L`insertion professionnelle des jeunes diplômés

Transcription

L`insertion professionnelle des jeunes diplômés
Février 2007
L’insertion professionnelle des jeunes diplômés issus de l’immigration
Synthèse des diagnostics et travaux menés par l’AFIJ avec le soutien de la DPM et de l’Acsé
Quelle définition donner du public des jeunes
diplômés « issu de l’immigration » ?
L’AFIJ a choisi de désigner comme jeune « issu de
l’immigration » un jeune diplômé lorsqu’il peut être
amené à subir une discrimination raciale directe ou
indirecte lors d’un entretien d’embauche.
Une autre approche simple consiste à considérer qu’un
jeune est « issu de l’immigration » lorsqu’il déclare
directement une origine étrangère ou possède l’une des
caractéristiques suivantes :
une nationalité étrangère,
un nom et/ou prénom à consonance étrangère,
une absence de pleine maîtrise orale de la
langue française (voire accent « étranger »),
une apparence physique pouvant mener un
employeur à discriminer sur le plan racial.
Ces derniers critères sont ceux retenus pour identifier le
public visé par des actions spécifiques (politique de la
ville, L’ACSé, parrainage vers l’emploi, etc.) menées par
l’AFIJ. L’AFIJ est consciente que le débat terminologique
sur ce sujet n’est pas clos.
Depuis 10 ans, l’AFIJ a pris en compte de manière particulière le public
diplômé de l’enseignement supérieur victime des pratiques
discriminatoires des employeurs ou susceptible de l’être.
Les actions qu’elle a mises en place et qu’elle a développées ont prouvé
toute leur efficacité et la nécessité de prendre en compte la
problématique de l’insertion professionnelle de ces jeunes diplômés.
En effet, à l’issue de leur cursus scolaire et universitaire – parfois
exemplaire – ces jeunes apparaissent comme une fierté au sein même
de leur famille voire de leur entourage personnel. Mais très vite, les
épreuves difficilement vécues durant leur recherche d’emploi les
conduisent à la désillusion la plus complète.
Certains finissent par avancer l’existence de pratiques discriminatoires à
leur encontre face à l’absence de réponse à plusieurs centaines de
candidatures. D’autres sont directement ou indirectement confrontés à
des cas de discriminations avérées. L’ensemble de ces questions doit
être traité car il existe un enjeu important d’une insertion
professionnelle réussie de ces jeunes diplômés et du public diplômé en
général à l’égard de l’ensemble de la jeunesse dans la société française.
La discrimination est un phénomène complexe inscrit dans le
temps, impliquant l’ensemble des acteurs du système de l’éducation, de
la formation et de l’emploi et engageant de fait les représentations de
chacun.
L’AFIJ a réalisé plus d’une dizaine de diagnostics représentant dix années de réflexions dans le cadre d’actions menées par
l’association sur l’approche des discriminations vécues ou ressenties des jeunes diplômés. Sans prétendre à une expertise
scientifique, ces travaux ont été réalisés à partir de remontées d’informations de la part des chargés de mission insertion de l’AFIJ et
de la part de nombreux témoignages de jeunes diplômés concernés.
A.
Les freins à l’embauche des jeunes diplômés issus de l’immigration, actes du colloque AFIJ à Strasbourg
avec la Participation du FASILD d’Alsace (25 juin 1998)
B.
L’insertion professionnelle des jeunes diplômés issus de l’immigration, Diagnostic d’aide à la décision de la direction de l’AFIJ,
avec le soutien du FASILD (décembre 1999)
C.
Bilan final sur le développement du parrainage vers l’emploi « les réseaux d’experts » à destination des jeunes
diplômés des quartiers défavorisés et/ou issus de l’immigration, action financée par la DPM (juin 2000)
D.
Les jeunes femmes diplômées de l’enseignement supérieur issues de l’immigration inscrites à l’AFIJ, approche
statistique exploratoire des profils et de l’insertion professionnelle,
diagnostic réalisé avec le soutien du FASILD et du Service des Droits des Femmes et de l’Egalité et des fonds FSE (janvier 2001)
E.
Approche des pratiques de recrutement des jeunes diplômés issus de l’immigration,
Réalisée avec le soutien de la DPM et de la DFE du FASILD (janvier 2003)
F.
Analyse des parcours d’orientation et du choix du cursus des jeunes femmes issues de l’immigration,
avec le soutien de la DPM et du FASILD (avril 2003)
G.
Analyse de l’insertion professionnelle des jeunes femmes issues de l’immigration en fonction de l’orientation scolaire et
universitaire, avec le soutien de la DPM et du FASILD (janvier 2004).
H.
Analyse des profils des jeunes issus de l’immigration dans la recherche de stages dans les filières technologiques
supérieures des STS et IUT, avec le soutien de la DPM (février 2003)
I.
Analyse de l’accès à l’emploi des jeunes issus de l’immigration en fonction de leur stage en STS et IUT,
avec le soutien de la DPM (janvier 2004).
J.
Analyse de la situation d’emploi des jeunes femmes susceptibles d’être victimes de discrimination liée à leur origine –
Réflexion sur la déqualification, avec le soutien du FASILD (janvier 2005)
K.
Analyse des échecs des jeunes issus des quartiers défavorisés, soutenue par la DPM (janvier 2005)
L.
Action d’identification de solutions accessibles dans la fonction publique pour des jeunes diplômés issus des quartiers
défavorisés, avec le soutien du Ministère de la Fonction publique, de la DPM et du FASILD (février 2006)
M.
Actions en faveur de la mobilisation des professionnels et en faveur de la lutte contre la discrimination raciale, actions
soutenues par le FASILD (bilans en 2001, 2002, 2003, 2004, 2005 et 2006).
1.
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, Impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 – Mél. : [email protected]
1
Année 1998
Année 1999
« Les freins à l’embauche
des jeunes diplômés issus de l’immigration »
Actes du colloque de l’AFIJ Strasbourg (le 25 juin 1998)
« L’insertion professionnelle
des Jeunes Diplômés Issus de l’Immigration »
Diagnostic d’aide à la décision de la direction de l’AFIJ
Avec le soutien du FAS Alsace
Avec le soutien du FAS
Colloque ayant réuni autour de la table :
Panel :
des jeunes diplômés issus de l’immigration
500 jeunes diplômés dont 270 issus de l’immigration
des responsables d’entreprise ou de recrutement
Relais AFIJ concernés :
des acteurs de structures intermédiaires
Marseille, La Seyne sur Mer et Tours
Au vu des premiers résultats d’actions expérimentales menées
par l’AFIJ sur trois sites (Marseille, La Seyne sur Mer et Tours),
l’AFIJ a souhaité susciter un espace de parole afin de montrer
que le public jeune diplômé issu de l’immigration existe, et qu’il
rencontre des problèmes d’insertion professionnelle liés au
contexte global de pénurie d’emploi d’une part et à la
discrimination à l’embauche d’autre part.
Ce diagnostic a pu mettre en évidence les difficultés
d’insertion des jeunes diplômés issus de l’immigration résidant
dans les quartiers défavorisés par rapport à celle des autres
jeunes diplômés des quartiers, mais aussi par rapport à celle
de l’ensemble du public diplômé accueilli par l’AFIJ.
Ce colloque a également démontré qu’il existe des actions à
mettre en œuvre pour faire évoluer les situations.
Il a le mérite de présenter aussi bien des écarts statistiques
significatifs que des témoignages de jeunes et de recruteurs
révélant l’existence de la discrimination raciale à l’égard des
diplômés de l’enseignement supérieur.
Année 2000
Année 2001
« Le développement du parrainage vers l’emploi "les
réseaux d’experts" à destination des jeunes diplômés
issus des quartiers défavorisés et/ou issus de
l’immigration »
« Les jeunes femmes diplômées de l’enseignement
supérieur issues de l’Immigration »
Approche statistique exploratoire de l’AFIJ
Avec le soutien de la DPM
Avec le soutien du FAS et du service des Droits des femmes et
de l’Egalité (fonds FSE)
Panel :
Panel :
385 parrains appelés « experts »
500 jeunes diplômés parrainés dont 265 issus de l’immigration
1 341 jeunes diplômés
dont 724 jeunes diplômés issus de l’immigration
Relais AFIJ concernés :
Relais AFIJ concernés :
Avignon, Bourges, Grenoble, Lyon, Marseille, Montpellier,
Mulhouse, Nice, Nîmes, Perpignan, Strasbourg, Toulon,
Toulouse et Tours
Avignon, Bourges, Grenoble, Lyon, Marseille, Nice, Nîmes,
Perpignan, Strasbourg, Toulon, Toulouse et Tours
Il s’agit ici d’un bilan des actions de parrainage menées par
l’AFIJ sur différents territoires.
Il a été prouvé l’efficacité d’un tel dispositif à l’égard des jeunes
diplômés pour les empêcher d’adopter une attitude de passivité,
voire de défaitisme suite aux nombreuses candidatures restées
sans réponse et/ou suite aux issues négatives (interprétation de
ces échecs liée à de la discrimination à l’embauche).
Cette approche a permis de faire ressortir les écarts notables
d’accès à l’emploi entre les jeunes femmes diplômées issues
de l’immigration et les autres groupes de jeunes.
Ainsi la double discrimination apparaît de manière très
significative.
Année 2002
« Approche des pratiques de recrutement des jeunes diplômés issus de l’immigration »
Avec le soutien de la DPM et de la Direction de la Formation et de l’Emploi du FASILD
Panel :
370 recruteurs
en contact avec plus d’une trentaine de relais AFIJ
Ce diagnostic fait état des résultats d’une enquête adressée aux professionnels du recrutement en relation avec l’AFIJ sur leurs
pratiques de recrutement à l’égard des jeunes Français d’origine étrangère.
Cette enquête a permis de noter que le frein à l’embauche des jeunes concernés, le plus significatif aux yeux de ces recruteurs, est
l’absence de maîtrise de la langue française (écrire ou orale).
Par ailleurs, l’AFIJ a relevé à travers les questions ouvertes de cette enquête qu’une part non négligeable de recruteurs avait une
connaissance biaisée du public diplômé Français issu de l’immigration.
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 - [email protected]
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Février 2007
Année 2002
Année 2003
« Analyse des parcours d’orientation et du choix du
cursus des jeunes femmes issues de l’immigration »
« Analyse de l’insertion professionnelle des jeunes
femmes issues de l’immigration en fonction de
l’orientation scolaire et universitaire »
Avec le soutien de la DPM et de la DFE du FASILD
Avec le soutien de la DPM et de la DFE du FASILD
Panel :
Panel (idem 2002) :
500 jeunes diplômés
dont 256 jeunes diplômés issus de l’immigration
dont 153 jeunes femmes diplômées issues de l’immigration
500 jeunes diplômés
dont 256 jeunes diplômés issus de l’immigration
dont 153 jeunes femmes diplômées issues de l’immigration
Relais AFIJ concernés :
Relais AFIJ concernés (idem 2002) :
Aix en Provence, Avignon, Bordeaux, Grenoble, Lyon, Marseille,
Martigues, Montpellier, Nice, Nîmes, Paris, Perpignan, Rodez,
Saint Denis, St Etienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse et Tours
Aix en Provence, Avignon, Bordeaux, Grenoble, Lyon, Marseille,
Martigues, Montpellier, Nice, Nîmes, Paris, Perpignan, Rodez,
Saint Denis, St Etienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse et Tours
Ce travail est né des conclusions frappantes du diagnostic de
2001 sur l’accès à l’emploi des jeunes femmes diplômées issues
de l’immigration. L’AFIJ a souhaité approfondir l’analyse des
différences de parcours d’études en fonction des choix
d’orientation. Ce diagnostic met en exergue les moyens de
renseignement utilisés et les difficultés de ces jeunes filles à
s’orienter vers les filières porteuses de débouchés.
Ce diagnostic s’inscrit dans la continuité de celui de 2002 tout
en mesurant l’influence du parcours scolaire et universitaire sur
l’accès à l’emploi des jeunes filles issues de l’immigration.
Année 2002
Année 2003
« Analyse des profils des jeunes issus de
l’immigration dans la recherche de stages dans les
filières technologiques supérieures des STS et IUT »
« Analyse des profils des jeunes issus de
l’immigration dans la recherche de stages dans les
filières technologiques supérieures des STS et IUT »
Avec le soutien de la DPM
Avec le soutien de la DPM
Panel :
Panel (idem 2002) :
200 jeunes étudiants dont 100 issus de l’immigration
200 jeunes étudiants dont 100 issus de l’immigration
Relais AFIJ concernés :
Relais AFIJ concernés (idem 2002) :
Avignon, Bourges, Grenoble, Lyon, Marseille, Nice, Nîmes,
Perpignan, Strasbourg, Toulon, Toulouse et Tours
Avignon, Bourges, Grenoble, Lyon, Marseille, Nice, Nîmes,
Perpignan, Strasbourg, Toulon, Toulouse et Tours
Il s’agit ici de la première étape de chantier d’analyse du public
dans les STS et IUT comprenant une mission de stage.
Après un travail d’analyse du public concerné (2002), ce
diagnostic met en lumière les phénomènes discriminatoires
dans l’accès à l’emploi des jeunes titulaires d’un BTS ou DUT.
On voit bien ici l’influence du stage sur l’insertion de ces
jeunes, mais aussi les difficultés d’obtention de stage.
Année 2004
« Analyse de la situation d’emploi des jeunes femmes susceptibles d’être victimes de discrimination liée à leur
origine - Réflexion sur la déqualification »
Avec le soutien de la DPM et de la DFE du FASILD
Panel :
100 jeunes femmes diplômées issues de l’immigration en emploi
Relais AFIJ concernés :
Aix en Provence, Avignon, Béziers, Grenoble, Marseille, Martigues, Nice, Nîmes, Rodez, Saint Denis, St Etienne, Toulon et Toulouse
Après de nombreux diagnostics ayant prouvé une insertion professionnelle difficile des jeunes femmes diplômées issues de
l’immigration en raison de la filière d’études empruntée, l’AFIJ a analysé exclusivement un public de jeunes femmes issues de
l’immigration ayant obtenu un emploi. Ce travail a permis à l’AFIJ de mener une réflexion sur la définition de la « déqualification » et
a montré que ces jeunes femmes ayant atteint un niveau d’études supérieur (bac+4 et 5) étaient déclassées.
Il n’est pas anodin de préciser qu’à cela s’ajoutent toute une série de bilans d’actions réalisées par la direction générale de l’AFIJ en
faveur de la sensibilisation des recruteurs dans la lutte contre les discriminations à l’embauche, ainsi que les bilans d’actions locales
menées dans le cadre de financement spécifique (politique de la ville, FASILD – L’ACSé, parrainage, etc.).
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 - [email protected]
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LES ENSEIGNEMENTS RETENUS …
Les divers diagnostics ont permis d’identifier les caractéristiques majeures des jeunes diplômés issus de l’immigration suivis à l’AFIJ.
Il apparaît un décalage évident entre leur profil et celui des autres jeunes diplômés : décalage d’âge de fin des études, de niveau de
formation, de domaine de formation, de situation financière, de mobilité, etc.
Sur les profils des jeunes diplômés issus de l’immigration
Une majorité de jeunes de
nationalité française
Parmi le public accueilli par l’AFIJ, les jeunes diplômés « issus de l’immigration » sont de
nationalité française pour plus de 85%.
Une population à dominante
féminine
L’AFIJ a relevé, dès ses premiers travaux, que les jeunes femmes issues de l’immigration
étaient surreprésentées parmi le public accompagné et parmi le public général de l’AFIJ.
Cela a suscité par la suite plusieurs diagnostics sur cette population féminine afin de
vérifier l’existence de la double discrimination : raciale et sexiste.
L’accord cadre signé en juillet 2002 avec la DPM, le Service des Droits des femmes et de
l’égalité, et le FASILD a justement inclus cet aspect particulier.
Un public nettement plus âgé
On constate que les jeunes « issus de l’immigration » à diplôme égal ont en moyenne près
de deux ans de plus que la moyenne.
Tous les diagnostics montrent une proportion plus élevée de diplômés issus de
l’immigration âgés de 30 ans et plus par rapport aux autres. Cette part des plus de 29 ans
est généralement deux fois plus supérieure parmi les jeunes issus de l’immigration que
parmi les autres jeunes.
Sur leur environnement personnel peu porteur
Un manque de moyens durant la
recherche d’emploi
Compte tenu d’un sortie plus fréquente en échec en premier cycle ou avec un BTS ou
DUT, ces jeunes ont moins de 25 ans et donc ne peuvent prétendre au RMI. Les
problèmes de manque de ressource pendant la période de recherche d’emploi sont plus
fréquents. Or, le temps de recherche d’emploi est long (plus de 9 mois en moyenne), il
faut avoir les ressources pour « attendre l’emploi » (soutien familial, job, etc.).
Une provenance de milieux
modestes
Le diagnostic sur l’analyse du parcours d’orientation et du choix de cursus des jeunes
femmes issues de l’immigration montre qu’une situation sociale plutôt défavorisée
conditionne de manière non négligeable les choix et la réussite des études. Pour
information, on peut se référer à la différence de CSP des parents selon les jeunes
diplômés quel que soit le genre.
Répartition des jeunes en fonction de la CSP dominante des parents
Jeunes femmes
Issues de
l’imm.
Agriculteurs, exploitants
Jeunes hommes
Autres
Issus de
l’imm.
Autres
2%
3%
2%
4%
Artisans, commerçants, chefs
d’entreprise.
10%
14%
16%
9%
Ingénieurs, cadres
16%
29%
10%
42%
Employés, ouvriers
35%
32%
43%
27%
7%
14%
1%
7%
Professions intermédiaires
Un seul est retraité ou au chômage
Les deux sont retraités ou au chômage
7%
-
5%
2%
23%
8%
23%
8%
Source : « Analyse des parcours d’orientation et du choix de cursus », avril 2003
Les jeunes femmes issues de l’immigration évoquent le fait que leurs parents n’ont pas
souvent les moyens de faciliter leur parcours (effectuer des études dans une école
supérieure, quitter le foyer familial). Certaines parlent même du manque de connaissance
de leur parent qui ne facilite pas leur choix d’études. « Ils sont ouvriers, illettrés et
immigrés », déclare une jeune diplômée à propos de ces parents.
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 - [email protected]
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Février 2007
Sur leurs parcours scolaires et universitaires
Une concentration massive dans
les formations supérieure courtes
De manière générale, les jeunes diplômés issus de l’immigration adoptent des parcours de
formation généralement plus courts que les autres jeunes. Quasiment la moitié du public
issu de l’immigration cherche un emploi avec un niveau bac+2 (contre environ le tiers des
autres jeunes suivis).
Des échecs en premier cycle
universitaire plus nombreux
Quel que soit le diagnostic mené par l’AFIJ, les jeunes issus de l’immigration se trouvent
plus souvent en situation d’échec universitaire que les autres jeunes. Ce constat est
encore plus évident pour le premier cycle universitaire et pour les jeunes femmes.
Pour ces jeunes issus de l’immigration, les incidents de parcours tels que les erreurs
d’orientation ou les redoublements sont également plus fréquents. Ce qui explique en
partie les sorties à un âge plus élevé.
Une part non négligeable de
jeunes issus d’un baccalauréat
technologique
Les diagnostics 2003 et 2004 sur l’analyse des parcours ont confirmé la corrélation entre
les échecs universitaires et la série du baccalauréat technologique ou professionnel. La
proportion d’obtention de ces séries du bac est plus fréquente, que pour la moyenne des
étudiants, chez les jeunes « issus de l’immigration » et surtout chez les jeunes femmes.
Or, quel que soit le public, la part des échecs universitaires est plus forte lorsqu’on ne
dispose pas d’un baccalauréat de série générale. Les jeunes femmes titulaires d’un
baccalauréat technologique, connaissent plus souvent un échec universitaire.
Une défaillance de l’orientation
scolaire et universitaire
Les jeunes issus de l’immigration ont plus souvent que la moyenne des jeunes une
mauvaise connaissance et/ou des représentations inexactes du monde du travail, des
carrières et des besoins en entreprise.
Ils sont davantage victime des carences du système d’orientation. Par ailleurs, on
remarque que, filles ou garçons, ces jeunes font d’abord appel à leurs professeurs pour
avoir des conseils d’orientation alors que les autres jeunes, quel que soit le genre,
s’adressent en premier lieu à leur CIO.
Répartition des jeunes par type de moyen de renseignement utilisé
Jeunes femmes
Jeunes hommes
Issues de
l’immigration
Autres
Issus de
l’immigration
Autres
Amis
11%
15%
13%
13%
Professeurs
26%
15%
29%
21%
Lycées
17%
11%
9%
12%
CIO / ONISEP
21%
30%
20%
29%
Journées « Portes ouvertes »
10%
11%
10%
11%
Forums d’orientation
8%
10%
10%
9%
Revues d’information
7%
6%
9%
6%
100%
100%
100%
100%
Total
Source : « Analyse des parcours et des choix d’orientation …», avril 2003
Une fréquence de diplômes de
filières généralistes à faibles
débouchés professionnels
Plusieurs diagnostics montrent aussi une surreprésentation de jeunes issus de
l’immigration à des niveaux intermédiaires (Licence et Master 1). Leur insertion est
problématique dans la mesure où leurs formations, pour la plupart généralistes et
dépourvues de stage, offrent peu de débouchés professionnels.
Des handicaps liés à l’absence de
stages, à la difficulté d’accès aux
stages ou à la faible qualité de
ceux-ci.
Une grande part de formations généralistes ne prévoit pas de stages. Les stages
constituent une première expérience professionnelle valorisable au moment de la
recherche d’emploi. Or, les jeunes issus de l’immigration, plus nombreux dans ces
parcours, se retrouvent handicapés par rapport à l’absence de première expérience.
Les filières technologiques, quant à elles, comportent un (ou des) stage(s) dans un
environnement professionnel. Mais le diagnostic de 2003 sur l’accès à l’emploi des jeunes
issus de l’immigration diplômés en STS ou IUT en fonction de leur stage, prouve que ces
jeunes :
ont plus de difficultés que les autres jeunes à trouver un stage (49% contre 26%
des autres),
ont plus souvent des stages d’observation que des stages opérationnels,
sont plus nombreux à ne pas manier certains outils essentiels qui s’avèrent être
des pré requis indispensables pour l’emploi (ex : l’informatique) faute d’un stage
de qualité.
Il apparaît que l’obtention de stages plus encore que de l’emploi est lié au relationnel des
jeunes et de leur famille.
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 - [email protected]
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Sur les emplois obtenus
Des emplois plus précaires
Moins de CDI en premier emploi
La précarité de l’emploi concerne en général l’ensemble de la jeunesse sortante de
l’enseignement supérieur, mais elle est beaucoup plus forte pour les jeunes diplômés issus
de l’immigration et en particulier les jeunes femmes.
Jeunes
femmes
issues de
l’immigration
Jeunes
hommes
issus de
l’immigration
Autres
jeunes
femmes
diplômées
Autres
jeunes
hommes
diplômés
CDI
30%
45%
45%
60%
CDD et autres
70%
55%
55%
40%
Source : « L’insertion professionnelle des jeunes femmes diplômées issues de l’immigration », janvier 2001
Des emplois moins bien
rémunérés
Les salaires de première embauche sont plus bas pour les diplômés issus de l’immigration.
Si on se concentre sur le SMIC, il est frappant de noter des écarts considérables en
défaveur des jeunes issus de l’immigration.
Jeunes issus de
l’immigration
Autres jeunes
diplômés
Public AFIJ
SMIC
52%
42%
22%
Supérieur au SMIC
48%
58%
78%
Source : « L’insertion professionnelle des jeunes diplômés issus de l’immigration », décembre 1999
… tout particulièrement pour les
jeunes femmes diplômées
Le diagnostic de 2001 a mis en évidence à ce niveau une discrimination raciale certes,
mais surtout une discrimination sexiste. Autrement dit, les jeunes femmes issues de
l’immigration subissent fréquemment une double discrimination.
Jeunes
femmes
issues de
l’immigration
Jeunes
hommes
issus de
l’immigration
Autres
jeunes
femmes
diplômées
Autres
jeunes
hommes
diplômés
Salaire inférieur à 1 294 €
78%
49%
72%
46%
Salaire supérieur à 1 295 €
22%
51%
28%
54%
Source : « L’insertion professionnelle des jeunes femmes diplômées issues de l’immigration », janvier 2001
Des emplois moins souvent en
adéquation avec les diplômes en
particulier pour les jeunes femmes
diplômées.
Dès le premier diagnostic de l’AFIJ, est apparu le problème de la déqualification plus
accentué chez les jeunes diplômés issus de l’immigration que la moyenne des jeunes
diplômés.
Jeunes issus de
l’immigration
Autres jeunes
diplômés
Public AFIJ
Cadre ou à responsabilité
29%
33%
52%
Exécution avec perspective d’évolution
23%
33%
28%
Nature des postes
Exécution sans perspective d’évolution
48%
33%
20%
Total
100%
100%
100%
Source : « L’insertion professionnelle des jeunes diplômés issus de l’immigration », décembre 1999
Le diagnostic de 2001 a mis en lumière cet aspect pour les diplômés de Bac+4 et plus,
ceux pouvant prétendre à des postes de responsabilité. L’AFIJ a été frappée par l’absence
de jeunes femmes diplômées issues de l’immigration accédant à un poste cadre à l’issue
de leurs études dans son échantillon.
Bac+4 et plus
Cadre
Responsabilité
Jeunes
femmes
issues de
l’immigration
Jeunes
hommes
issus de
l’immigration
Autres
jeunes
femmes
diplômées
Autres
jeunes
hommes
diplômés
-
33%
38%
66%
20%
44%
22%
-
Exécution avec perspective
-
12%
10%
17%
Exécution sans perspective
80%
11%
29%
17%
Source : « L’insertion professionnelle des jeunes femmes diplômées issues de l’immigration », janvier 2001
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 - [email protected]
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Février 2007
Sur les conditions de réussite
L’obtention moins fréquente du
permis de conduire
Le permis de conduire et la possession d’un véhicule sont souvent exigés par les
entreprises situées en zone industrielle excentrée ou pour des fonctions nécessitant des
déplacements ou en prévision de l’évolution des postes.
Cette demande pénalise des jeunes diplômés issus de l’immigration. En effet, l’absence
de permis est deux fois plus forte chez ces jeunes diplômés issus de l’immigration
(diagnostics 2000 et 2001). C’est le cas tout particulièrement pour les jeunes
femmes.
Leïla, Rhône Alpes, 25 ans, niveau BTS Comptabilité
« J’ai eu une mission intérimaire… en tant qu’opératrice de saisie ; … c’est dans une zone
industrielle, et l’arrêt de bus est vraiment à 20 minutes à pied du lieu de travail. Déjà l’entrée,
juste pour aller au travail jusqu’à aller au bureau, c’est vraiment une trotte. C’était dans une
entreprise de transport. … bon je devais travailler de 14 heures à 20 heures, l’entreprise m’a
dit non, c’est jusqu’à 21 heures. Donc, déjà une chose, ils se sont trompés au niveau des
horaires. Ensuite, une femme de ménage m’a dit « je ne sais pas comment vous allez faire
pour rentrer car le dernier bus est à 19 heures 30 » ; et puis le responsable m’a dit « je ne
comprends pas pourquoi ils nous ont envoyé une personne qui n’a pas de véhicule ».
Source : « L’insertion professionnelle des jeunes femmes diplômées issues de l’immigration », janvier 2001
Une mobilité déclarée réduite
Ces jeunes sont plus souvent contraints à utiliser les transports en commun avec tous les
inconvénients que cela peut générer.
Les jeunes issus de l’immigration déclarent une moindre mobilité que la moyenne des JD,
comme c’est le cas d’une manière plus générale pour des jeunes de milieu social
défavorisé. Certains jeunes, en particulier les jeunes femmes issues de l’immigration,
déclarent qu’elles ne veulent pas quitter leur ville car elles doivent participer à la prise en
charge de leur famille.
Une déficience de réseau
relationnel
Le milieu social défavorisé de ces jeunes diplômés issus de l’immigration les désavantage
considérablement : ils manquent le plus souvent d’un réseau relationnel nécessaire pour
l’obtention d’un stage de cursus puis d’un emploi.
Une large part des processus de recrutement repose sur le réseau relationnel de la
simple information (« qui est l’interlocuteur ? », « comment fonctionne le
recrutement ? ») à la priorité relationnelle (personne recommandée à l’audition lors d’un
entretien).
Ces jeunes diplômés issus de l’immigration ne parviennent pas à intégrer un milieu
professionnel opportun en stage ou en emploi. Le simple envoi de centaine de
candidatures spontanées qui restent très souvent sans réponse.
La nécessité de valider les
« bons » diplômés
Dès 1999, l’AFIJ note que certains niveaux d’études et diplômes facilitent plus l’accès à
l’emploi des jeunes, en particulier les jeunes issus de l’immigration.
Le diagnostic sur l’insertion professionnelle des jeunes femmes issues de l’immigration en
fonction de l’orientation scolaire et universitaire (janvier 2004) analyse particulièrement ce
point. Il en ressort qu’à l’instar des autres jeunes femmes qui ont un taux d’accès à
l’emploi supérieur à 60% quel que soit le niveau d’études.
Les jeunes femmes issues de l’immigration ont de bonnes chances d’insertion
professionnelle avec un bac+2 : DUT et surtout BTS et bac+5 : DESS ou master 2
pro.
Les autres niveaux de diplômes génèrent des difficultés d’insertion professionnelle pour
les jeunes femmes issues de l’immigration. Pour celles qui parviennent à être en emploi,
elles se retrouvent dans des emplois précaires.
Le diagnostic de 2004 sur la déqualification montre que les jeunes femmes issues de
l’immigration connaissent bien un déclassement lorsqu’elles n’ont pas un bac+5. Et
encore, on voit bien que, pour celles qui sont de niveau bac+5, seulement la moitié
parvient à obtenir un poste à responsabilité.
Ceci prouve que pour les jeunes issus de l’immigration, plus encore que pour
les autres, le choix des études et du diplôme à valider est une condition
incontournable pour une bonne insertion professionnelle.
De manière générale, la discrimination raciale à l’embauche est manifeste sur les
postes à responsabilité pour les jeunes diplômés issus de l’immigration. Ces derniers
mettront plus de temps à accéder à l’emploi pour parvenir à un poste correspondant le
mieux à leur niveau de qualification.
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
Direction générale : 10, impasse Robiquet - 75006 Paris - Tél. : 01 53 63 83 10 - Fax : 01 53 63 83 19 - [email protected]
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La discrimination raciale à l’embauche à l’égard des jeunes diplômés
Le ressenti de l’existence de la
discrimination raciale à l’embauche
chez les jeunes diplômés issus de
l’immigration
Face à l’absence de réponse à leurs nombreuses candidatures volontaires ou en réponse à
des offres, ces jeunes diplômés finissent par avancer l’existence de pratiques
discriminatoires.
L’AFIJ a mis en place en 2002 un Comité Interne de Réflexion sur les Discriminations
réunissant des chargés de mission de chaque région de France pour faire remonter les cas
de discrimination vécue par les jeunes diplômés issus de l’immigration.
Ce comité note une progression significative de ces ressentis depuis la mise en place
d’actions d’accompagnement individuel. En conséquence, il enregistre l’augmentation des
cas d’auto discrimination.
Le constat de pratiques
discriminatoires directes dans les
recrutements
Le diagnostic de 1999 a mis en lumière des pratiques discriminatoires au travers de
témoignages de recruteurs interviewés par l’AFIJ. On peut en citer quelques uns :
L’existence de pratiques discriminatoires
en matière raciale est une réalité dans
certains cas…
Responsable manager dans la restauration rapide
« On embauche des Français purs et on n’embauche pas des jeunes d’origine étrangère. C’est
la volonté du Directeur régional. (…) Avec le nom et la photo, déjà on fait une première
sélection C’est un peu dommage, mais bon. En général, les étrangers d’origine maghrébine,
de suite il y a un blocage. On préfère embaucher un Black plutôt qu’un Arabe, pour être clair.
C’est sûr qu’il y a une sélection à ce niveau là »
Chef de projet dans l’ingénierie industrielle
« Moi, j’ai refusé d’embaucher un Noir parce qu’on me l’avait pas présenté comme Noir. On
aurait pu me le dire que c’était un garçon de couleur. Mais bon, j’ai eu des problèmes avec un
Français qui était Noir, qui avait des faux diplômes, et qui nous a mis dans une merde pas
possible. Maintenant, j’ai ce recul. Et c’est vrai qu’il y en a peu dans les bureaux d’études : on
trouve plus de Pakistanais, de Libanais, d’Algériens et d’Italiens. »
Responsable d’agence de travail temporaire
« Je ne pratique pas la discrimination mais je sais que j’ai des clients qui m’interdisent de leur
adresser des candidatures de jeunes de telle ou telle origine. Et vous savez, il y a une
concurrence entre les agences, on doit faire bonne impression : sur 3 CV que je reçois, je
n’enverrai pas celui qui appartient à une personne d’origine étrangère. »
Des représentations inexactes des
jeunes diplômés Français issus de
l’immigration de la part de
recruteurs
Dans les bilans d’actions de sensibilisation menées par l’AFIJ, il a été mis en évidence les
représentations que se font les recruteurs des jeunes diplômés issus de l’immigration.
Les réponses à l’enquête de 2002 obtenues auprès de 400 recruteurs ont prouvé leur
connaissance inexacte de ce public. Lorsqu’il leur est demandé quel est le frein à
l’embauche des jeunes diplômés issus de l’immigration, les arguments retenus sont divers
mais 90% d’entre eux répondent qu’il s’agit de l’absence de la maîtrise de la langue
française à l’oral et 81% cochent l’absence de la maîtrise de la langue française à l’écrit.
100%
90%
81%
38%
7%
6%
5%
16%
1%
ad
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Source : « L’approche des pratiques de recrutement des jeunes diplômés issus de l’immigration », janvier 2003
Dans une des questions ouvertes de cette enquête demandant de qualifier les populations
rencontrant des difficultés, on trouve : « analphabètes », « primo arrivants (problèmes de
langues) », « jeunes avec des problèmes de comportement et de langages », etc.
AFIJ - Association pour Faciliter l’Insertion Professionnelle des Jeunes diplômés
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