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livres
Walter Benjamin, « La crise du roman », et « Petite histoire de la photographie », in
Œuvres II, Folio essais, 2000.
Alfred Döblin, Le rideau noir, roman des mots et des hasards, Farrago, 1999.
Alfred Döblin, Berlin Alexanderplatz, Gallimard folio, 2009.
Alfred Döblin, L'assassinat d'une renoncule, Presses universitaires de Grenoble, 1984.
Alfred Döblin, Voyage babylonien, L'imaginaire Gallimard, 2007.
Alfred Döblin, Wang-Loun, Fayard, 1989.
Alfred Döblin, Voyage et destin, Editions du Rocher, 2001.
Alfred Döblin, « Des visages, des images, en vérité », in August Sander, Visage d'une
époque, Bibliothèque visuelle, Schimer/Mosel, 1990.
Alfred Döblin, Sur la musique, conversations avec Calypso, Rivages Poche, 2002.
Alfred Döblin, Novembre 18, une révolution allemande, 4 tomes, Agone, 2008-2009.
Sigmund Freud, Lettres de jeunesse, Gallimard, 1990.
Sigmund Freud, Chroniques les plus brèves, Albin Michel, 1992
Sigmund Freud, « Allocution à Francfort dans la maison de Goethe », OC. Vol XVIII, PUF, 1994.
Sigmund Freud, Lettres à Wilhelm Fliess, 1887-1904, Édition complète, PUF, 2006.
Jean-François Laplenie, « La psychanalyse dans Berlin Alexanderplatz : une place de choix ? »
in Berlin Alexanderplatz d’Alfred Döblin, sous la direction de Frédéric Teinturier, L’Harmattan, 2011
Jacques Le Rider, Modernité viennoise et crises d'identité, Quadrige/PUF.
Jacques Le Rider, Fritz Mauthner, Une biographie intellectuelle, Bartillat, 2012.
Jacques Le Rider, Crise du langage et position mystique: le moment 1901-1903, autour de
Fritz Mauthner, publié sur internet, Germanica 43/2008.
Michel Vanoosthuyse, Alfred Döblin, Belin, 2005.
Con tribu tion a ux fra is 10€ Prix r éduit 5€
PSYCHANALYSE
Par Xavier Leconte
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À rebours, pourrait-on dire, mais n’est-ce pas le même geste, dans un
discours d’hommage à Freud pour son soixante-dixième anniversaire il
conclue en appelant les psychanalystes à se mettre à l’école de la littérature. Il rappelle que Dostoïevski, Ibsen et Strindberg ont écrit
avant Freud et termine sur ces mots : « La littérature est un réservoir de
connaissances très méprisé, une source et pas un affluent ».
Galerie verte
L’UNEBÉVUE
Il écrira plus tard, en 1941, que s’il s’est mis à étudier la psychiatrie c’est parce qu’il voulait « la vérité, une vérité qui ne passe pas
par les concepts où elle se dilue et s’effiloche ». Ce profond mouvement de défiance envers les entités abstraites et conceptuelles,
ces « hameçons pour bavards », nous verrons qu’il est à situer dans
un mouvement critique de l’époque dont une des figures majeures est
Fritz Mauthner avec ses Contributions à une critique du langage.
Döblin poursuit : « Je ne voulais nullement d’une simple philosophie,
et encore moins de l’aimable apparence de l’art. J’avais déjà vécu des
choses difficiles et je n’aimais pas les divertissements des gens bien
en place, ni l’esthétisme, du moins étais-je répugné par ce que j’en
voyais. En revanche, la vie dont je faisais l’expérience quotidienne
était empreinte de sérieux et chargée d’énergie ; merveilleusement âpre,
en outre, et terrible la Nature, dont nous participons aussi. »
SAMEDI 2 FÉVRIER
A la Galerie, au premier étage de l’ENTREPÔT
7 à 9 rue Francis de Pressensé 75014 Paris
de 14h à 16h30
La langue est une force productrice, à la fois sur le
plan de la forme et des idées. Parfois ce sont les lois
du rythme qui dominent, parfois ce sont les allitérations
qui semblent guider, parfois les assonances.Celui qui
n’a pas vécu cela ne connaît pas le phénomène essentiel
de la langue vivante, qui n’est pas la langue de la philologie ni celle du dictionnaire. Mais elle est un phénomène
prospère et concret, qui ne connaît pas de « mots » pas plus
que le monde ne connaît d’objets isolés.
Alfred Döblin
Au printemps 1930 Freud se rend à Berlin pour la mise en place
d’une nouvelle prothèse. Le séjour est plus long que prévu et il
s’échappe trois jours dans la maison de pêcheur que son fils
Ernst a acquis sur les bords de la Baltique. Il y fait « l’expérience d’un court vol de plaisance, le seul de sa vie ». À la
fin du mois de juillet commencent des vacances dans les environs
de Vienne. Deux jours après son installation, le 28 juillet 1930,
il reçoit « une lettre tout à fait charmante » lui annonçant que
le prix Goethe pour cette année lui avait été décerné. Ce n’est
pas pour lui tout à fait une surprise : dans ses chroniques les
plus brèves il notait déjà, à la date du 3 juillet, «le prix
Goethe fait surface ». Dans la « charmante lettre » d’Alfons
Paquet, poète, essayiste et romancier, secrétaire du comité
chargé d’administrer le Prix, Freud peut lire ceci : « En vous
décernant ce prix, vénéré Monsieur le Professeur, le Directoire
souhaite manifester en quelle haute estime il tient les bouleversements opérés par les nouvelles formes de recherche créées
par vous sur les forces qui modèlent notre époque. Par une
méthode relevant rigoureusement des sciences de la nature, en
même temps que par une interprétation hardie des allégories forgées par les poètes, votre recherche a ouvert un accès aux forces
de pulsion de l’âme, et par là créé la possibilité de comprendre à leur racine l’apparition et l’édification de nombreuses
formes de la culture, et de guérir des maladies dont jusqu’à présent l’art médical ne possédait pas la clé. Mais votre psychologie a fouillé et enrichi non seulement la science médicale, mais
également le monde de représentation des artistes et des ministres de l’âme, des historiens et des éducateurs ».
Jones note que l’idée de cette nomination venait de Paquet. Il
n’en dit pas plus le concernant, mais ajoute que ce dernier « fut soutenu, lors de la réunion qui eut lieu pour en discuter, par un psychiatre d’orientation psychanalytique, le Dr
Alfred Döblin, qui représentait la Section de poésie de
l’Académie prussienne des Arts. La majorité des membres du Comité
qui comprenait de nombreux hommes d’église fut, après de longues
discussions, contre cette nomination, mais aucun vote n’intervint.
Les perspectives semblaient sombres, mais Paquet était décidé à
surmonter l’opposition et y réussit après quelques semaines de discussions dans les coulisses ». Cette dernière indication, d’importance, Jones précise dans une note de bas de page que c’est le Dr
Döblin qui la lui a communiquée le 6 avril 1954.
Le vaillant Alfred Döblin qui a défendu la cause de Freud devient donc
sous la plume de Jones « un psychiatre d’orientation psychanalytique
qui représentait la Section de poésie de l’Académie prussienne des Arts
». Formulation particulièrement incongrue, bien que littéralement
juste, lorsqu’on sait que Döblin, en 1930, était un écrivain déjà célèbre qui venait de publier l’année précédente un roman qui avait fait
grand bruit, Berlin Alexanderplatz. Il était certes également médecin
psychiatre. En 1911 il installe son premier cabinet médical en médecine générale et neurologie, et commence à travailler à la Caisse
d’Assurance Maladie. D’après le témoignage de Robert Minder, « il pratiquait les méthodes freudiennes dans sa clientèle populaire à BerlinEst dès avant 1914, s’était soumis lui-même, en 1920, à une « analyse
didactique » chez Georg Simmel, l’un des grands psychanalystes allemands
de l’époque ».
« Plus tard, commente Minder, Döblin sera freudien et anti-freudien
tout à la fois, de même qu’il sera marxiste et anti-marxiste ». La
bévue de Jones, si c’en est une, indique vraisemblablement un malaise.
Comment peut-on être à la fois psychiatre, psychanalyste et écrivain ? Selon les coordonnées d’une « polémique récurrente entre
champ littéraire et champ psychanalytique », comme le souligne
Jean-François Laplenie, il faudrait « protéger l’activité artistique de la concurrence, voire de la contamination par ce que Musil
a nommé à la même époque la “puissance voisine, obscurément menaçante et attirante” de la psychanalyse ».
Or Döblin manie avec une grande délicatesse cette problématique aux
allures paradoxales. Il considérait tout d’abord que sa pratique
médicale ne constituait nullement une entrave à la création poétique. Bien au contraire, dans un manifeste retentissant et provocateur paru en 1913 dans le Sturm sous le titre : Aux auteurs de
romans et à leurs critiques. Programme de Berlin, il lance ce
conseil : « Qu’on aille à l’école de la psychiatrie, la seule
science qui s’occupe de la totalité de l’être psychique ; elle a
compris depuis longtemps la naïveté de la psychologie et elle se
contente de noter les processus, les mouvements, — elle n’a pour
tout le reste, et le pourquoi et le comment, qu’un hochement de
tête et un haussement d’épaules. « Colère », « amour », « mépris »
signalent des phénomènes sensibles, mais, au-delà, ces conjonctions
de lettres primitives et ineptes ne disent rien. »