait pas parler de démocratie dans notre pays. Il ne faut pas se tromper, si les hommes politiques sont aujourd’hui si friands des médias c’est pour véhiculer leur image, se faire entendre le plus possible et par le plus grand nombre de futurs électeurs. Etre visible, audible et lisible tel est le chemin de bataille des élus qui souhaitent accroître leur notoriété. 1 Jean Mouchon, La politique sous l’influence des médias, Paris, L’Harmattan Communication, 1998, p.13. Anne-Marie Gingras, La communication politique. Etat des savoirs, enjeux et perspectives, Sainte-Foy, Presse de l’Université du Québec, 2003, Thierry Vedel, « Internet et les pratiques politiques », p.191. 3 Erik Neveu, Une société de communication ?,Paris, Montchrétien, juillet 2001, p.93. 2 43 Paragraphe 1. La médiation politique La médiation politique peut être de deux sortes grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. « Les moyens de communication se diffractent en deux modalités, … une communication directe, face à face, ou … une communication à distance, sans présence vivante. » 1 . En partant de cette réflexion, on se rend compte qu’on est en présence de deux univers totalement différents et qui pourtant ont le même but : communiquer avec autrui sur divers problèmes de société. Par le blog, on se rapprocherait plus de la deuxième proposition de communication, même si cet outil peut amener dans certaines conditions à rencontrer physiquement ses interlocuteurs. « La médiation politique serait ainsi une médiation rendant possible une forme sociale de la spécularité à partir de laquelle les acteurs sociaux se constitueraient comme sujets, puisqu’elle rendrait possible le retour sur soi de la conscience, pour les sujets, de leur appartenance sociale. » 2 . Cette médiation est nécessaire, trop souvent utilisée dans le seul but de se faire une notoriété pour l’acteur politique, elle se doit de nos jours, d’être employée dans le sens qui se veut d’être à l’écoute de l’autre, de l’échange avec autrui. Paragraphe 2. Les instruments de base utilisés par tous les politiques Les premiers outils utilisés par les politiques avaient comme « architecture » de base : une communication verticale ou pyramidale. On entend par là, que l’élu parle, le peuple écoute sans pour autant avoir la moindre possibilité en retour de donner son avis. Il n’y a pas ou disons-le très peu de « feedback » pour permettre un véritable dialogue. La communication se fait souvent à sens unique. Cette communication « … a un caractère inexorablement autoritaire, découlant du silence obligé des téléspectateurs, de leur écoute passive. » 3 . Mais malheureusement, le public n’avait pas trop le choix, et c’est par l’utilisation de ces médias que les élus vont pouvoir s’exprimer, se montrer et se faire apprécier. C’est une tradition qui perdure depuis des dizaines d’années. 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.33. Bernard Lamizet, La médiation politique, Paris, L’Harmattan, 1998, p.53. 3 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.39. 2 44 « Pour transmettre leur pensée, les hommes ont toujours utilisé des « médias » : paroles, manuscrits, imprimés, écrans. » 1 . Le choix devient alors très vite varié pour le simple citoyen lambda qui souhaiterait s’informer dans le domaine politique. « Potentiellement, l’homme contemporain dispose de nombreux moyens pour s’informer. Le journal, la radio, la télévision sont à la portée de tous pour proposer leur approche complémentaire de la réalité … Du concret à l’abstrait, de la rapidité de l’instant au recul du différé : les variantes pour approcher la réalité sont disponibles. » 2 . Mais peu de personnes s’y intéressent. Pour que l’inverse se produise, il faut qu’il y ait un événement médiatique important pour que toute la population, du moins une forte majorité d’entre elle soit captivée. On peut penser aux élections présidentielles, à la crise sociétale suite à la proposition du Contrat Première Embauche instaurée par Dominique de Villepin. Dans de telles situations, les individus vont privilégier un support plutôt qu’un autre, selon leurs besoins, leurs envies d’informations plus ou moins pointus, leurs affinités avec les nouvelles technologies électroniques. « L’acte de s’informer s’opère à l’économie, à partir d’un seul support choisi pour sa commodité et pour sa simplicité. » 3 . C’est pourquoi le blog ne touche qu’une certaine catégorie de personnes. Actuellement, les outils traditionnels de transmission de l’information priment toujours sur les récentes innovations technologiques. A. La newsletter « La newsletter ou plus familièrement le Bulletin d’information est une lettre à laquelle les internautes peuvent s'abonner sur un site Web, afin de recevoir régulièrement par courrier électronique des informations brèves et récentes associées à ce site. » 4 . Dans le cas de la politique, les élus possédant un site peuvent mettre à disposition de leurs visiteurs ce système en s’y abonnant gratuitement par simple enregistrement de leur adresse mail. Ces derniers la reçoivent directement sur leur boîte électronique quotidiennement, hebdomadairement ou bien mensuellement. De plus, le format papier peut être employé mais cela demande un investissement financier important pour sa réalisation. 1 Philippe Cabin et Jean-François Dortier, Communication : Etat des savoirs, Paris, Sciences Humaines, Daniel Bougnoux, « Pourquoi les médiologues ? », février 2005, pp.233-249. 2 Jean Mouchon, La politique sous l’influence des médias, Paris, L’Harmattan Communication, 1998, p.27. 3 Jean Mouchon, op.cit., p.27. 4 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Newsletter 45 La newsletter électronique tend à se diversifier grâce au blog, puisqu’elle est utilisée comme un « rappel » quasi journalier des dernières notes émises sur le blog par l’envoi d’un mail aux adhérents, amis, connaissances susceptibles d’être intéressés par les écrits du politique. Celleci les informe que de nouveaux écrits sont parus. Il ne reste plus qu’à cliquer sur le lien mis dans le message pour être dirigé automatiquement vers les derniers messages en question. Permettant ainsi au blogueur de maintenir son audience au fil des mois. B. Le tract Autre moyen de faire parler de soi, le tract reste un outil privilégié. On le trouve la plupart du temps lors de manifestations, de mouvements politiques, d’élections. Il est distribué le plus souvent par des militants du parti politique, dans la rue ou dans les boîtes aux lettres. Il est utilisé dans le but de faire connaître une opinion, une information. Par ce biais, on touche toute la population, des adhérents, des opposants sans le vouloir. De format A5 ou A4, ce dernier a un coup financier important car il nécessite de nombreuses impressions. C. Les réunions ou meetings Chaque représentant politique peut donner lieu à des réunions avec ses partisans. C’est souvent l’initiative d’élus qui sont à des places importantes dans la hiérarchie politique. Habituellement, pour des politiques qui se présentent à des mandats de maire, de conseiller régional ou autre. Beaucoup d’échanges s’effectuent avec ces personnes dans ces meetings. Le seul inconvénient de cet outil est une présélection des invités pour y participer. En effet, il faut être membre du parti pour y prendre part. Quelque fois dans de grandes réunions tout le monde peut y être convié notamment, lors des congrès des partis politiques. Il y a également lors des campagnes municipales, la création de réunions de quartier afin de solliciter au plus près de chez eux, les électeurs. 46 D. Les présences physiques sur le terrain Tout élu se doit d’être présent sur le terrain quand ce dernier a un poste de cette envergure afin de se faire connaître directement sans aucun artifice, aucun média ni intermédiaire, même si ces déplacements ne se font pas seuls, mais accompagnés de plusieurs personnes à la fois. Ces interventions physiques permettent une écoute directe des citoyens qui viennent à leur rencontre, notamment, pour les élus de quartier qui peuvent s’y rendre plusieurs fois par semaine. Et, pour que la communication ne reste pas « lettre morte », les sollicitations qui auront pu être émises par les citoyens pourront faire l’objet d’une étude selon leur importance. E. Les passages radiophoniques Tous les élus n’ont pas le privilège d’y accéder. En effet, nous pouvons vérifier que la parole n’est pas donnée à tout le monde et seuls les élus qui ont un peu de notoriété dans une ville ou dans le pays sont présents sur les ondes. Constat rapide, on n’entend souvent les mêmes personnes du monde politique local et national. Pourtant, « Le médium radio fait pénétrer la parole chez n’importe qui, saisi dans son intimité familiale …» 1 . S’il y a bien un média présent dans tous les foyers français, c’est bien celui-là au même titre que la télévision. Et pourtant, aujourd’hui on peut entendre la radio beaucoup plus facilement que la télévision : chez soi, dans la voiture, un magasin. Il est intéressant de voir à quel point, elle peut être appréciée des élus politiques car « La radio est un média que les hommes politiques aiment bien : on touche beaucoup de monde à la fois : les services de presse de grandes radios sont bien faits, et les reprises dans la presse écrite des propos tenus devant un micro sont en général bonnes. » 2 . Le message est diffusé à différentes heures dans la journée, grâce aux rediffusions des journaux d’informations et d’autre part par la presse écrite qui en fera écho sur ses supports. C’est donc une véritable propagation de l’information et les politiques en ont bien compris l’enjeu. 1 2 Dominique Maingueneau, Analyser les textes de communication, Paris, Dunod, mai 1998, p.58. Roland Cayrol, Médias et Démocratie : la dérive, Mayenne, Presses Sciences Po, novembre 1997, p.56. 47 « C’est principalement en écoutant les autres que nous avons accès à leur monde, et dans l’environnement le sonore exerce sur nous une forte attraction. » 1 . Derrière leur radio, les individus n’ont que très rarement la possibilité de parler, de donner leur avis, d’entamer une discussion. Ils ne peuvent qu’être des individus passifs. Mais depuis quelques années, un instrument de divertissements et de communication très populaire le devance : le petit écran. F. Les passages télévisuels De nos jours et de plus en plus, les politiques s’approprient ce média. Il semble être aujourd’hui l’instrument privilégié des politiques aussi bien nationaux que locaux. En effet, cet outil est présent dans pratiquement tous les foyers français. Mais, il aura fallu du temps pour les voir apparaître sur ce support car « Leur formation, dans la tradition essentiellement écrite de notre système scolaire, les porte à être méfiants face à un support où l’émotion l’emporte souvent sur la raison. » 2 . Aujourd’hui, la méfiance ne se situe plus du côté de la politique mais du côté du peuple qui se sent manipulé par l’utilisation massive qu’on en fait. Aujourd’hui, nombreuses sont les émissions où sont présents ces élus. « La communication politique offre un terrain de choix ; les candidats n’ont pas forcément un programme ni tellement à nous dire – mais l’important est pour chacun de se montrer à la télévision et dans les journaux. » 3 . En partant, de cette réflexion, on constate que c’est surtout pour se faire connaître visuellement que la télévision est utilisée. L’apparence physique est supérieure à la parole même si, « … l’apparition de la télévision va provoquer une nouvelle transformation de l’exercice de la parole politique, réduire l’importance des exposés d’idées, au profit de débats où il faut susciter la sympathie des téléspectateurs.» 4 . Beaucoup sont présents aux émissions sans avoir pour autant des projets à faire connaître, des décisions politiques à dévoiler. La télévision est un lieu pour être vu. « La majorité de la population s’informe en regardant le journal télévisé, et, pour une bonne partie d’entre elle, 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.31. Jean Mouchon, La politique sous l’influence des médias, Paris, L’Harmattan Communication, 1998, p.81. 3 Daniel Bougnoux, La communication contre l’information, Paris, Hachette, 1995, p.40. 4 Dominique Maingueneau, Analyser les textes de communication, Paris, Dunod, mai 1998, p.59. 2 48 l’image est le garant de la vérité. » 1 . Si on en juge ces propos, on constate que l’on arrive à tout croire du simple fait que des individus soient passés sur le petit écran. On est en droit aujourd’hui de se poser cette question : « La télévision-citoyenne ne devraitelle pas préparer le téléspectateur à « sa » rencontre avec l’homme politique ? »2 . On remarque aisément que ce n’est pas forcément la vocation première de cet outil, car il n’y a que très peu de moyens de réactions possibles, si ce n’est la téléconférence ou l’appel téléphonique qui soient suscités. « …, la participation des téléspectateurs reste une participation d’individus contraints par une réception à domicile, éclatée et tributaire d’aléas du cadre domestique. » 3 . Malheureusement, encore aujourd’hui, les émissions qui permettent aux téléspectateurs de s’exprimer ne sont pas nombreuses. Parmi elles citons quelques unes à en avoir la pratique : « La marche du siècle » 4 , ou tout récemment en Novembre 2005, l’émission « Mots Croisés », où se côtoyaient des jeunes de banlieues et des personnalités politiques, comme Nicolas Sarkozy, pour ne citer que lui. Mais là encore, le temps de parole n’était pas équilibré selon les intervenants. A travers ces émissions, on est plus dans le jeu du spectacle que dans le débat politique comme le souhaiterait l’ensemble de la population. Bien que, nombre d’entre eux considèrent ces interventions comme de véritables échanges et sont ainsi dupés. On l’a bien compris ce qui manque à ces médias, c’est la possibilité aux citoyens de pouvoir faire entendre leurs différentes idées face à celles émises par ces politiques médiatisés. C’est pourquoi une évolution de ces médias va donner naissance aux supports multimédia. Et c’est ainsi, que l’on va passer d’une communication verticale à une communication horizontale. Le spectateur devient acteur du fait qu’on en arrive à utiliser « un message adressé immédiatement aux citoyens, en court-circuitant complètement les institutions représentatives. » 5 . 1 Jean Mouchon, La politique sous l’influence des médias, Paris, L’Harmattan Communication, 1998, pp.24-25. Jean Mouchon, op.cit., p.17. 3 Jean Mouchon, Ibid., p.86. 4 Roland Cayrol, Médias et Démocratie : la dérive, Mayenne, Sciences Po, novembre 1997, p.69. 5 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.60. 2 49 La télévision n’est pas un frein à la démocratie « …, mais au contraire une condition de son exercice. Elle est d’ailleurs pour des millions de citoyens la principale, pour ne pas dire la seule source d’information, de distraction et de culture. » 1 . Sans elle, la politique ne pourrait certainement pas être aussi répandue dans le public. « ... les médias ont opéré un déplacement du lieu de la politique. Les médias – la télévision, en tout premier lieu – tendent à devenir le lieu principal de la politique. » 2 . En effet, « … les médias structurent, en permanence, notre environnement politique, de manière très efficace, et d’une manière peu consciente pour le citoyen-télespectateur.» 3 . Mais sans eux, la politique ne pourrait pas se développer au stade où elle en est, c’est-à-dire omniprésente dans notre vie. De ce fait, les élus qui passent par ce moyen de communication sont obligés de créer un dialogue à l’image de cet outil de grande diffusion. Du coup, on « tombe » dans la mise en scène orchestrée au millimètre près, on est dans l’art du « spectacle » 4 . Le petit écran est, et restera pour de nombreuses années «… la reine des drogues pour l’homme public. » 5 . Roland Cayrol a raison d’ajouter que « La télévision joue, en tant que telle, à se faire institution politique, à se présenter comme lieu solennel d’arbitrage d’un débat politique dramatisé selon les règles de son spectacle. Les autres médias se partagent les miettes, nullement négligeables, du festin politique et électoral. » 6 . Mais aujourd’hui, le blog prend une part plus importante que des « miettes » car les réactions sont nombreuses et développent une véritable opinion publique parmi les citoyens. 1 Anne-Marie Gingras, La communication politique. Etat des savoirs, enjeux et perspectives, Sainte-Foy, Presse de l’Université du Québec, 2003, Estelle Lebel , « L’image politique », p.113. 2 Roland Cayrol, Médias et démocratie : la dérive, Mayenne, Presses de Sciences Po, novembre 1997, p.19. 3 Roland Cayrol, op.cit., p.25. 4 Roland Cayrol, Ibid., p.25. 5 Ibid., p.59. 6 Ibid., p.21. 50 G. La presse Quel politique n’a pas encore eu recours à la presse papier ? Quel élu ayant une certaine notoriété n’a jamais vu venir taper à « sa porte » un journaliste du quotidien de sa ville ? La réponse semble évidente et pourtant tous les élus n’y ont pas accès facilement. « La presse écrite continue de jouer un rôle essentiel dans la communication politique, comme si, dans un milieu marqué par la culture littéraire et juridique, elle conférait de la noblesse au message. » 1 . En effet, le discours d’un politique sur ce support semble être « vénéré » par les citoyens qui le lisent. La presse reste malgré son secteur économique en difficulté, un moyen important pour faire parler de soi. Mais le plus dur reste encore à convaincre les journalistes d’accorder aux acteurs politiques moins connus, quelques lignes précieuses dans les pages destinées à la politique ou à la vie de la ville. Sans un minimum de notoriété, la presse semble dénigrer ces élus qui aimeraient tant parler de certains sujets capitaux à leurs yeux. Il existe, en dehors de la presse régionale et nationale, différents supports écrits que les représentants politiques peuvent essayer de toucher plus facilement. Il s’agit des moyens de communication de la ville, comme le magazine de la commune, de la région, le courrier du maire et de ses élus. « Bref, c’est dans les médias, dans les colonnes des journaux, sur les antennes des radios, et surtout dans les studios de télévision que se déroule désormais la vie politique… » 2 . Meilleur relais de l’information politique, la presse est aujourd’hui concurrencée par les médias informatiques qui tentent de la devancer. 1 2 Roland Cayrol, Médias et Démocratie : la dérive, Mayenne, Presses Sciences Po, novembre 1997, p.56. Roland Cayrol, op.cit., p.21. 51 Section 2. Son évolution « L’homme politique, qu’il soit candidat aux élections ou en tout cas désireux de dialoguer avec les citoyens, peut aujourd’hui disposer d’instruments capables d’annuler cette dimension spatio-temporelle qui imposaient des formes d’intermédiation personnelle. » 1 . C’est pourquoi on constate que les nouvelles technologies sont aujourd’hui bien intégrées dans le domaine politique pour répondre à ce nouveau besoin de communiquer. Quel élu possédant ne serait ce qu’une petite notoriété n’a pas eu recours aux nouveaux outils informatiques comme : le site Internet ? Mais, ce dernier requière une maîtrise des langages informatiques comme le HTML, le JAVA indispensables pour sa réalisation. Il est donc nécessaire de faire appel à une personne spécialisée dite webmaster pour en acquérir un. Cependant, certaines utilisations de ce média électronique produisent des distances et d’autres les abolissent, tout en augmentant « la vitesse de traitement de l’information »2 . Mais encore faut-il que le public sache s’en servir. Quel que soit l’outil employé, « … l’essor des techniques et des technologies de communication entraîne la formation d’un nouveau modèle de communication. Ce modèle, encore en gestation reposerait sur une accentuation ou même une accélération. » 3 . Ce changement de support passe également par une amélioration du dialogue, c’est-à-dire qu’on peut parler d’un « …, passage de la communication verticale à un système horizontal qui trouve aujourd’hui son expression dans la grande nouveauté que sont les réseaux. » 4 . On se trouve ainsi, dans un tout autre univers, complètement opposé aux médias dits classiques, mais à la fois complémentaires les uns des autres. Ces derniers offrent une toute autre vision, une toute autre approche de la politique de manière plus directe de ce qui existait précédemment. « La différence fondamentale entre anciens et nouveaux médias réside dans la numérisation et l’interactivité, en lieu et place de la passivité qui caractériserait la situation du lecteur de journaux, de l’auditeur de la radio et du spectateur de la télévision. Mais seul l’avènement des nouveaux médias procure de réelles 1 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.61. 2 Patrice Flichy, Louis Quéré, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès Sciences Publiques, 2000, p. 140. 3 Bernard Miège, Société conquise par la communication. I. Logiques sociales, Grenoble, Presses Universitaires Grenobloise, septembre 1996, p.214. 4 Stefano Rodotà, op.cit., p.32. 52 possibilités de dialogue et d’intervention autonome de la part du public intéressé. » 1 . L’arrivée des nouvelles technologies de l’information et de la communication vont faire beaucoup d’émules à la fin des années 90 et en font encore aujourd’hui. Paragraphe 1. La médiation électronique grâce à Internet Nous venons de donner quelques notions de diffusion, de création, de ce nouveau moyen d’information qui va devenir au fil des années un système de communication de plus en plus apprécié du grand public. Aujourd’hui, « … les individus faisant usage de leur raison s’approprie la sphère publique contrôlée par l’autorité et la transforme en une sphère où la critique s’exerce contre le pouvoir de l’Etat, … dotée d’un public possédant ses propres institutions et de plates-formes de discussion. Grâce à la médiation de celle-ci, c’est l’ensemble des expériences vécues au sein d’une dimension privée corrélative d’un public qui pénètre également la sphère publique politiquement orientée. » 2 . Entre les politiques et le public, la médiation change de visage et n’est plus aussi contrôlée qu’avant. Ce qui fait le bonheur d’élus peu connus à l’encontre de ceux qui avaient déjà une notoriété bien établie en ce domaine très fermé. Par l’emploi de ce média électronique « …, on a remarqué que le passage de la communication unidirectionnelle à la bidirectionnalité et l’interactivité était associé de façon quasi automatique au dépassement de la passivité du citoyen/usager, …» 3 . On est obligé d’être actif devant ces outils sinon ces derniers ne fonctionneraient pas. Mais beaucoup d’internautes restent derrière leurs écrans sans intervenir au débat, ou tout simplement n’osent pas participer de peur des réactions que peuvent susciter leurs interventions. Aujourd’hui, on a pris conscience des potentialités qu’offre Internet pour celui qui souhaite parler librement et qui souhaite s’informer sans aucune contrainte de temps, d’espace et de médiateur. Le citoyen est libre de ses propres choix d’informations. « Internet peut contribuer à une meilleure information des citoyens et à une plus grande transparence de l’action 1 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.43. 2 Jürgen Habermas, L’espace public, Traduction de Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1997, p.61. 3 Stefano Rodotà, op.cit., p.51. 53 publique. Il participe en cela à l’idéal démocratique du citoyen éclairé cher aux philosophes libéraux … » 1 . Mais est-on vraiment dans cet idéal démocratique ou est-ce juste une façade ? Selon Thierry Vedel, on peut tirer quatre avantages représentatifs d’Internet, à savoir : « … la diminution des coûts de diffusion et de stockage de l’information, … un accès direct à l’information primaire, … la possibilité de recherches personnalisées, … la diversification des sources d’information. » 2 . Intéressons-nous plus attentivement aux éléments les plus utilisés de nos jours pour faire passer des informations à partir d’Internet. A. Le site Internet : une communication institutionnalisée « Les sites Web ont certes accru notre pouvoir d’accéder à l’information, mais le problème de la qualité, de la validité et de la pertinence des informations en ligne reste posé. » 3 . Loïc Le Meur va jusqu’à considérer le site Internet comme un tract : « Le site Internet délivre un discours institutionnel, de l'ordre du prospectus que l'on distribue dans les boîtes aux lettres. » 4 . Il reste cependant, le premier outil Internet utilisé pour diffuser des informations de manière permanente à la portée du grand public. Il ne suffit qu’au citoyen lambda de vouloir se connecter sur ce dernier et s’informer sur ce qui est dit, pour connaître les derniers projets proposés, les dernières réunions prévues. « Par ailleurs, des sites Web ont été créés pour collecter les doléances ou les revendications de la population ou instaurer un dialogue avec les élus. » 5 . En effet, sur un site Internet, il est possible de laisser un courrier électronique à partir de l’adresse e-mail dans la rubrique contactez-moi. Mais pour ce dernier, nous ne savons pas qui lit les messages. Cela peut-être le webmaster, le cabinet de l’élu quand ce dernier à une grande responsabilité gouvernementale ou tout simplement la personne politique elle-même. De plus par ce procédé, seul l’individu ayant souhaité contacter l’élu est en attente d’une réponse. Le public qui irait visiter ce site n’est pas au courant qu’une demande a été formulée. C’est donc une conversation très 1 Anne-Marie Gingras, La communication politique. Etat des savoirs, enjeux et perspectives, Sainte-Foy, Presse de l’Université du Québec, 2003, Thierry Vedel, « Internet et les pratiques politiques », p.192. 2 Anne-Marie Gingras, op.cit., p.192. 3 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.45. 4 Loïc Le Meur, http://www.loiclemeur.com/france/2005/08/les_sites_actue.html, 13 Août 2005. 5 Anne-Marie Gingras, Ibid., p.195. 54 personnelle, très privilégiée qui s’établit entre l’émetteur et le récepteur. Cela reste dans un circuit très contrôlé qui pourtant aurait pu susciter l’intérêt d’autres citoyens. Les informations restent d’ailleurs très formelles, on n’apprendra souvent rien de plus par rapport aux articles parlant de l’élu, si ce n’est une très courte biographie, son parcours politique, ou les dates de réunions à ne pas oublier. La hiérarchie reste très présente sur cet outil, puisque c’est le propriétaire du site qui décide s’il répond ou non, aux messages envoyés, ce qu’il mettra ou non, sur ses pages Web. L’information diffusée y est assez statique puisqu’elle n’est guère modifiée au fil des mois. Cet outil reste très présent, et peu d’élus n’y ont pas au moins fait une fois appel. B. Le mail : une communication écourtée Autrefois critiqué, il fait aujourd’hui parti de notre quotidien. Comme on continue d’ouvrir son courrier postal, chaque individu ayant un intérêt pour les nouvelles technologies possède une adresse e-mail pour recevoir du courrier électronique. Permettant ainsi de lire ses propres mails chaque jour ou presque, comme le ferait tout un chacun en lisant son courrier traditionnel. « Le courrier électronique a repris les anciennes fonctions de la poste, avec une efficacité accrue mais sans changement structurel sur la nature de la parole ainsi échangée. » 1 . L’opportunité du mail vient de sa rapidité d’exécution, donc un gain de temps, mais également un gain d’argent car un mail ne coûte rien une fois l’abonnement réglé et on peut en envoyer sans limite, ce qui n’est pas sans conséquence. Certaines personnalités en abusent pour faire de la propagande gratuite, c’est ce qu’on appelle le spamming qui est l’envoi de courriers électroniques massifs « sans sollicitation des destinataires, à des fins publicitaires ou malhonnêtes » 2 . Citons Nicolas Sarkozy qui a su tirer avantage pour recruter de nouveaux adhérents à l’UMP fin 2005. Aujourd’hui les élus s’en servent pour souhaiter leurs vœux de bonne année, faire part d’une toute dernière nouvelle, d’une réunion. Toutefois, ce procédé « emprunte plutôt son paradigme à la conversation téléphonique. » 3 . 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.44. Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Spamming 3 Dominique Wolton, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès Science Publique, 2000, Peter Dahlgren, « L’espace public et l’Internet. Structure, espace et communication. », p.173. 2 55 Cet outil fait parti des communications différées car il faut le temps au destinataire de lire le message et d’y répondre s’il le désire. Malgré tout, il peut-être à la fois dirigé vers la hiérarchie si cela vient d’un particulier qui souhaite soumettre ses pensées à l’élu, ou bien de l’acteur politique qui souhaite émettre un message à l’ensemble de ses adhérents, ou à une personne précise. Le mail, on l’a vu, est aussi utilisé comme une sorte de « newsletter » pour envoyer à leurs adhérents les titres des dernières notes posées sur le blog. C. Le forum de discussion : première proposition de médiation à double sens Premier moyen de communication mis à la disposition des individus pour communiquer à plusieurs sur des sujets divers, les forums ou les newsgroup deviennent pour la politique des outils utiles. « Grâce aux forums, non seulement les citoyens peuvent communiquer entre eux, mais il leur est loisible de s’adresser aux dirigeants. » 1 . Peu à peu les élus de manière individuelle et plus personnelle vont décider de jouer le jeu et se mettent à parler avec les personnes qui les contactent. Comme le souligne Michel Béra, les forums sont conçus « …, pour créer l’information sous forme démocratique. » 2 . C’est donc le véritable premier moyen par voie électronique de discussion entre citoyens et élus. « Le citoyen se sentira mieux écouté qu’à l’époque où il devait prendre la plume pour en faire autant … » 3 . De plus, un sentiment d’autonomie se fait ressentir par son emploi. Aucune contrainte n’est imposée par son utilisation. En effet, les internautes sont libres de leurs actes. On se rend compte que cet outil est utilisé par un groupe restreint d’individus qui sont les acteurs principaux du débat engagé dans le forum, et que d’autres internautes au nombre plus important ne font que lire ce qui peut être écrit. 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.79. Michel Béra, Eric Mechoulan, op.cit., p.58. 3 Michel Béra, Eric Mechoulan, Ibid., p.80. 2 56 C’est ce que souligne Anne-Marie Gingras, « Une minorité de participants est à l’origine de l’essentiel des messages et la majorité des internautes lisent seulement les messages sans s’impliquer dans les discussions. » 1 . A l’époque, les forums étaient considérés comme « un lieu de liberté et d’authenticité : chaque individu peut s’exprimer sans entrave et sur une base égalitaire et s’engager dans des discussions plus sincères en se débarrassant de ses rôles institutionnels ou de ses images sociales (notamment grâce à l’anonymat). » 2 . Chacun devient libre de ses propres paroles en dévoilant ou non sa véritable identité. Mais pour Pascal Ricaud, cet anonymat peut amener à poser des problèmes dans cette conversation car il tenterait de mettre fin au débat lancé, « …, une des principales garanties de la ‘parole libre’ – mais également l’un des principaux freins à l’émergence d’espaces publics structurés, stables et autonomes – est l’anonymat. » 3 . Ces anonymes peuvent nuire au dialogue en critiquant constamment et parfois même violemment. Ces perturbateurs ont été baptisés « trolls », ce qui correspond à une certaine « … laideur,… bêtise et … méchanceté … » 4 . Mais, « Les forums de discussion qui organisent des échanges indirects ne permettent pas toute l’ouverture de la communication que l’on avait supposé initialement. … D’après des spécialistes, la fonction argumentative de la parole y trouverait peu de place.» 5 . Toutefois, nous garderons en mémoire que cet outil a été à l’initiative du « débat politique »6 , c’était le début d’une communication horizontale dans un lieu de discussion privilégié. 1 Anne-Marie Gingras, La communication politique. Etat des savoirs, enjeux et perspectives, Sainte-Foy, Presse de l’Université du Québec, 2003, Thierry Vedel, « Internet et les pratiques politiques », p.206. 2 Anne-Marie Gingras, op.cit., p.193. 3 Pascal Ricaud, « Vers de nouvelles situations de délibératives via Internet : espaces publics partiels ou micro-espaces publics ? », Tours. 4 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Troll 5 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.45. 6 Anne-Marie Gingras, Ibid., p.193. 57 D. Le blog : une communication de proximité Nous venons de le constater 1 , le forum a été le premier outil d’échanges mélangeant des milieux sociaux différents. Mais son utilisation n’était pas si simple que cela et le débat n’était pas aussi sollicité que ce que l’on pouvait espérer. Aujourd’hui, un nouvel instrument de communication plus simple se propage de plus en plus et prend le relais dans notre pays. « Les weblogs se distinguent des forums et des communautés en ligne type Usenet en cela qu’ils sont initialement des espaces de publication et non de discussion. » 2 . On souhaite par son utilisation créer une sorte de proximité, « … une impression d’intimité, tout en maintenant une certaine distance, car le pouvoir (local et national) suppose en France un certain respect, une certaine solennité. » 3 . Ainsi, nous allons mieux connaître la personne, mieux discerner ses engagements personnels ce qui diffère des projets proposés par une hiérarchie omniprésente. Les mots sont pesés par l’auteur, il dévoile ses propres pensées, opinions à, et sur un moment actuel, sur une ou des idées personnelles qu’il souhaite développer. Ce qui n’est pas toujours le cas sur les supports électroniques comme le site. « Sur le site Internet, on apprend ce que pense le parti ; sur le blog, on apprend ce que les gens pensent du parti. » 4 . En effet, le dialogue est ouvert à quiconque souhaite y participer. Les écrits sont visibles par tous, quand ce dernier n’est pas modéré, c’est-à-dire quand le propriétaire du blog ne bloque pas les messages s’il ne les a pas lu auparavant. C’est une manière de « jouer le jeu », en montrant une volonté d’ouverture d’esprit. Pour la première fois depuis la création d’Internet, le représentant politique parle lui, de ses préoccupations, de son travail en tant qu’élu. Cela demande du temps et de l’imagination afin de susciter l’intérêt des visiteurs pour instaurer un dialogue. « Claude Lefort, de son côté, insiste sur l’idée que le pouvoir, dans sa version démocratique moderne, doit en permanence, non seulement accueillir ‘le conflit des opinions’, mais gagner sa légitimité en s’enracinant dans les opinions … » 5 . En partant de cette remarque, on voit 1 Cf.Supra, p.51. Olivier Ertzscheid, « Weblogs : un nouveau paradigme pour les systèmes d’information et la diffusion de connaissances ? », Colloque du 27 avril 2005. 3 Roland Cayrol, Médias et Démocratie : la dérive, Mayenne, Presses Sciences Po, noveambre 1997, p.55. 4 Interview, Loïc Le Meur, Le Figaro, http://umpboulogne.blogs.com/92/2005/08/blog_et_politiq.html, 12 août 2005. 5 Bernard Miège, Société conquise par la communication. I. Logiques sociales, Grenoble, Presses Universitaires Grenobloise, septembre 1996, p.108. 2 58 bien que l’élu quel que soit son statut politique, doit se mettre à manipuler tous les nouveaux outils utilisés par l’ensemble de la population, afin d’être au plus proche d’elle. Voilà pourquoi depuis quelques mois, il décide de se lancer dans l’expérience du blog pour dialoguer. « La meilleure information reste finalement celle qui est garantie par le médiateur le plus fiable, donc le plus proche, celui en qui on a confiance. La notion de proximité est là aussi essentielle.» 1 . De ce fait, les blogueurs politiques utilisent un instrument manipulé par de nombreuses personnes en France. Ils se dévoilent, parlent d’eux comme nulle part ailleurs. Ils apparaissent comme des personnes proches de nous. Un sentiment de confiance s’installe de plus en plus grâce aux échanges qui s’y opèrent pour ceux qu’y adhèrent aux idées promulguées sur ces pages Web. Tous ces outils permettent aux élus locaux de rester en contact direct avec leurs partisans et citoyens, « … d’être continuellement présent et autonome dans des lieux et à des moments très divers. » 2 . L’internaute allant volontairement sur le blog, pense créer une relation personnalisée avec l’auteur des messages. Il pense être le seul au courant de ce qui est dit. « Le blog est, pour un homme politique, l'équivalent, sur le mode virtuel, d'une promenade sur le marché. Dans la rue, on vient les interpeller ou leur serrer la main. Sur un blog, on peut de la même manière réagir à leurs propos, leur poser des questions, leur adresser des critiques... » 3 . C’est un autre moyen d’aller à la rencontre de ses électeurs potentiels. Par le biais de ce mécanisme, on touche une autre partie de la population. Dans la grande majorité, il s’agit d’étudiants, de personnes ayant un certain niveau d’études ou de catégories socioprofessionnelles élevées. Par le blog, on va avoir un aperçu de la vie de ces élus qui semblent au demeurant être inabordables étant donné leur statut. S’ils jouent le jeu, on se rend compte qu’ils sont comme nous, qu’ils ont des centres d’intérêts souvent proches des notres, mais qu’ils n’ont pas le temps de les assouvir ou les pratiquer. En dialoguant sur leur blog, nos préjugés vont s’estomper et s’instaure une conversation sur certains de ces points. 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.45. Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.61. 3 Interview, Loïc Le Meur, le Figaro, http://umpboulogne.blogs.com/92/2005/08/blog_et_politiq.html, 12 août 2005. 2 59 Le tutoiement fait également parti du jeu sur le blog, on ose le « tu » alors qu’on ne connaît pas la personne. Son emploi reste toutefois très limité, face à l’élu le vouvoiement est le plus usité. On ne va pas « se leurrer » pour autant, si les élus créent leur blog c’est soit pour se faire connaître et sortir de l’anonymat face aux grands élus comme les Maires, les Présidents. Soit, donner une autre image d’eux, se doter d’une nouvelle identité par le biais d’Internet. Grande nouveauté à prix réduit, ce moyen va déstabiliser le « train train quotidien » des hommes politiques qui restent accrochés aux solutions médiatiques traditionnelles. « Ces différents blogs sont tour à tour présentés comme outil d’une autre communication, plus personnelle, comme le moyen pour les simples citoyens de remettre en question l’approche informationnelle des médias dominants, et comme le signe d’une (ré)appropriation de la politique, par des usagers qui inventeraient de nouvelles formes de participation politique à travers les outils internet, et leur dernier avatar, les blogs. » 1 . Mais ne nous projetons pas si facilement dans ce qui est de dire que le blog va révolutionner la démocratie. Il lui donne une certaine souplesse qui ne semblait pas être présente avant, entre les divers protagonistes. Cet outil «… offre la possibilité d’être un interlocuteur actif et même si ceci ne suffit pas à lui attribuer un label indiscutable de démocratie, la qualité de la communication s’en trouve certainement changée. » 2 . La réussite de ce procédé dépendra de la volonté de la population d’y participer ou non. A ce jour, les élus semblent tous, à quelques expressions près, satisfaits de leur blog. Les avantages évoqués sont ceux de pouvoir s’exprimer selon leur bon vouloir auprès de ces nouvelles techniques de communication plus directes, plus libres et plus transparentes 3 . Il est important de noter que le blog fait parti des conversations asynchrones, qui sont des dialogues imposant un certain différé par son utilisation. La communication sur un blog peut avoir différentes variantes selon la manipulation du visiteur. A partir des diverses propositions de Philippe J. Maarek 4 sur la communication des sites Web, ces dernières peuvent s’y appliquer. Le visiteur peut tout simplement consulter l’écran, dans ce cas on est dans une « communication unidirectionnelle » vers l’appelant (avec 1 Fabienne Greffet, « Polics as usual ? Les blogs politiques français en 2005», Nancy 2. Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.39. 3 Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°2. 4 Philippe J. Maarek, Communication et marketing de l’homme politique, Paris, Litec, 2001, p.240. 2 60 feedback indirect). Ou bien déposer un commentaire vers le site et ainsi engager une « communication unidirectionnelle » vers l’homme politique, une question impliquant une réponse de la part du propriétaire du texte initial. Ou encore être face à une « communication bidirectionnelle » entre personnes connectées comme le serait un forum. Mais malheureusement, le blog ne permet pas à ce jour de réaliser une communication bidirectionnelle en temps réel entre plusieurs participants. Peut-être que les prochaines platesformes le permettront, mais cela imposerait à l’élu d’être omniprésent sur son ordinateur et d’y consacrer trop de temps. Il faudra se contenter de ce que nous pouvons faire aujourd’hui grâce au blog et qui n’existait pas auparavant. Paragraphe 2. Changement de mentalités On se trouve par l’utilisation du blog, dans une toute autre relation avec les politiques qui l’utilisent. Au départ méfiant de cet outil, il est de plus en plus visité, et commenté par la suite au fil des mois. C’est le politique qui nous parle et c’est le citoyen qui le questionne. « … les médias sont devenus aujourd’hui incontournables car ils sont désormais le seul lieu où l’on trouve les informations permettant de décoder les différents univers dans lequel nous évoluons. » 1 . On va par cet instrument chercher ce que l’on ne peut pas trouver dans les autres médias traditionnels. C’est un nouveau moyen pour se sentir plus proche de l’élu, car il aura plus d’espace pour s’exprimer sur sa ville, son département, sa région. Il va dire ce qu’il pense, aime ou pas. Il va oser dans la majorité des cas, casser la langue de bois qui pèse malheureusement trop souvent dans notre démocratie. Mais attention, tous les mots vont être pesés, les commentaires vont être plus ou moins filtrés afin de ne pas déclarer ouvertement une « guerre » aux autres élus, ou aux citoyens qui l’attaqueront ouvertement. Le dialogue va donc partir d’une ouverture d’esprit sur le principe de l’écoute des uns et des autres ; d’être ouvert aux critiques, au changement. La volonté d’échanger se veut être la clef de la réussite de cet outil, sans cela, un blog serait simplement le tracé jour par jour de la vie d’un individu qui souhaite être lu dans le monde mais sans nécessairement avoir l’envie de discuter avec eux. 1 Philippe Breton, L’utopie de la Communication. L’émergence de « l’homme sans intérieur », Paris, La Découverte, janvier 1993, pp.125-126. 61 Par cet instrument, l’élu va devoir proposer à ses visiteurs et potentiels électeurs des sujets variés susceptibles de les intéresser au-delà des simples thèmes qui le touchent personnellement. Il doit montrer ses combats, les causes qu’il défend. Il faut qu’il se rende crédible par la « parole » écrite, puisque celle-ci en principe n’est plus contrôlée par qui que ce soit. Il faut attirer le visiteur, sans non plus le tromper dans ce jeu de séduction que propose le blog. « Difficile en effet d’argumenter à distance avec des personnes qu’on ne connaît pas, et d’ailleurs pour quoi leur dire ? Il ne suffit pas d’avoir à sa disposition un moyen de communication, encore faut-il avoir une parole à transmettre. » 1 . Voilà pourquoi, les sujets doivent garder une certaine ligne conductrice précise. Parler de tout, oui, mais attention de ne pas parler pour ne rien dire. « La démocratie a besoin d’espaces publics multiples, opposés et alternatifs. …. Habermas conçoit en effet dorénavant l’espace public comme une myriade insaisissable d’espaces communicatifs à la fois distincts et entrelacés. » 2 . Le politique va donc saisir sa chance en utilisant le blog comme un nouvel objet de médiation. En effet, le blog va être un outil supplémentaire et complémentaire des autres médias classiques. « Si nous ne voulons pas que les technologies de l’information se développent sans être intégrées dans une vision sociale partagée, il faut que le politique participe à leur développement de manière dynamique en y impulsant sa vision, tout en accompagnant les évolutions des usages qui sont de plus en plus incontournables. » 3 . En partant de cette remarque d’Emmanuel Marcovitch, on voit bien que la politique dans son ensemble, plus représentée par le local que par le national saisi cette opportunité de communiquer davantage par tous les outils mis à leur disposition. Toucher le maximum de personnes, n’est-ce pas là le but de tous les élus qui souhaitent un jour se faire élire, même si certains veulent seulement engager un dialogue qui malheureusement a eu jusque là du mal à se développer faute d’une mauvaise image de la démocratie. 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.45. Dominique Wolton, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès Sciences publiques, 2000, Peter Dahlgren, « L’espace public et l’Internet. Structure, espace et communication », p.167. 3 Jean-Yves Capul et al., L’Internet, Paris, La Documentation Française, Cahiers Français N°205, mars-avril 2000, », Emmanuel Marcovitch, « Une nouvelle société de l’information. Demain l’internet : nouveaux usages, nouvelles technologies, p.10. 2 62 Paragraphe 3. Vers une plus grande transparence On le voit bien, communiquer est le fer de lance de tout politique qui souhaite se débarrasser de cette image lourde et négative que de nombreux citoyens ont de leurs élus. « Il n’est de lors de démocratie vivante, que si l’information est libre et pluraliste et si la communication s’effectue bien, et dans les deux sens, entre gouvernants (ou aspirants gouvernants) et gouvernés. » 1 . Cet échange est nécessaire pour que le blog fonctionne correctement, sans quoi ce dernier serait facilement mis de côté au profit des outils de communication traditionnels qui sont plus opaques dans leurs informations. Par son utilisation, le blog va permettre « Une plus grande transparence de l’action des gouvernements, l’absence d’intermédiaires, la création d’un lieu nouveau pour le débat public ou le développement d’un moyen d’expression pour les ‘communautés virtuelles’ représentent quelques unes des potentialités de l’internet favorables à la démocratie. » 2 . Chaque élu décidant d’utiliser cette nouvelle technologie, se doit d’être le plus honnête possible. Beaucoup de personnes et notamment les élus d’opposition seront là, pour le surveiller et attendre la moindre maladresse pour le dénoncer, ce qui lui ferait perdre toute crédibilité. Les politiques ne peuvent donc pas prendre le risque de mentir à leur population. Si ils décident de se lancer dans cette aventure numérique, ils doivent dès le début avoir pris conscience de l’enjeu qu’un blog peut leur apporter. Il faut être honnête avec soi même pour l’être avec les citoyens qui attendent par cet instrument une nouvelle vision de la démocratie. « L’internet peut contribuer à une meilleure information des citoyens et à une plus grande transparence de l’action publique et il participe en cela de l’idéal démocratique du citoyen éclairé ... » 3 . Idéal qui malheureusement à ce jour, n’est pas partagé par l’ensemble de la population. Peu de personnes semblent pour le moment être attirées par ce média, et pourtant il pourrait répondre à bon nombre de leurs questions. 1 Roland Cayrol, Médias et démocratie : la dérive, Presses de Sciences Po, novembre 1997, p.13. Jean-Yves Capul et.al, L’Internet, Paris, La Documentation Française, Cahiers Français N°295, mars-avril 2000, Thierry Vedel, « Une nouvelle société de l’information. L’internet et la démocratie », p.25. 3 Jean-Yves Capul et.al., op.cit., p.25. 2 63 Mais cette transparence pour être optimale, ne doit pas modérer volontairement les messages envoyés. Car dans ce cas là, il a déjà une modification de la communication puisque les commentaires vont être filtrés. Pour que cet échange soit le plus honnête possible, les commentaires doivent rester libres. Toutefois la suppression de certains d’entre eux ne sera acceptée qu’à partir du moment où ils ne respectent pas certaines règles dites de « bonne conduite ». Section 3. Perspectives par l’utilisation du blog Paragraphe 1. Vers une médiation « directe » Le blog va avoir cette facilité et possibilité de créer une médiation entre gouvernants et gouvernés qui souhaitent à tout prix engager le dialogue. « A défaut de créer la démocratie directe, l’Internet assurera le bon fonctionnement de la démocratie existante en désespoir de cause. » 1 . Car aujourd’hui aucun autre moyen n’a été mis à la disposition du grand public pour parler si simplement et ouvertement. Encore faut-il que ce dialogue reste dans le domaine du correct sinon, il est certain qu’il sera retiré. Cette médiation est belle et bien différente de la presse, de la télévision, et comme le dit Loïc Le Meur en phrase d’accroche de son blog, « Les médias traditionnels diffusent des messages, les blogs démarrent des discussions. » 2 . Discussions partagées par une minorité de personnes, « Les partisans de cette ‘agora virtuelle’ se retrouvent tant à l’extrême gauche qu’à l’extrême droite de l’échiquier politique, avec un argument commun : l’idéal de la démocratie n’est pas l’élection de représentants, mais l’implication directe du peuple dans les décisions. » 3 . Il serait intéressant de comprendre pourquoi les citoyens qui demandent tant d’être écoutés, ne vont pas utiliser ce nouvel espace de communication qui reste à la portée de nombreux individus du fait qu’il soit sur Internet. « Dans une communauté politique, l’espace politique, l’espace communicationnel est donc le 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.81. Slogan du blog de Loïc Le Meur, http://loiclemeur.typepad.com.france 3 Alain Bron, Laurent Maruani, La démocratie de la solitude. De l’économie politique de l’information, Paris, Desclée de Brouwer, Août 1996, p.156. 2 64 socle de l’espace public, dans la mesure où ce dernier est un espace de médiation symbolique dédié aux questions politiques. » 1 . Le blog va permettre de parler de politique, mais également d’actualité plurielle, de tout ce qui peut tenir à cœur les propriétaires de ce dispositif. Paragraphe 2. Une interactivité encore mal exploitée « A défaut d’être conviviale, l’interactivité s’instrumentalise. … illusion d’une relation de proximité entre l’homme politique et son public qui, l’espace d’un instant, se sent investi d’un droit de sanction large allant du pouvoir de la personnalité à son pouvoir de conviction. » 2 . Par sa conceptualisation, le blog permet de développer un dialogue interactif entre deux personnes ou plus. « Dans un premier temps, l’‘interactivité’, comme la liberté d’expression, a été conçue comme un élément du discours critique et contestataire de la communication face au sens unique des médias. » 3 . Il est vrai, que cet instrument va être le lieu de la critique, de l’opposition, mais également de l'approbation. On ne parle plus de sens unique mais de double sens, car « Entrer en relation avec quelqu’un, ce n’est pas seulement se défendre contre lui, c’est aussi pouvoir communiquer avec lui. » 4 . Le blog permet de rentrer en contact avec des élus, des personnes que l’on n’arrive pas forcément à rencontrer physiquement. « Dans le cas des technologies interactives, …, l’interactivité de ces machines appelle de facto la participation de l’individu au procès communicationnel et leur polyvalence requiert que l’utilisateur construise ses usages propres. Ces techniques marquent donc une rupture dans les modèles d’usage des mass média. » 5 . Le public devient un acteur essentiel dans cette nouvelle communication qui passe par Internet. « …, la communication devient de plus en plus interactive en offrant une possible alternance dans les rôles de communication et en se rapprochant de la forme conversationnelle de la communication sociale ordinaire. » 6 . Une fois, la mise en route 1 Eric Dacheux, L’Europe qui se construit, « Les relations entre espace communicationnel, espace médiatique et espace public », Saint-Etienne, Presses Universitaires de St Etienne, novembre 2003. 2 Jean Mouchon, La politique sous l’influence des médias, Paris, L’Harmattan Communication, 1998, p.86. 3 Michel Sénécal, L’espace médiatique. Les communications à l’épreuve de la démocratie, Montréal, Liber, 1995, p.232. 4 Philippe Cabin et Jean-François Dortier, Communication : Etat des Savoirs, Paris, Sciences Humaines, Dominique Picard, « Les rituels de l’interaction », pp. 129-138. 5 Josiane Jouët, Pratiques de communication et figures de la médiation, Paris, Réseaux N°60, CNET, 1993, p.8 6 Jacques Gerstlé, La communication politique, Paris, Armand Colin, novembre 2004, p.45. 65 effectuée sur cet outil, l’échange se fait volontiers et des communautés autour de chaque blog politique naissent. L’interactivité est donc suscitée par une petite catégorie d’individus qui deviennent des privilégiés de l’information émise. Paragraphe 3. Un outil de marketing politique Le marketing politique est né en France depuis quelques années, il est devenu un instrument précieux pour les personnes publiques désireuses de faire parler d’elles. « Selon H. Cazenave, les débuts du marketing politique datent des années 1930 aux Etats-Unis. » 1 . Pour ce qui est de la France, il faudra attendre quelques années plus tard. « L’élection présidentielle de 1974 marque le passage à une véritable envolée de la communication politique mercatisée en France … l’insertion dans la campagne de messages concernant la vie privée des candidats, et notamment dans l’affichage ; la mise au premier plan du ‘débat décisif’ télévisé entre les deux candidats du second tour. » 2 . Le blog, n’est pas un outil comme les autres puisqu’il ne suscite pas la majorité de la population. De ce fait, il devient un outil supplémentaire à ce qui existait déjà pour faire parler de soi. Cet instrument correspond tout à fait à un outil de marketing politique car un blog créé par un élu, est fait pour développer un dialogue. Aucune déformation n’est alors possible à partir du message original. Par la suite c’est la radio, la télévision ou la presse qui sera le relais de ce qui est dit. On peut prendre comme exemple concret, le blog d’Alain Juppé 3 où ses écrits ont été repris dans la presse française, pour mettre fin à la rumeur de son éventuel retour en France en octobre 2007. Il avait alors déposé un démenti 4 sur son blog et les médias avaient fait suivre sa réponse. Tout élu blogueur tente par ce procédé de se rapprocher du citoyen, de casser la langue de bois au profit du « parler vrai » 5 . La « … communication renvoie alors à une palette 1 Philippe Breton, Serge Proulx, L’explosion de la communication à l’aube du XXIe siècle, Paris, La découverte, 2002, p.71. Philippe J. Maarek, Communication et marketing de l’homme politique, Paris, Litec, 2001, p.31. 3 Alain Juppé, http://www.al1jup.com/ 4 Alain Juppé, http://www.al1jup.com/viewPost.php?id=226 5 Marc Lits, « Le déplacement médiatique du débat politique », Bucarest, 01 juin 2003. 2 66 d’activités par laquelle des personnages publics et d’institutions s’emploient à contrôler avec plus ou moins de bonheur leur image, peser sur la façon dont leurs discours sont reçus. » 1 . Ils sont les auteurs de ce qui est dit, ils sont donc les responsables de leur propre identité qu’ils souhaitent véhiculer à la plus grande partie des individus qu’ils réussiront ou non à toucher par leurs propos. « La communication politique … a … su mettre à son service les ‘nouveaux médias’, comme aujourd’hui Internet, … » 2 . Il est fort à parier que la démocratie va s’en servir pour les prochaines élections présidentielles et municipales, comme cela s’est passé pour les élections américaines de 2004. 1 2 Erik Neveu, Une société de communication ?, Paris, Montchrétien, juillet 2001, p.10. Philippe J. Maarek, Communication et marketing de l’homme politique, Paris, Litec, 2001, p.238. 67 CHAPITRE III. LES BLOGS : UN INSTRUMENT DE MODERNISATION DE LA VIE POLITIQUE LOCALE Précédemment, nous avons vu l’ensemble des outils de communication 1 que peuvent se procurer les élus pour s’exprimer auprès des citoyens. Pour le cas d’Internet, cela avait commencé par la création de sites. Mais ces derniers nécessitent toujours une grande pratique informatique. « La volonté de saisir cette opportunité de créer un monde meilleur s’est matérialisée, entre autres, dans le développement des ‘autoroutes de l’information’, ou l’inforoute, … » 2 . Le blog va donner une image plus moderne de l’élu qui en fera l’usage. De nos jours, « Support et moyen de communication permettent à la parole humaine d’être transportée vers l’autre, vers l’auditoire, vers des auditoires. Dans ce sens, la communication est bien, comme le disait Robert Escarpit dans sa théorie générale de l’information et de la communication, un ‘cas particulier du transport’. » 3 . Section 1. Une proximité évidente A travers de ce que l’on vient de lire, le blog est crée pour être au plus proche d’une certaine catégorie de personnes. « Nous pensons que l’on ne doit plus parler de droit à l’information, mais tout simplement de droit à la démocratie. » 4 . La parole et l’écoute de la parole vont être essentielles pour que cet échange fonctionne. « L’orateur est d’abord celui qui écoute. Le mot ‘communication’ renvoie, dans le vocabulaire de la théorique ancienne, au moment où l’on demande son avis à l’auditoire, donc à celui où l’orateur l’écoute. » 5 . Certes, il s’agit d’une proximité mais une proximité virtuelle qui va le rapprocher des ses partisans. Une proximité évidente, par un dialogue permanent qui est beaucoup plus personnel qu’institutionnel comme cela le serait dans un média classique. « … la proximité est devenue un véritable leitmotiv dans les 1 cf. Supra, p.39. Caroline Caron, « Une société de l’information pour les citoyens ou les consommateurs ? Une analyse comparée de politiques publiques en matière de télécommunications », Laval, Québec, 17 mars 2005. 3 Philippe Breton, Serge Proulx, L’explosion de la communication à l’aube du XXIe siècle, Paris, La découverte, 2002, p.8. 4 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.17. 5 Philippe Breton, L’Eloge de la parole, Paris, La découverte, 2003, p.180. 2 68 discours des élus et des spécialistes de la communication politique. » 1 . Voilà pourquoi tous les moyens sont bons pour parler aux futurs électeurs. Section 2. La « parole » des élus Ce qui prime par cet outil, c’est la parole du politique. « Si nous avons une parole, si nous prenons la parole, c’est tout simplement que nous avons quelque chose à dire et que cela a quelque chance d’être entendu. » 2 . L’auteur est maître de ses propres mots exprimés par l’écrit, et tout dernièrement par l’oral grâce au podcasting. Il a tout le temps et l’espace disponibles pour parler de ses préoccupations, de ce qui le passionne. « … les dispositifs de communication servent à transporter la parole humaine ou, autrement dit, ils servent à prendre la parole. » 3 . Aujourd’hui, cette liberté d’expression est utilisée par une minorité d’élus qui ont pris conscience des enjeux qui se jouaient par l’emploi du blog auprès des citoyens. Ils se doivent cependant, de ne pas susciter des « feuilletons de paroles », qui au bout du compte n’intéresseront plus personne. Ce n’est pas tout de présenter des sujets divers, il faut aussi y donner son avis et solliciter celui qui viendra lire ces notes, puisqu’ « On y partage ses goûts autant qu’on y commente les informations publiées par d’autres. » 4 . En effet, le blog est un relais de ses propres opinions, mais également de ce qui se passe autour. « La parole engage celui qui la tient et on attend de celui qui donne sa parole qu’il la respecte. » 5 . En plus du blog, l’élu a toujours la possibilité de s’exprimer que ce soit à l’écrit, à l’oral, ou bien par le biais de rencontres sur le terrain. Nous verrons comment les citoyens l’utilisent pour s’exprimer 6 . « …, Internet constitue un outil par lequel les élus et les gouvernants peuvent mieux connaître les demandes et les points de vue des citoyens. » 7 . 1 Pascal Ricaud, « Vers de nouvelles situations de délibératives via Internet : espaces publics partiels ou micro-espaces publics ? », Tours. 2 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.15. 3 Philippe Breton, op.cit., p.15. 4 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.V. 5 Philippe Breton, Ibid., p.183. 6 cf. Infra, p.66. 7 Anne-Marie Gingras, La communication politique. Etat des savoirs, enjeux et perspectives, Sainte-Foy, Presse de l’Université du Québec, Thierry Vedel, « Internet et les pratiques politiques », 2003, p.195. 69 Paragraphe 1. Formation d’une nouvelle identité politique Le politique va se donner une autre image que celle annoncée par les médias. Pour la première fois, il est libre de ses propos et se dévoile sans gêne. Voilà pourquoi, nous pouvons emprunter le terme de nouvelle « identité politique ». Un autre visage, plus proche, plus commun va se révéler sous les yeux curieux de la population. L’auteur va se montrer sans intermédiaire, lever le voile sur ses projets, échanger plus facilement avec les citoyens qui souhaitent prendre part au débat. Inspirer de la confiance, de la nouveauté tels sont les principes que revendique cet outil. Un nouveau lien se crée et se tisse ainsi au fil des semaines de rédaction. Etre ouvert et à l’écoute d’autrui, n’est-ce pas l’une des exigences que les élus doivent avoir envers leurs concitoyens ? Paragraphe 2. Une image moderne de la politique Par l’emploi du moyen le plus « à la mode » de notre pays depuis plus d’un an aujourd’hui, les politiques tentent d’être « tendances » et donc d’être parmi les plus « branchés ». Cela peut plaire ou non, mais le blog casse l’image « vieillotte » que diffusent les médias traditionnels. Ils sont plus ouverts, ce qui se traduit souvent par plus « jeune ». Car essentiellement utilisés par les adolescents et les jeunes adultes, le blog va permettre de communiquer avec ces cibles qui souvent délaissent les débats politiques. Etre jeune d’esprit, moderne sont des atouts pour être au plus près de ce futur et potentiel électorat. 70 Section 3. Une nouvelle écoute de la « parole » des citoyens Certes par le blog, une nouvelle écoute de la parole des citoyens et en train de se créer, mais également pour toutes les personnes qui ne sont pas « citoyennes » de ce pays et qui désirent comme tout le monde donner leur point de vue. D’après l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, du 26 août 1789 : « ‘La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus dans les cas déterminés par la loi’ … » 1 . Cette parole va permettre à la population désireuse de s’immiscer dans le discours politique de se faire connaître auprès de l’auteur principal, mais également auprès des gens participant à la discussion. C’est ainsi, qu’une conversation se passe entre le citoyen et le politique, ou entre citoyens eux-mêmes. On répond non plus à un commentaire de l’élu, mais à un commentaire d’un ou plusieurs protagonistes. Cette nouvelle parole est précieuse à leurs yeux car pour la première fois, ils se sentent écoutés et ont un sentiment de supériorité par rapport à la population entière qui ne fait pas encore appel à ce mécanisme. Une sorte de lien privilégié semble se créer. «… le citoyen connecté se sentira d’autant plus informé qu’il consultera une information instantanée. » 2 . Et à partir de cela, les échanges l’amènent à penser qu’il existe. « Néanmoins, l’Occident ordinaire, désigné … sous le terme de ‘mouton’ informé, se sentira plus heureux qu’auparavant grâce à un accès au réseau lui procurant le sentiment d’une relation directe avec l’humanité et aidant à une élévation du niveau de vie. Cette relation le flatte, le convainc de mieux participer à la grande aventure technique.» 3 . Une fierté s’en fait ressentir, on pense que l’on prend de l’importance face au politique, du fait de se forger sa propre opinion et de la dévoiler aux autres. « La parole qu’elle soit violente, brutale ou pacifique, appelle donc un engagement total. L’une des vertus de cette particularité est de faire de la parole, même lorsqu’elle est collective, lieu commun ou encore soumise à l’instinct, une donnée individuelle : ‘ Le phénomène totale de la parole, dit Gusdorf, est un phénomène personnel’. » 4 . On parle en son 1 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.98. 2 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.58. 3 Michel Béra, Eric Mechoulan, op.cit., p.306. 4 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.61. 71 nom. « Prendre la parole, c’est constater, et activer, une différence entre les personnes, une différence de point de vue, de lieu d’où l’on regarde le monde. Je ne suis pas toi, je ne ressens pas les choses comme toi. Ma prise de parole, pour exprimer ce ressenti, va donc t’apporter une nouveauté, un changement. » 1 . Chacun va apporter sa contribution pour étoffer le dialogue. « Et il semble que l’avènement des moyens de communication électronique permette la réalisation de cet objectif, en offrant à tout citoyen la possibilité d’intervenir à tout moment dans le processus politique. » 2 . En naviguant sur Internet, on peut à n’importe quelle heure de la journée aller lire les commentaires et y répondre. Privilège ou non, une poignée d’adeptes de ces nouvelles technologies ne semblent pas vouloir abandonner cet outil, revendiquant un droit d’expression autonome. « La liberté totale d’accès à l’information et donc la capacité illimitée de la transformer en connaissance font désormais partie du statut de citoyen : toute limitation de ce droit d’accès est immédiatement interprétée comme une limitation de la citoyenneté.» 3 . Voilà pourquoi, on peut critiquer le fait que certains blogs politiques limitent ce droit à la parole, quand ces derniers mettent en place la modération des commentaires. Une frustration peut s’en faire ressentir car la parole du citoyen n’est plus aussi libre, elle nécessite dès sa création un contrôle du propriétaire du support. Il semble donc primordial qu’un blog ne soit pas modéré, pour dire qu’il en soit un. Et que seuls, les messages susceptibles de franchir un certain seuil d’irrespect envers la politique, les élus, les partis ou autres, soient supprimés après que le message soit paru. « La compétence requise pour être acteur de la communication politique est selon ce modèle de trois ordres : les individus y sont rationnels, libres et égaux. » 4 . Par ce média, un individu a autant de chances d’être écouté qu’un autre, car leur classe sociale n’est pas montrée par les écrits déposés. Par le biais du blog, il n’y a pas de mise en scène préétablie, tout le monde à la possibilité de parler comme bon lui semble, de plus, aucun temps ne lui est imposé. « …l’accès libre de connaissance via les technologies de 1 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.64. Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.17. 3 Stefano Rodotà, op.cit., p.98. 4 Dominique Wolton, Le Nouvel Espace Public, Paris, Editions CNRS, mai 1989, p.10. 2 72 l’information et de la communication peut-être considéré comme un droit fondamental du citoyen et une condition de son intégration au territoire. » 1 . Cependant, on peut se rendre compte en visitant différents blogs tenus par des élus politiques, que de nombreuses personnes ne souhaitent pas être reconnues par le propriétaire. L’anonymat ou l’utilisation d’un pseudonyme ne sont pas choses rares ; ils sont souvent utilisés par des individus en contradiction avec l’auteur de la note et le font savoir de différentes manières : diplomatiquement, méchamment, violemment ou vulgairement dits trolls pour cette dernière. « L’anonymat sur l’Internet facilite la tromperie ; en même temps, l’absence des marqueurs sociaux traditionnels, qui caractérise l’interaction autrement, de se faire entendre. » 2 . Celui-ci protège l’individu qui s’en sert de représailles face aux autres internautes. « L’anonymat peut être une échappatoire, surtout dans le cadre de débats ouverts, c’est-à-dire non fondés sur des critères définissant la valeur (reconnue par autrui) et la proximité sociale et culturelle des participants. » 3 . Les politiques, s’ils décident d’utiliser un blog, doivent être dans une phase d’écoute de l’autre sans quoi, ces derniers devront l’arrêter très peu de temps après son ouverture, car aucun échange sincère ne sera présent. « L’empathie suppose une attitude très particulière de réception, qu’on pourrait définir comme une ‘écoute sans jugement’, entièrement tournée vers l’autre. » 4 . Chacun à son tour et selon une règle stricte de respect d’autrui peut donc devenir un acteur majeur du discours engagé sur cet instrument, « …l’on y rencontre ses lecteurs, qui peuvent eux-mêmes en devenir auteurs, d’un simple clic de souris.» 5 . Aujourd’hui, cette écoute peut poser problème, car les citoyens deviennent des blogueurs à leur tour et n’hésitent pas à signaler les dérives de leurs dirigeants. On peut citer, un exemple concret : Christophe Grébert 6 , dont les diffusions de documents municipaux sur son blog l’ont amené à rencontrer la justice. Il a été relaxé, car aucune faute n’avait été commise, puisqu’il s’agissait de documents publics. Aujourd’hui, ce genre de blog citoyen se développe pour contrer les partis politiques qui ne souhaitent pas tout divulguer de leurs pratiques. 1 Franck Bulinge, « Territoire, Tic et citoyenneté : Vers une réduction de la fracture socio-numérique. Une approche expérimentale, Toulon, mai 2002. 2 Dominique Wolton, Communiquer à l’ère des réseaux, Hermès, Sciences Publiques, 2000, Peter Dahlgren, « L’espace public et l’Internet. Structure, espace et communication. », p.179. 3 Pascal Ricaud, « Vers de nouvelles situations de délibératives via Internet : espaces publics partiels ou micro-espaces publics ? », Tours. 4 Philippe Breton, L’Eloge de la parole, Paris, La Découverte, 2003, p.181. 5 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de Choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.V. 6 Christophe Grébert, http://www.monputeaux.com/ 73 Section 4. Un besoin de s’exprimer pour tous Besoin qui devient de plus en plus poussé quand arrivent les élections, notamment présidentielles et par la suite municipales. Car notre choix pour ces élections se fait sur des critères précis, ainsi est-il préférable de bien connaître les candidats, de les questionner. Le blog va devenir un outil parmi les plus utilisés dans ces périodes électorales, accompagné des campagnes d’affichages, du tractage et des meetings. Etre le plus honnête, le plus vrai telle est l’attente du citoyen envers ses politiques, « … la ‘transparence’, maître mot pour comprendre les fondements de la société moderne, grande maison de verre où tout se sait sur tout, du moins dans l’idéal. » 1 . Il faudra que les représentants de l’Etat soient les plus sincères, sans quoi une sanction sera portée lors des élections. Les électeurs du Web seront les premiers à leur faire part de leur mécontentement qui se manifestera par des critiques à travers Internet et donc dans la vie quotidienne. « C’est la transparence qui permet cette fusion grâce à la communication, l’homme est transparent à la société et la société est transparente pour l’homme. » 2 . Si la personne élue est « transparente », le citoyen le sera également, voire même plus. « Le désir d’être l’objet d’une médiatisation l’emporte largement sur la discrimination qu’appellerait le respect d’un espace privé. » 3 . Encore faut-il que les politiques et que les citoyens aient envie de s’exprimer librement. « Les usagers s’approprient à leur manière, selon leurs besoins, les technologies mises à leur disposition. » 4 . Voilà pourquoi, beaucoup de personnes ne s’informent pas sur l’ensemble des médias proposés. Le blog reste un outil pour tous, aussi bien pour l’amateur que pour le professionnel, aussi bien pour une conversation individuelle qu’un dialogue collectif. Le politique doit avoir conscience de cet enjeu et utiliser tous les moyens mis à sa disposition pour répondre aux attentes des ses électeurs et n’en négliger aucun. 1 Philippe Breton, L’utopie de la communication. L’émergence de l’ « homme sans intérieur », Paris, La Découverte, janvier 1993, p.47. 2 Philippe Breton, op.cit., p.56. 3 Philippe Breton, Ibid., p.129. 4 Patrice Flichy, « Technologie et lien social », Colloque du 25 au 28 aôut 2003, Paris 74 Paragraphe 1. Perte des repères entre l’émetteur et le récepteur « Pour communiquer, il faut d’abord être deux : un émetteur et un récepteur. Mais il faut aussi que l’information circule dans les deux sens. Or, ce n’est le cas ni des médias…, ni de la communication politique … où la circulation de l’information est à sens unique.» 1 . Sauf qu’aujourd’hui, la mentalité change grâce au blog. On ne parlera plus de sens unique mais de double sens de circulation, car le public peut prendre part au discours engagé. Ce n’est pas tout d’interagir, encore faut-il être écouté. Nous venons de le voir, sans l’écoute des uns et des autres, le blog ne servirait à rien. Aujourd’hui, les personnes s’intéressant à ce nouveau moyen d’échanges semblent avoir compris les enjeux mis à leurs dispositions, et tentent d’y participer. Mais, on reste d’accord sur le principe que l’auteur principal du blog reste l’émetteur initial des messages. Bien évidemment, cette place va se déplacer d’un acteur à un autre, à partir du moment où l’on souhaite véritablement ouvrir un débat de fond. Celui qui décidera de prendre la parole sera à son tour un émetteur de pensées et l’auteur principal deviendra de ce fait un récepteur. « Nous assistons à une réappropriation du web par les internautes qui deviennent autant de producteurs que consommateurs d’informations. » 2 . On passe dans une alternance de rôles à la fois d’émetteur quand nous produisons un message et de récepteur quand nous lisons une note. Auparavant, aucun média ne permettait cette substitution aussi radicale que nous propose le blog. « Désormais, un nouveau média existe et fonctionne selon un système horizontal de circulation de l’information. … non plus seulement pyramidale, c’est-à-dire verticale à destination d’une masse de personnes mais aussi, une circulation horizontale en proposant aux lecteurs de commenter et de débattre entre eux ou avec le blogueur. » 3 . De ce fait, on peut contredire, surveiller ou approuver ce qui peut-être écrit par les intervenants. Nouvel outil de libéralisation de la parole, de prise de parole qui nous amène à l’apparition d’une circulation de l’information plus honnête, liée à l’émergence du « Web 2.0 », permettant une plus grande participation des internautes, tout en leur conférant une 1 Philippe Cabin, Jean-François Dortier, Communication : Etat des savoirs, Auxerre, Sciences Humaines, 1998, Jean-François Dortier, « La communication : omniprésente, mais toujours imparfaite », pp. 1-16. 2 http://maujo.blogspot.com/2005/05/ltude.html 3 Yoann Kermet, « La blogosphère et l’information : nouveaux enjeux et nouvelles limites », Nice, 2005, p.34. 75 place importante dans ce nouvel environnement. Par le blog, « Tout le monde peut se présenter simultanément comme producteur et consommateur, dans une dimension où celui qui, parmi les utilisateurs d’Internet, est situé le plus à la périphérie peut avoir une ‘puissance de parole’ égale à celle d’un gouvernement ou d’un grand potentat privé. » 1 . Nous l’avons vu 2 , difficile de catégoriser cet outil dans une démocratie précise, son manque d’utilisation par les politiques et notamment par la population, ne peut pas en faire un instrument démocratique au même titre que les médias dits traditionnels. Toutefois, la démocratie tente de se rajeunir, de se moderniser et essaye de renouer le contact avec ses citoyens et par conséquent avec ses électeurs par son emploi. Paragraphe 2. D’une individualité par l’acte à une collectivité par l’échange On vient de le voir 3 , il y a échange de rôles entre émetteurs et récepteurs, « …le one to one peut laisser place au one to tribe …» 4 ou au « one to many » quand le dialogue est dirigé vers plusieurs individus d’une même note, mais également passe du « many to many » quand le dialogue se fait avec plusieurs intervenants. Cela touche également les personnes qui lisent ce message sans y intervenir virtuellement et textuellement par la suite. L’acte unique de la lecture doit susciter un certain intérêt, car si l’internaute n’écrit pas lors de cette visite, il faut lui donner envie de revenir pour essayer d’obtenir une intervention de sa part lors de sa prochaine connexion. L’essentiel est que cela puisse interpeller le maximum d’individus. « Aujourd’hui, grâce à l’Internet, ce sont les acteurs eux-mêmes, les personnes, …, les institutions, …, les communautés virtuelles … qui décident de ce qu’elles vont publier sur le Web. » 5 . C’est pourquoi on peut dire qu’ « Internet, est un extraordinaire vecteur de libération de la parole. » 6 , et plus particulièrement que « Les gens entrent en contact non seulement pour parler, mais aussi pour faire des choses ensemble, par exemple poursuivre des buts politiques. » 7 . 1 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.101. 2 Cf. Supra, p.29. 3 Cf. Supra, p.70. 4 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.293. 5 Pierre Lévy, Cyberdémocratie, Paris, Odile Jacob, janvier 2002, p.63. 6 Pierre Lévy, op.cit., p.69. 7 Dominique Wolton, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès, Sciences Publiques, 2000, Peter Dahlgren, « L’espace public et l’Internet. Structure, espace et communication. », p.172. 76 Paragraphe 3. Naissance d’une nouvelle communauté d’ « élites » Par l’utilisation d’Internet, une nouvelle communauté apparaît et se détache du reste de la population. On est face à une fracture sociale « socio-numérique» 1 de plus en plus forte. Mais comme le souligne Dominique Wolton, « …, peu nombreux sont les utilisateurs de net qui deviennent des drogués de l’information politique ; et ceux qui le sont l’étaient probablement avant qu’ils ne commencent à utiliser le net. » 2 . Il est probable que les visiteurs des blogs politiques soient à l’origine des individus s’intéressant à ce domaine. Par cet outil, les internautes vont être libres de se forger leurs propres idées sur leurs élus. En reprenant le concept d’espace public d’Habermas, ce lieu « … a émergé à travers les pratiques discursives de ces élites et les médias naissants (presse, livres et brochures). » 3 . Alors le blog suit-il cette voie qui commence par les élites et qui s’étendra au grand public par la suite ? Ou bien est-ce que les disparités vont perdurer autour de l’emprunt de ce moyen ? « Quoi qu’on en dise, la connexion du foyer à l’Internet relève encore d’un luxe, ne serait-ce qu’au sein des sociétés européennes développées. » 4 . Il est important de signaler cette situation car « Le risque d’une nouvelle stratification sociale entre les inforiches et les infopauvres est bien réel. » 5 . La crainte d’un « apartheid informationnel » 6 est donc à prendre en compte, notamment par le manque de matériels dans les familles ayant des difficultés financières pour s’en sortir. « Si l’on peut espérer que l’internet accroîtra à terme l’engagement civique et la participation politique, il n’est pour l’instant utilisé que par une minorité de la population (caractérisé par des niveaux de revenus et de formation élevés). » 7 . Le blog ne sera considéré comme outil démocratique qu’à partir du moment où toute la population aura la possibilité d’être en relation avec Internet. Une fois cette étape effectuée, si les connexions ne sont pas centrées vers les blogs politiques cela sera considéré comme un rejet volontaire de cette information disponible sur le Web. 1 Franck Bulinge, « Territoire, Tic et citoyenneté : Vers une réduction de la fracture socio-numérique. Une approche expérimentale, Toulon, mai 2002. 2 Dominique Wolton, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès, Sciences Publiques, 2000, Peter Dahlgren, « L’espace public et l’Internet. Structure, espace et communication. », p.175. 3 Dominique Wolton, op.cit., p.182. 4 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.306. 5 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.104. 6 Stefano Rodotà, op.cit., p.105. 7 Jean-Yves Capul et.al, L’internet, Cahiers Français N°295, Paris, La Documentation Française, mars-avril 2000, Thierry Vedel, « Une nouvelle société de l’information. L’internet et la démocratie », p.29. 77 PARTIE III. LES NOUVELLES FORMES DE MÉDIATION POLITIQUE : L’EXEMPLE DE QUATRE BLOGS D’ÉLUS LOCAUX « La communication en ligne et « les relations virtuelles » ont des traits bien spécifiques ; elles sont centrées sur du texte, font grand usage de styles d’écritures laconiques et sont généralement caractérisées par l’absence de répliques auditives, visuelles et tactiles. » 1 . En effet, le blog de l’élu politique va permettre de mettre en évidence ces caractéristiques, à la seule différence qu’il va pouvoir développer davantage ses opinions, sans contrainte de temps comme c’est le cas sur les autres médias. A cette analyse, nous rajouterons l’enquête 2 effectuée auprès de 35 autres blogueurs politiques qui ont bien voulu répondre à notre questionnaire pour montrer ce qui ressort de l’utilisation de leur blog. 1 Dominique Wolton, Revue Réseau, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès, Sciences Publiques, 2000, Peter Dahlgren, « L’espace public et l’Internet. Structure, espace et communication. », p.179. 2 Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII. 78 CHAPITRE I. ANALYSE DES BLOGS D’ ÉLUS LOCAUX ET INTERPRÉTATION Section 1. Analyse d’un blog d’élus appartenant à l’UMP, au FN, au PCF et au PS La méthodologie de recherche choisie est l’« Analyse du discours » 1 . On donne naissance à cette discipline par l’apparition de deux livres : « En 1969 paraissent le n°13 de la revue Langages intitulé ‘L’analyse du discours’, élaboré dans le cadre de l’Université de Nanterre, ainsi que l’ouvrage de Pêcheux, l’Analyse automatique du discours. Ces deux ouvrages marquent en quelque sorte l’acte de naissance officiel de la nouvelle discipline. »2 . Comme le cite Dominique Maingueneau, « …l’AD s’affirme comme une analyse (= une psychanalyse) appliquée aux textes. » 3 . C’est ainsi que nous allons baser notre étude sur quatre blogs d’élus locaux politiques représentant l’UMP, le FN, le PC et le PS. Les hypothèses énoncées suite à l’élaboration de notre problématique constitueront la ligne directrice précise à suivre de cette démarche empirique. Section 2. Formulation des hypothèses et objectif de cette étude « La première phase de l’analyse consiste à construire le corpus en fonction des conditions de production dominantes. Le corpus discursif est défini comme l’ensemble des textes de longueur variable (ou séquences discursives) renvoyant à des conditions de production considérées comme stables. » 4 . Pour la deuxième phase, il s’agit « d’obtenir une représentation ‘désuperficialisée’ du corpus discursif … » 5 . L’objectif est de mettre en avant les caractéristiques des blogs politiques qui ont contribué à donner une nouvelle image de la politique par leur emploi. 1 Dominique Maingueneau, L’analyse du Discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991 Dominique Maingueneau, op.cit., p.14. 3 Dominique Maingueneau, Ibid., p.13. 4 Ibid., p.91. 5 Ibid., p.91. 2 79 Mais également de remédier à un manque par le fait de lancer le débat en dehors des médias traditionnels. Le blog nouveau moyen de communication via le réseau Internet va permettre à l’élu politique de faire entendre sa « parole », de se rapprocher de ses partisans, de se faire connaître auprès d'une audience en perte de vitesse dû à un manque de confiance. Alors le mythe de l’élu politique « intouchable, inabordable » devient-il obsolète ? Ou est-ce seulement un outil supplémentaire de communication médiatique ? Mais ce qui change de nos jours, c’est la possibilité au citoyen de devenir un acteur essentiel à ce débat émergent. Comme nous avons pu le constater dans notre première partie théorique, le blog donne une autre image des politiques beaucoup plus moderne et ouverte. Mais, cette utilisation n’est pas si anodine que cela. Se faire connaître, développer ses idées sur tous les supports de communication existants n’est-ce pas là la meilleure façon d’obtenir des voix pour les prochaines élections en mettant en avant leurs arguments pour contrer leurs adversaires ? Ces nouvelles pratiques de dialogue mettent ainsi en place de nouveaux moyens de communication. Nos hypothèses de travail tenteront de prouver que la parole des politiques est totalement assumée notamment par l’emploi d’une subjectivité bien présente dans leurs écrits et ce qui paraît moins probable, par un retour identique de la part de leurs lecteurs. Le ton employé sera différent, selon les partis et selon la zone géographique étudiée. Enfin, nous verrons que la demande d’interaction n’est pas si évidente que cela et que c’est le citoyen lui-même qui prend l’initiative de répondre de son « propre chef » dans le même sens ou en totale opposition avec ce qui peut-être écrit. Le blog devient en effet un outil favorisant la conversation mais pas forcément le débat démocratique. Le blogueur se doit de convaincre le maximum de personnes de manière plus ou moins discrète et d’essayer de modifier l’opinion des citoyens à son encontre. Pour analyser, déterminer les textes de ces différents auteurs et mettre en avant nos hypothèses de travail, nous allons faire appel pour faciliter cette recherche à l’aide de l’édition gratuite du logiciel TROPES 1 disponible sur Internet. Nous allons ainsi, pouvoir traiter 32 000 caractères sur les notes émises. De plus, nous nous servirons des différentes séquences 1 http://www.acetic.fr/tropes.htm 80 que Dominique Maingueneau cite dans son ouvrage à savoir, « la séquentialité narrative, descriptive, argumentative, explicative, poétique … » 1 pour répertorier ces textes dans une de ces catégories. Nous avons choisi d’étudier pour notre corpus les mois de Février et Mars 2006. Choix stratégique car ces deux mois ont été particulièrement riches en terme d’événements nationaux, ce qui a permis à ces auteurs d’écrire de nombreuses notes. Sans compter les événements dans leur ville respective. Nous montrerons comment à partir de la totalité des notes, un certain ton d’expression domine chez chaque individu. « La consultation des blogs et leur classification permet de dresser plusieurs constats. D’abord l’audience des blogs, le nombre de commentaires et les liens tissés vers celui-ci varient sensiblement selon les blogs et selon les sujets. » 2 . Quel que soit la catégorie dans lequel se place les blogs, il est important de noter que « Tout texte (de même que tout discours) est par nature informatif. Il apporte des renseignements sur des faits, des êtres ou des ‘choses’, soit encore sur le locuteur, qui peut faire part de ses opinions ou même ‘trahir’ ses sentiments sans le vouloir. » 3 . Paragraphe 1. Présentation des auteurs des blogs analysés L’étude menée se porte sur quatre blogs d’élus locaux français situés dans des zones géographiques différentes en France. La sélection des blogs s’est basée sur le fait que ces personnes politiques ont toutes un mandat de conseiller municipal pour correspondre au plus près de la problématique de ce mémoire. Les auteurs des blogs choisis sont les suivants : Véronique Delvolvé, Yannick Bedin, Steeve Briois et Patrick Mottard. Chacun ayant une étiquette politique différente les uns des autres. Véronique Delvolvé 4 : élue UMP, est âgée de 33 ans et a pour statut, adjoint au maire du 7ème arrondissement de Paris. Son mandat date de 2005. 1 Dominique Maingueneau, L’analyse du discours : introduction aux lettres de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p.214. 2 Fabienne Greffet, « Politics as usual ? Les blogs politiques français en 2005, Nancy2, 2005, p.8. 3 Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Colin, mars 1997, p.137. 4 Véronique Delvolvé, http://delvolve.typepad.com/ 81 Le maire, depuis 2002, est Michel DUMONT, membre du groupe UMP. Il s’agit d’un arrondissement de 65 000 habitants qui se développe sur environ 409 hectares 1 . Son blog est le premier d’une élue politique française et a été créé en Décembre 2004. Sa structure graphique est plutôt gaie, composée de couleurs vives : jaune et verte. Une photographie bien positionnée nous la représente souriante. De nombreux liens vers d’autres sites ou blogs catégorisés selon ses centres d’intérêts sont disponibles. Il y a, par la mise en forme de cet outil, une ouverture vers ses convictions politiques, vers l’Europe et enfin vers des blogs s’intéressant à divers thèmes autres que politique. Ce blog, du fait, de mettre en ligne différents liens hypertextes, laisse penser à une certaine ouverture d’esprit mais peut-être pas autant que ce que l’on pourrait croire de prime abord, car la plupart d’entre eux sont liés à son parti politique. Une adresse mail et une petite biographie sont disponibles sur la page d’accueil. Les commentaires récents, les dernières notes, les archives sont présents en ligne mais nous ne pouvons pas accéder à l’intégralité des notes passées, puisque seuls les 10 derniers mois sont présentés. L’élue a décidé de créer son blog sur la plate-forme payante Typepad. Le blog de Steeve Briois 2 , a été créé en Décembre 2005. Agé de 33 ans, il est conseiller municipal d’Hénin-Beaumont dans le Nord-Pas-de-Calais. Son mandat date de 1995 et est membre du parti Front-National. Le parti majoritaire de sa ville est le Parti Divers Gauche dont le maire est : Gérard DALONGEVILLE depuis mars 2001. Cette ville se compose de 27 OOO habitants et a une superficie de 2071 hectares. 3 Steeve Briois annonce le pourquoi de son blog par un édito qui décrit très clairement ses origines, son statut au sein de la ville, son action pour avoir su implanter le Front National à Hénin-Beaumont. Fierté qui n’est pas cachée bien au contraire, puisque tout son parcours politique est scrupuleusement détaillé. Les couleurs utilisées sont le dégradé de trois bleus. Une photographie de l’élu souriant est présente. Aucun lien, vers d’autres sites ne se trouve sur ce blog. On peut noter la présence de son mail et une liste de ses notes catégorisées par thèmes. Les titres des commentaires et les titres des notes récentes sont mis en ligne, ainsi que les archives. 1 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/VIIe_arrondissement_de_Paris Steeve Briois, http://steevebriois.hautetfort.com/ 3 http://www.mairie-heninbeaumont.fr/www/fr/accueil/decouvrir_henin_beaumont/heninbeaumont_en_chiffres.aspx 2 82 Le blog se veut donc être centré sur les dires de l’auteur. Rien n’amène le visiteur à connaître ses centres d’intérêts, les sites que ce dernier aime visiter. Il a fait confiance à HautetFort pour obtenir un blog, plate-forme qui est généralement gratuite. Cependant, il a opté pour la version payante pour ne pas être envahit de spams, qui sont des messages publicitaires s’infiltrant sur le blog comme s’il s’agissait de commentaires. Le blog suivant est celui de Yannick Bedin1 , membre du Parti Communiste Français, conseiller municipal de Bourges. Ce blog a été créé en Décembre 2005. Le Maire de sa ville, Serge LEPELTIER ancien RPR, se ralliera au parti UMP en décembre 2002. Il est à la tête de la mairie de Bourges depuis le 13 juin 2005. Cette ville se compose de 72 500 habitants et a une superficie de 6800 hectares 2 . Les couleurs dominantes de son écran sont le blanc et le rouge, qui nous ramènent aux couleurs de son parti. Une photo du blogueur s’y trouve également. De nombreux liens vers d’autres sites ou blogs sont présentés aux visiteurs. Ces derniers sont répertoriés selon différentes catégories qui parlent de la politique, en général d’autres blogs de confrères communistes, de blogs manifestant un certain intérêt pour les luttes engagées, la presse. Cette plate-forme sous Dotclear a été créée à partir de l’hébergeur Ouvaton qui est payant. Le webmestre a mis en place une recherche par mot clef, ce qui permet de trouver à partir d’un mot, une note que l’on souhaite retrouver. En revanche, pour joindre l’auteur, il faut passer par un formulaire de contact, aucune adresse personnelle ou professionnelle n’est donnée. Enfin, seul ce blog présentent les « fils RSS » qui permettent de « ‘syndiquer’ le contenu publié », permettant à l’internaute d’être au courant que le « … site ou blog a été mis à jour. » 3 , par réception d’un mail sans avoir à s’y rendre dessus. Le dernier blog étudié est celui de Patrick Mottard 4 , conseiller municipal de Nice membre du Parti Socialiste. Ce blog présenté en dernier n’existe que depuis janvier 2006. Le maire de la ville de Nice, depuis 1995, est Monsieur Jacques PEYRAT appartenant au groupe politique RPR en 1996 et se ralliera à l’UMP par la suite. Cette ville de 345 000 habitants a une superficie de 543 965 km². 1 Yannick Bedin, http://www.yannick-bedin.org/index.php Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Bourges 3 Cyril Fiévet, Emilie Turrettini, Blog Story. Onde de Choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.300. 4 Patrick Mottard, http://patrickmottard.blogspot.com/ 2 83 Monsieur Mottard, dans son édito en page d’accueil, l’annonce : « j'éradique la langue de bois et je revendique la subjectivité. » 1 . Comme les précédents, il possède une photographie souriante. Les couleurs qui priment sont le gris et le bordeaux. On y trouve les derniers messages, les archives, et trois liens vers trois sites. Deux le concernant directement et un vers Google News, qui est un site recensant l’actualité dans le monde. C’est donc un blog également centré sur la personne et sur ce que l’élu a déjà entrepris dans les nouvelles technologies car les deux liens sont son site personnel Internet et le site NIAC TV dont il est le rédacteur en chef. En revanche, aucune blogroll n’est présente. Il manque également, l’adresse e-mail de ce dernier et aucun autre moyen n’est mis en place pour que l’internaute puisse le contacter en dehors du blog. Il a opté pour le logiciel gratuit Blogspot pour sa plate-forme à partir d’un hébergeur payant. En visualisant ces quatre blogs et leurs villes respectives, on se rend compte immédiatement que trois blogs sur quatre n’ont pas le même parti politique que le maire de la ville. Sont-ils ainsi des blogs d’opposition ? Seul celui de Véronique Delvolvé est dans la même optique politique. Il est donc intéressant de voir comment vont être utilisés ces blogs qui n’ont pas les mêmes objectifs politiques que leur ville. Ce qui peut donner une idée sur le pourquoi de la création de leur blog en plus de leur envie de communiquer avec autrui. « L’objet du blog permet également de cerner la teneur des débats qui se déroulent dans la blogosphère : s’agit-il de faire écho à ce qui se joue sur la scène politique ou sur celle des ‘grands’ médias ? S’agit-il au contraire de faire émerger des questions occultées dans le débat public et, de rechercher une mise sur l’agenda politique ? » 2 . C’est ce que nous allons nous efforcer de prouver par cette étude empirique. Le choix de ces quatre blogs est représentatif des blogs politiques qui fleurissent de jour en jour à la vue des proches élections présidentielles, municipales et sénatoriales. Cependant, ces derniers ont quasiment tous une actualisation fréquente de leur information ce qui n’est pas le cas de tous dans la blogosphère. 1 2 Patrick Mottard, http://patrickmottard.blogspot.com/ Fabienne Greffet, « Politics as usual ? Les blogs politiques français en 2005, Nancy 2, 2005, p.6. 84 Paragraphe 2. Leur mise à jour Pour qu’un blog fonctionne, il est nécessaire que cet outil soit mis à jour régulièrement, sans quoi il est évident qu’il ne sera plus lu et sera délaissé au fil des jours. Et par conséquent, beaucoup de temps sera nécessaire pour attirer de nouveau les visiteurs. Pour vérifier cette étape, il nous a simplement fallu additionner l’ensemble des notes par mois distincts et de les diviser sur une base d’un mois comportant 30 jours pour avoir une moyenne de leur mise à jour. Pour ce qui est du blog de l’UMP représenté par Véronique Delvolvé, c’est 27 notes émises pour le mois de Février, et 26 pour le mois de Mars. On est proche de la réactualisation journalière. Concernant le blog FN de Steeve Briois, on a 30 notes pour le mois de Février et 39 pour le mois de Mars. Ce dernier le met donc son blog à jour quotidiennement, voire même au-delà. Pour le blog du PCF, Yannick Bedin a écrit pour le mois de Février 11 billets et 7 pour le mois de Mars. C’est en moyenne une note tous les deux, trois jours pour le mois de Février et tous les quatre jours pour le mois de Mars que le blog est alimenté de nouvelles notes. Enfin, le blog PS rédigé par Patrick Mottard, recense 19 notes en Février, et 25 notes pour le mois de Mars. Ce qui correspond pour le mois de Février à environ une note tous les deux jours et pour le mois de mars à pratiquement une note par jour. Dans l’ensemble, on peut considérer que ces quatre blogs sont régulièrement « alimentés ». Seul celui de Monsieur Bedin est en retrait par rapport aux autres blogs étudiés. Celui qui tient la meilleure mise à jour est Steeve Briois, qui profite au maximum de cet outil pour parler et dire ce qui le dérange dans sa ville et faire part de son soutien quotidien pour son parti politique. « Dans une conversation, en effet, les deux interlocuteurs sont en contact, le co-énonciateur pouvant intervenir à tout moment. La parole y est donc constamment menacée et son déroulement foncièrement imprévisible. » 1 . Voilà pourquoi, il est nécessaire pour les blogueurs de se rendre sur leur blog, afin de ne laisser aucun dérapage venir de l’extérieur s’introduire dans leur outil, et rester ainsi maîtres de leur propos. 1 Dominique Maingueneau, L’analyse de discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p. 108. 85 Paragraphe 3. Le genre utilisé par ces différents auteurs « La présence du sujet énonciateur se traduit aussi dans ses marques de modélisation. Dire, c’est aussi se situer par rapport à son propre dire. Le texte est ainsi constamment habité par la présence d’un sujet qui situe son dire par rapport au certain, au possible, au vraisemblable …, ou qui porte des jugements de valeur... Dans tous les cas cependant il ne s’agit pas d’une relation solitaire entre l’énonciateur et ce qu’il dit : l’énonciateur est toujours pris dans sa relation à son co-énonciateur. » 1 . Nous allons ainsi mettre en avant la place de l’énonciateur et du co-énonciateur dans l’ensemble des textes analysés par l’utilisation des « embrayeurs » 2 qui en est faite. Selon Dominique Maingueneau « Le discours est interactif ». Ce dernier définit l’acte de parler comme « une forme d’action sur autrui, et pas seulement une représentation du monde … toute énonciation constitue un acte (promettre, suggérer, affirmer, interroger…) qui vise à modifier une situation … qui visent à produire une modification sur les destinataires. » 3 . Afin d’étudier ces textes, nous allons mettre en évidence, l’emploi que ces derniers utilisent sans s’en rendre compte. En effet, « les énoncés se rangent en divers types (déclaratifs, impératifs, interrogatifs), qui correspondent à de multiples actes de langage, … » 4 . De plus, nous allons voir comment leur implication se manifeste sur l’ensemble des quatre blogs étudiés. C’est ce que nomme Dominique Maingueneau par le terme « d’assertion » qui est le fait qu’ « … on ne peut se contenter d’envisager les personnes sous l’angle de leur référence. Le sujet énonciateur est à la fois le point d’origine des repérages référentiels … et des modélisations. … Un énoncé joue simultanément sur deux registres étroitement liés : d’un côté il dit quelque chose de quelque chose, de l’autre cette relation fait l’objet d’une prise en charge par l’énonciateur. En aucun cas on ne peut séparer ce qui est dit de la manière dont il est posé. » 5 . 1 Dominique Maingueneau, L’analyse de discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p.108 2 Dominique Maingueneau, op.cit., p.108/109 3 Dominique Maingueneau, Analyser les textes de communication, Paris, Dunod, mai 1998, p.39 4 Dominique Maingueneau, Ibid., p.115. 5 Ibid., p.115. 86 A. Le logiciel TROPES 1 TROPES est un logiciel de traitement de textes écrits ou oraux. « Tropes permet de garantir la qualité des analyses, en apportant une approche sémantique et pragmatique, garantissant la sécurité des interprétations grâce à son automatisation des analyses. ». Il apporte différents « outils d’analyse sémantique », on peut citer par exemple : la classification automatique des mots du texte, la détection du contexte global du document, la catégorisation des mots-outils, la localisation des séries chronologiques, l’affichage sélectif par thème ou par catégorie linguistique, les graphes hypertextes permettant d’analyser et de naviguer dans les documents. Par son utilisation simple et rapide, le logiciel simplifie les recherches de mots, termes ou autres par la mise en couleur précise de ce que l’on souhaite voir ressortir du texte. On peut ainsi citer : le rouge qui représentera les verbes, le jaune les conjonctions de coordination et de subordination. Nous présenterons à la suite de notre analyse ce que nous avons utilisé pour faire émerger notre recherche par l’emploi de ce logiciel. « Les usages de l’échange amènent ainsi à repérer, dans chaque domaine, des sous-classes correspondant à des genres particuliers… Ces multiples formations linguistiques sont liées à des conditions de production et de réception éminemment variables, selon les époques et les pays. De ce point de vue, le discours ne saurait être dissocié du contexte socio-culturel dont il dépend, il doit s’appréhender de manière pluri-disciplinaire, au vu des paramètres externes.» 2 . A travers ce logiciel, nous allons mettre en évidence les formes de discours que peuvent présenter l’ensemble des textes de chaque blogueur politique. Appelées « types de séquences » selon Dominique Maingueneau, elles sont « des contraintes en quelque sorte transversales aux multiples types et genres de discours. » 3 . J-M Adam en distingue quelques unes comme : « la séquentialité narrative, …, descriptive, argumentative, explicativeexpositive, dialogale-conventionnelle, poétique-autotélique. » 4 . 1 http://www.acetic.fr/fr/guide/tropes/v60/index.htm Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Collin, mars 1997, p.108. 3 Dominique Maingueneau, L’analyse de discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p.214. 4 Dominique Maingueneau, op.cit., p.214. 2 87 Les notes de Véronique Delvolvé 1 Dans l’ensemble, le mois de Février a tendance à être plutôt énonciatif. Ce qui d’après Tropes correspond à des textes d’« individus qui affichent leurs points de vue en essayant de convaincre ». La mise en scène semble être dynamique et active. Le logiciel Tropes met en avant de nombreux verbes et adverbes pour argumenter le style général de ces textes respectivement représentés par « pouvoir, soutenir, faire, vouloir, être » et « beaucoup, même, aussi ». Les connecteurs d’opposition sont très fréquents puisqu’ils sont représentés à 26,4% par « mais, alors que ». Les verbes employés affichent son opinion comme « je voterai, je remercie, j’irai », d’autres dits performatifs à 3,9% comme « vouloir, excuser » impliquent un acte par le langage. Tandis que les textes de Mars changent radicalement de sens, on est plus dans de l’argumentatif. « Le texte argumentatif n’a pas pour seul but, au contraire du texte explicatif, d’apporter un savoir rationnellement exposé. Il vise à transformer les convictions du lecteur, à bousculer ses croyances pour le faire changer d’avis. » 2 . Pour mettre en avant ce style de texte, Tropes souligne les conjonctions de coordination et de subordination suivi des adverbes. On retrouve souvent « mais, même si, alors que, pourtant, sauf que » qui correspondent à un caractère d’opposition présent à 25% dans l’ensemble des textes. Ou encore beaucoup de négations « non, ne…pas, jamais » quantifiées par un total de 24%. Les verbes sont déclaratifs comme « savoir, préférer, oser, refuser, dénoncer ». Une analyse plus détaillée c’est-à-dire texte par texte nous montre une répartition identique puisqu’il y a plus de textes argumentatifs que dans les autres catégories. Dans l’ensemble, il s’agit de textes courts qui demandent de la connaissance sur le terrain de ce qui est écrit, mais également qui incitent les visiteurs à laisser des commentaires, et cela semble fonctionner. 1 2 Cf. annexe, les notes de Véronique Delvolvé, pp.I-XXII. Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Collin, mars 1997, p.143. 88 Les notes de Steeve Briois 1 Le style est descriptif pour le mois de Février et plutôt argumentatif pour le mois de Mars. Cela se retrouve dans l’analyse du texte lorsqu’il décrit précisément ce qui se passe dans sa ville jour par jour. En effet, beaucoup de termes liés à la représentation temporelle sont utilisés. Tropes en dénombre 133. Et 50,5% des verbes employés comme : « écrire, continuer, citer » sont dits « factifs » par le logiciel correspondant à une action. Pour le mois de Mars, ce sont les concepts liés à « la politique et la société, la justice, sa ville » qui dominent. Comme le souligne Jean-François Jeandillou : « Toute argumentation est orientée vers une conclusion que le lecteur doit pouvoir juger acceptable alors même qu’il ne l’aurait pas admise au préalable. » 2 . L’auteur utilise de nombreux connecteurs « d’addition » qui correspondent à l’énumération de faits par l’emploi essentiellement dans ce cas de « et ». De nombreux verbes « factifs » sont encore présents auxquels s’ajoutent des verbes dits « déclaratifs » qui veulent donner un état, une action, un être, un sentiment comme « crier, souhaiter, croire, dire ». Les textes de Steeve Briois semblent montrer que l’auteur a bien conscience de l’impact de chaque mot posté sur son blog. Il tente de faire prendre conscience aux habitants d’HéninBeaumont, que le maire actuel n’est peut-être pas celui dont ils en ont l’image ou l’écho. Alors que le blog se veut être un lieu de débat, Steeve Briois l’utilise pour décrédibiliser son maire. Les notes de Yannick Bedin 3 Par rapport aux autres blogs, ses notes sont les moins nombreuses, puisqu’elles s’élèvent à 18 sur les deux mois. Le logiciel Tropes dans l’ensemble n’a pas su déterminer le ton qui émanait des textes de ce blogueur. Nous avons décidé d’analyser note par note pour faire ressortir une moyenne du style employé pour ces deux mois. Le mois de Février se trouve plus dans le style argumentatif, l’auteur parlant essentiellement de « sa ville, son département et de son parti ». Il utilise 12% de connecteurs « de cause » comme « parce que, donc, car » qui lui permettent de construire un raisonnement et plus de 52% de connecteurs « d’addition » pour énumérer des faits précis. La majorité des verbes employés ont une tendance à montrer une action « se lancer, rencontrer, faire ». 1 Cf. annexe, Les notes de Steeve Briois, pp.XXIII-LXVII. Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Collin, mars 1997, p.143. 3 Cf. annexe, Les notes de Yannick Bedin, pp.LXVIII-LXXIX. 2 89 Le ton devient plutôt narratif, dans le sens de conter une histoire lorsqu’il s’agit de parler du communisme en Europe, ou bien de sa région. Concernant, le mois suivant, on est plutôt dans le style descriptif. « Le texte descriptif se construit autour d’une unité thématique (objet, lieu ou individu) dont sont pris en considération l’aspect général, les parties constitutives ou la situation dans le temps et l’espace. » 1 . Les critiques émises dans ses commentaires sont de l’ordre du « politiquement correct ». En revanche nous pouvons souligner que de nombreux adjectifs objectifs à 42,7% sont utilisés, ce qui correspond tout à fait à l’image que veut donner ce parti. Les verbes sont en majorité « factifs », soutenus par 20% de verbes « déclaratifs ». Là encore, les connecteurs « d’addition » pour énumérer des faits sont présents à 65,6%. Les notes de Patrick Mottard 2 On constate très vite, que cet homme aime écrire. Mais ce n’est pas le style narratif qui l’emporte sur les deux mois, mais bel et bien l’argumentatif. Pour le mois de Février, les concepts qui ressortent de cette étude sont liés à « la politique, l’éducation et au cinéma ». Dans l’ensemble, il parle de ce qu’il fait pour sa ville à partir de sa permanence et de son parti. Il met en avant des sujets divers et variés, ayant une préférence pour des thèmes émanant de la culture et du sport. L’argumentation « fait intervenir l’activité du sujet et celle de l’auditoire dans la construction même du discours. » 3 . Par ce style, le logiciel Tropes met en avant 38,5% de connecteurs d’intensité utilisés pour dramatiser le discours, représentés par « quelque, un peu, de plus, plusieurs ». Il exprime ses actions et cela se voit dans l’ensemble des verbes utilisés « assister, pouvoir, vérifier, prendre ». Pour le mois de Mars, les concepts sont orientés sur les « événements de la ville et des environs, de l’enseignement et la recherche ». Cependant, ses textes montrent que 16% de connecteurs « d’opposition » prennent place dans le discours « par contre, pourtant, en tout cas ». L’auteur argumente ses prises de positions. Encore une fois la dramatisation est présente et chose nouvelle, quelques « modalisations de doute » sont identifiées à 2,5% par « probablement, peut-être » qui sont à relier au monde de la municipalité que côtoie l’élu. 1 Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Dunod, mars 1997, p.149. Cf. annexe, Les notes de Patrick Mottard, pp.LXXX-CXXIV. 3 Dominique Maingueneau, L’analyse du discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p.232. 2 90 Les blogs et notamment ceux des politiques ont une tendance à être plutôt de type argumentatif. En effet, cela est compréhensible car ce type d’interaction « n’agit pas directement sur autrui…, mais sur l’organisation même du discours, qui est censée avoir ellemême un effet persuasif. » 1 . B. Les thèmes développés « Tout texte … est par nature informatif. Il apporte des renseignements sur des faits, des êtres ou des ‘choses’, soit encore sur le locuteur, qui peut faire part de ses opinions ou même ‘trahir’ ses sentiments sans le vouloir. » 2 . En utilisant Tropes, nous allons pouvoir déterminer des catégories de « références » les plus fréquemment utilisées par les auteurs de chaque blog. Les notes de Véronique Delvolvé 3 Dans le cas, du blog de Véronique Delvolvé, les notes se basent essentiellement sur le ton de l’actualité, de son travail et de sa vie personnelle. Tropes détecte différents univers de références dont les plus représentatifs sont « la politique, la France, les conflits, la jeunesse ». Les termes les plus recensés sont liés à sa « ville » : Paris, grâce à laquelle elle y inclut sa vision de la politique. A partir de l’étude détaillée du logiciel, on voit bien que son travail est très prenant, et ne cache nullement son adhésion au parti de l’UMP qui est très représenté dans ses notes. Son soutien est sans conteste. Elle assume clairement son étiquette politique, tout en ouvrant un dialogue vers des visions autres, comme le fait de mettre en avant les points forts des personnalités de gauche, comme c’est le cas de la note sur Ségolène Royal. Liberté de ton d’expression et surtout ouverture sur le monde s’en ressentent, même si cette dernière se centralise sur des sujets de société comme notamment le Contrat Première Embauche, la polémique sur caricatures dans la presse, la culture. Quelques notes sur ses engagements personnels sont « postées », c’est en quelque sorte un agenda mis à la disposition de tous. 1 Dominique Maingueneau, L’analyse du discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p.228. 2 Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Dunod, mars 1997, p.137. 3 Cf. annexe, Les notes de Véronique Delvolvé, pp.I-XXII. 91 Les écrits sont assez courts, et ne donnent pas dans l’ensemble assez d’indications pour comprendre ce qu’elle veut nous dire. Cela se ressent également dans ses titres, ces derniers sont très brefs et sont souvent suivis de points de suspension. Il est donc nécessaire de lire le texte qui l’accompagne pour le comprendre. Les mêmes constatations se retrouvent sur les deux mois étudiés. La réactivité de ses lecteurs est très présente dans l’ensemble, et les commentaires ne sont pas modérés. Seuls ceux qui ont une atteinte à la dignité humaine sont enlevés. Les notes de Steeve Briois 1 Pour le premier mois, Tropes met en avant l’emploi de termes en relation avec « la politique, Dalongeville, la mairie, le communisme et l’élu local ». En effet, il n’hésite pas dans ses écrits à critiquer la majorité mise en place dans sa ville, il s’agit essentiellement de contestation face au maire et au parti communiste. Ses notes sont très liées à sa ville, il ne cache rien de ce qu’il s’y passe, montre les conditions dans laquelle elle est dirigée. Cependant, ce dernier emploie des termes familiers pour parler du dirigeant de sa ville, comme « loustic, voyou, super menteur, pignouf, barbu ». Steeve Briois dit parler de manière humoristique et avoue utiliser un « … ton incisif … qui peut choquer lorsqu’on ne le replace pas dans son contexte ». Tout est mis en place pour mettre au plus bas le maire qui semble accumuler de nombreuses maladresses notamment d’un point de vue financier. « Les jugements de valeur supposent des normes qui ne sont pas nécessairement universelles. Dans un certain nombre de partis fermés sur leurs convictions ou de systèmes totalitaires il existe même des insultes rituelles, des catalogues spécifiques par lesquels les énonciateurs structurent leur univers et leur communauté imaginaire. L’injure prend alors un côté paradoxal : en principe destiné à outrager le destinataire, elle peut fort bien n’avoir qu’une fonction de ciment du groupe si ce destinataire ne partage pas le système de valeurs de l’énonciateur.» 2 . Certaine fois, il se fait passer pour victime, notamment lors des procès contre le maire. La critique est facile, mais aucun projet n’est mis en avant pour donner une autre image de sa ville. Tous les moyens sont bons pour se faire passer pour le « rejeter » de la ville, mais également pour faire passer leurs idées notamment celles sur le racisme, l’immigration et l’insécurité, confère l’exemple du meurtre du jeune Ilan Halimi dans la région parisienne. 1 Cf. annexe, Les notes de Steeve Briois, pp.XXIII-LXVII. Dominique Maingueneau, L’analyse du Discours. Introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p.119. 2 92 Cependant, ce dernier utilise son blog comme le compte-rendu de ce qui se passe au sein des conseils municipaux et met en avant l’actualité de son parti et de son agenda chaque mois. Dans l’ensemble ses notes dépassent les 15 lignes de rédaction en moyenne. Nous pouvons considérer son blog non pas comme un débat ouvert au dialogue mais comme une attaque volontaire contre le maire d’Hénin-Beaumont ce qui n’est pas en soi le but de cet outil. Ce blog devient par ces écrits un véritable blog d’opposition au maire de la ville. Ce qui est regrettable, c’est que tant de termes soient utilisés si librement dans ces notes, alors que ce dernier disait ne « critiquer que les actes » de ces individus et pas les personnes ellesmêmes. On constate que pratiquement toutes les notes sont commentées. Cependant, l’auteur annonce que son blog est modéré face à une « noyade » de commentaires d’opposition venant de la mairie suite « au succès grandissant de ce blog ». Ces textes sont très riches en terme de contenus ce qui montre qu’il y a une importante rédaction qui se fait au préalable. Une certaine réflexion est donc présente dans ces propos et on en déduit que l’auteur a un certain recul par rapport à ce qu’il peut écrire. Il tient à faire partager ce blog au plus grand nombre. D’ailleurs pour parler de cet outil, il emploie le terme « votre blog préféré ». Ca devient une sorte de journal collectif dont le rédacteur en chef serait Steeve Briois. Les notes de Yannick Bedin 1 Peu de sujets sont abordés, mais ceux cités parlent en général des événements nationaux qui sont rattachés aux mobilisations faites dans sa ville. Ainsi, le Contrat Première Embauche est utilisé pour mettre en avant la mobilisation des habitants de sa ville et pour critiquer le gouvernement mis en place. Il y parle également des événements qui se passent à Bourges, du PCF d’un point de vue local, national et européen. Mais également tout ce qui touche l’immigration. Les textes y sont courts mais donnent immédiatement le ton que veut employer l’auteur. Pas de superflu, le strict nécessaire est mis pour faire passer un message. Enfin, grâce à cet outil l’auteur rappelle quand des manifestations ont lieu, une sorte de « mémo » de rendez-vous. Les titres utilisés condensent les propos de la note. L’élu avoue qu’Internet n’est pas perçu comme un outil de proximité par ce parti. Mais ce dernier s’efforce de montrer qu’il peut l’être à condition de bien l’utiliser, tout en continuant 1 Cf annexe, Les notes de Yannick Bedin, pp.LXVIII-LXXIX. 93 les rencontres sur le terrain dans les quartiers. Ce qu’il fait à titre personnel en participant à des débats. Il a décidé de ne pas modérer les commentaires, ce qui montre une véritable envie de débattre sans artifice, puisque les commentaires sont aussitôt postés sur le blog et ne demandent pas l’aval de son propriétaire. Du fait d’être si peu actualisé, le blog pourrait plus se rapprocher d’un site Internet, à la seule différence qu’il permet de nous exprimer directement sans passer par le mail comme c’est le cas la plupart du temps. En posant plus souvent de notes sur cet outil, il pourrait faire un peu plus parler de lui, de son parti et ainsi avoir plus d’interactivité ce qui attirerait plus de lecteurs et d’intervenants. Les notes de Patrick Mottard 1 C’est le deuxième blog qui a le plus d’écrits après celui de Steeve Briois en terme de contenu. Avant de parler des thèmes des textes de ce blog, on note immédiatement l’emploi de titres frappants. Jeux de mots, « clin d’œil » qui se font l’écho des notes écrites dans le billet en question. Les titres amènent à la lecture, car certains d’entre eux intriguent et conduisent l’œil du visiteur à regarder en détail ou en diagonale les écrits. L’auteur est très présent dans ses notes et ne se cache de rien. Toutes les opportunités sont bonnes pour parler de ses démarches pour améliorer le quotidien des niçois. Des « clins d’œil » critiques mais jamais violents ciblent la municipalité en place sur des points précis de son programme politique. Il tente de montrer le vrai visage de la droite face à une gauche qui se bat depuis des années pour conquérir le siège de la mairie. Aujourd’hui, le blog met petit à petit ses travaux, ses engagements auprès de la population. Engagement politique qui aura mis du temps à se montrer face à l’ensemble des notes qui ont tendance à ne parler que de ce qu’aime culturellement l’auteur. Bien évidemment, les sujets nationaux sont traités, notamment le Contrat Première Embauche, la mort d’Ilan Halimi. Ce que cependant l’on pourrait reprocher, c’est de tout vouloir recentrer sur ce que fait Monsieur Mottard. Ce blog est à contrario des trois autres, plus un modèle de « journal intime » qu’un blog politique, mais l’auteur l’annonce dans son édito qu’il se rapprocherait plus de la première version. Quel que soit le thème abordé, l’élu prend véritablement position en faisant quelques fois des allusions ironiques. Il se sert concrètement de son blog comme d’un outil de communication 1 Cf. annexe, Les notes de Patrick Mottard, pp.LXXX-CXXIV. 94 supplémentaire très accès sur ses passions et depuis peu sur ses engagements, ses actions pour la ville. Homme ouvert au débat par ses permanences, ses rencontres sur le terrain, son blog est pourtant modéré. Ce qui fait de ce dernier une sorte de site Internet plus interactif qu’un site classique. Ayant suivi l’évolution de cet outil depuis sa création, on peut en noter une certaine amélioration. En effet, d’un point de vue structurel, le blog s’est amélioré. Des liens hypertextes sont utilisés, l’auteur participe davantage au débat en donnant son avis sur certains commentaires. Il y a rajouté la colonne prévue pour visualiser ses derniers messages. Or, si on regarde le blog de Patrick Allemand, autre candidat PS candidat aux municipales de Nice, on constate qu’un lien vers le blog de Patrick Mottard existe bien. Malgré tout, le blog lui permet de mettre en avant ce qu’il souhaite dire sans avoir de censure. Une autre manière de se faire entendre, et surtout de remémorer les actions menées pour sa ville qui ont pu rester pour certains oubliées. Toutefois, l’auteur parle un peu trop de ses activités personnelles au détriment de son engagement politique. Certes, cela permet aux internautes de le connaître un peu plus intimement mais les projets politiques de ce dernier ne sont pas mis en avant alors qu’il est candidat à la municipalité de Nice en 2008. C. L’emploi des personnes : les indices personnels Nous allons mettre en évidence l’ensemble des divers emplois que peut faire un élu pour parler de lui, notamment par l’utilisation de la subjectivité. Pour cela, nous allons nous appuyer sur les divers pronoms personnels et possessifs utilisés dans leur propos pour montrer leur engagement. « Les pronoms de 1er et 2e personnes, ainsi que les possessifs, ne se comprennent qu’au vu de chaque situation d’énonciation énonciative. Je-me-moi renvoient automatiquement à celui qui dit ou écrit je-me-moi ; il en va de même pour mon-ma-mesmien(s)-mienne(s). » 1 . Nous mettrons en avant la place que peut prendre le nous collectif qui va impliquer d’une part le blogueur politique et les personnes qui se sentent concernées par les propos émis. « ... Nous demeure un pur embrayeur quand il englobe je + tu, et quand il a une valeur de 1er personne 1 Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Dunod, mars 1997, p.55. 95 atténuée (le nous dit de majesté = je + je + je…) : il permet alors au locuteur de parler en tant qu’individu mais aussi comme sujet occupant une fonction ou une position sociale collectivement reconnue.» 1 . Le logiciel Tropes nous permet de donner des pourcentages de ces emplois dans les textes étudiés. Les notes de Véronique Delvolvé Sur les deux mois étudiés, on a pu constater 57 implications personnelles de Véronique Delvolvé. Ce qui correspond selon le logiciel à 54% de pronoms personnels et possessifs à la première personne pour le mois de Février et de 17,2% pour le mois de Mars montrant par ce résultat qu’elle s’est moins impliquée dans ses notes. Pour le reste, c’est l’utilisation du « Nous » et du « Vous » qui se retrouvent le plus souvent. En effet, « … l’embrayeur ‘nous’ … comme un sujet collectif compact. …Cet emploi de ‘nous’ pour désigner non une somme d’individus mais un sujet collectif n’a rien d’étonnant ; comme l’explique Emile Benviste , ‘d’une manière générale, la personne verbale au pluriel exprime une personne amplifiée et diffuse’. Le nous, en effet, n’est pas une collection de je, ‘c’est un je dilaté au-delà de la personne stricte, à la fois accru et de contours vagues’. Dans le ‘nous’, la prédominance du ‘je’ est très forte, au point que, dans certaines conditions, ce pluriel peut tenir lieu du singulier. »2 . Voilà pourquoi ces derniers sont également utilisés à 5,6% pour le premier mois et 3,9% pour le second. Cependant, l’emploi du « on » est plus utilisé au mois de Mars avec 14,1% ce qui correspond au fait que l’élue s’implique moins car les sujets sont d’ordre plus général car sont liés à l’actualité pour le mois de Mars et sont beaucoup plus personnels, pour le mois de Février. Les notes de Steeve Briois L’auteur s’implique complètement dans ses propos. Les pronoms « je, me, moi, mes » restent très présents, on en compte 29 pour le premier mois ce qui correspond à un total de 14,4 % et 39 emplois pour ce qui est du mois suivant soit 18,9%. Pas de doute, l’auteur pèse ses mots et ne s’en cache pas le moins du monde. Mais du fait de partager son blog avec des collaborateurs la place des pronoms à la première personne du pluriel est très importante car 14,8% et 7,9% sont affichés par le logiciel. Cet emploi se fait souvent pour les comptes rendus municipaux, les décisions de justice que rencontrent l’auteur. On peut rajouter l’emploi du « il » et du « on » s’élevant à 11% pour le 1 2 Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Dunod, mars 1997, p.56. Dominique Maingueneau, Analyser les textes de communication, Paris, Dunot, mai 1998, p.105. 96 mois de Mars. Un style beaucoup plus impersonnel en ressort de cette utilisation et du coup moins d’implications s’en font ressentir. Là encore cela est en rapport avec les sujets abordés. Les notes de Yannick Bedin Issu du PCF, il est intéressant de noter que certaines notes n’utilisent aucun pronom de la première personne autant au singulier qu’au pluriel. Ceux sont des pronoms de la troisième personne du singulier qui sont présents. On est dans cette situation, quand « le narrateur est totalement absent de l’histoire qu’il raconte, on qualifie son récit d’hétérodiégétique. Seule la 3e personne peut alors être utilisée … » 1 . L’élu dit que cela n’est pas évident pour lui d’employer le pronom « je » à la place du « nous » qui est la marque « de fabrique » du PCF pour parler au nom de tous et non pas en son nom propre « … il est difficile pour un militant communiste de passer du nous au je ». En effet, il n’y a que 3 notes où les pronoms « je, j’, moi, mon » sont utilisés. Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire il y a plus d’emplois de pronoms à la première personne sur les deux mois que l’emploi du « nous » et de ses dérivés. Pour Février, les pronoms à la première personne correspondent à 15,2% et 11,7% pour mars. Contre 16,5% comprenant « nous et on » pour Février et 11,7% pour « on » en Mars. On voit qu’il n’est pas si évident pour l’auteur de parler au nom de tous et qu’il s’implique plus que ce qu’il ne pense. Les notes de Patrick Mottard Il est la personne la plus subjective puisqu’il comptabilise à lui seul 158 « … indices grammaticaux de la 1re personne (je, moi, …) qui marquent sa présence immédiate au sein même du discours, puisque parler à la 1re personne c’est avant tout parler de soi-même. » 2 . En effet, Tropes comptabilise 30% et 20% de pronoms à la première personne du singulier pour les mois de Février et de Mars. L’auteur doit tout de même faire attention à ne pas trop parler de lui. Toutefois, on note que l’utilisation du pronom « nous » est très présente ce qui implique plusieurs personnes mais comme on l’a vu précédemment cela peut correspondre à un « je » masqué, dans la majorité des cas il s’agit de son parti, de sa permanence, de son épouse et lui. Sur ces deux mois étudiés, Tropes a retrouvé 16,7% et 14,2% de cette utilisation. Pour le mois de Mars, un fort taux du pronom « on » est utilisé à 13,2%. Ce qui semble montrer la volonté de regrouper l’avis de tous et ainsi ne pas parler en son nom uniquement. 1 2 Jean-François Jeandillou, L’analyse textuelle, Paris, Armand Colin, mars 1997, p.165. Jean-François Jeandillou, op.cit., p.8. 97 Les notes de ces quatre blogs sont en grande majorité accompagnées de photographies, permettant d’illustrer leur propos et de rendre le blog un peu plus distrayant. Les photographies de petits formats, sont en rapport direct avec ce qui est écrit dans la note, sorte d’indice avant la lecture du texte. Paragraphe 4. Leur enjeu principal Fabienne Greffet a relevé plusieurs enjeux susceptibles de se trouver sur le blog d’un élu local, elle en cite 5 en particuliers : « Commentaires de la vie politique …, mise en valeur d’une personnalité publique, mise en valeur ou information sur une organisation ou fraction organisationnelle…, information et mobilisation sur les enjeux d’une campagne électorale, information et mobilisation sur un enjeu de société. » 1 . En effet, les quatre blogs sont proches par leur utilisation, mais éloignés par leurs contenus, ce qui est logique étant donné l’étiquette politique différente les uns des autres. On peut cependant noter, que leurs projets pour les municipales de 2008 ne sont pas mis en avant sur cet outil. Seul Steeve Briois en parle sans dévoiler de programme et tout dernièrement Patrick Mottard a annoncé qu’il ne se présenterait pas aux élections législatives pour se consacrer uniquement aux municipales. Mais analysons les réactions des internautes qui décident de s’intéresser à cet outil. 1 Fabienne Greffet, « Politis as usual ? Les blogs politiques français en 2005 », Nancy 2, 2005, p.7. 98 A. Les visiteurs et leurs commentaires En étudiant ces blogs, nous avons pu constater que le dialogue n’était pas forcément celui qu’on attendait, à savoir celui entre l’élu et le visiteur. On se trouve face à une conversation entre les citoyens eux-mêmes. « Le public n’est pas une communauté d’auditeurs volontaires qui se posent en tant que groupe devant son orateur, mais une dispersion d’auditeurs sans visage par rapport à laquelle il n’est plus question de se poser en ‘orateur’. Le discours tend à devenir une parole d’individu à individu. » 1 . On s’aperçoit en analysant deux mois de notes, que le ton varie d’un blog à un autre. Dans le cas de Véronique Delvolvé, sur un total de 586 commentaires, 19 appartiennent à l’élue en question. Pourtant, elle avoue recevoir la visite de 8000 personnes par mois en moyenne. Elle attend de ses lecteurs : « Qu’ils me lisent et qu’ils me commentent » 2 . Sur le blog de Steeve Briois, c’est 423 réponses émises dont 4 de l’auteur. Ce dernier nous a confié le chiffre de 15 000 connexions par mois, ce qui par rapport aux habitants de sa commune semble important. L’élu souhaite de ses visiteurs : « Une participation positive ou négative. Le pire c’est l’indifférence. » 3 . Yannick Bedin, ne comptabilise que 11 commentaires dont 3 de l’auteur. Il a en moyenne 670 visiteurs par mois. Son attente vis-à-vis de ses internautes : « Qu’ils réagissent plus et se livrent à des débats entre eux sur mon blog. On n’en est pas là. » 4 . Sur celui de Patrick Mottard, on passe à 200 messages dont 24 qui appartiennent au propriétaire de cet outil. Au total, c’est une moyenne de 4000 visites par mois qui se présentent sur son blog. Son souhait pour une amélioration du dialogue avec ses interlocuteurs : « Qu’ils me connaissent un peu mieux, et puis j’attends d’eux un peu d’interactivité pour me donner l’occasion d’approfondir mes centres d’intérêts, mes passions. Les choses sont mieux quand on s’enrichit mutuellement. » 5 . Face à ces résultats, nous en déduisons que les élus n’interviennent pas toujours dans l’ensemble des opinions émises. Ils laissent libre court à la conversation, en permettant aux internautes de se répondre mutuellement et ainsi laisser place au débat. 1 Dominique Maingueneau, Analyser les textes de communication, Paris, Dunot, mai 1998, p.59. Cf. annexe, Questionnaire de Véronique Delvolvé, pp.CXXV-CXXVII, question n°30. 3 Cf.annexe, Questionnaire de Steeve Briois, pp.CXXVIII-CXXXII, question n°30. 4 Cf. annexe, Questionnaire de Yannick Bedin, pp.CXXXIII-CXXXVI, question n°30. 5 Cf, annexe, Questionnaire de Patrick Mottard, pp.CXXXVII-CXL, question n°30. 2 99 Il arrive cependant, que celui-ci devienne un lieu de règlement de comptes, il est donc nécessaire aux auteurs d’intervenir et de rétablir la situation. Concernant les critiques, peu sont véritablement décelées. On peut en déduire deux hypothèses : soit les opposants au parti en question ne souhaitent pas intervenir dans ces conversations, soit et c’est ce qui nous semble le plus probable, les commentaires trop indésirables ne sont pas mis en ligne. Parmi, les quatre blogs étudiés, deux sont modérés celui du FN et celui du PS, les deux autres sont « libres » jusqu’à ce qu’une censure soit émise après la lecture des commentaires sur le blog. Les blogueurs politiques étudiés, avouent en avoir supprimés quelques uns sur les centaines répertoriés. De plus, la logique de l’utilisation du blog voudrait que chaque intervenant se tutoie. On se rend compte que le tutoiement n’est pas automatiquement employé, ou reste très rare. On en déduit que seuls certains visiteurs prennent ce droit parce qu’ils connaissaient l’auteur ou tout simplement parce que l’internaute ose le tutoiement comme cela devrait être sur tous les blogs. On parlerait plutôt d’un TU pour un VOUS comme le font les anglais avec le YOU. N’est ce pas là une manière de faire redescendre la hiérarchie ? Mais actuellement, on en est loin. Aujourd’hui, les citoyens électroniques ont du mal à changer les règles d’éducation : on ne tutoie pas une personne que l’on ne connaît pas intimement ou qui ne nous le permet pas. En revanche, le tutoiement est plus usité entre les visiteurs. 100 B. L’identité des commentateurs Pour ce qui est de ces personnes, il est intéressant de noter que les individus déposant des notes sur les blogs ne déclinent pas souvent leur identité entièrement. Nous pouvons le vérifier en prenant le cas du blog de l’élue UMP, on se rend compte que de nombreuses personnes semblent garder comme identifiant que leur prénom. Peu d’identités patronymiques sont entièrement dévoilées. Ces dernières ont des pseudonymes qui sont d’ordre basique sans volonté de faire passer un message en particulier. Sauf une d’entre elle, par « Zorro », qui correspond au vengeur masqué donnant une touche « humoristique » à l’identité de l’individu. Celles qui la donnent en revanche, ont souvent un lien hypertexte sur leur pseudonyme nous renvoyant vers leur blog ou site personnel. Dans le cas du Front National, les pseudonymes sont essentiels, sans quoi ce dernier n’aurait pas autant de notes émises. Le plus marquant, reste les termes utilisés pour s’identifier. Ils ont pour la plupart l’envie de faire passer un message particulier rien que par le terme employé comme : « le patriote, la coléreuse, une militante, futurFN62110 ». Sur le blog de Yannick Bedin, sur les 11 intervenants, un seul semble avoir un vrai pseudonyme, à savoir « eldiablo ». Pour les autres, il semble s’agir de prénoms quelconques. Un seul utilise l’adresse de son site pour s’identifier. Dans celui de Patrick Mottard, beaucoup d’individus utilisent un prénom, certains mettent leur identité au complet, d’autres enfin se servent de pseudonymes sans volonté de faire passer un message particulier. Il semble donc difficile de parler de politique en se montrant sous son vrai visage, voilà pourquoi certaines personnes osent donner leur point de vue grâce à l’anonymat que met en place le blog. Seules les personnes allant sur le blog du Front National ne se dévoilent pas beaucoup. Leurs pensées se transmettent à travers le pseudonyme utilisé. A se demander si ces dernières acquiesceraient les idées émises si elles devaient donner leur identité. 101 C. Le ton employé pour s’exprimer La politesse se montre sur certains blogs « Cher », « Cordialement », « Bien à vous » sont souvent employés par les internautes. Le vouvoiement reste une marque de politesse et pas forcément une marque de hiérarchie. Chacun à sa méthode pour faire interagir les visiteurs. Cela peut être induit dans les propos émis ou ouvertement posés. Quelle que soit la technique employée les visiteurs interviendront d’eux-mêmes sur les notes qui les interpellent. Suite à cette étude, on peut constater que les blogueurs politiques mettent véritablement leur ville en avant, et parlent de certains événements nationaux importants à commenter. Ils sont leur propre journaliste, ils affichent leur point de vue sans l’intermédiaire de qui que ce soit. Sans avoir de contrainte pour employer tel terme plutôt qu’un autre. Ils osent être plus transparents que certains élus et le prouvent par leurs écrits. Comme le souligne l’ouvrage « Le pouvoir de l’internaute » de François-Xavier Hussherr, le blog « …relaie une prise de conscience de l’insuffisance de la communication conventionnelle pour capter des électeurs ; il démontre la nécessité pour l’homme politique de parler au vivier de jeunes électeurs utilisant les nouveaux médias, mais aussi la capacité d’adaptation à une demande croissante de transparence de la part de ses électeurs. » 1 . Et, c’est souvent pour cela que les blogueurs politiques décident de créer un blog pour jouer « carte sur table » avec la vérité et se montrer le plus honnête possible dans leurs convictions. 1 François-Xavier Hussherr, Le pouvoir des Internautes, Boulogne, Timée-Editions, mai 2006, p.211. 102 D. Les internautes fidèles aux blogs Chaque blog étudié devient un lieu de débat quasi quotidien, où les mêmes commentateurs sont recensés sur presque toutes les notes. Cyril Fiévet va même jusqu’à les comparer à des « fans » qui « réagissent aux humeurs ou opinions exprimées, les comparent aux billets précédemment publiés, ou y ajoutent des commentaires et parfois de nouvelles informations. » 1 . On constate à travers notre étude, à l’exception du blog de Yannick Bedin, que ces personnes se comptent au nombre de trois ou quatre et qu’elles se trouvent constamment au coeur de la conversation. Elles sont souvent les premières à réagir sur les sujets et suivent de très près ce qui peut être émis par les autres visiteurs. Pour ce qui est du reste des commentateurs, nous avons pu constater que certains intervenaient sur des sujets plutôt que d’autres et sont donc de ce fait moins présents. E. Conclusion de l’analyse Véronique Dévolvé attendait de son blog 2 de « pouvoir s’exprimer sur son mandat et sur ses convictions ». On constate rapidement qu’il lui sert plus pour parler de son parti que d’un compte rendu de ses propres fonctions. A ce jour, elle attend des internautes plus « de lecture et de commentaires ». Concrètement, son blog va dans cette voie là et ne devrait pas se modifier car l’interaction s’est déjà bien installée sur son outil par la rigueur qu’elle s’impose pour le tenir en vie. Dans le cas de Steeve Briois, le blog 3 a été pour lui un moyen de modifier son site considéré comme trop « figé, sans animation et aucune interactivité ». Aujourd’hui, il souhaite à tout prix que le dialogue se poursuive et ne veut surtout pas se trouver face à une « indifférence » de la part de son audience : « Les réactions positives ou négatives sont les bienvenues ». Toutefois après l’analyse de ce dernier, nous avons pu constater qu’aucune réaction dans le sens opposé à celle de l’auteur n’était présente. 1 Cyril Fiévet, Emily Turrettini, Blog Story. Onde de choc, Paris, Eyrolles, octobre 2004, p.167. Cf. annexe, Questionnaire de Véronique Dévolvé, pp.CXXV-CXXVII, questions n°2 et n°30. 3 Cf. annexe, Questionnaire de Steeve Briois, pp.CXXVIII-CXXXII, questions n°2 et n°30. 2 103 Yannick Bedin quant à lui, a voulu se doter d’une « expression plus personnelle sur les questions municipales ou globales sans engager son propre parti » 1 . En effet, ses opinions sont bien présentes même s’il avoue que cela n’est pas évident pour lui de parler en son nom. C’est aussi pour donner vie à un débat que cet outil a été créé. Mais, il n’y a pas assez de notes pour que son blog puisse faire naître l’interactivité recherchée. Pour que cela se passe, il doit être à l’initiative de ce débat par des écrits plus nombreux, ce qui suscitera sûrement l’avis des lecteurs. Patrick Mottard avoue que c’est sa position politique qui l’a amené à côtoyer le blog 2 pour se faire connaître auprès de la population niçoise de manière plus intime, donc différente des médias traditionnels utilisant un ton plus impersonnel. Afin d’obtenir des visiteurs un nouvel échange : « les choses sont mieux quand on s’enrichit mutuellement », et pour prouver que l’on peut faire de la politique « sans être un monstre froid ». Cet outil lui permet d’être le temps d’un écrit, une sorte de journaliste sur sa propre ville comme il l’a toujours souhaité l’être depuis la création de son blog. Nous pouvons dire à ce stade de notre analyse, que les quatre élus politiques avaient les mêmes intentions au départ, c’est-à-dire une volonté d’expression personnalisée, un rapport plus intime avec leurs lecteurs. Ce qui a permis de démarrer un nouveau dialogue, inconnu, sur les autres supports de médiation qu’ils ont à leur disposition. A ce jour, tous n’ont pas tenu leur engagement fixé ou ne se sont pas donnés les moyens de créer ce dialogue inespéré pour de nombreux citoyens. De plus, l’interactivité proclamée par les blogs n’est pas si présente que cela, certes certaines notes suscitent plus de commentaires que d’autres, mais on ne peut pas considérer ces échanges comme une véritable conversation. Celle-ci reste discrète et écourtée dans le temps. Les auteurs de ces outils en profitent donc pour parler d’eux et pas forcément de leurs pratiques politiques ce qui peut être regrettable pour certaines personnes. Le blog reste donc un outil pour mieux connaître les gens mais pas véritablement pour amener à un débat sur du long terme. Cette agora reste limitée dans les propos émis. 1 2 Cf.annexe, Questionnaire de Yannick Bedin, pp.CXXXIII-CXXXVI, questions n°2 et n°30. Cf.annexe, Questionnaire de Patrick Mottard, pp.CXXXVII-CXL, questions n°2 et n°30. 104 Section 3. Ce qui se passe autour du blog Il faut savoir que de nombreux événements existent sur le thème du blog ; des soirées comme : « Paris blogue-t-il ? », « Politique 2.0 », ou encore la création de formations pour apprendre à créer un blog. Et tout dernièrement, un nouveau magazine spécialisé dans les nouvelles technologies a créé un dossier spécial blog et politique pour le lancement de son premier numéro. Ce qui montre bien, que le blog a véritablement un impact dans notre société. Paragraphe 1. Un retour à l’écrit papier : le cas du magazine Netizen Nous l’avons dit 1 , le blog est en train de devenir un média à part entière, on allume son ordinateur comme on allumerait son poste de télévision, et on va sur les sites ou blogs de notre choix, comme on changerait de chaînes. Le zapping est donc possible sur le Net. Toutefois, on remarque que cette montée progressive des blogs n’enlève pas la puissance des autres médias comme la télévision, la radio ou la presse, qui ont été les premiers à mettre en avant cet outil. Aujourd’hui, la presse continue d’en parler par la toute dernière création en date du 28 janvier 2006, le magazine : « Netizen » 2 . On pourrait se demander, pourquoi passer de l’écran d’ordinateur au support papier ? Il est vrai qu’on craignait que l’écrit ne disparaisse face à Internet, mais ce ne fût pas le cas. De nos jours, l’écrit papier fait parti de notre quotidien, de notre culture littéraire française, on a besoin d’avoir « quelque chose entre les mains ». On le sait, lire à l’écran fatigue la vue, c’est pourquoi, on peut affirmer que le support papier n’a pas fini de faire parler de lui. Certes, le magazine ne pourra relater que des faits passés, mais cependant, il nous donne d’autres voies à explorer pour se cultiver, se perfectionner sur un thème précis. 1 2 Cf. Supra, p.25. Netizen, http://www.pointblog.com/netizen/ 105 Toutefois, lire un texte demande de l’attention, de la disponibilité pour le parcourir dans son intégralité ou bien « … autorise à l’inverse une lecture très rapide, beaucoup plus rapide que sur l’écran, puisqu’il se feuillète très facilement et conserve les notes manuscrites. » 1 . Le premier numéro de Netizen dédié au monde politique n’a pas fait tant d’émules que cela du côté des blogueurs politiques, puisqu’ils ne sont que 36% à l’avoir lu dont 23% à l’avoir trouvé intéressant 2 . Paragraphe 2. Les soirées dédiées aux blogs dont les invités sont des élus blogueurs Quelques soirées autour du blog ont été mises en place par la blogosphère elle-même, pour rencontrer des blogueurs des quatre coins de la France, pour se connaître en dehors de notre écran, se rencontrer physiquement et non plus virtuellement. On peut citer, la soirée du 30 janvier 2006 : Politique 2.0, dont le thème était « Les blogs et la politique font-ils bon ménage ? ». Des blogueurs politiques y étaient conviés 3 , on peut citer Nadine Jeanne, Claude Goasguen ou encore Julien Dray. D’autres professionnels du blog étaient là comme Loïc Le Meur un des plus grand blogueur et podcasteur, à l’initiative des podcasts de Nicolas Sarkozy et Dominique Strauss Kahn. Ou encore David Abiker journaliste à Radio France et France 5, Christophe Ginisty Directeur de Pointblog 4 . Elles sont organisées pour échanger sur leurs expériences, donner envie aux autres de s’engager dans cette aventure, suite aux conseils de ces blogueurs politiques « affirmés ». Dans ces réunions, les partis politiques sont mélangés pour parler de pratique commune. Ils ne sont pas là pour se faire la « guerre », ce qui est rare de nos jours. Une évolution des mentalités seraient-elles en train de se révéler ? C’est un autre moyen pour engager le débat, cette fois-ci en se montrant physiquement et en sortant de son anonymat. Mais, les élus qui y participent sont peu nombreux et souvent les mêmes s’y manifestent. 1 Jean-Yves Capul et.al., L’internet, Paris, La Documentation Française, Cahiers Français N°295, mars-avril 2000, Eric Maigret, « Une nouvelle société de l’information. L’internet : un nouveau média ? », p.14. 2 Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°13. 3 http://www.politique20.info/intervenants.php 4 http://www.pointblog.com/ 106 Parmi nos interviewés 1 , seuls 23% ont annoncé participer à ces soirées, dont Véronique Devolvé et Yannick Bedin. La dernière manifestation de ce type date du 18 mai 2006 au Sénat : « Blog & Breakfast » où étaient présents Dominique Wolton, célèbre écrivain ; Alain Lambert, ancien ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire ou encore Mathieu Maire du Poset, webmaster de Jack Lang 2 . Paragraphe 3. Les congrès politiques font appel aux blogueurs Qui l’aurait cru, aujourd’hui ce sont les partis politiques qui contactent leurs adhérents blogueurs pour venir participer à leur congrès, afin de retranscrire ce qui se passe en temps « réel » et relayer l’information au plus grand nombre de personnes. L’UDF 3 avec son congrès à Lyon le 28 et 29 janvier 2006 en est un exemple. Ces partis ont pris conscience que la blogosphère et en particulier celle se spécialisant dans le domaine de la politique pouvait avoir un impact non négligeable sur les citoyens. Nicolas Sarkozy a su l’utiliser en faisant appel à des blogueurs pour présenter ses vœux à la presse 4 . Ces derniers sont fiers d’être invités à ces manifestations même s’ils n’ont pas la même « étiquette » politique que le parti en question. 1 Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp. CXLI-CLXII, question n°12. http://www.blogandbreakfast.com/ 3 Cf. annexe, Mail de l’UDF, p.CLXIV. 4 http://www.pointblog.com/past/2006/01/13/des_blogueurs_parmi_les_invites_aux_voeux_de_sarkozy.htm 2 107 Paragraphe 4. Les formations pour les élus A ce jour, des formations payantes pour les cadres et les élus de parti politique sont organisées par des professionnels. A notre connaissance, c’est un élu 1 de l’UMP qui a lancé cette initiative pour les adhérents de son parti. Conçue en deux étapes, la première réunit un maximum de représentants pour vanter les mérites du blog et démontrer son utilité, suite à laquelle, une fiche d’inscription 2 est disponible afin d’accéder à la deuxième étape qui est : l’initiation au blog. Paragraphe 5. Un militantisme de plus en plus impliqué Les blogs militants politiques sont de plus en plus nombreux à émerger. Ils sont les garants de la diffusion des messages émanant des leaders politiques de leur ville, département ou région. On peut citer en exemple le cas du blog MJS des Alpes-Maritimes 3 . Aujourd’hui, ce militantisme politique se fait de plus en plus présent dans la blogosphère et il est fort probable que celui-ci aura un impact non négligeable sur les prochaines élections présidentielles et municipales. Mais, cela ne s’arrête pas qu’aux élections, revenons quelques mois en arrière pour constater leur implication dans la mobilisation « pour ou contre le Contrat Première Embauche ». Le mouvement initialement issu de la rue s’est amplifié au fil des mois pour se retrouver sur les blogs. Parti de quelques centaines de notes sur ce sujet au début de Février 2006, il en a atteint un peu plus de 46 000 fin Mai 2006 4 . Par le biais d’Internet, les personnes peuvent être au courant de l’actualité du parti sans avoir à se déplacer. Le blog va se faire l’écho de ce qui se passe durant ces événements. D’autant plus, que la parole est reprise certaines fois par de petits films amateurs que l’on peut visualiser depuis son écran d’ordinateur et ainsi se faire sa propre idée de ce qui a pu être dit. 1 http://www.fm-formation.typepad.com/ Cf. annexe Fiche d’inscription à une formation sur les blogs, p.CLXIII. 3 http://www.mjs06.org/ 4 http://technorati.com/chart/cpe?chartdays=90&language=fr 2 108 La politique est donc réactivée par cette demande accrue de la part du citoyen pour prendre part au débat. Aujourd’hui, il existe même une plate-forme pour créer son « blog militant » 1 disponible pour les sympathisants de la droite française. Section 4. Les avantages d’avoir recours à Internet et en particulier au blog La plupart des élus ont décidé d’opter pour une formule gratuite pour leur blog 2 . « … la diminution des coûts de diffusion de l’information ; la diversification des sources d’information ; un accès direct à l’information primaire, sans intervention de médiateurs susceptibles d’en transformer le sens ... »3 vont faciliter les élus à se lancer dans la création de blog pour offrir une amorce de dialogue sans limite avec la population qui touche surtout, une jeune catégorie d’électeurs ou de futurs électeurs. Dans une des dernières émissions télévisées datant du 27 avril 2006, « A vous de juger » dont le thème de l’émission était « 2007 : les vrais enjeux », les politiques étaient unanimes pour dire il fallait être plus proche du peuple et que ce dernier devait intervenir dans les projets futurs. En attendant les élections présidentielles, pourquoi ne pas créer pour certains, pour d’autres continuer cet espace de communication afin de débattre, d’échanger, d’arriver à cette écoute de l’autre par le blog. D’autant plus que ces élus blogueurs avouent être soutenus en majorité par les visiteurs qui viennent y déposer des commentaires. De nombreux messages d’encouragements, de remerciements sont mis en ligne. Les élus semblent être sensibles à ces remarques et y trouvent une oreille attentive. 1 http://www.blogmilitant.com/ Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°20. 3 Jean-Yves Capul et.al., L’Internet, Paris, La Documentation Française, Cahiers Français N°295, mars-avril 2000, Thierry Vedel, « Une nouvelle société de l’information. L’internet et la démocratie », p.25. 2 109 Paragraphe 1. La place des différents partis sur Internet et sur les blogs Internet aujourd’hui, est devenu un outil utile et précieux, on ne compte plus les sites des partis politiques qui naissent dès qu’une nouvelle section est ouverte, ni même l’envoi des mails aux adhérents. Ces instruments ont un impact certain sur les adhésions à leur mouvement politique par le biais du Net comme on vient tout juste de le voir. Le parti politique qui a compris l’enjeu de l’utilisation du blog est l’UMP. D’après les dernières statistiques, il tient la tête des recensés dans la blogosphère et depuis le 12 juin 2006 a créé son propre blog 1 . Alors que, le PS très proche derrière l’a depuis le mois de Janvier 2006 2 . Se trouve ensuite l’UDF. A ce jour, le PCF ou bien encore le FN, ne sont pas de grands utilisateurs de cet outil. Cette question de disparité est due au fait que certains élus 3 pensent que le dialogue n’est pas vraiment engagé car d’autres craignent le « véritable » contact ce qui pourrait leur poser problème et que trop de censures seraient appliquées. La notion de problème de génération a également été émise. Pour le PCF, avoir un blog personnel ne convient pas à l’image que veut se donner ce parti. Pour d’autre, une trop grande transparence pourrait leur faire défaut. Il est donc fort à parier que le monopôle des représentants politiques au fil des mois restent dans les mains des deux premiers déjà bien présents sur le Net, c’est-à-dire l’UMP et le PS. La bataille se fera donc entre ces deux partis pour les prochaines élections, combat qui a déjà débuté depuis quelques mois, notamment au travers de leurs militants respectifs. Mais également, par l’utilisation du bombardement Google qui « … est une technique de référencement visant à influencer le classement d'une page dans les résultats du moteur de recherche Google. » 4 . Très utilisé à des fins politiques pour présentés dans les premières pages de liens le nom de son parti politique. Il est donc fort à parier que ces googles bombes vont se développer au court de cette année jusqu’aux élections afin d’attirer au maximum le regard des internautes vers les liens de ces partis. Ce qui peut les amener à faire de nouveaux adhérents. A ce jour, cette méthode n’est pas illégale sauf si cela porte atteinte à la personne. 1 Blog de l’UMP, http://blog-ump.typepad.fr/ Blog du PS, http://sntic.parti-socialiste.fr/ 3 Cf. annexe, Enquête auprès de blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°38. 4 Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Google_bombing 2 110 On le voit bien, Internet devient un excellent moyen pour attirer de nouvelles adhésions aux partis politiques. Il semble toutefois judicieux de souligner l’initiative dans l’évolution du site Internet qui émane de Ségolène Royal et de son site « Envie d’avenir » dit « forum participatif » 1 qui met en place un ensemble de débats sur différents sujets tels que « la France et l’immigration, Economie et travail : débloquer la situation ». La méthode est simple et semble bien fonctionner. Un sujet de fond est mis en ligne, des commentaires d’internautes sont postés. Après deux mois et trois mois de réponses, une synthèse de la totalité des interventions est proposée et le débat est de nouveau mis en ligne pour améliorer certaines propositions. Ainsi, par cette méthode le citoyen se sent au centre des questions qui le préoccupent et pense avoir une place dans la société beaucoup plus importante que celle par le passé qui ne s’exprimait que par un vote à bulletin secret. On est confronté à quelque chose de « révolutionnaire » d’un point de vue des mentalités à savoir qu’on se trouve face à une première « expertise citoyenne ». Le citoyen a autant de savoir qu’une autre personne diplomatiquement plus élevée et donne son opinion, ses propositions d’évolution. On est aujourd’hui face à une émergence du citoyen beaucoup plus importante que celle du politique. Paragraphe 2. Les blogs des politiciens pour les élections présidentielles de 2007 Si on reprend les blogs des candidats américains lors de la dernière élection présidentielle de 2004, concrètement ceux-ci ont servi en dévoilant certaines informations qui ne se trouvaient nulle part ailleurs. Les démocrates étaient plus présents sur cet outil, mais pour autant cela ne leur a pas permis d’accéder à la présidence. Alors bloguer est-il nécessaire pour se faire élire ? Il semble bien que non dans ce cas précis. Concernant, l’étude menée auprès des élus locaux 2 , la majorité des interrogés considèrent que le blog sera un outil à ne pas négliger pour les élections. C’est un instrument supplémentaire, qui est à ce jour le plus utilisé par des conseillers municipaux, des députés. Il est fort à parier, que ce sont eux qui seront les vecteurs de messages pour soutenir leur parti politique respectif. 1 2 Ségolène Royal, http://www.desirsdavenir.org/ Cf. annexe, Enquête auprès de blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°39. 111 Paragraphe 3. Les blogs des politiciens pour les élections municipales de 2008 Alors que cette étude est en train de prendre fin, on peut à ce jour dire que les blogs des élus locaux sont plus présents sur la toile du Net que ceux des nationaux. Le blog fait aujourd’hui parti de notre quotidien, même si cela génère encore un certain « snobisme » de dire qu’on lit le blog d’une personne politique. Toutefois, le blog peut devenir un inconvénient si ce dernier n’est pas alimenté régulièrement. Les visiteurs pourront y voir un côté négatif à cet abandon volontaire. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, une petite majorité des élus interrogés 1 pensent que cet instrument aura véritablement de l’importance pour les prochaines élections municipales. Pour le reste, c’est plus un outil supplémentaire, même s’ils ont bien compris que le but était de se faire connaître autrement que par les médias traditionnels employés lors d’une campagne électorale. C’est surtout un outil pour essayer de toucher une cible qui d’habitude ne s’intéresse guère aux discours politiques. Les jeunes sont les premiers visés. Attendons de voir si pour les prochaines élections présidentielles et municipales, le taux d’absentéisme de cette catégorie d’individus sera aussi présente que les années précédentes. 1 Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°40. 112 CHAPITRE II. BILAN Section 1. La différence avec les blogs des élus nationaux Ils ne s’en cachent pas, les élus politiques nationaux comme Dominique Strauss Kahn, Jack Lang font aujourd’hui appel au blog pour communiquer et proposer de débattre sur différents sujets. Ce nouveau moyen de médiation est différent de ceux des élus locaux par rapport à leurs écrits. D’une part ils ne sont pas postés par les auteurs eux-mêmes, mais par leurs assistants. D’autre part, leur notoriété fait que ces personnes sont lues par mois par des centaines de milliers d’internautes et non par des centaines ou milliers de personnes comme l’est un élu local. « Pourquoi s’arrêteraient-ils, nos hommes politiques médiatiques, dès l’instant que – ils le constatent tous les jours – « ça marche » : la petite phrase bien ficelée est bel et bien reprise en chœur par les médias… » 1 . Les thématiques exposées sont très nombreuses et très orientées sur la société en générale. Il est fort probable que cela change, car au moment où nous rédigeons ce mémoire, la campagne présidentielle de 2007 vient de commencer. Cependant, les élus interrogés 2 reconnaissent ne pas savoir faire de différences importantes entre le blog d’un élu local et celui d’un élu national. Pour eux, les thèmes exposés restent très généraux et très nationaux. Le côté plus professionnel est souligné, du fait que se trouve derrière l’élu une équipe qui gère et alimente tous les jours cet instrument. 1 2 Roland Cayrol, Médias et Démocratie : la dérive, Mayenne, Presses de Sciences Po, janvier 1997, p.45. Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°36. 113 Section 2. La différence avec les blogs des élus américains La première pourrait se donner en terme quantitatif, aujourd’hui on constate qu’on ne fait pas le poids face à la population américaine par rapport au nombre de connexions beaucoup plus nombreuses. En effet, les « …dix blogs les plus populaires ont collecté 28 millions de visites de lecteurs… » 1 . On est loin des « 7 millions de visiteurs uniques par mois» 2 pour un seul blog politique comme celui de « DailyKos » qui est le blog du parti libéral. Surtout, que ces blogs ont continué d’attirer l’attention des visiteurs six mois après les élections présidentielles de 2004. « Les weblogs politiques les plus populaires ont des audiences supérieures à beaucoup de titres de presse, ... Les audiences des weblogs ne cessent de croître, à un rythme très soutenu. Les weblogs ont révélé des affaires reprises par la suite dans les médias traditionnels et se paient parfois le luxe de les corriger. » 3 . Mais, nous n’avons pas à rougir de cette utilisation sur notre territoire, qui se situe essentiellement chez nos élus locaux. 1 David Kline et.al., Blog ! How the newest media revolution is changing politics, business, and culture, New-York, CDS Books, 2005, p.5 “...the ten most popular political blogs collectively had 28 million visits from readers, ...” 2 David Kline et.al., op.cit., p. 5 “... the liberal blog DailyKos, drex 7 million” 3 Loïc Le Meur, http://www.loiclemeur.com/france/2004/11/linfluence_des_.html 114 Section 3. Perspectives à venir « Enfin, les réseaux dans lesquels s’insèrent les blogs se transforment et s’étendent sensiblement, certains devenant progressivement populaires et rassembleurs. » 1 . A ce jour, il existe peu de représentants politiques nationaux à avoir mis leur contribution au blog, si ce n’est, pour le PS : Dominique Strauss-Kahn 2 , Jack Lang 3 ou encore celui de Laurent Fabius 4 . Va-t-il y avoir une évolution de cette situation ? Sûrement, car le blog devient un outil supplémentaire face à la télévision, aux tracts, à la radio. Vision plus moderne, plus ouverte sur le monde, le blog offre la possibilité de se dévoiler à sa manière, d’émettre ses opinions, ses points forts et surtout de reconnaître ses propres erreurs. Mais là, où tout peut faire la différence, ce sont les blogs des personnes influentes dans le monde de la blogosphère, car ils vont être lus jusqu’au jour des élections. Les internautes n’arrivant pas à se faire leur propre opinion iront prendre conseil chez eux, iront lire l’argumentation qui va être proposée pour ne pas se tromper au moment de leur choix définitif. Voilà, pourquoi il serait intéressant d’étudier ces blogs qui risquent pour certains de manipuler l’opinion publique sous l’effet d’un éventuel « contrat secret » entre les blogueurs influents et certains partis politiques. Un exemple de réussite de l’utilisation du blog, est celui de Thierry Solere, qui s’est vu attribuer le poste de « Conseiller Exécutif de l’équipe nationale de l’UMP » 5 . Le blog complète les autres médias, dont les plus utilisés sont d’après nos interviewés 6 essentiellement : la presse, les tracts, la présence sur le terrain et Internet à 49%. Le blog devrait amener à donner le vrai visage de son propriétaire et par conséquent de l’élu. Il va engager un dialogue que l’on ne pensait peut-être pas voir apparaître, c’est-à-dire celui entre les citoyens eux-mêmes, puisque comme nous l’avons constaté les échanges entre les élus et les internautes sont peu nombreux. Le blog crée de nouveaux rapports à l’autre et ces échanges passent par l’organisation de manifestations autour de cet outil. 1 Fabienne Greffet, « Politics as usual ? Les blogs politiques français en 2005 », Nancy 2, 2005, p.6. Dominique Strauss-Kahn, http://www.blogdsk.net/ 3 Jack Lang, http://www.jacklang.net/le_blog/index.html 4 Laurent Fabius, http://www.laurent-fabius.net/ 5 Thierry Solere, http://solere.blogs.com/boulogne/2006/02/nicolas_sarkozy.html 6 Cf. annexe Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°5. 2 115 Aujourd’hui, la plus grande part des blogs politiques est tenue par des élus de l’UMP et du PS. Il serait donc intéressant de voir si dans une échéance de moins d’un an pour les présidentielles et de deux ans pour les municipales, d’autres partis politiques se trouveront en compétition sur Internet. Paragraphe 1. Un outil utile pour les municipales et les présidentielles En regardant les dernières élections présidentielles américaines de novembre 2004, les deux candidats G. Bush et J. Kerry avaient créés leur propre blog. « Reconnaissant l’importance des blogs, plusieurs candidats et partis politiques ont crées des weblogs pour les élections présidentielles américaines de 2004. » 1 . Les sondages effectués une fois les élections passées montrent que ces derniers ont eu un impact important pour faire pencher la balance vers Bush ou Kerry selon les mois de campagne. Toutefois, les blogs de ce dernier pourtant plus actifs et plus dynamiques auraient pu nous faire penser que le candidat démocrate allait gagner ces élections. Or c’est l’inverse qui s’est produit. Aujourd’hui, il existe pour G. Bush un blog 2 de soutien qui reste très actif. Mais des blogueurs anti-Bush s’en sont servis pour le discréditer aux yeux de son électorat en dévoilant son passé militaire. D’après une étude publiée par Pulse et HP, le blog a été très largement utilisé pour faire passer des messages lors des élections de 2004 entre Bush et Kerry. « Pour cette analyse, il ressort que la blogosphère républicaine était plus dynamique que la démocrate. Plus dynamique à se relier en interne (liens entre blogs par blogroll ou notes interposées) et à se relier aux médias en ligne. … Au niveau du classement sur les moteurs de recherche, les blogs républicains ont obtenu plus de visibilité. » 3 . John Kerry ne s’est pas caché d’utiliser le Web pour mieux se faire connaître auprès de l’électorat. Certes Bush Jr. a remporté ces élections mais ne les a pas eu facilement. 1 The Political Blogosphere and the 2004 U.S. Election : DevidedThey Blog”, Lada Ademic, Natalie Glance, 4 mars 2005, p.1, Traduction effectuée par mes soins, “Recognizing the importance of blogs, several candidats and political parties set up weblogs during the 2004 U.S. Presidential campaign.” 2 http://www.blogsforbush.com/about.shtml 3 http://www.shoob.com/fr/blog/archives/2005/05/dynamique_de_co.html 116 Il serait intéressant d’étudier cette mobilisation à quelques mois de nos élections pour voir si celle d’Internet sera suffisante pour se faire entendre jusqu’aux urnes. « Le blog met l'homme politique à un clic, c'est-à-dire à une seconde, de l'électeur. » 1 . Encore faut-il que l’électeur soit derrière son ordinateur. Or nous sommes dans une « edemocratie » utopique car cela ne s’adresse qu’à des privilégiés. Cela reste un début, car si on rappelle la définition de Jürgen Habermas sur l’espace public, ce dernier était au départ utilisé par une petite communauté de personnes qui s’étendra à l’ensemble des habitants d’une ville, d’un pays. Comme tout outil de communication, il lui faut du temps pour se faire connaître. Aujourd’hui, il est fort à parier que les électeurs de demain feront appel en plus des autres outils de médiatisation : au blog, car ils seront nés avec Internet et auront appris à le manipuler et à ne pas être manipulés à leur tour. Paragraphe 2. Une contrainte évidente : le manque de temps Tout blogueur admettra que le blog nécessite un investissement personnel et temporel important. Cette difficulté n’est rien à côté du bénéfice que le blog offre à un politique qui souhaite connaître et apprécier les gens. Le temps d’écrire une note, de la mettre en ligne n’est pas plus long que la rédaction d’une lettre manuscrite, mais étant responsable de leurs écrits et de ceux des visiteurs, c’est de leur devoir d’aller régulièrement surveiller leur blog. Car, on pourrait les attaquer pour diffamations même si cela ne vient pas d’eux. D’après notre enquête, les blogs modérés correspondent à 44% d’entre eux 2 . De plus, les auteurs se doivent d’aller sur leur blog régulièrement pour lui donner vie en validant les messages émis dans la journée. Si cela n’était pas fait, un frein à l’évolution de cet outil se ferait ressentir. 1 2 Interview, Loïc Le Meur, Le Figaro, http://umpboulogne.blogs.com/92/2005/08/blog_et_politiq.html, 12 août 2005. Cf. annexe, Enquête auprès des blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°17. 117 Paragraphe 3. Des règles à respecter Côté juridique, on ne sait pas vraiment quelles règles appliquer au blog lors d’une campagne présidentielle politique, puisque 2007 sera la première année où ces outils seront utilisés. Il est évident que le CNIL, le forum des droits d’Internet mettront un code de bonne conduite pour ces campagnes électorales qui vont pour la première fois avoir une importance accrue au niveau d’Internet 1 . Il semble important de rappeler qu’en 2002, lors des élections les sites Internet ont été fortement utilisés comme « outil de propagande » 2 . Cependant, de nombreuses lois s’appliquent à Internet. L’article L 52-1 alinéa 1er du code électoral dispose que « Pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d’une élection et jusqu’à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l’utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite. » 3 . Il serait intéressant de voir comment les blogueurs politiques respecteront ces règles qui s’imposent à Internet et par conséquent aux blogs dont cet outil découle. Ces derniers devront être étroitement surveillés afin de ne pas donner d’avantages face à ceux qui ne les utilisent pas. Un comportement illicite pourra se ressentir tout simplement, par une mise à jour « inhabituelle et injustifiée rendant compte de manière répétitive et abusive des activités d’un candidat » 4 ou encore « solliciter l’indexation » 5 de son blog pendant les périodes électorales sera puni. Ces règles sont à prendre en compte, et elles devront scrupuleusement être appliquées pour ne pas se retrouver attaquer par les partis politiques de l’opposition. 1 http://blog.netpolitique.net/index.php/2006/04/13/298-blogs-politiques-et-hypotheques-juridiques Le forum des droits de l’Internet, www.foruminternet.org 3 http://www.affaires-publiques.com/textof/codelect/codelectoral.htm 4 Cf. Annexe, Sébastien Canevet, Fiche n°2 : Les activités en ligne des collectivités locales, p.CLXVI. 5 Cf. Annexe, Sébastien Canevet, Fiche n°1 : La publicité électorale, p.CLXV. 2 118 CHAPITRE III. LA « E-DÉMOCRATIE » UTOPIQUE OU NON ? Prenons, la définition de la démocratie que Jürgen Habermas donne dans une société contemporaine marquée par les nouvelles technologies, « On entendra par démocratie les formes institutionnelles garanties d’une communication universelle et publique qui est consacrée à la question pratique de savoir comment les hommes peuvent et veulent vivre ensemble dans le cadre des conditions objectives déterminées par le pouvoir immensément accru dont ils disposent sur les choses. » 1 . Aujourd’hui, la « e-democratie » veut changer ce pouvoir, et le modeler à un dialogue. Paul Virilio, dans son ouvrage « Cybermonde : la politique du monde », parle des difficultés qu’une démocratie électronique peut amener. « La démocratie est solidaire, elle n’est pas solitaire et l’homme a besoin de réfléchir avant d’agir. » 2 . Pour qu’elle fonctionne, il faut que le peuple soit derrière elle, sans quoi c’est une guerre civile qui peut-être amorcée. Mais par la « e-democratie » et par l’emploi des outils dont elle dispose, notamment le blog, « … la communication politique locale ne sera plus rigide, descendante et hiérarchique comme elle le fut toujours pensée auparavant. Le simple habitant de la cité pourra désormais faire part de ses remarques, de ses suggestions aux gouvernants locaux. » 3 . Comme le souligne, Tétu et Renzetti, « ‘Le réseau est le support d’une utopie démocratique, il laisse l’idée d’un usage limité des réseaux qui assoit la suprématie de certains et reproduit une hiérarchie, celle de l’inégalité des territoires : l’espace de communication créé par l’Internet est toujours un espace différencié’. » 4 . Une égalité des chances pour tous n’est pas possible dans une démocratie mais elle l’est certainement plus que dans une dictature. Le problème, c’est qu’il y a toujours des disparités fortes entre les individus et cela ne permet donc pas de dire que la démocratie est parfaite. Ne critiquons pas de trop, car aujourd’hui, une partie de ces représentants tendent la main à ceux qui veulent bien se lancer dans cette aventure de la « démocratie électronique ». 1 Félix Weygand, « La fin du Politique : une critique de la Cyberdémocratie », Canada, 16 septembre 2004. Serge Braconi, « Enjeux sociologiques de la démocratie participative de proximité : étude des médiations électroniques entre élus locaux et administrés », Nice, 2002, p.25. 3 Serge Braconi, op.cit., pp.31-32. 4 Igor Babou, Etudes de Linguistiques Appliquée N°114, « Des discours d’accompagnement aux langages : les nouveaux médias », Paris, Didier Erudition, 1998, pp.407-420. 2 119 Section 1. La hiérarchie disparaît par l’utilisation du blog On l’a vu 1 , l’émetteur peut devenir le récepteur de l’information par le biais des commentaires postés sur son blog. Les rôles s’échangent même si l’acteur principal reste toujours maître de son outil. Par le fait de discuter avec l’élu, les hiérarchies s’estompent au fil des lectures et s’installe un rapport plus intime voire même « d’amitié » entre les protagonistes, ce qui avant aurait été impensable. « L’Internet se veut résolument le lieu de l’affranchissement des pyramides hiérarchiques. » 2 . En partageant ses doutes, ses craintes, ses passions, ses projets politiques, l’élu devient un homme ordinaire, pas si différent de nous. Ce dialogue horizontal impose une diminution de la hiérarchie. On est libre de parler, de s’exprimer, de râler. On est fier de lui adresser la parole même si on n’approuve pas ses opinions. « Pour le citoyen qui a la possibilité de se servir d’un réseau, donc d’une forme de communication horizontale, …, il n’y a pas de positions de suprématie, d’agendas préétablis, de temps de parole imposés. Une fois que les modalités d’accès sont effectivement reconnues, tous les citoyens se trouvent sensiblement à égalité ; … » 3 . Par ce support de communication, on laisse chez soi son âge, son sexe, sa profession, tout ce qui pourrait amener à une différence. « En rendant possible le contact entre chacun, avec ou sans anonymat, l’internet viendrait signer la fin des hiérarchies sociales, accroître le développement d’une intelligence collective ou annoncer la libération d’une culture de masse symbolisée par la télévision, qui aurait jusque-là noyé les individus dans la passivité. » 4 . Quoiqu’il en soit, on devient tous égaux par le biais de cet instrument. La seule hiérarchie encore présente, s’opère lors de suppression de commentaires. Dans ce cas là uniquement, la hiérarchie refait surface, cet échange bilatéral d’informations « de contacts facilités»5 est primordial pour faire tomber les barrières de la supériorité d’une personne. « On voit donc que ce qui est ici en cause n’est rien moins que l’organisation sociale globale avec l’anticipation du passage d’une société pyramidale à une société réticulaire fondée sur des 1 Cf. Supra, p.69. Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p. 83. 3 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.100. 4 Jean-Yves Capul et.al, L’Internet, Cahiers Français N°295, Paris, La Documentation Française, « Une nouvelle société de l’information. L’internet : un nouveau média », Eric Maigret, p.11. 5 Jacques Gerstlé, La communication politique, Paris, Armand colin, novembre 2004, p.45. 2 120 groupes ouverts, adaptatifs et évolutifs où se développe la capacité d’auto-régulation. » 1 . Le blog brise l’idée préconçue que l’on ne peut pas communiquer avec ceux qui nous dirigent. Section 2. L’ « Homo communicans » de Wiener de retour Le blogueur politique va sans le savoir se référer à l’image de l’ « homo communicans » de Wiener qui est « … un être …, tout entier tourné vers le social, qui n’existe qu’à travers l’information et l’échange, dans une société rendue transparente grâce aux nouvelles ‘machines à communiquer’. » 2 . Aujourd’hui, ces relations se sont accrues par le biais des nouvelles technologies et tout particulièrement par les conversations qui s’y développent. « Wiener et Mac Luhan illustrent, chacun à leur façon, l’idée de l’avènement d’un homme nouveau, l’homo communicans, le premier considérant la communication comme le ciment d’une civilisation qui vaincra les forces obscures de l’opacité, …, le second y voyant l’instrument privilégié propre à réaliser une grande fraternité planétaire. » 3 . La pensée de Mac Luhan est semble-t-il très utopique et ne correspond pas de prime abord aux fonctionnalités des blogs. Le blog créé une transparence, des échanges, une proximité. « Communiquer, c’est allumer un feu. Communiquer, c’est entrer dans un orchestre sans chef ni partitions exactement écrites, mais avec des possibilités d’improvisation libre, de variations sur les thèmes des autres. Le jeu de la communication se joue à plusieurs, et ce pluralisme devrait faire de l’homo communicans l’homme modeste par excellence, car nul ne domine vraiment ni à lui seul la longue chaîne des opérations d’extraction, de traitement et de réception des messages, nul ne fabrique ni ne maîtrise jusqu’au bout leur sens… » 4 . Par le blog, il n’y a plus de hiérarchie visible, plus de dispositif imposant les règles des dirigeants. « La conception humaniste de l’homme ‘gouverné de l’intérieur’ cède ainsi la place à celle de l’homme inscrit dans un système de communication, dans un réseau d’échanges d’information. » 5 . 1 Jacques Gerstlé, La communication politique, Paris, Armand Colin, novembre 2004, pp.44-45. Philippe Breton, L’utopie de la Communication. L’émergence de l’ « homme sans intérieur », Paris, La Découverte, janvier 1993, p.46. 3 Michel de Coster, Bernadette Bawin-Legros, Marc Poncelet, Introduction à la sociologie, Issy-les-Moulineaux, De Boeck, p.129. 4 Daniel Bougnoux, La communication contre l’information, Paris, Hachette, 1995, pp.89-90. 5 Francis Balle, Médias et sociétés, Paris, Montchrétien, octobre 1999, p.771. 2 121 Les élus sont là pour communiquer, se dévoiler, polémiquer sur des sujets aussi divers que précis touchant autant l’actualité nationale, que locale. Section 3. « Je blogue donc je suis » « Qu’attendons-nous de nos médias ? Peu de connaissances, beaucoup de reconnaissance. » 1 . L’élu qui n’a pas la notoriété de ses supérieurs, souhaite inconsciemment ou non, sortir de l’ombre et ainsi se faire un nom sous l’égide de son parti. Par la création et l’utilisation du blog, le blogueur politique prend ses responsabilités et communique sur tout ce qui le tient à cœur. Il se fait un nom, s’impose aux regards du grand public, sort de l’ombre de ses prédécesseurs. Oser parler sans tabou, sans avoir peur de représailles, si leurs réflexions étaient portées sur un média traditionnel. Car aujourd’hui, ceux sont les journalistes qui viennent lire ce qui est posté sur le blog et qui le retranscrivent sur leurs médias. Pour la première fois dans l’histoire de la presse, ils n’imposent pas toujours leurs sujets et se servent dans les propos des blogueurs politiques. « Je blogue donc je suis » signifie « je blogue donc j’existe ». De ce fait, le blog est véritablement un instrument complémentaire de ce qui peut être utilisé communément par les représentants politiques locaux, c’est-à-dire essentiellement la radio, la presse, le journal de la ville, de la circonscription ou encore le tractage. Ce nouvel instrument donne une liberté d’expression totale, ce qui n’était pas permis auparavant. De l’autre côté, le citoyen va lui aussi exister en bloguant. On parle dans ce cas précis de « blogs citoyens ». Ces derniers peuvent être des blogs d’opposition utilisés pour dénoncer des dépenses importantes, des projets abandonnés ou tout simplement un support de réflexion sur leur ville. Ceux sont des dimensions sociales et politiques qui ne sont pas à négliger de nos jours, et beaucoup de mouvements peuvent être dévoilés sur cet outil. Le citoyen devient un investigateur et ne cachera rien de ce qu’il découvrira. 1 Daniel Bougnoux, La communication contre l’information, Paris, Hachette, 1995, p.91. 122 Paragraphe 1. « Démocratisation et libéralisation de la personne » « Plus simple encore qu’une utopie à construire, l’Internet propose le retour à l’âge d’or de la démocratie, faisant aboutir la quête d’un imaginaire anhistorique travesti en modernité futuriste. » 1 . On ne peut pas reprocher à Internet ce qui nous permet aujourd’hui de communiquer au plus près de l’élu local en lui adressant directement par la voie électronique son message. Le fait d’utiliser le blog, amène à « … éliminer la crainte d’une communication ‘manipulatrice’. » 2 . Le politique va tout de même, mettre en avant ses armes de séduction car lorsqu’on est élu on a toujours à l’esprit les campagnes électorales, un mandat à renouveler. Cela se ressent dans la manière de rédiger ses notes. Chaque mot a une place bien précise pour faire passer un message. L’avantage c’est que personne ne peut modifier le message ou le modérer. Un sentiment de liberté est donc présent sur le blog par cette diffusion qui n’a pas de limite de volume d’information. Autant les citoyens, que les politiques, ont la possibilité de s’exprimer quel que soit leur engagement politique. Paragraphe 2. Un lien social renforcé Le fait de laisser quiconque s’exprimer crée sur ce nouvel espace public un lien social, «…, la place électronique, la nouvelle agora permettraient finalement de réaliser la démocratie directe avec la participation totale de tous les citoyens aux décisions politiques, … » 3 . Mais nous l’avons vu, seule une minorité de personnes vont accéder à cette conversation. De ce fait, on ne peut parler de démocratie directe. Plus de transparence et de dialogue, telles sont les volontés de l’élu blogueur. Ce qui compte aujourd’hui, c’est que chacun puisse donner son point de vue au moment voulu. 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.55. Serge Braconi, « Enjeux sociologiques de la démocratie participative de proximité : étude des médiations électroniques entre les élus locaux et administrés », Nice, 2002, p.31. 3 Stefano Rodotà, La démocratie électronique. De nouveaux concepts et expériences politiques, Rennes, Apogée, janvier 1999, p.37. 2 123 En 1997, l’Unesco donne une définition de l’information comme « un élément de connaissance », un an plus tard on dira d’elle « qu’elle s’inscrit dans un rapport social et qu’elle ne prend sens que par rapport à ce lien social ; quant à l’échange d’information, il est lui-même une composante majeure de ce lien. » 1 . Alors qu’on pourrait croire que l’internaute en se connectant sur le Net s’isole, on peut constater que ce n’est pas tout à fait le cas aujourd’hui. On pensait la même chose avec une innovation comme le téléphone à l’époque alors que, « 80% des communications téléphoniques étaient le fait des correspondants éloignés géographiquement de moins de 50 kilomètres. » 2 . Aujourd’hui avec Internet, « Le lien électronique est évalué à l’aune du lien social traditionnel qui demeure la valeur de référence. » 3 . « La communication interpersonnelle devient permanente que ce soit en direct ou en différé, grâce à la mémoire de la machine, qu’il s’agisse du répondeur ou du courrier électronique. » 4 . Et à cela, nous pouvons rajouter que le blog devient un support de communication supplémentaire, permettant de diffuser de manière continue l’information sans aucune contrainte temporelle, puisque tout est archivé. « La parole aujourd’hui est un fait social majeur. C’est par elle que nous agissons, que nous prenons des décisions, …, que nous organisons et transformons le monde qui nous entoure. » 5 . Mais ce lien social qu’offre le blog est certes ouvert à tous, mais n’est pas utilisé par tous. Cet outil reste à usage personnel pour l’internaute qui viendrait s’informer et ne regroupe pas toute la famille derrière, comme le fait la télévision. 1 Franck Bulinge, « Territoire, Tic et citoyenneté : Vers une réduction de la fracture socio-numérique. Une approche expérimentale, Toulon, mai 2002. 2 Patrice Flichy, « Technologie et lien social », Paris, Colloque du 25 aôut au 28 août 2003. 3 Josiane Jouët, Pratiques de communication et figures de la médiation, Réseau N°60, CENT, 1993, p.11 4 Josiane Jouët, op.cit., p.14. 5 Philippe Breton, L’Eloge de la parole, Paris, La Découverte, 2003, p. 185. 124 CONCLUSION GÉNÉRALE Cette étude a eu pour principal objectif de mettre en évidence la place de la médiation dans le blog. Les blogueurs politiques ont pris conscience de l’opportunité que pouvaient leur apporter le blog en terme de diffusion d’information, d’image de soi et des éventuelles rencontres qu’ils pouvaient faire par ce biais. « Internet ne nous menace pas ; il nous rend plus que jamais libres d’aller où nous voulons et de faire ce que nous voulons quand nous le voulons. » 1 . Toutefois, toute publication politique se doit de connaître les règles qu’imposent les textes de lois pour sa parution sur ce support. La loi s’applique sur Internet, même s’il est vrai que ce média était moins surveillé que ses aînés : les médias traditionnels. « Le multimédia, intégrant l’écrit, l’audiovisuel et l’interaction, peut modifier les formes du débat, mais n’est pas, en soi, le lieu unique de la constitution de l’espace public. » 2 . Voilà pourquoi, il faut composer avec l’ensemble des instruments permettant le voyage de l’information et amenant à une conversation à double sens pour que cet espace public devienne un jour véritablement démocratique. « Or ni le chemin de fer, ni la poste aux lettres, ni le télégraphe, ni le téléphone, ni l’Internet, pourrait-on déjà avancer sans dévoiler de secret, n’ont contribué à la création d’un homme meilleur dans une société meilleure. » 3 . Ainsi, les avis sur l’utilisation d’Internet varient, certains y voient une évolution de la démocratie, d’autres au contraire un échec. Internet est un outil qu’utilisent de plus en plus les nouvelles générations, « … Il n’est pas un ‘mieux-être’ … », mais plutôt un « …‘moins mal-être’… » 4 de notre société actuelle. « L’un des troubles provoqués par les médias aujourd’hui est fait que l’homme moderne croit avoir accès à la signification des événements simplement parce qu’il est informé. » 5 . Or avec l’explosion des blogs et notamment des blogs politiques, les internautes risquent de se noyer dans les informations mises à leur disposition. 1 Michel Béra, Eric Mechoulan, La machine Internet, Paris, Odile Jacob, mars 1999, p.11. Marc Lits, « Espace public et opinion de la presse écrite », Sciences Humaines, février 2005, pp.259-265. 3 Michel Béra, Eric Mechoulan, op.cit., p.56. 4 Philippe Breton, L’utopie de la communication. L’émergence de l’ « homme sans intérieur », Paris, La Découverte, janvier 1993, p.92. 5 Philippe Breton, op.cit., p.134. 2 125 « Le nouveau model ‘communicationnel’, si séduisant et offensif soit-il, n’a pas encore supplanté les modèles antérieurs. Il devra sans doute coexister longtemps avec eux ; et on peut lui prévoir quelques difficultés pour conserver sa pureté originelle (et conceptuelle) ; le plus probable est qu’il soit amené à se mêler aux autres modèles. » 1 . C’est bien ce que nous avons pu constater avec le blog qui mélange à la fois l’écrit, le son, la vidéo et nous promet de très nombreuses surprises pour la suite de son évolution. « Les nouvelles technologies sont bien, …, au service de la société ‘faiblement rencontrante et fortement communicante’.» 2 . En étudiant de près les blogs d’élus locaux, peu d’informations nous sont données sur leurs actions, c’est plus de l’ouverture d’esprit qu’un rendu d’activités. Pour les élus, « … la parole est une source d’épanouissement de la personne. » 3 , et c’est le cas également pour le citoyen qui participe au débat. « L’Internet remet en question les situations de monopole du pouvoir de dire dans les vieux pays de démocratie en Europe occidentale et en Amérique du Nord. » 4 . Le citoyen y trouve sa place par l’utilisation de cet instrument. Et, nous avons bien conscience que sans les visiteurs, les blogs ne fonctionneraient pas et beaucoup d’élus ne continueraient pas cette aventure. Or, les citoyens sont demandeurs de cette information, ce qui fait qu’aujourd’hui les blogs politiques se multiplient. Cependant, « La technologie peut à la fois être source d’inégalités et d’avancées démocratiques. Ce que la société d’information deviendra ne dépend pas de la technique, mais plutôt de ce que les humains décideront d’en faire. » 5 . Après une fracture sociale importante en France, le blog a créé une fracture numérique même si elle reste minime par rapport à la première. Malgré tout, un lien social se crée entre l’élu et le citoyen électronique mais surtout et le plus inespéré un lien social entre les citoyens connectés eux-mêmes. 1 Bernard Miège, Société conquise par la communication. I. Logiques sociales, Grenoble, Presses Universitaires Grenobloise, septembre 1996, p.215. 2 Philippe Breton, Eloge de la parole, Paris, La Découverte, septembre 2003, p.44. 3 Philippe Breton, op.cit., p.47. 4 Pierre Lévy, Cyberdémocratie, Paris, Odile Jacob, janvier 2002, p.69. 5 Caroline Caron, « Une société de l’information pour les citoyens ou les consommateurs ? Une analyse comparée de politiques publiques en matière de télécommunications », Laval, Québec, 17 mars 2005. 126 Ces nouvelles technologies « ‘… transforment en profondeur les échanges, la production de richesses, les rapports sociaux, …’ Désormais, on ne compte plus les initiatives visant à dynamiser la vie sociale, grâce au miracle de l’électronique. » 1 . Par les blogs, on renoue avec la définition même de l’ « agora » puisqu’on se situe dans une sphère à la fois publique et privée 2 . Son utilisation amène une nouvelle forme de médiation avec les citoyens, qui sera accentuée lors des prochaines campagnes présidentielles et municipales. Toutefois, « … les technologies ‘électroniques’ en général apparaissent comme complémentaires, voire accessoires, par rapport à d’autres formes de communication politique.» 3 . Il est donc évident que le blog ne sera qu’un outil supplémentaire par rapport aux autres médias. « Le ‘blogging’ politique d’aujourd’hui semble pris dans les mêmes utopies cyberoptimistes que l’internet des débuts, en affirmant que les blogs permettraient une démocratie plus directe, une interpellation en continu des gouvernants par les citoyens ; ce qui explique peutêtre partiellement l’écho dont ils font l’objet de la part de médias « de masse », largement mis en cause. Derrière ces conceptions, se dessine l’utopie d’un citoyen intéressé, informé, hyperactif, qui pourrait se passer des médiations de la démocratie représentative, conception typique des discours sur la démocratie électronique depuis l’apparition d’internet. » 4 . « Non seulement Internet ne résout pas ce problème, mais il risque d’ajouter à la complexité de la tâche : la surabondance d’information peut provoquer l’inhibition du citoyen ou le mettre dans l’impossibilité de décider. » 5 . Il est fort à parier que le blog politique va prendre une place grandissante dans la démocratie des prochaines années, car quoiqu’on en dise, le blog politique est un outil marketing. « Fini les réunions publiques : aujourd’hui pour être ‘branché’ en politique, il faut posséder son blog. » 6 . On n’ira pas jusqu’à concevoir que les réunions ne sont plus à l’ordre du jour, mais le blog aujourd’hui, est un phénomène qui prend de l’ampleur et qui va se généraliser par la suite pour devenir quelque chose de banal comme cela l’a été pour la création des sites Internet. 1 Patrice Flichy, Louis Quéré, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès Sciences Publiques, 2000, p.110. Patrice Flichy, Louis Quéré, Communiquer à l’ère des réseaux, Paris, Hermès Sciences Publiques, 2000, p.147. 3 Fabienne Greffet, « Politics as usual ? Les blogs politiques français en 2005 », Nancy 2, 2005, p.2. 4 Fabienne Greffet, op.cit., p.9. 5 Anne-Marie Gingras, La communication politique. Etat des savoirs, enjeux et perspectives, Sainte-Foy, Presse de l’Université du Québec, 2003, Thierry Vedel, « Internet et les pratiques politiques », p.209. 6 Article du site Marianne.fr, « Le blog, un nouvel outil de communication », 23 février 2005. 2 127 Malgré cela et il est important de le souligner, les autres procédés de communication ne sont pas pour autant bannis. Bien au contraire ils sont toujours des outils très précieux. Les politiques ont bien compris qu’ils devaient penser aux personnes qui n’utilisaient pas ces nouveaux médias. Ainsi, tous les outils de communication des plus archaïques au plus modernes seront utilisés pour permettre de toucher le maximum de personnes. Les blogs des politiques sont à ce jour, plus une retranscription de leur vision de la vie sociétale, la politique. Ils retranscrivent l’actualité selon leurs propres mots sans médiateur et sans tabou. Aujourd’hui, tout le monde l’admet, le blog est un nouveau moyen de médiation, constituant un lieu de débat. C’est une « … réplique électronique de l’agora athénienne. » 1 . Le blog reste un outil de communication qui donne une nouvelle vision de l’acteur politique. Or, « Pas de démocratie sans communication. » 2 , comme le souligne Monique Dagnaud. Actuellement, on pourrait catégoriser les blogueurs politiques en trois sous parties : ceux créer pour se faire connaître ; ceux pour alimenter leur campagne électorale d’un nouvel outil de médiation et enfin ceux utilisés comme voie d’opposition au pouvoir d’une ville, d’une région, d’un département. Aujourd’hui, l’emploi du blog peut-être illustré par les propos de Philippe Breton : « … parlez, mais taisez-vous ! Il s’agit d’un véritable paradoxe, car à la fois la parole est libre, encouragée, elle est un des principaux opérateurs du changement social, et à la fois elle est difficile à prendre ou encore réduite à un discours sans effet, quand elle n’est pas travestissement de la pure violence. » 3 . Les écrits de ces internautes sur les blogs politiques n’ont pas encore prouvé à ce jour leur efficacité pour améliorer cette démocratie, car la plupart des messages émis sur les blogs acquiescent ce qui est écrit et ne contredisent pas autant que cela l’élu qui a toujours la possibilité de retirer le message et donc de raccourcir cette conversation à tout moment à partir de l’instant où les propos émis dérangent. Mais heureusement, se développent en parallèle des blogs citoyens et des blogs militants pour casser cette image lisse que veulent se donner les élus par leur utilisation. 1 Jean-Yves Capul et.al., L’internet, Cahiers Français N°295, Paris, La Documentation Française, mars-avril 2000, Thierry Vedel, « Une nouvelle société de l’information. L’internet et la démocratie », p.25. 2 Monique Dagnaud, L’Etat et les médias : fin de partie, Paris, Odile Jacob, septembre 2000, p.14. 3 Philippe Breton, L’Eloge de la parole, Paris, La Découverte, 2003, p.186. 128 Cependant, si les blogs sont de plus en plus nombreux, c’est que les politiques ont compris qu’une demande émanait du peuple, puisque la plupart d’entre eux montrent une baisse de confiance dans les médias traditionnels. Ce qui reste frappant à ce jour, c’est de voir que le dialogue se situe davantage entre les citoyens, qu’entre élu et les internautes. Le blog devient un lieu d’émancipation pour ce qui du domaine de la politique, là où souvent le mot tabou était présent. Les blogs des élus locaux ne seront pas les seuls à se faire les messagers, les « propagandistes » pour les prochaines élections présidentielles, car les blogs citoyens et les blogs militants seront également au cœur des débats pour soutenir leur candidat. Toutefois, on est en droit de se demander si les blogueurs politiques locaux vont continuer à alimenter leur blog aussi souvent que possible lors de la campagne municipale de 2008, parmi ceux potentiellement candidats. Alors va-t-on voir s’essouffler les blogs politiques une fois ces deux moments passés dans notre pays ? Ou encore va-t-on vers une augmentation et une participation accrue de ces derniers ? De nombreux représentants politiques 1 semblent ne pas vouloir abandonner leur blog une fois ces événements passés, mais nous sommes encore en droit de douter. A ce jour, nous ne pouvons nullement affirmer ou infirmer ces interrogations, car Internet étant en perpétuelle mutation, il ne nous est pas permis de nous projeter. Reste à souligner, que cet outil permet de solliciter un nouveau regard de l’élu l’utilisant, il « … témoigne de la capacité d’adaptation des hommes politiques, … pour promouvoir un débat plus ‘participatif’. » 2 , ce qui lui donne toute sa légitimité par rapport aux anciens médias traditionnels qui sont toujours et qui le resteront encore pour longtemps à sa disposition. La liberté d’expression est un des piliers de la démocratie, voilà pourquoi le blog semble être le premier outil qui tente de répondre à cette liberté, même si elle est encore trop contrôlée et trop impressionnante pour les internautes qui n’osent pas tous se lancer dans une conversation avec l’élu en question. 1 2 Cf. annexe, Enquête auprès de blogueurs politiques, pp.CXLI-CLXII, question n°30. 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