LE MAG LE RENDEZ-VOUS DU - La Chaux-de
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LE MAG LE RENDEZ-VOUS DU - La Chaux-de
JEUDI 24 MARS 2016 yy yyJEUDI 24 MARS 2016 16 16 MAGAZINE LE MAG LE RENDEZ-VOUS DU Un apprenti dans l’atelier de décolletage du Lycée professionnel de Montjoux; une halte entre Besançon et La Chaux-de-Fonds; une villa à Gilley; en 2015, le carnaval de Gilley s’était choisi les Etats-Unis pour thème; un apprenti du Centre Ils n’ont pas fait que passer LA CHAUX-DE-FONDS La région transfrontalière parcourue par la «ligne des horlogers» a inspiré les photographes Pablo Fernandez et Hervé Dez. DOMINIQUE BOSSHARD Au bord du Doubs, un immeuble surplombe un bouquet d’arbres. Ailleurs, un chien se découpe derrière la baie vitrée d’une villa, telle une vigie à son poste. Au bout d’un quai enneigé, un panneau publicitaire sert d’hameçon pour un hôtel... Quantité d’autres photos se pressent sur les murs du Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds, comme autant de fenêtres ouvertes sur la zone frontalière qui s’étend de La Chaux-de-Fonds à Besançon. A de nombreuses reprises, les photographes Pablo Fernandez, le Chaux-de-Fonnier, et Hervé Dez, le Parisien, ont traversé, sans s’y arrêter, ces localités disséminées tout au long de la ligne ferroviaire dite «des horlogers». Comme la plupart des voyageurs, ils n’ont fait que passer... Puis, en 2012, le projet «Traversées», un cycle de voyages sonores transfrontaliers entre autres mené par l’ABC sur cette même ligne, a suscité des envies. Et si, à son tour, le duo tirait parti de ce territoire franco-suisse? A travers le prisme de leur travail documentaire, on découvre des espaces ni très riants ni très esthétiques. «La ligne traverse pourtant des endroits magnifiques, notamment au fil du Doubs», révèle Pablo Fernandez. «Mais ce qui nous intéressait, c’était de montrer l’impact de la présence humaine sur le paysage». Sans cesse remodelée au gré des aléas de l’économie et de l’industrialisation (ou de la désindustrialisation), cette zone transfrontalière n’échappe pas à une certaine standardisation urbanistique. Dans le terreau de nos sociétés de consommation, les quartiers résidentiels avec leurs villas bien alignées, les supermarchés périphériques, ont poussé comme des champignons. La notion de frontière s’estompe. «Mais nos paysages régionaux ne sont pas dénués de paradoxes», relève Pablo Fernandez. «Ces structures et ces constructions uniformisées cohabitent avec des villes, Le Locle, La Chaux-de-Fonds et Besançon, inscrites au patrimoine de l’Unesco pour leurs singularités architecturales.» Noir et blanc atemporel demain, ils prennent la pose dans les locaux de leurs écoles professionnelles. Relatifs aux gestes de l’apprentissage, des clichés en noir et blanc accompagnent ces portraits en couleur. «L’usage de la couleur ou du noir et blanc n’est pas arbitraire mais fait sens», précise le photographe. «L’atemporalité du noir et blanc va de pair avec la transmission, donc la pérennité, d’un savoir-faire. La couleur, en revanche, a un lien marqué avec l’instant présent, elle situe une époque et se prête donc à l’instantané.» Dans cette approche de la population et des paysages, tout est donc pesé, pensé. Ce qui ne tue pas pour autant dans l’œuf toute spontanéité. En témoignent des images grappillées, elles, au passage, objectif collé à la vitre de la voiture ou du train. Des scènes éphémères, un couple qui s’embrasse, comme peut en capter l’œil de tout voyageur. Ou des apparitions cocasses, comme cette «culotte» accrochée au flanc d’une colline: un mot qu’un farceur, sans doute, a recomposé en puisant dans les lettres du festival Rock altitude! } Ce mode de vie globalisé n’a pas non plus réduit en charpie le tissu social et communautaire. On assiste à une fête de lutte au Locle, au carnaval de Gilley, on franchit le seuil du XL bowling à la INFO Tchaux. Les deux photographes sont allés à la ren- «Nous ne faisons que passer»: contre de la population, avec un intérêt marqué La Chaux-de-Fonds, Musée des beaux-arts, jusqu’au 22 mai pour la jeunesse, et plus particulièrement les ap- (nos éditions du 12 mars). Besançon, Musée du temps, du 11 juin au 23 septembre 2016. Catalogue de l’exposition. prentis. Horlogers, fromagers ou mécaniciens de + Passion, Passacaille et cantates de Bach à la Collégiale de Neuchâtel SPÉCIAL PÂQUES Bach dans toute sa splendeur retentira ce week-end à la Collégiale de Neuchâtel et au temple du Locle. L’Eglise rouge, elle, accueillera l’Office des Ténèbres de Victoria, ressuscité par le chœur In illo tempore. De Vendredi saint à dimanche, les Concerts de la Collégiale proposent une immersion lumineuse dans les œuvres que Bach a composées aux alentours de 1724. C’est l’année de sa Passion selon Saint-Jean. L’année aussi de la plupart de ses cantates. L’immense compositeur, qui vient alors d’être nommé cantor à l’église Saint-Thomas de Leipzig, insuffle à sa Passion la ferveur de la tradition luthérienne avec des accents dramatiques proches de l’opéra. Restituer dans toutes ses couleurs cette œuvre monumentale, célébrissime, relève toujours d’une gageure. Le défi est relevé ici par deux formations de la région qui arpentent en virtuoses le répertoire ancien: l’Ensemble vocal d’Erguël sous la direction de Philippe Krüttli et l’orchestre d’instruments anciens, le Moment baroque. Pour petits et grands Samedi, Simon Peguiron, organiste à la Collégiale, donnera à entendre quelques-uns des plus grands classiques de Bach pour l’orgue, avec notamment la Passacaille en ut mineur et les six chorals Schübler. Un concert pour les enfants aura lieu l’après-midi avec quelques extraits du programme et une présentation du roi des instruments. Le rendez-vous de dimanche sera articulé autour de quatre cantates pour Pâques. Ces œuvres seront interprétées par l’Ensemble vocal et instrumental de la Collégiale. Instigateur des Concerts de la Collégiale, Simon Peguiron est intarissable sur cette époque si féconde de Bach, un compositeur qui habite le musicien de 36 ans «depuis l’adolescence». Organiste titulaire de la Collégiale depuis sept ans, le Neuchâtelois a certes joué et rejoué les Passions et les cantates. Et pourtant, «leur richesse est illimitée, plus on les joue, plus on a envie d’en poursuivre l’exploration». Une histoire de passions. } CFA + Neuchâtel, Collégiale, demain, samedi et ● dimanche à 17h, concert pour les enfants samedi à 15h. La Passion est également donnée ce soir à 20h à la Collégiale de Saint-Imier. La passion du chant incarnée par l’Ensemble vocal d’Erguël. PABLO FERNANDEZ. JEUDI 24 MARS 2016 yy 17 MAGAZINE 17 Gulwali Passarlay avait 13 ans lorsqu’il LECTURE Les routes de l’exil JEUDI a quitté l’Afghanistan pour l’Angleterre. Il est aujourd’hui étudiant en sciences politiques. PAGE 18 TROIS RAISONS D’ALLER VOIR... Oxmo Puccino, rappeur sans chaînes, ni haine RAP L’Olympia le 30 mars affiche complet. Mais il reste encore quelques places pour ce soir à la Case à chocs. interrégional de formation des Montagnes neuchâteloises (Cifom), de g. à dr. et de haut en bas. 1. CË?FDD<;<KÜK< En 2012, Oxmo Puccino avait débarqué à la Case à chocs en «Roi sans carrosse». Il revient ce soir chanter «La voix lactée», titre de son huitième album. Sa galaxie est celle du hip-hop, mais le «poétiseur» franco-malien est un électron libre «à cheval sur l’impossible». Un funambule en équilibre sur les cultures et les musiques. Ce qu’il veut, c’est chanter son époque avec des mots à lui. PABLO FERNANDEZ-HERVÉ DEZ «Nous ne faisons que passer»... Le titre de l’exposition fait bien sûr écho à «la ligne des horlogers» mais peut évoquer aussi la visite au musée ou la trajectoire éphémère de nos existences... La photographie servirait-elle à retenir le temps qui s’enfuit? Sans nier la part de nostalgie inhérente à cet art, Pablo Fernandez préfère bifurquer vers la réponse du grand photographe américain Garry Winogrand: «Je photographie pour savoir à quoi ressemblent les choses quand elles sont photographiées.» Et cette curiosité-là, assure le Chaux-de-Fonnier, est difficile à expliquer. «La photographie, c’est une façon, assez pudique et assez polie peut-être, de faire un pas de côté pour tenter de regarder et de penser le monde», se risque-t-il. Pablo Fernandez et Hervé Dez partagent, en outre, une même conception de leur travail documentaire, axé sur un échange avec les habitants des régions concernées. «Nous tenons à avoir un retour sur nos images, sur notre propos.» Présenté jusqu’ici en maints endroits de façon fragmentée, ce travail a certes suscité des réactions, «d’une honnêteté absolue et d’une grande précision», apprécie Pablo Fernandez. Certaines images ont été jugées «super-glauques»? Le photographe ne se démonte pas: ces endroits, il sait en apprécier les atouts – il mentionne les fromageries avec gourmandise –, mais le travail présenté, rappelle-t-il, ne s’apparentait pas à une démarche touristique. «Nous n’étions pas là pour vendre l’image d’une région.» Les photos d’oiseaux morts – l’un éclaffé au côté d’une canette de boisson énergisante, l’autre, une corneille, écrasé sur le bord de la route – leur ont valu pas mal de reproches aussi. Loin d’être anecdotiques, défend l’intéressé, ces clichés nous en disent long sur la cohabitation de la nature, d’une vie plus «sauvage», et de notre monde consumériste et policé. «Dans un quartier bien propre et bien lisse, un oiseau mort, ça fait tache!» } DR-VINCENT DESAILLY Bien loin d’un dépliant touristique 2. CË?FDD<ÁCËy:FLK< Son blaze, Puccino, est emprunté aux films de gangsters. Et son credo – «être à l’heure sans être à la mode» – pourrait être le slogan d’une montre suisse haut de gamme. A 41 ans, l’enfant de Segou (Mali), grandi en banlieue parisienne, jongle «entre le marteau et la plume»: le rap pour «parler du monde dans lequel nous vivons» et l’écriture pour «briser le silence» des exclus. En amoureux de la langue française, il admire Boby Lapointe et Renaud, mais ne l’appelez plus «le Black Brel». Ce qu’il veut, c’est chanter sa galaxie à lui au nom des jeunes qui n’ont pas eu sa chance: «Attends pas c’trèfle à quatre feuilles ou c’est la dégringolade...» UNE RENCONTRE DANS LES BALKANS SCELLE LEUR COLLABORATION Pablo Fernandez: Il vit et travaille à La Chaux-de-Fonds, où il est né en 1968. Autodidacte, il publie ses premières photos dans «L’Impartial», à la fin des années 1980. Il parcourt régulièrement l’Europe, et notamment les Balkans. En 2004, il y rencontre le photographe parisien Hervé Dez, à l’affût du même sujet, les Roms du Sud de la Serbie: «Plutôt que de nous affronter, nous avons choisi d’unir nos forces»! De 2013 à 2015, ils récidivent avec le projet «Nous ne faisons que passer», et choisissent, à dessein, de ne pas différencier leurs photos par une signature. Hervé Dez: Né en 1967, il vit et travaille à Boulogne-Billancourt. Issu de l’Ecole des arts et métiers de l’image, détenteur d’une licence en Arts plastiques à la Sorbonne, il a été membre du collectif le bar Floréal de 2002 à 2008. Son travail documente les mutations des paysages urbains, de même que les effets des transitions sociales et économiques en Europe de l’Est et du Sud-Est. } AU TEMPLE DU LOCLE Les sept derniers jours Chanteuse classique, Miriam Aellig (photo DR) est aussi cheffe de chœur. Dans ce registre, la Chaux-de-Fonnière s’illustrera demain au temple du Locle au pupitre d’un ensemble à découvrir pour la première fois. Formé de quelque 70 membres des Eglises Action biblique de Suisse, auxquels se joignent cinq instrumentistes et deux récitants, le chœur AB s’est constitué spécialement pour ces concerts de Pâques. Au programme: des chorals et un extrait de l’Offrande musicale de Bach. En deuxième partie, les chanteurs interpréteront une œuvre inédite en français du compositeur américain Joel Raney, «Les 7 derniers jours». Miriam Aellig en signe la traduction et l’adaptation musicale. } CFA + Le Locle, temple, demain à 20h. Egalement au temple d’Yverdon le 26 à 20h. ● 3. CË?FDD<;<G8IFC< «Cessez d’être spectateur de votre vie!» scande le rappeur d’un bout à l’autre de sa voie lactée. Avec son frère, le basketteur Mamoutou Diarra, il a créé l’association Courte Echelle pour aider les enfants des cités à s’en sortir. Disque d’or dès son premier album («Opéra Puccino», 1998), largement reconnu audelà des cercles du hip-hop, ce fils d’immigrés a appris «à grimper à l’étage sans escalier». Son père, serrurier de métier, est un silencieux, un résigné. Ce qu’il veut, lui, c’est juste chanter la vie: «Sors tes antennes. Capte. Respire un peu, écoute ce cœur battre». } CATHERINE FAVRE + INFO Neuchâtel Case à chocs, jeudi 24 mars dès 20h. En première partie: Redouanne Harjane. Une histoire de passion aussi à l’église rouge C’est devenu un rituel: chaque Vendredi saint depuis 20 ans déjà, le chœur In illo tempore chante l’Office des Ténèbres du compositeur espagnol Tomas Luis de Victoria (1548 – 1611). Les Neuchâtelois ressuscitent – si l’on ose dire – la tradition aujourd’hui disparue de cette liturgie célébrée à la Renaissance. Au fil des chants, quinze cierges brûlant sur un chandelier triangulaire, sont éteints les uns après les autres, plongeant progressivement l’église dans l’obscurité. Un seul demeure allumé, dissimulé derrière l’autel, pour figurer la mort du Christ. S’élève alors dans la nuit le Miserere en une polyphonie poignante. Une fois de plus, demain, la basilique Notre-Dame, à Neuchâtel, résonnera des accents de cet office qui relève «sans doute de la mise en scène liturgique la plus prenante que l’Occident ait conçue», glisse le chef Alexandre Traube en explorateur toujours émerveillé de l’œuvre de Victoria. Spécialisé dans les répertoires sacrés par-delà toutes les cultures et toutes les époques, le chœur In illo tempore s’illustre depuis sa création en 1995 comme l’ambassadeur privilégié de Victoria. Plus de 20 ans d’un travail exigeant, reconnu sur la scène internationale. «Victoria», souligne Alexandre Traube, Le chœur In Illo tempore et l’œuvre de Victoria, 20 ans d’amour. DR «nous a appris à aller à l’essentiel, sans artifice. Sa musique sait trouver l’effet psychologique maximum avec une économie de moyens re- marquables. C’est le Mozart de la Renaissance.» } CFA + Neuchâtel, basilique Notre-Dame ● (Eglise rouge), demain 25 mars à 20h.