Ulipristal acétate (Esmya®)
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Ulipristal acétate (Esmya®)
Fibromes utérins Ulipristal acétate (Esmya ): un traitement qui renforce notre arsenal thérapeutique ® Propos recueillis par Dominique-Jean Bouilliez Nouveau médicament indiqué dans le traitement préopératoire des symptômes modérés à sévères des fibromes utérins chez la femme adulte en âge de procréer, Esmya® a pour principe actif l’ulipristal acétate, un modulateur des récepteurs de la progestérone caractérisé par un effet antagoniste partiel de la progestérone sur des tissus spécifiques. Il exerce une action directe sur les fibromes, en réduisant leur taille par le biais de l’inhibition de la prolifération cellulaire et l’induction de l’apoptose. Chez qui et comment l’utiliser au quotidien? L’expérience des Pr Michelle Nisolle (CHU La Citadelle, Liège) et Jasper Verguts (Virga Jesse, Hasselt). Pr Jasper Verguts (JV): La fréquence de cette affection est très variable selon le tropisme du gynécologue, car notre discipline touche à beaucoup d’aspects. Cela dit, dans ma pratique, ce sont 3 à 6 femmes par semaine qui viennent consulter pour des problèmes liés à un fibrome. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’elles aient toutes besoin d’un traitement. Dans ce cadre, j’essaie toujours d’appréhender d’abord le problème en fonction des plaintes de la patiente. Ce n’est que dans un deuxième temps qu’interviennent les caractéristiques du fibrome et les attentes de la patiente. Pr Michelle Nisolle (MN): Ma patientèle est un peu plus sélectionnée pour la chirurgie (laparoscopique ou autre), ce qui explique que je rencontre fréquemment cette pathologie, ce qui m’a permis par ailleurs de participer aux études pilote sur ce modulateur sélectif des récepteurs à la progestérone (SPRM). GC376F 79426/NL 01-2014 Quelles sont les plaintes le plus fréquemment formulées? Pr JV: Elles sont de trois types: les problèmes liés à la fertilité, les douleurs et les saignements. Le premier problème n’est pas simple, car il n’y a pas encore de règle EBM sur la prise en charge des problèmes de fertilité chez les femmes qui ont un fibrome. Cela dit, la solution la plus logique est le plus souvent chirurgicale lorsque le fibrome est intra-utérin. Quand le fibrome est extra-utérin, j’essaie d’intégrer sa prise en charge en fonction de la présence ou non d’autres symptômes. Pr MN: Mais il est des cas où il vaut mieux retarder, voire éviter la chirurgie, notamment chez les femmes multi-opérées qui, jusque récemment, n’avaient pas d’alternative à une chirurgie définitive. Et en cas de douleurs? Pr JV: La première question à se poser est de savoir si les plaintes (douleur, pression) sont liées au fibrome ou à d’autres affections (une infection urinaire, une endométriose, un kyste ovarien par exemple). Lorsque le fibrome est en cause et que la femme est en périménopause, je discute plus volontiers d’une solution chirurgicale que médicamenteuse. C’est aussi le cas lorsque la femme exprime clairement son souhait de ne plus avoir d’enfant. Quant aux autres femmes, c’est une discussion au cas par cas au cours de laquelle la solution de l’ulipristal acétate doit être envisagée. Pr MN: La douleur n’est pas une plainte rapportée fréquemment en consultation, contrairement aux saignements, qui sont gênants par euxmêmes, mais aussi par les conséquences qu’ils entraînent, l’anémie par exemple. Leur présence impose de savoir si cela est lié directement au fibrome ou à d’autres problèmes endométriaux. Pratiquement, je propose le traitement de manière systématique aux patientes qui présentent des saignements et à toutes les femmes symptomatiques pour lesquelles on me demande un avis. Pr JV: L’âge est également un facteur important quant à la décision thérapeutique, ainsi que les souhaits de la femme car on peut parfois contrôler les saignements avec une hormonothérapie contraceptive ou un stérilet. Mais cette hormonothérapie n’est pas toujours aussi efficace que souhaité. Ce sont ces patientes, celles qui ont des saignements non contrôlés ou gênants, qui sont les meilleures candidates à un traitement par SPRM. Le gros avantage de ce médicament, que l’on propose durant 3 mois avant l’hystérectomie, est qu’il arrête les saignements et facilite l’intervention, qui peut par ailleurs être programmée sans difficultés. Pour quelles patientes estimez-vous que l’ulipristal acétate est une réelle valeur ajoutée? Pr JV: Certainement pour deux catégories: les patientes qui présentent un fibrome intra-mural de gros volume (jusque 10cm) et pour lesquelles l’hystérectomie par voie vaginale, éventuellement laparoscopique, a peu de chances de pouvoir être réalisée sans difficultés, et les femmes qui présentent des problèmes de saignements abondants. Dans le premier Pr Jasper Verguts cas, le traitement permet une réduction substantielle du volume du fibrome, de telle sorte que l’intervention peut se réaliser par voie vaginale. Cela facilite la phase post-opératoire en évitant la laparotomie. Par ailleurs, sur le plan strictement chirurgical, le geste est plus facile dans la mesure où les vaisseaux sanguins sont plus faciles à coaguler et, en cas de myomectomie, la dissection est plus facile. Le seul problème chirurgical rencontré après ce traitement est un ramollissement plus important du fibrome qui rend sa manipulation un peu plus difficile. A contrario, il est plus facile à identifier. Pr MN: La diminution de la taille du fibrome m’importe moins, car je propose habituellement une chirurgie d’emblée aux patientes dont le fibrome est de taille importante et qui ne saignent pas. Quant aux patientes pour lesquelles se posent des problèmes de fertilité, souvent multi-opérées, et qui manifestent encore un désir de maternité, il faut tenter tout ce qui est possible et les SPRM sont une bonne solution à cet égard. J’ai cependant l’impression générale que les gros fibromes répondent moins bien que les petits fibromes. Reste alors le groupe le plus important, celui des patientes pour lesquelles une chirurgie est programmée du fait de l’abondance des saignements. Chez ces patientes, l’ulipristal acétate permet un contrôle très rapide du saignement, habituellement endéans la semaine. Dans mon expérience, toutes ont obtenu un arrêt des saignements sans pertes intercurrentes et ce, jusqu’au moment de l’intervention. L’un des avantages de ce traitement est que ces femmes arrivent sur la table d’opération dans un meilleur état général. Elles sont également moins fatiguées et ont nettement moins souvent besoin d’une transfusion après l’opération. Pratiquement, comment procédez-vous? Pr JV: J’ai pris l’habitude de programmer l’intervention en fin de traitement, ce qui comporte l’avantage indéniable de contrôler le saignement et de ne pas devoir postposer l’intervention pour des saignements intercurrents. Pr MN: Une fois la prescription effectuée, je revois les patientes, généralement au terme des 3 mois, et je réalise à nouveau une échographie. Il arrive que l’amélioration soit spectaculaire, auquel cas l’intervention programmée sera bien entendu reportée, le plus souvent à 6 mois à un an, car après traitement, les fibromes finissent toujours par reprendre du volume. L’avantage du traitement est aussi de nous donner du temps pour préparer convenablement la patiente, ce que ne Pr Michelle Nisolle permettent pas les analogues de la GnRH, qui occasionnent par ailleurs des effets secondaires parfois très gênants (bouffées de chaleur,…). Cela permet aussi de les recharger en fer lorsque c’est nécessaire et d’arriver en meilleur état général. Enfin, le délai avant l’intervention permet également de déterminer le type d’opération qui convient le mieux, voire d’en reformuler l’indication. Pr JV: En résumé, l’intervention chirurgicale est plus sûre, plus aisée à effectuer et, dans des conditions de confort sans pareil, plus facile à programmer. Dans ce contexte, l’ulipristal acétate est devenu un traitement indispensable dans notre pratique, d’autant plus qu’il n’existe pas d’alternative. Il renforce notre arsenal plutôt que de l’élargir. Pr MN: Nous voyons également beaucoup de patientes arriver aux urgences avec une anémie à 7-8g Hb/L. Et ces patientes, qui ne peuvent plus à présent bénéficier d’un traitement par estrogènes à forte dose, n’avaient plus que les antifibrinolytiques comme possibilité. Ce SPRM peut être administré dans le cadre de l’urgence, avec pour avantage majeur de faire disparaître les saignements endéans les 8 jours, ce qui permet de postposer leur intervention de 3 mois ou plus et de réaliser cette intervention dans de bonnes conditions de confort. Mais il faut faire comprendre aux patientes que ce n’est pas parce que le saignement a disparu que le fibrome n’est plus présent… Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes… Pr MN: Le geste chirurgical est généralement plus facile parce que le plan de clivage est plus aisé, même s’il arrive que le ramollissement du fibrome modifie la perception tactile. Pr MN/Pr JV: On peut retenir en résumé que ce traitement assure un contrôle rapide des saignements, même lorsqu’ils sont abondants. Il permet en outre une réduction significative du volume du fibrome, ces deux actions favorisant la correction rapide de l’anémie s’il y en a et la prévention des complications opératoires. Enfin, c’est peu de dire que ce traitement est très bien toléré. Cet article a été réalisé grâce à la collaboration de Gedeon Richter Benelux