Mémoire M1 L`expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée

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Mémoire M1 L`expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée
MASTER FOAD SCIENCES DE L’EDUCATION UNIVERSITE DE ROUEN
L’expérience scolaire
des élèves en Aide
Personnalisée.
Mémoire de Master 1ère année
Isabelle Valle
2010
UFR SCIENCES
DE L’EDUCATION
MONT SAINT AIGNAN
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
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Remerciements
Tout d’abord je tiens à remercier, pour leur participation toujours active et
volontaire, les élèves entendus en entretien.
Je remercie ensuite mes collègues et la Directrice de mon école pour l’intérêt
qu’ils ont porté à ce travail, pour la confiance qu’ils m’ont témoignée et les
discussions enrichissantes que nous avons eues.
Des remerciements particuliers à Laurent Lescouarch, Maître de conférences
à l’Université de Rouen, pour son accompagnement ainsi que ses conseils avisés et
toujours très précieux.
Un grand remerciement enfin à ma famille, pour son soutien et sa grande
patience.
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
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Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
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« Souvenons-nous le début du Phèdre de Platon : cette rencontre extraordinaire où le
maître et l’élève vont se baigner les pieds dans la rivière et deviser tranquillement,
sereinement. Les pieds dans l’Illisos, le maître et l’élève savourent ensemble le plaisir
d’apprendre : occasion assumée réciproquement sans aucune concession, pourtant, à la
rigueur de la transmission. »
Philippe Meirieu, De l’ennui en pédagogie,
Conférence donnée lors de la journée d'étude sur "L'ennui à l'école" organisée par
le Conseil national des programmes, Paris, janvier 2003.
« On y arrive toujours quand on croit qu’on va y arriver. »
Apolline, 8 ans 1/2
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
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Sommaire
Introduction ...................................................................................................................................... 7
1.
Les enjeux d’un dispositif d’aide particulier : l’aide personnalisée......................................... 9
1.1.
2.
3.
L'aide aux enfants en difficulté........................................................................................ 9
1.1.1.
La notion d’aide ........................................................................................................... 9
1.1.2.
L’aide pédagogique dans ou hors de la classe........................................................... 10
1.1.3.
Les dispositifs spécifiques d’aide ............................................................................... 11
1.1.4.
L’Aide Spécialisée : le RASED (Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté) 15
1.2.
Comment l’Aide Personnalisée peut-elle favoriser l’expérience scolaire des élèves ? 18
1.3.
L'estime de soi ............................................................................................................... 20
1.4.
L’envie de travailler pour réussir ................................................................................... 23
1.5.
La relation avec l'adulte médiateur ............................................................................... 24
1.6.
L’attractivité des activités.............................................................................................. 26
1.7.
La sécurité cognitive grâce à un environnement favorable .......................................... 28
Le dispositif méthodologique ................................................................................................ 30
2.1.
Choix de la population étudiée ..................................................................................... 30
2.2.
Choix du mode de collecte des informations ................................................................ 31
2.3.
Déroulement des entretiens ......................................................................................... 32
2.4.
Traitement des résultats ............................................................................................... 34
2.4.1.
Les conceptions et les attentes des élèves au sujet de l’Aide Personnalisée ........... 35
2.4.2.
La confiance en soi .................................................................................................... 36
2.4.3.
L’envie de travailler pour réussir ............................................................................... 37
2.4.4.
La relation à l’enseignant .......................................................................................... 39
2.4.5.
Les activités en Aide Personnalisée ........................................................................... 40
2.4.6.
L’environnement en Aide Personnalisée................................................................... 41
L’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée ...................................................... 44
3.1.
L’expérience scolaire en Aide Personnalisée : une expérience très positive ................ 44
3.1.1.
L’environnement en Aide Personnalisée................................................................... 44
3.1.2.
La relation à l’enseignant en Aide Personnalisée ...................................................... 46
3.2.
L’expérience scolaire en Aide Personnalisée : une expérience positive ....................... 48
3.2.2.
L’envie de travailler pour réussir ............................................................................... 48
3.2.3.
Des activités adaptées ............................................................................................... 48
3.3.
L’expérience scolaire en Aide Personnalisée peut-elle favoriser la confiance en soi ? 49
Conclusion ....................................................................................................................................... 51
4.
Annexes ................................................................................................................................. 54
4.1.
Tableau récapitulatif n°1 des réponses des élèves aux questions ouvertes ................. 54
4.2.
Tableau récapitulatif n°2 des réponses des élèves aux questions fermées .................. 55
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Introduction
Mis en place en 2008, le nouveau dispositif d’aide aux enfants en difficulté scolaire
baptisé « Aides Personnalisées » n’a pour l’instant pas été interrogé en termes
d’amélioration des résultats des élèves. Cela supposerait en effet la mise en place d’un lourd
dispositif de suivi de cohortes.
De plus, peu de directives ont été données aux enseignants concernant cette prise en
charge. D’ailleurs ils n’ont pas bénéficié de formation spécifique pour l’instant.
Ainsi, chaque enseignant ayant en charge des élèves en Aide Personnalisée leur propose ce
qu’il connaît et ce qui lui semble adapté au public accueilli. Qu’il s’agisse d’une simple
remédiation ou de l’invention d’une autre façon d’enseigner adaptée aux difficultés
d’apprentissage des élèves concernés.
Malgré un accueil très mitigé de ce dispositif par les enseignants, « des bruits courent »
au sujet de l’Aide Personnalisée. Les maîtres et maîtresses témoignent du fait qu’il s’y passe
« quelque chose ». En effet, des élèves mal à l’aise en classe se trouvent contents d’être là,
certains ayant une attitude d’évitement face au travail retrouvent l’envie d’essayer de faire
ce que les enseignants leur demandent, certains trouvent enfin le courage de poser des
questions et d’avouer qu’ils n’ont pas compris, d’autres encore font les efforts qu’ils
n’avaient pas faits jusque là.
Selon les enseignants, certains élèves pris en charge en Aide Personnalisée ont une
attitude inattendue : ils semblent, de façon tout à fait paradoxale, apprécier ce temps
d’école supplémentaire.
Pourquoi les enseignants ont-ils le sentiment que les conditions de travail spécifiques aux
Aides Personnalisées apportent, hormis le soutien scolaire, quelque chose en plus aux élèves
de l’école ? Que se passe-t-il de si particulier en Aide Personnalisée pour que les élèves
soient plus disponibles, plus volontaires vis-à-vis des apprentissages ?
Nous l’avons dit, il y a peu de moyens pour l’instant de mesurer l’impact des Aides
Personnalisées sur les résultats des élèves. Au moins est-il possible pour les enseignants de
témoigner de ce qu’ils font, de relater ce qu’ils constatent. Il serait possible aussi pour un
chercheur d’observer les pratiques. Mais cela ne nous apprendrait rien ou si peu sur ce que
les élèves ressentent lorsqu’ils prolongent leur journée scolaire en Aide Personnalisée.
Pourtant n’est-ce pas justement pour eux que cette aide a été mise en place ?
Dans un Dossier d’actualité1 publié en novembre 2009 (n°49) par l’INRP, la rédactrice
Agnès Cavet présente les travaux de Valérie Caillet (2008). Elle nous apprend que « la
sociologie de l’éducation a longtemps négligé l’étude des acteurs scolaires, et plus
particulièrement celle des élèves. Il a fallu attendre les années 90 pour que la recherche […]
place l’élève au centre de ses investigations et qu’elle interroge son expérience scolaire. »
Ainsi la recherche aura quasiment tout exploré mais en négligeant le cœur de ses
préoccupations, à savoir « le ressenti », le vécu, « l’expérience scolaire » des élèves.
1
Cavet, A. in Dossier d’actualité, une publication mensuelle de la Veille scientifique et technologique, Institut National
de Recherche Pédagogique, membre associé de l’université de Lyon. INRP. Dossier n°49 de novembre 2009.
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Toujours selon Agnès Cavet, François Dubet fut un des premiers à aborder cette question
avec la parution de son ouvrage Les lycéens en 1991. Selon lui, « l'expérience des élèves est
l'unité élémentaire à partir de laquelle on peut essayer de penser l'éducation, puisque c'est là
que se mesure ce que l'école "fait" réellement. »2
En fait, selon Bernard Charlot3, « le sens de l’école n’est plus donné mais doit être construit
par les acteurs ». Il cite lui aussi François Dubet et son travail sur les difficultés des jeunes et
sur les lycéens (1987 et 1991) : « on définira l’expérience scolaire comme la manière dont les
acteurs, individuels ou collectifs, combinent les diverses logiques de l’action qui structurent le
monde scolaire. » (p43)
Ainsi c’est l’élève lui-même, de façon tout à fait personnelle, qui va construire son
« expérience scolaire » en fonction de l’offre qui lui est faite par les différents acteurs du
système. Et c’est cette même expérience qui va déterminer sa relation à l’école et aux
apprentissages.
Toujours selon Agnès Cavet4, « pour Caillet (2008), l'expérience scolaire est bien sûr
influencée par des déterminants tels que la position sociale, le parcours scolaire et l'âge de
l'élève. « Mais la cohérence des expériences scolaires dépend aussi des ressources internes à
l'école elle-même, de son climat, de sa politique scolaire, des relations pédagogiques, en
bref de sa capacité à réduire les tensions de l'expérience », tensions qui vont croissant au fil
de la progression de l'élève dans son parcours scolaire. »
Il apparaît alors que le « ressenti » de l’élève à l’école est essentiel dans son parcours mais
surtout que cette « expérience scolaire » dépend aussi de facteurs internes à l’école sur
lesquels il est possible de faire levier.
Car les tensions sont bien réelles. Selon l'enquête Baromètre Trajectoires 2009, 66% des
jeunes interrogés n'aiment « pas » ou « peu » aller à l'école, et ce chiffre est en
augmentation depuis l'enquête de 2008. Agnès Cavet cite là encore Valérie Caillet : « Ceci
peut s'expliquer par le fait qu'une majorité (53%) des enfants ou adolescents interrogés
s'ennuie à l'école » : 37% s'ennuient « quelques fois » et 16% « souvent», voire « tout le
temps ». « À cela s'ajoute le constat que l'école [...] demeure un facteur de stress pour une
part significative des [élèves] interrogés ». Ainsi, plus du tiers (36%) déclarent avoir
« parfois » ou « souvent » mal au ventre avant d'aller à l'école ou au collège. »
Ainsi l’expérience scolaire est loin d’être positive pour tous. Comment peut-on imaginer
qu’un élève puisse avoir envie de travailler et de réussir si l’école est « ennuyeuse » ou pire
encore, un « facteur de stress » ? Et de la même façon, est-il possible que malgré cela les
élèves aient envie de rester en Aide Personnalisée ?
L’expérience scolaire des élèves, leur « ressenti » à l’école est à interroger. L’Aide
Personnalisée peut être un premier terrain d’investigation intéressant. Il s’agit de
questionner l’ « expérience scolaire » à l’occasion de la mise en place d’un nouveau dispositif
2
Dubet, F. Faits d’école, Paris Ed. de l’EHESS, 2008
Charlot, B. Du Rapport au Savoir Eléments pour une théorie Anthropos Economica 2005
4 Cavet, A. in Dossier d’actualité, une publication mensuelle de la Veille scientifique et technologique, Institut national
de recherche pédagogique, membre associé de l’université de Lyon. INRP. Dossier n°49 de novembre 2009.
3
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pour lequel on peut poser l’hypothèse qu’il est à même de favoriser le « ressenti » des
élèves à l’école, peut-être davantage que la situation ordinaire de vie en groupe-classe.
D’ailleurs, selon Serge Boimare5, « certaines difficultés scolaires ne peuvent être réglées que
dans un cadre hors-temps scolaire c'est-à-dire libéré des contraintes de programme et
d’emploi du temps ».
Il paraît intéressant de s’interroger sur ce cadre hors-temps scolaire, sur ce temps
d’aide personnalisée et sur ce qu’il implique pour les élèves.
L’Aide Personnalisée peut-elle favoriser l’expérience scolaire des élèves? Les circonstances
particulières du travail avec le maître après la classe peuvent-elles aider les élèves à se sentir
mieux à l’école ?
1. Les enjeux d’un dispositif d’aide particulier : l’aide personnalisée
1.1. L'aide aux enfants en difficulté
1.1.1. La notion d’aide
L’aide aux enfants en difficulté est dans l’Education Nationale largement associée à celle
de soutien. Il s’agit d’aider les élèves par le biais de prises en charges particulières, qu’elles
soient dans ou en dehors de la classe.
D’après Jean Marie Gillig6, le soutien serait « une des réponses aux innombrables avatars
résultant de l’explosion scolaire des années 60. » (p65)
Face au nombre grandissant d’élèves, à la diversité des parcours et afin de garder le projet
de faire accéder la plus grande majorité d’entre eux à un niveau d’études satisfaisant, il est
devenu nécessaire de mettre en place des dispositifs qui puissent pallier les difficultés de
certains d’entre eux à se mettre en conformité avec les exigences de l’Institution scolaire.
Les projets de soutien se sont multipliés avec des modalités très variées. Ils peuvent être
mis en place à l’intérieur comme à l’extérieur de la classe, voire même à l’extérieur de
l’école. Ils peuvent être encadrés par des enseignants mais aussi par des animateurs sociaux,
des éducateurs, des parents ou grands-parents bénévoles, etc. Il conviendra alors de
distinguer ces aides selon qu’elles entrent dans le champ scolaire ou dans le champ nonscolaire.
En effet, ce dernier secteur n’a cessé de se développer au fil des années et de
nombreuses structures poursuivent des objectifs d’apprentissage, jouant également un rôle
social important. Apparu dans les années quatre-vingts, l’accompagnement à la scolarité fait
l’objet d’orientations arrêtées au niveau national. Il se définit comme l’ensemble des actions
5
Boimare, S. in entretien du SNUIPP
http://www.snuipp.fr/spip.php?article6006&var_recherche=fen%EAtres%20sur%20cours%20une%20heure%20jo
urnali%E8re%20serge%20boismare [consulté le 03-03-2010]
6
Gillig, J.M. L’Aide aux enfants en difficulté à l’école problématique, démarches, outils, Dunod, Paris, 1998
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visant à offrir, aux côtés de l’Ecole, l’appui et les ressources dont les enfants ont besoin pour
réussir à l’Ecole, appui qu’ils ne trouvent pas toujours dans leur environnement familial et
social.
Pour autant, l’aide ou ce que l’on nomme aussi le soutien a encore toute sa place dans le
champ scolaire, que ce soit dans ou hors de la classe.
D’après Laurent Lescouarch7, cette pédagogie « serait un ensemble de dispositifs
visant la réduction des redoublements et de l’échec scolaire, et intégrant les aides
spécialisées. » (p57).
Finalement la notion d’aide ou de soutien embrasse un champ très large.
Selon le même auteur, « on peut distinguer quatre perspectives d’aides : le soutien dans le
cadre des activités courantes, le soutien par l’individualisation de certaines activités, le
soutien avec intention délibérée de rattrapage et le soutien en liaison avec les groupes de
niveau. » En fait, « tous les enseignants sont censés faire du soutien. » (p57)
Aux enseignants maintenant d’imaginer grâce à l’Aide Personnalisée une autre idée de la
pédagogie de soutien, d’essayer de tirer profit dans l’intérêt des élèves de cette opportunité
offerte par les Institutions.
Le chemin sera certainement long et laborieux tant la pédagogie de soutien s’est souvent
fourvoyée. Ainsi comme l’indiquait Jean Houssaye8 :
« La pédagogie de soutien est très présente à l’école élémentaire et au collège.
Prioritairement, elle permet de reprendre les apprentissages de base à l’aide d’un surplus de
temps et d’explications destinés aux élèves en difficulté, à l’aide de la répétition d’éléments
du programme jugés indispensables à acquérir, les élèves « faibles » devant rattraper les
autres pour profiter de l’enseignement collectif dispensé par ailleurs. C’est une pédagogie du
rattrapage et… de la bonne conscience » (p14).
L’aide est une composante du système éducatif français. Elle est souvent pratiquée et
semble légitime. Pourtant, elle recouvre différentes acceptions qu’il convient d’approfondir.
1.1.2. L’aide pédagogique dans ou hors de la classe
Selon Jean-Marc Louis et Fabienne Ramond9 (p131), il existe six formes d’aide
pédagogique hors de la classe :
- La gestion de la scolarité par cycles mise en place par la loi de 1989 et qui devait
permettre de prendre en compte les rythmes individuels d’apprentissage des élèves.
(Malheureusement cet esprit de la loi n’a pas été suffisamment compris par le
personnel éducatif.)
- Le travail en équipe
7
Lescouarch, L. Spécificités des pratiques pédagogiques des enseignants chargés d’Aide Spécialisée à Dominante
Pédagogique (ASDP) en Réseau d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté (RASED) Thèse de doctorat en Sciences de
l’Education 2006 Université de Rouen
8
Houssaye, J. Le soutien va-t-il tuer la pédagogie différenciée ? in Les cahiers pédagogiques, 376/377 1999
9
Louis, J.M. et Ramond, F. Comprendre et accompagner les enfants en difficulté scolaire, Dunod, Paris, 2009
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-
Les groupes de soutien : le soutien est individualisé ou par petits groupes, interne ou
externe à la classe par le biais du décloisonnement.
Les groupes de rattrapage
Les groupes de remédiation
Les groupes de besoins.
Le soutien est difficile à mettre en place en classe car il faut pouvoir laisser fonctionner
de manière autonome une partie des élèves, ce qui n’est pas forcément évident en termes
de gestion de la discipline et souvent peu efficace en termes d’apprentissage pour ces
derniers.
En dehors de la classe, le soutien devient à l’heure actuelle quasiment impossible à organiser
puisque les RASED donc les maîtres spécialisés tendent à disparaître, ainsi que les maîtres
surnuméraires qui pouvaient être disponibles dans les écoles.
Le problème se pose exactement de la même façon pour les groupes de rattrapage et de
remédiation : ils nécessiteraient du personnel supplémentaire. Par contre les groupes de
besoins peuvent fonctionner plus facilement dans la mesure où chaque élève d’une classe
peut appartenir à un groupe de besoins, même si il n’est pas en difficulté scolaire.
L’aide pédagogique dans ou hors de la classe peut recouvrir différentes modalités
d’organisation laissées à l’appréciation des équipes pédagogiques en fonction des besoins
individuels des élèves ou collectifs des classes et selon les ressources disponibles dans
l’école.
S’ajoutent d’autres dispositifs d’aide, réglementaires quant à eux, qui répondent à une
volonté affichée de l’Education Nationale de lutte contre l’échec scolaire.
1.1.3. Les dispositifs spécifiques d’aide
Actuellement, il existe quatre dispositifs spécifiques d’aide aux enfants en difficulté à
l’école élémentaire (en dehors de l’aide spécialisée) : le PPRE qui est un instrument d’aide,
les stages de remise à niveau proposés aux élèves de cours moyen et l’accompagnement
éducatif qui sont des dispositifs hors temps scolaire et l’Aide Personnalisée qui consiste en
deux heures de temps scolaire supplémentaire pour les élèves en difficulté.
- le PPRE
C’est l’article 16 de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme
pour l’avenir de l’école qui annonce la mise en place du Programme Personnalisé de Réussite
Educative (PPRE). Ce dispositif d’aide vise à faire acquérir à tous les élèves les éléments
constitutifs du « socle commun » à la fin de la scolarité obligatoire. Selon cet article, « à tout
moment de la scolarité obligatoire, lorsqu’il apparaît qu’un élève risque de ne pas maîtriser
les connaissances et les compétences indispensables à la fin d’un cycle, le directeur d’école ou
le chef d’établissement propose aux parents ou au responsable légal de l’élève de mettre
conjointement en place un programme personnalisé de réussite éducative ».
En effet, selon l’article 9 de cette même loi: « La scolarité obligatoire doit au moins garantir
à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun constitué d’un
ensemble de connaissances et de compétences qu’il est indispensable de maîtriser pour
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accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation, construire son avenir personnel
et professionnel et réussir sa vie en société » .
La mise en place du PPRE est une réponse institutionnelle à l’échec scolaire. Elle est dans
l’esprit de la lutte contre les inégalités sociales initiée dans les années soixante-dix avec
l’objectif affiché d’amener 80% de la population scolaire au niveau du Baccalauréat.
Mais cette mise en place répond aussi à un autre objectif : pallier la baisse du nombre
de classes d’adaptation et d’intégration scolaire qui, selon Martine Janner-Raimondi, a pour
conséquence « un déplacement de la prise en charge de la difficulté des classes spécialisées
vers les classes « ordinaires. »10
Ainsi l’institution Education Nationale garde ses ambitions affichées de réussite pour tous
tout en continuant un autre processus entamé en 1975 avec la loi d’orientation du 30 juin :
l’intégration dans les classes dites « ordinaires » de tous les enfants présentant un handicap
ou des difficultés d’apprentissage.
C’est donc au Programme Personnalisé de Réussite Educative qu’il revient d’articuler ces
deux objectifs.
J.M. Louis et F. Ramond11 explicitent son mode de fonctionnement : « Le projet
personnalisé de réussite éducative (PPRE) est l’instrument d’une aide intensive et ciblée, de
courte durée, concernant quelques objectifs d’apprentissage spécifiques pour lesquels les
actions pédagogiques « conventionnelles » doivent être repensées. » (p77).
Le PPRE est un instrument. C’est un document réalisé par l’équipe éducative et de soin si
nécessaire, en concertation avec les parents et qui permet de détailler les difficultés mais
aussi les facilités d’apprentissage d’un élève afin de pouvoir mettre en place une aide qui est
réévaluée toutes les six semaines.
C’est donc un travail collectif de la communauté éducative autour de l’élève. Il va cibler les
connaissances, les compétences et les méthodes de travail qui concernent l’élève,
sélectionner des objectifs prioritaires, mettre en place un programme d’actions, préciser une
durée et prévoir la possibilité d’une éventuelle reconduction, en continuité ou en rupture
avec le PPRE précédent.
- Les stages de remise à niveau
Leur mise en place a été faite à l’occasion d’« une note ministérielle12 qui part du constat
qu’environ 15% des élèves quittent aujourd’hui l’école primaire « avec des lacunes graves
dans la maîtrise de la lecture, de l’écriture et du calcul qui compromettent leurs chances de
réussite scolaire » » (p150), comme nous l’indiquent J.M. Louis et F. Ramond13.
Ces stages sont destinés aux élèves de CM1 et CM2 « qui présentent des lacunes
importantes en français et en mathématiques ». Ils ont pour objectif de faciliter leur entrée
en 6ème.
10
Janner-Raimondi, F. in Spirale, Les Programmes Personnalisés de Réussite Educative : entre injonction de réussite et
développement professionnel http://spirale-edu-revue.fr/spip.php?article985 [consulté le 13-03-10]
11
Louis Jean Marc et Ramond Fabienne Comprendre et accompagner les enfants en difficulté scolaire Dunod, Paris 2009
12 Note du 1er février 2008 adressée aux recteurs d’académie, aux inspecteurs d’académie, aux inspecteurs chargés de
circonscription du premier degré.
13
Ibid
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Ils sont proposés pendant les vacances scolaires (printemps et été) sur trois périodes d’une
semaine. Les enseignants prennent en charge les élèves à raison de trois heures par jour
pendant cinq jours.
« Quant aux activités menées, la notion de remise à niveau qui les caractérise est
assimilable à celle de rattrapage et reste bien une action d’enseignement et non de soutien
ou d’aide spécialisée ».14
Officiellement, selon le Ministère de l’Education Nationale, « Depuis 2008, les élèves en
difficulté en C.M. 1 et C.M. 2 peuvent suivre des stages de remise à niveau pendant la période
des vacances scolaires. Ces stages gratuits sont proposés dans les trois zones pendant les
vacances de printemps 2009.
Trois sessions sont organisées pendant les vacances scolaires : une semaine au printemps,
la première semaine de juillet et la dernière semaine des vacances d’été.
Ces stages durent cinq jours, à raison de 3 heures d’enseignement quotidien. Ils
permettent une remise à niveau dans les matières fondamentales : français et
mathématiques. Ils ont lieu dans les établissements scolaires ou tout autre lieu approprié à
l'accueil de jeunes élèves. Des groupes de cinq ou six élèves sont constitués.
A la fin du stage, l’évaluation des progrès de chaque élève est transmise à l’enseignant de
la classe et aux familles.
Les enseignants volontaires du premier degré animent ces stages et en définissent le
contenu. Ils sont rémunérés par des heures supplémentaires défiscalisées et exonérées de
cotisations sociales. Une session d'une semaine est rémunérée environ 360 € défiscalisés pour
15 heures.
Les stages s’inscrivent dans le dispositif général de lutte contre la difficulté scolaire
identifiée tout au long de l’année ou au moment des évaluations de C.M. 2. »15
- L’accompagnement éducatif
Il a été mis en place pour la première fois à la rentrée 2007 dans les collèges de
l’éducation prioritaire par l’intermédiaire de la circulaire n°2007-115 DU 13-7-2007.
Destiné à « favoriser la réussite de tous », il est d’une durée indicative de 2 heures, organisé
tout au long de l’année en fin de journée après la classe. Selon le Ministère de l’Education
Nationale, cet accompagnement éducatif « répond à une forte demande sociale de prise en
charge des élèves après les cours. Ce dispositif contribuera ainsi à l’égalité des chances entre
tous les élèves.»16
Cet accompagnement s’adresse aux élèves volontaires avec un accès prioritaire aux élèves
de 6ème. Il concerne trois domaines éducatifs essentiels : l’aide aux devoirs et aux leçons, la
pratique sportive, la pratique artistique et culturelle.
La circulaire de rentrée 2009 n° 2009-068 du 20-5-2009 précise les modalités de mise en
œuvre de l’accompagnement éducatif désormais destiné aussi à certains élèves des écoles
élémentaires.
En effet, il est proposé à tous les élèves des écoles de l'éducation prioritaire ainsi qu’à tous
les collégiens. Autre nouveauté ; il concerne cette fois quatre domaines : l'aide aux devoirs
14
Louis Jean Marc et Ramond Fabienne Comprendre et accompagner les enfants en difficulté scolaire Dunod, Paris 2009
http://education.gouv.fr/cid24294/stages-de-remise-a-niveau-pour-les-c.m.1-et-c.m.2.html [consulté le 18/08/09]
16
http://www.education.gouv.fr/bo/2007/28/MENE0701447C.htm [consulté le 22-04-2010]
15
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et aux leçons, la pratique sportive, la pratique artistique et culturelle ainsi que, pour les
collégiens, la pratique orale de l'anglais. C’est la nouveauté.
« L'accompagnement éducatif est coordonné avec les autres dispositifs existant hors du
temps scolaire, en particulier sur les territoires relevant de la politique de la ville.
Un effort particulier sera fourni pour présenter aux familles cette offre éducative gratuite et
pour apprécier, le cas échéant, les effets de l'accompagnement éducatif sur les résultats
scolaires et le comportement des élèves. »17
Il s’agit bien pour le Ministère de l’Education Nationale d’associer les dispositifs hors
l’école à la réussite de tous les élèves. Sur le versant de l’aide pédagogique proprement dite
avec l’aide aux devoirs et sur celui des pré-requis culturels dans une logique de
compensation destinée aux élèves issus de milieux défavorisés.
- L’Aide personnalisée
L’Aide Personnalisée a été mise en place par la circulaire n°2008-082 du 5-6-2008 sur
l’aménagement du temps scolaire : « À compter de la rentrée 2008, le temps scolaire des
élèves de l’école primaire est organisé comme suit : 24 heures d’enseignement par semaine
pour tous les élèves, ceux qui rencontrent des difficultés d’apprentissage pouvant bénéficier,
en outre, de deux heures d’aide personnalisée. »
Deux heures d’école supplémentaires sont offertes aux enseignants afin qu’ils puissent gérer
de manière plus efficace l’hétérogénéité des élèves et aider ceux qui ont des difficultés
d’apprentissage. Ces heures sont réparties sur la semaine sur décision du conseil d’école.
Cette décision d’aménagement du temps scolaire fait suite aux résultats d’enquêtes
internationales PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves) et PIRLS
(Progress in International Reading Literacy Study) sur la qualité de l’enseignement. Ils ont été
interprétés comme catastrophiques par les instances dirigeantes et notamment par Xavier
Darcos alors ministre de l’Education Nationale.18
La lutte contre l’échec scolaire dans le système éducatif français entamée il y a une
quarantaine d’années n’a apparemment pas eu les résultats escomptés.
L’Aide Personnalisée est une tentative de plus du gouvernement pour tenter de maintenir ce
cap et atteindre enfin l’objectif fixé de réduction significative de la difficulté scolaire à
l’école.
Toujours selon la circulaire du 5 juin 2008, pour mettre en place l’Aide Personnalisée
dans les classes, « les enseignants s’appuient sur les programmes de l’école primaire,
références en matière de connaissances et de compétences à acquérir à chaque niveau, sur
les évaluations nationales, références précises à des moments clé de la scolarité, ainsi que sur
les outils d’évaluation et de contrôle des résultats mis en œuvre dans chaque classe. »
Cette circulaire peut être différemment interprétée : Il s’agit bien d’aide pédagogique mais à
quel niveau se situe-t-elle ? S’agit-il de proposer des activités de soutien, de rattrapage des
17
http://www.education.gouv.fr/cid27581/mene0911464c.html [consulté le 22-04-2010]
Walter, J.P. art. Les résultats des évaluations internationales
ftp://ftp2.snepfsu.net/snepfsu/outils/ResultatsEvaluationsInternationales.pdf [consulté le 13-04-2010]
18
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 14
notions pas ou mal comprises ? Ou s’agit-il de proposer de réelles activités d’enseignement
différencié ? Car si l’Aide Personnalisée est un enseignement différencié dans la mesure où
elle ne s’adresse qu’à certains élèves et à une heure différente des autres, rien ne garantit a
priori que l’enseignement et les activités en elles-mêmes soient différenciés.
A suivre donc.
Les élèves pris en charge en Aide Personnalisée sont « choisis » par leur enseignant.
Celui-ci diagnostique les difficultés des élèves de sa classe en français et en mathématiques
afin de leur proposer, ainsi qu’à leurs parents, une prise en charge en Aide personnalisée. Ce
même enseignant prend en charge ses propres élèves (dans de rares cas et afin de constituer
des groupes de besoin il peut y avoir échange d’élèves entre collègues).
L’objectif affiché de l’Aide personnalisée est de pallier des difficultés ponctuelles mais sur
le terrain, force est de constater que des élèves ayant des difficultés plus profondes peuvent
aussi être concernés. En effet, quand ils ne sont pas pris en charge par le RASED (Réseau
d’Aides Spécialisées aux Enfants en Difficulté) par manque de postes, ils sont pris en charge
en Aide Personnalisée.
L’Aide Personnalisée est un moment inédit dans l’enseignement élémentaire où l’élève
peut apprendre avec son enseignant et dans sa classe mais en dehors de toutes les
interférences produites lors d’une journée de classe ordinaire.
C’est un moment où l’élève va pouvoir peut-être développer des compétences conatives
indispensables à la réussite scolaire mais qui lui font défaut au sein du groupe-classe : selon
Agnès Florin, professeur de psychologie « la motivation, les relations avec les enseignants et
les pairs, l’espérance de réussite… créent une dynamique motivationnelle qui affecte
directement le degré d’implication d’un élève dans une tâche scolaire. »19
A ces différents dispositifs spécifiques d’aide pédagogique mis en place entre 2005 et
2009 s’ajoute le RASED, un réseau d’aides mais spécialisées cette fois, créé dans les années
quatre-vingt-dix.
1.1.4. L’Aide Spécialisée : le RASED (Réseau d’aides spécialisées aux élèves en
difficulté)
Selon la circulaire n°2009-088 du 17-7-2009, « l'aide personnalisée, ou les stages de
remise à niveau au cours moyen, lorsqu'ils sont mis en place, peuvent se révéler insuffisants
ou inadaptés pour certains élèves, soit parce que ceux-ci présentent des difficultés marquées
exigeant une analyse approfondie et un accompagnement spécifique, soit parce qu'ils
manifestent des besoins particuliers en relation avec une déficience sensorielle ou motrice ou
des atteintes perturbant leur fonctionnement cognitif et psychique ou leur comportement.
Pour aider ces élèves, les enseignants spécialisés des réseaux d'aides spécialisées aux élèves
en difficulté (RASED) viennent renforcer les équipes pédagogiques en apportant des
compétences spécifiques permettant de mieux analyser ces situations particulières et de
construire des réponses adaptées. »
19
Florin Agnès in entretien du SNUIPP dans la revue (fenêtres sur cours) n°337 du 1er février 2010
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En effet, les RASED, créés le 9 avril 1990 par la circulaire n°90-082 dispensent des aides
spécialisées aux élèves d’écoles maternelles et élémentaires en grande difficulté. Ces aides
sont pédagogiques ou rééducatives. « Elles complètent les aides personnalisées mises en
place en 2008 et les stages de remise à niveau pendant les vacances scolaires. »20
La complémentarité entre les différents dispositifs d’aide proposés par l’Education Nationale
(RASED, Aide Personnalisée, Stages de remise à niveau) est évidente. Ils ne répondent pas
aux mêmes besoins des élèves et sont dispensés par des personnels ayant des formations
différentes.
Pourtant les postes de RASED supprimés à la rentrée 2009 ont pu laisser penser que les aides
spécialisées allaient disparaître.
Laurent Lescouarch21 va plus loin que le constat d’une simple complémentarité puisque
selon lui, les RASED proposent un soutien spécialisé « … destiné à des élèves dont les
difficultés sont telles qu’elles ne peuvent se résoudre dans le cadre ordinaire de la classe »
(p62). Selon lui, les difficultés propres à des élèves pris en charge par le réseau d’aide aux
enfants en difficulté ne peuvent pas être surmontées par un enseignant ordinaire dans une
classe ordinaire.
En effet, l’Aide Spécialisée est l’étape suivante des dispositifs spécifiques d’aide. Elle
concerne des élèves dont les difficultés d’apprentissage ont des spécificités qui dépassent le
cadre des aides pédagogiques. Ces enfants ont besoin de méthodes, de modes de travail,
d’activités qui sont autres et ne sont plus du ressort d’un enseignant non spécialisé aussi
compétent soit-il.
D’ailleurs, comme nous le rappelle Laurent Lescouarch22, « les différentes formes d’actions
d’ASDP (Aides Spécialisées à Dominante Pédagogique) ont ainsi la particularité de couvrir
l’ensemble du champ pédagogique allant du renforcement scolaire à la construction d’une
motivation, sans omettre le rapport au savoir et le développement de stratégies
métacognitives. »
Les Aides Spécialisées sont un volant d’aides très spécifiques, adaptées à un public
particulier et qui utilisent des modes de fonctionnement adaptés.
Comme dans les textes officiels, il apparaît clairement ici qu’il n’y a aucun enjeu de
concurrence entre l’Aide Personnalisée et l’Aide Spécialisée qui ne fonctionnent pas au
même niveau dans la prise en charge des difficultés scolaires.
C’est aussi l’opinion de Sylvie Cèbe, professeure de sciences de l’Education à Genève. Selon
elle, la mise en œuvre de l’Aide Personnalisée « permet de donner toute leur place aux
enseignants spécialisés et à leur professionnalisme. » Elle pense « qu’il est dangereux de
confondre les deux dispositifs comme si la mise en place de l’un se faisait au détriment du
second parce qu’en soutenant cela, on fait comme si les deux étaient équivalents. Et c’est
justement parce que les RASED ont eu trop souvent à concilier les deux types de prise en
20
http://www.education.gouv.fr/cid24444/reseaux-d-aides-specialisees-aux-eleves-en-difficulte-rased.html
[consulté le 18/08/09]
21
Lescouarch L. Spécificités des pratiques pédagogiques des enseignants chargés d’Aide Spécialisée à Dominante
Pédagogique (ASDP) en Réseau d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté (RASED) Thèse de doctorat en Sciences de
l’Education 2006 Université de Rouen
22 Lescouarch, L. Modélisation des pratiques pédagogiques de « Maîtres E » en RASED. Congrès international AREF
Strasbourg, 2007.
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charge qu’il leur restait trop peu de temps à accorder aux élèves qui avaient le plus besoin
d’eux. »23
Dans le cas de l’Aide Personnalisée, nous sommes bien dans le cadre d’une Aide
pédagogique adaptée à certaines difficultés scolaires dites « passagères ».
Dans le cas de l’Aide Spécialisée, nous entrons dans le cadre de difficultés scolaires plus
lourdes mais aussi plus spécifiques et qui sortent du cadre strictement pédagogique. Car
même si le maître spécialisé E est un maître spécialisé à dominante pédagogique, il ne faut
pas oublier qu’il ne s’agit plus d’éducation mais d’éducation spécialisée.
De plus, comme précisé sur le site officiel de l’Education Nationale « en cas de difficultés
importantes, le psychologue scolaire réalise un bilan approfondi de la situation de l'enfant,
en concertation avec les parents, et suit son évolution. Il peut proposer des entretiens aux
enseignants et aux parents pour chercher des solutions adaptées au sein de l'école ou à
l'extérieur. 24» C’est bien tout un dispositif, d’où le nom de « réseau », qui se met en marche
pour aider les élèves dont les difficultés sont plus profondes.
Ainsi ces deux dispositifs d’aide (spécifique et spécialisée) ne concernent pas forcément les
mêmes élèves. De plus, ils peuvent être et devraient être d’ailleurs, tout à fait
complémentaires. Il s’agit alors de mettre en place un travail concerté entre tous les
protagonistes de l’aide à l’école.
C’est d’ailleurs ce qui est pointé par le Ministère de l’Education Nationale sur son site officiel
http://education.gouv.fr : les RASED « contribuent à l’aide personnalisée et à la définition
des programmes personnalisés de réussite éducative (P.P.R.E.). Ils sont membres à part
entière de l’équipe enseignante des écoles où ils exercent et restent membres du réseau
d'aide spécialisée de la circonscription. »25
Cependant, la création des Aides Personnalisées s’est accompagnée de la suppression de
certains Réseaux d’Aides Spécialisées à la rentrée 2009. Cela a créé une certaine confusion
dans la profession et la crainte toujours présente d’un remplacement des Aides Spécialisées
par les Aides Personnalisées. Elles n’ont pourtant pas les mêmes missions.
Aides pédagogiques organisées par les enseignants, aides spécifiques instituées par
l’Education Nationale ou encore Aides spécialisées dispensées par les RASED, voilà un
dispositif qui semble entier et cohérent, à même de prendre en charge la gradation des
difficultés que peuvent rencontrer les enseignants chez leurs élèves. Cette richesse du
système éducatif français n’est-elle pas à même de répondre à l’ambition nationale de lutte
contre l’échec scolaire ?
Arrêtons-nous plus précisément sur l’Aide Personnalisée mise en place l’année dernière à
grands renforts de communication médiatique. C’est la première fois dans l’histoire de
l’Instruction publique en France que certains élèves ont officiellement des heures de classe
23
Cèbe, S. entretien dans la revue Enseignant syndicat Se-Unsa du lundi 14 décembre 2009
http://www.education.gouv.fr/cid24444/reseaux-d-aides-specialisees-aux-eleves-en-difficulte-rased.html
[consulté le 18/08/09]
25
http://www.education.gouv.fr/cid24444/reseaux-d-aides-specialisees-aux-eleves-en-difficulte-rased.html
[consulté le 18/08/09]
24
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supplémentaires par rapport à leurs camarades. Est-il possible qu’ils tirent bénéfice de ce
temps d’aide ? Est-il possible que leur « ressenti » pendant l’Aide Personnalisée soit positif ?
1.2. Comment l’Aide Personnalisée peut-elle favoriser l’expérience scolaire des
élèves ?
L’Aide Personnalisée est un temps d’aide inédit dans l’histoire de l’enseignement en
France puisque pour la première fois, des élèves qui présentent des difficultés
d’apprentissage bénéficient de deux heures hebdomadaires d’école en plus, avec leur
enseignant, et en très petits groupes.
Un temps d’aide inédit dans sa forme mais aussi dans son fond puisqu’il permet aux
enseignants de mettre en place un réel enseignement différencié.
Cela signifie peut-être beaucoup pour des élèves en difficulté : un enseignant disponible, des
activités et des modes de travail adaptés, un temps réservé sans la concurrence des autres
élèves, un nouvel univers tout à leur disposition.
D’ailleurs plusieurs hypothèses permettent d’envisager que l’Aide personnalisée puisse
favoriser « l’expérience scolaire » des élèves :
Tout d’abord, il est possible de supposer que l’Aide Personnalisée puisse favoriser la
confiance que les élèves ont en leurs capacités de travail. Or, il est établi par la psychologie
de l’apprentissage que la confiance favorise la performance.
Selon le psychologue américain Albert Bandura, quatre sources d’information permettent à
un élève d’avoir confiance en ses capacités d’apprentissage : les performances passées,
l’observation des performances d’autrui, les messages de l’entourage et les états
physiologiques et émotionnels.26
Trois de ces quatre messages pourraient être favorablement orientés grâce à l’Aide
Personnalisée : l’observation des performances d’autrui n’est plus d’actualité puisque les
bons élèves sont rentrés à la maison, les messages de l’entourage et notamment de
l’enseignant peuvent être plus adaptés à l’enfant donc plus rassurants, de même que
l’environnement qui pourrait favoriser un état physiologique et émotionnel positif si il est
organisé dans ce but.
En effet en Aide Personnalisée, l’enseignant et le système scolaire font implicitement
confiance à l’élève. Ils lui proposent l’Aide Personnalisée en partant du principe qu’il est
capable de réussir. En tout cas, c’est ce que l’élève peut penser lorsqu’il est choisi. Ensuite
les circonstances de l’Aide Personnalisée elles-mêmes peuvent favoriser la confiance en soi :
le petit groupe, le maître disponible et dans une position d’écoute favorable puisque
débarrassée d’interférences d’ordre disciplinaire ou encore les activités adaptées propres à
la réussite de chacun des élèves pris en charge.
Il semble intéressant d’approfondir ce point ; l’Aide Personnalisée ne pourrait-elle pas
favoriser la confiance des élèves en leurs capacités d’apprentissage et par là même favoriser
leur estime de soi?
26
Bandura, A. Auto-efficacité : le sentiment d’efficacité personnelle, De Boeck, Paris, 2002
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Ensuite, il est remarquable pour qui fréquente les écoles en ce moment de constater que
certains élèves sont contents de venir en Aide Personnalisée. Ils ont envie de profiter de ce
temps d’aide tout en sachant pertinemment qu’il s’agira d’un temps de travail. Ils ont envie
de venir en Aide Personnalisée pour travailler.
Pourquoi des élèves pourraient avoir envie de travailler plus longtemps à l’école ? Cela va
pourtant à l’encontre de nos représentations collectives. Pourrait-on supposer que parce
que c’est un temps qui leur est strictement réservé, cela leur donne envie d’y travailler, d’y
progresser et peut-être d’y réussir ?
Notons la publication d’une enquête par le syndicat SNUIPP27, seule enquête nationale
publiée à ce jour sur l’Aide Personnalisée (mille deux cents réponses). Il ne s’agit que de
résultats indicatifs puisque les réponses viennent d’écoles qui se sont portées volontaires
pour participer au sondage et non d’un échantillon d’écoles représentatif.
Les résultats nous apprennent que « l’aide personnalisée a un effet positif sur la motivation
des élèves (pour 70% des enseignants), et sur les résultats scolaires (pour 50% des
enseignants). »
L’Aide Personnalisée pourrait-elle donner envie aux élèves de travailler pour réussir ?
Ajoutons encore qu’une des grandes frustrations des enseignants, c’est de ne jamais
avoir le temps suffisant à consacrer aux enfants en difficulté. Certains élèves ont besoin de
l’adulte déjà pour entrer dans les apprentissages mais aussi par la suite pour être
encouragés, corrigés, réorientés. Du point de vue « enseignant », imaginer un temps
spécifique où il sera enfin possible de prendre le temps d’aider semble être une opportunité
à saisir.
Qu’en est-il du côté des élèves ? Les élèves nécessitant la médiation de l’adulte ressententils eux aussi ce manque de temps que l’enseignant a à leur consacrer ? Poseraient-ils
davantage de questions ? Approfondiraient-ils davantage leur compréhension des notions
enseignées si leur enseignant était plus disponible pour les y aider ?
Il semble intéressant de le supposer. Quoi de plus tentant alors que ce temps d’aide
personnalisée où l’enseignant sera enfin tout à fait disponible pour son élève ?
De plus, la plus grande disponibilité de l’enseignant peut permettre une meilleure
compréhension de sa part des mécanismes d’apprentissage, des facilités, des blocages que
l’élève doit surmonter. Une relation d’empathie pourrait alors se mettre en place, une
relation de confiance entre l’élève et son maître, pouvant largement favoriser les
apprentissages scolaires.
Les activités proposées en Aide Personnalisée peuvent aussi être une source de bien-être
pour les élèves. Il s’agit en effet pour les enseignants de proposer des activités
complètement individualisées, pour lesquelles il est possible de faire des corrections et
même des réajustements en temps réel. L’enseignant participe pour une fois à la réflexion
de l’élève, il peut voir évoluer son fonctionnement cognitif, l’aider mais surtout trouver les
activités et le mode de travail qui seront les plus adaptés à sa personnalité de travail. Il s’agit
de placer l’enfant, non pas au cœur du système éducatif mais plus simplement au cœur du
système d’enseignement.
Cette façon de travailler présente des limites ; notamment la disparition des interactions
entre pairs et du conflit socio-cognitif mais à raison de deux heures par semaine seulement.
27
http://www.snuipp.fr/spip.php?article6524 [consulté le 18-04-10]
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Deux heures où une façon différente de travailler devra être « inventée » afin que les élèves
concernés par l’Aide Personnalisée puissent en tirer bénéfice.
L’Aide Personnalisée est un temps spécifique dans la mesure où il s’agit d’une rupture
avec l’environnement qu’est le groupe-classe.
Tout d’abord, elle peut permettre à l’élève de se réapproprier le « lieu du savoir » : la classe
est débarrassée de la pression des autres élèves : bruyants et sûrs d’eux, qui lèvent le doigt
avant tout le monde, qui réussissent toujours et avant les autres, ce qui est très frustrant,
qui gênent le travail ou encore qui se moquent des éventuelles erreurs des autres.
Cette situation inédite de travail en tout petits groupes pendant le temps d’Aide
Personnalisée pourrait permettre à l’élève d’être plus à l’aise, de s’exprimer, d’oser se
tromper, de trouver immédiatement l’aide dont il a besoin, de réussir enfin dans ses
apprentissages, de retrouver confiance en lui.
L’Aide Personnalisée regroupe des élèves en très petit nombre, isolés des autres
élèves de la classe, en présence de leur enseignant et dans une situation de travail différente
de la classe qui doive leur permettre de surmonter leurs difficultés scolaires.
Cette nouvelle organisation du temps de classe pourrait-elle influencer le « ressenti » des
élèves quant à leur vécu scolaire ? Pourrait-elle éventuellement leur permettre de retrouver
confiance en eux ? Leur donner envie de travailler ? Améliorer leur relation avec leur
enseignant ? De plus, les activités spécifiques proposées en Aide Personnalisée et le nouvel
environnement de classe pourraient-ils leur permettre de se sentir mieux à l’école et plus à
l’aise avec les apprentissages scolaires ?
La confiance en ses capacités d’apprentissage contribue pour chacun à construire son
estime de soi. L’estime de soi quant à elle ne suffira pas à renforcer les capacités
d’apprentissage. Elle n’est pas suffisante mais elle est pourtant nécessaire. Comment peutelle éventuellement être favorisée par l’Aide Personnalisée ?
1.3. L'estime de soi
Selon Nicole Mosconi28, « quand il apprend, le sujet rencontre quelque chose d’inconnu,
de non-maîtrisable et cette rencontre peut susciter de l’angoisse. »
Pour apprendre, il faut bien sûr disposer des fonctions cognitives nécessaires mais surtout
que ces fonctions soient disponibles, c'est-à-dire qu’aucun blocage d’origine affective ou
psychologique ne vienne entraver leur fonctionnement.
En effet, comme l’explique Serge Boimare, quand les enfants ne veulent pas ou ne peuvent
pas apprendre, il est « inutile de chercher très loin la raison de cet évitement. Elle est toute
simple : le fait de ne pas savoir et d’avoir à chercher la réponse à une question posée réactive
chez ces enfants des inquiétudes excessives et des sentiments contradictoires qui les
déstabilisent. A la source de ces intrusions qui dérèglent et perturbent le travail de la pensée,
on voit émerger des craintes archaïques, des peurs infantiles et des préoccupations
identitaires. » (p 4 et 5)
28
Mosconi, N. du CREF in article Rapport au savoir : approche socio-clinique
http://www.dijon.iufm.fr/IMG/pdf/colloque.pdf (consulté le 11/02/10).
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Page 20
L’individu apprenant doit être « bien dans sa tête », disposé à apprendre et
suffisamment confiant pour estimer que l’acte d’apprentissage en vaut la peine et qu’il est
possible qu’il donne un résultat positif. Qui pourrait entreprendre un travail laborieux, car
l’apprentissage scolaire est parfois laborieux, sans avoir confiance dans son aboutissement ?
Afin d’entamer un processus d’apprentissage, il faut espérer pouvoir le réussir, il faut avoir
suffisamment confiance en soi.
L’estime de soi est un élément déterminant dans l’acte d’apprendre, elle va permettre à
l’apprenant d’avoir confiance en lui, elle va lui permettre d’accepter d’être déstabilisé.
Car apprendre, c’est aussi se mettre en danger c'est-à-dire admettre que l’on ne sait pas ou
que l’on s’est trompé jusque-là pour se rendre disponible à un nouveau savoir. Ainsi l’acte
d’apprendre nous met face à nos incomplétudes, nos fragilités. C’est la raison pour laquelle
les chercheurs s’accordent à dire que l’estime de soi est essentielle à l’acte d’apprendre, elle
va permettre à l’apprenant d’accepter de se remettre en question.
D’ailleurs selon Bernard Charlot29 « tout rapport au savoir est aussi rapport à soi… La
question du narcissisme et de l’image de soi est toujours en jeu lorsqu’on apprend. » (p21)
L’estime de soi va permettre la confiance en soi et faciliter l’apprentissage.
Dans un article paru dans la revue Sciences Humaines30, Benoît Galand ajoute que « les
élèves qui ont confiance se fixent des objectifs d’apprentissage plus élevés, cherchent
davantage à comprendre en profondeur et à donner du sens à ce qu’ils étudient, gèrent
mieux leur temps de travail, se laissent moins distraire de leurs objectifs et persévèrent plus
face à des difficultés. »
Il nous apprend aussi et nous y reviendrons dans la suite de ce travail que « cette
confiance ne dépend pas exclusivement de l’élève, mais également des types de dispositifs
pédagogiques mis en place par les enseignants et des messages communiqués par les
parents. »
En effet nous ne sommes pas égaux face à l’estime de soi, c’est une construction
individuelle, familiale, sociale et … scolaire. Ainsi l’école et plus spécifiquement l’enseignant
occupent une position idéale pour favoriser l’estime de soi d’un élève. En adoptant une
attitude compréhensive, distanciée face à l’erreur ou à l’ignorance, le maître ou la maîtresse
« autorise » son élève à se fabriquer une estime de soi et à avoir confiance en lui ou en elle.
Nous le disions l’estime de soi est une construction personnelle et individuelle
indispensable à l’acte d’apprendre. Elle commence en famille pendant la petite enfance puis
évolue avec les années d’enseignement scolaire qui suivent. Si les enseignants ont une
attitude simplement bienveillante à l’égard de leurs élèves, l’estime de soi des enfants sera
normalement acquise. Mais si les enfants ont un vécu familial difficile qui ne leur a pas offert
l’estime de soi alors la situation va s’avérer beaucoup plus délicate. En effet, au milieu d’une
classe et d’enfants qui ont confiance en eux, ces enfants en manque d’estime vont se
recroqueviller, se faire oublier ou au contraire se manifester bruyamment pour dissimuler
leur manque.
29
30
Charlot, B. Les Jeunes et le Savoir Perspectives internationales Anthropos Ed. Economica 2001
Sciences Humaines n° spécial n°5 L’école en questions octobre-novembre 2006
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 21
Par contre, quand l’élève vient en Aide Personnalisée, il a d’abord été repéré par
l’enseignant qui a proposé la prise en charge. La stigmatisation est discrète puisque l’élève
continue à travailler en classe comme les autres, en suivant le même programme et en
participant à l’ensemble des activités, ce qui n’est pas le cas quand un élève est sorti de la
classe par un maître spécialisé du RASED par exemple. Par contre il lui donne une
importance particulière si nous considérons qu’il lui fait confiance en lui offrant une
possibilité de progresser en classe par le biais de l’Aide Personnalisée.
Mais la stigmatisation ne disparaît pas pour autant. Rester en classe après les autres ou aller
travailler pendant la pause méridienne pendant que les autres jouent peut bien évidemment
être source de frustration voire d’un sentiment d’injustice de la part des enfants.
Il s’agira de démêler dans la recherche l’ambivalence de ces sentiments.
On peut poser l’hypothèse que la prise en charge en Aide Personnalisée valorise l’élève
dans la mesure où si l’enseignant lui propose de venir, c’est d’abord qu’il croit en une
possibilité d’amélioration de ses résultats scolaires mais en plus qu’il a décidé de mettre
quelque chose en œuvre pour que cela soit possible. On peut supposer que les élèves ne
vivent pas l’Aide Personnalisée comme une obligation institutionnelle (comme certains
enseignants) mais au contraire comme un temps en plus qui leur est réservé, pour lequel ils
ont été choisis et qui va leur donner une chance supplémentaire, aussi mince soit-elle de
sortir de leurs difficultés.
De plus, c’est durant le travail en Aide Personnalisée que la situation peut encore
évoluer. Encourager un élève, lui faire confiance, dédramatiser ses erreurs et ses blocages
sont autant d’attitudes positives de l’enseignant qui ne sont peut-être pas suffisantes noyées
dans une journée en groupe-classe. Par contre en Aide Personnalisée, ces attitudes positives
dirigées vers un très petit nombre d’élèves peuvent peut-être avoir un véritable effet.
Certains enfants peuvent véritablement souffrir de la vie en groupe-classe et ne pas
profiter pleinement des enseignements et des situations d’apprentissage car ils craignent
l’attitude, les réactions de leurs camarades.
Dans l’ouvrage « Apprendre et Comprendre », Britt-Mari Barth31 raconte une anecdote
qui illustre parfaitement cette difficulté : en classe, un petit garçon prend la parole très
spontanément pour donner une réponse erronée, « tout le monde a ri ; il s’est senti confus.
Mais, ce jour-là, il a surtout appris que lorsque l’on n’est pas sûr d’avoir la bonne réponse, il
vaut mieux se taire et ne pas courir le risque de se ridiculiser… » Britt-Mari Barth ajoute « ce
genre d’incident, fréquemment observé, me renvoyait à mon questionnement sur le lien entre
l’affectif et le cognitif : quel est le lien entre l’estime de soi et la capacité d’être à l’initiative
de son propre apprentissage ? » (p67)
Finalement et c’est le plus grand risque, quand un enfant a perdu sa confiance en lui, il
semble être compliqué de la restaurer dans l’environnement-classe. L’Aide Personnalisée
avec un effectif très réduit, un enseignant disponible et des activités adaptées pourrait peutêtre jouer ce rôle.
Toupiol, G. de la FNAME Apprendre et Comprendre, Place et rôle de la métacognition dans l’aide spécialisée,
contribution de Barth, B.M. La construction du sens : une approche socio-cognitive de la médiation, Retz, Paris, 2006
31
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Page 22
Avec l’estime de soi et la confiance en ses capacités d’apprentissage qui pourraient être
favorisées par les circonstances de travail en Aide Personnalisée, une deuxième hypothèse
peut être posée qui concerne l’envie de travailler pour réussir.
En effet, les enfants en difficulté d’apprentissage sont souvent découragés d’avance quand
un travail leur est proposé en classe. S’ils sont en grande difficulté, ils ont intégré leurs
échecs successifs et, c’est aisément compréhensible, essaient d’éviter d’y être confrontés à
nouveau. En Aide Personnalisée, la situation et les objectifs sont différents : l’enfant est
normalement placé en situation de réussite grâce à des objectifs et un mode de travail qui
lui correspondent.
Est-il possible alors de supposer que la situation de travail en Aide Personnalisée puisse
donner aux élèves envie d’y travailler ?
1.4.
L’envie de travailler pour réussir
Selon Bernard Charlot32, « la question de la mobilisation du sujet, de sa mise en activité
intellectuelle, apparaît centrale dans la problématique du rapport au savoir. » (p 10 et 11).
En effet, pour modifier son rapport au savoir et pour réussir à l’école, il va d’abord falloir que
l’élève en ait envie. C’est cette envie, cette volonté d’apprendre qu’il faut rechercher avant
tout avec les élèves en difficulté.
Les élèves en difficulté ont-ils envie de réussir ? Et si tel est le cas, ont-ils pour autant
envie de travailler et envie d’apprendre pour atteindre cet objectif? Serait-il possible
d’imaginer que les élèves puissent avoir davantage envie de travailler en Aide Personnalisée,
parce qu’ils se sentent accompagnés, parce qu’ils se sentent estimés même avec leurs
difficultés, parce qu’ils ne sont plus des « anonymes » perdus dans un groupe-classe ? Les
savoirs et le travail scolaire prennent une saveur différente quand ils ne sont enseignés qu’à
soi, lorsque l’on se sent privilégié dans la relation au savoir et à l’apprentissage.
Toujours d’après B. Charlot, « toute la problématique du rapport au savoir… a pour
objectif d’élucider les conditions et les formes de cette mobilisation. »
Ainsi il est intéressant d’observer si les conditions particulières de l’Aide Personnalisée
pourraient être d’une quelconque influence sur cette mobilisation autour du savoir qui
s’accompagnerait de l’envie de travailler et d’apprendre.
L’envie d’apprendre dont dépend la réussite de l’élève est très personnelle. Selon B.
Charlot33, « il existe pour le sujet des objets, des situations, des personnes, des formes
d’activité, des formes relationnelles (relations aux autres mais aussi à soi-même ) qui, pour
lui, sont plus importantes, sont plus intéressantes, ont plus de valeur que d’autres,
correspondent mieux à ce qu’il est, à ce qu’il veut et peut être- et donc qui méritent
davantage d’être apprises. » Seule une relation privilégiée entre l’élève et le savoir, favorisée
par un environnement favorable débarrassé de toute interférence extérieure et médiatisée
par un enseignant disponible peut permettre cette relation toute particulière au savoir.
32
33
Charlot, B. Les Jeunes et le Savoir Perspectives internationales Anthropos Economica, Paris, 2001
Ibid.
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Page 23
Les pédagogues s’accordent à dire comme Jean Houssaye34 qu’il faut « tenir compte des
besoins de l’individu » (p47) mais c’est Philippe Meirieu35 qui nous donne « la bonne
direction : celle qui consiste ni à ignorer le désir, ni à le sacraliser, ni à le dévoyer, ni à le
monnayer, mais bien plutôt à créer les conditions de son émergence. » (p91)
Il s’agit donc de tout mettre en œuvre pour créer ces conditions d’émergence. L’Aide
Personnalisée pourrait être un laboratoire d’expériences « grandeur nature » à disposition
des enseignants et des chercheurs.
Avoir confiance en ses capacités d’apprentissage et une bonne estime de soi, avoir envie
de travailler en Aide Personnalisée, deux hypothèses qui porteraient à imaginer un début
d’expérience positive des élèves en Aide Personnalisée. Mais les conditions particulières de
travail en Aide Personnalisée pourraient avoir un troisième avantage : celui d’améliorer la
relation de l’élève avec son enseignant voire de favoriser la médiation pédagogique.
1.5. La relation avec l'adulte médiateur
Comme nous l’avons vu précédemment avec Bernard Charlot36, apprendre est une
transformation du sujet. Mais l’auteur ajoute des conditions à cette transformation qui selon
lui, « exige une médiation par d’autres êtres humains », « suppose une activité du sujet »
mais « implique aussi une activité des adultes médiateurs entre le monde et le sujet ». (p18)
Il va même jusqu’à dire qu’ « apprendre est une construction de soi qui n’est possible que par
l’intervention de l’autre. »37 (p20)
La médiation de l’adulte entre l’élève et le savoir est nécessaire voire indispensable.
L’adulte accompagne, guide l’élève dans sa découverte d’une tâche à accomplir. Il le sécurise
d’abord par sa présence puis lui explique, le dirige, l’accompagne, l’encourage et le félicite.
L’élève se sent ensuite suffisamment en confiance pour réaliser la tâche de manière tout à
fait autonome puis ensuite pour accompagner à son tour d’autres élèves. C’est la fonction
d’étayage de l’adulte décrite dans les travaux du psychologue américain Jérôme Bruner en
1983.
La médiation est une idée fort ancienne développée au départ par Lev Vygotski dans son
ouvrage Pensée et Langage paru à Moscou en 1934.
Schneuwly et Bronckard38 citent d’ailleurs dans leur ouvrage des extraits empruntés à
l’auteur russe : « Chaque fonction apparaît deux fois dans le développement culturel de
l’enfant, d’abord entre les individus puis dans l’enfant… Toutes les fonctions supérieures (à
savoir « conscientes et volontaires ») débutent comme des relations effectives entre individus
humains. » (p96)
Houssaye, J. Les trois facettes de la motivation entretien in Sciences Humaines n°12 de février-mars 1996
Meirieu, P. Apprendre…oui, mais comment ESF, Issy-les-Moulineaux, 1987
36 Charlot, B. Les Jeunes et le Savoir Perspectives internationales, Anthropos Economica, Paris, 2001
37
Ibid
38
Schneuwly, B. et Bronckart, J.P. Vygotski aujourd’hui, Paris, Delachaux et Niestlé, 1985.
34
35
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Selon Anne-Marie Doly39 « Vygotsky insiste sur le rôle de l’adulte dans ce qui le définit
comme « aide » à apprendre, c'est-à-dire à aller au-delà de ce que l’enfant sait faire seul, en
« zone proximale » ainsi que sur l’aspect transmissif de cette relation : « ce que l’enfant est
en mesure de faire aujourd’hui à l’aide des adultes, il pourra l’accomplir seul demain. » »
(p97)
La recherche sur ce point est tout à fait claire, c’est la médiation qui va permettre
l’apprentissage des élèves. Le rôle de l’adulte en général et de l’adulte enseignant en
particulier est essentiel dans l’acte d’apprendre. Mais il n’est pas suffisant. La médiation par
les pairs, l’apprentissage par le conflit socio-cognitif et l’émulation dans le groupe-classe
sont aussi déterminants. Mais est-ce vraiment le cas pour des élèves en difficultés ? Sont-ils
à même de profiter des apports du groupe s’ils manquent de confiance en eux et sont en
situation d’évitement face aux apprentissages scolaires ? Les élèves en difficultés ont peutêtre un besoin de médiation par l’adulte plus important que celui des autres. L’Aide
Personnalisée pourrait peut-être leur apporter cela.
Il y aura toujours des élèves suffisamment à l’aise avec l’acte d’apprendre pour pouvoir
travailler et progresser malgré des manques dans les conditions et les relations
d’apprentissage, et notamment le manque de médiation. Mais il y aura aussi toujours des
élèves pour qui ce type de manque sera cruel voire décisif dans le déroulement de la
scolarité. C’est exactement ce que nous dit Jacky Beillerot40 en reprenant les mots de
Winnicott : « pour un grand nombre d’élèves ou d’adultes, des conditions moyennes
ordinaires « suffisamment bonnes » permettent que les apprentissages s’acquièrent
normalement. Le problème est qu’il n’en va pas de même pour des enfants qui vivent dans
des quartiers déshérités, ou pour ceux qui souffrent d’inhibitions psychologiques repérées ou
repérables.» (p61)
Guy Avanzini41 ajoute que le rôle du formateur peut être encore plus grand puisque
celui-ci « va s’efforcer de réconcilier l’apprenant avec lui-même, quand celui-ci a été
auparavant mis en échec de façon telle qu’il doute de ses possibilités d’apprentissage. » (p43)
En effet, le côté affectif de la relation pédagogique a son importance. Britt-Mari Barth42 cite
les travaux de J. Bruner (1987) sur l’acquisition du langage. Selon cet auteur, l’apprentissage
nécessite une relation de confiance avec l’adulte et celle-ci « invite l’enfant à réellement
s’engager dans l’activité intellectuelle. » (p69) Elle est la continuité de la relation de
confiance entre la mère et l’enfant, il s’agit de sécurité affective.
Dès lors, il faut rechercher les conditions qui permettront de favoriser cette
médiation, surtout chez les élèves en difficultés scolaires. La première difficulté rencontrée
par les enseignants est celle du temps disponible pour chaque élève de la classe. Ce temps
sera d’autant plus précieux qu’il concerne des élèves en difficultés qui ont encore plus
besoin de médiation que les autres.
39
Toupiol, G. Apprendre et Comprendre Place et rôle de la métacognition dans l’aide spécialisée, ouvrage collectif de la
FNAME, Retz, Paris, 2006
40
Beillerot, J. Le miracle de l’apprentissage in Sciences Humaines n°12 de février-mars 1996
41 Avanzini, G. Savoirs et médiation in Sciences Humaines n°12 de février-mars 1996
42 Toupiol, G. de la FNAME Apprendre et Comprendre, Place et rôle de la métacognition dans l’aide spécialisée,
contribution de Barth, B.M. La construction du sens : une approche socio-cognitive de la médiation, Retz, Paris, 2006
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Partant de cette réflexion, il est possible de poser l’hypothèse que le temps d’aide
supplémentaire offert par le dispositif de l’Aide Personnalisée aux seuls enfants en difficulté
est un temps où la médiation de l’enseignant peut réellement s’exprimer. En effet, il s’agit
d’un moment rare à l’école où le maître (ou la maîtresse) de la classe sera totalement
disponible pour l’élève.
Qu’en est-il du côté des élèves ? Leur expérience en Aide Personnalisée leur a-t-elle fait
remarquer cette disponibilité de l’enseignant ? Et surtout en tirent-ils un bénéfice certain ?
Nous pouvons le penser si nous nous référons à Jean Houssaye43qui cite dans Professeurs et
élèves : les bons et les mauvais les travaux de Steve Bissonnette et Mario Richard en 1998 :
« les sciences de la cognition ont bien montré que l’apprentissage loin d’être purement
cognitif, est d’abord avant tout un acte social et affectif. » (p119)
Après la confiance en soi, l’envie de travailler et la relation à l’adulte médiateur, les
activités proposées en Aide Personnalisée pourraient aussi être un moyen de favoriser
l’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée. En effet, quoi de plus agréable pour
un élève que d’être confronté à des activités qui correspondent à son propre mode
d’apprentissage, qui visent de réelles difficultés d’apprentissage ? En supposant bien sûr que
les enseignants « jouent le jeu » en créant des situations de travail vraiment adaptées aux
élèves.
1.6. L’attractivité des activités
Il existe autant de situations d’apprentissage qu’il existe de professeurs et d’élèves,
chacun adaptant pour les uns les activités proposées et pour les autres les façons
d’apprendre en fonction de sa personnalité et de son fonctionnement cognitif. Une activité
attractive pour un élève ne va pas seulement l’être parce qu’elle est ludique ou distrayante,
elle va l’être aussi dans la mesure où elle va correspondre à la façon d’apprendre de d’élève
concerné.
D’ailleurs, Gérard Mendel nous rappelle que « l’acte d’apprendre est toujours unique, il est
l’acte d’un sujet singulier, le produit d’une histoire singulière. Nul ne peut apprendre pour
quelqu’un d’autre et à sa place ; et chacun a des manières d’apprendre qui lui sont
propres. »44 (p35)
C’est en effet le leitmotiv des pédagogues depuis la naissance de la pédagogie différenciée
dans les années soixante-dix : avec l’explosion scolaire, il était devenu indispensable
d’organiser les classes de manière à ce que chaque élève puisse apprendre à son rythme et
avec des procédures qui lui sont propres.
Cette idée innovante s’est pourtant avérée difficile à mettre en œuvre, par un seul
enseignant pour un groupe-classe et surtout à l’échelle d’une année scolaire et dans toutes
les matières.
Différencier la pédagogie implique d’abord de connaître parfaitement ses élèves. Les
évaluations diagnostiques permettent de cibler les lacunes de chacun. Par contre il est plus
difficile et plus long de faire le point sur les procédures d’apprentissage des élèves et sur les
43
44
Houssaye, J. Professeurs et élèves : les bons et les mauvais, ESF, Issy-les-Moulineaux, 2001
Mendel, G. L’acte est une aventure, La Découverte, Paris, 1998
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difficultés précises qu’ils rencontrent lors de la mise en place de ces procédures : s’agit-il
d’une mauvaise compréhension de la consigne ? S’agit-il d’une difficulté d’abstraction ?
S’agit-il de la compréhension erronée d’une nouvelle notion ? D’une mauvaise application de
cette notion ou plus simplement d’un défaut de concentration ? Nous voyons bien qu’une
seule et même erreur peut relever de difficultés et donc de besoins complètement
différents.
D’ailleurs selon Etienne Brunswic45, il est nécessaire de « tenir compte des profils
d’apprentissage des élèves… Au maître de connaître les profils cognitifs et d’appliquer les lois
de la vie mentale. »
Il nous semble que cette analyse indispensable du fonctionnement cognitif de l’élève
pourrait se révéler bien plus aisée en Aide Personnalisée, l’enseignant pouvant y suivre pas à
pas la démarche d’apprentissage de son élève, ses facilités, ses blocages, ses goûts…
Ne pourrions-nous pas alors imaginer que l’Aide Personnalisée puisse faciliter la
différenciation pédagogique dans la classe ?
Malgré sa complexité, la pédagogie différenciée reste incontournable pour la plupart
des pédagogues et des enseignants. Comme le disait Jean Houssaye46, il est nécessaire de
remettre en cause le « système qui prétend que chacun peut apprendre les mêmes choses de
la même façon.» (p119)
En effet, le modèle transmissif a montré ses limites. La massification de l’enseignement des
années soixante-dix et la volonté sociale, politique et philosophique d’éduquer tous les
enfants a créé cette situation délicate qui demande à l’Institution scolaire d’atteindre des
objectifs similaires avec des enfants d’origines sociales et culturelles très différentes.
Adapter les situations d’apprentissage et les activités proposées aux élèves qui en ont
besoin, car ils ont des façons d’appréhender l’apprentissage qui leur sont propres, est
incontournable. En effet, « on ne peut enseigner qu’en s’appuyant sur le sujet, ses acquis
antérieurs, les stratégies qui lui sont familières » (p134), comme nous le rappelle Philippe
Meirieu47.
Ici se dessine un apport supplémentaire possible du temps d’Aide Personnalisée. En
effet, voilà un moment dans le temps scolaire où l’enseignant est disponible pour son élève.
L’élève a le temps et l’écoute nécessaires pour développer sa pensée, l’enseignant a le
temps et l’écoute nécessaires pour la comprendre. Il sera plus aisé ensuite de créer des
situations d’apprentissage plus adaptées à l’élève, avec tous les ajustements qu’il sera
possible de faire au fil des séances. D’ailleurs ces situations seront transférables dans la
classe en facilitant éventuellement la différenciation pédagogique mise en place par
l’enseignant.
Il est certainement confortable pour un apprenant d’être écouté et compris, de trouver une
façon de travailler adaptée et adaptable. Il est possible de supposer que les activités
proposées en Aide Personnalisée puissent jouer un rôle dans le « ressenti » des élèves, dans
leur « expérience scolaire » qui, si elle s’avère positive, pourra être le point de départ d’une
nouvelle relation au savoir et à l’apprendre.
45
Brunswic, E.
Houssaye, J. Professeurs et élèves : les bons et les mauvais ESF, Issy-les-Moulineaux, 2001
47 Meirieu P. Apprendre… oui, mais comment ESF, Issy-les-Moulineaux, 1987
46
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Page 27
Mais les apports éventuels de l’Aide Personnalisée sur l’expérience scolaire des
élèves ne s’arrêtent encore pas là.
L’Aide Personnalisée peut aussi être considérée comme un moment privilégié où
l’environnement sera favorable à l’apprentissage. Un moment privilégié par un lieu qui peut
être différent de celui de la classe, par un moment qui peut être propice aux apprentissages
s’il respecte les rythmes de l’enfant, par la situation de travail en très petit groupe qui peut
être rassurante pour un élève en difficulté.
1.7. La sécurité cognitive grâce à un environnement favorable
Voilà une autre condition essentielle de l’apprentissage : l’environnement, la situation
dans laquelle cet apprentissage a lieu. En effet, « le rapport au savoir peut être défini comme
rapport … à des situations d’apprentissage »48 (p2) selon Jean-Yves Rochex.
Il faut donc réfléchir aux conditions dans lesquelles les élèves apprennent, elles vont être
déterminantes car « apprendre, selon Bernard Charlot49, c’est déployer une activité en
situation : dans un lieu, à un moment de son histoire et dans diverses conditions de temps,
avec l’aide de personnes qui vous aident à apprendre. » (p78)
Il existe donc bel et bien des situations qui vont être plus favorables à l’apprentissage que
d’autres ; des endroits, des moments, des modes d’organisation du travail, bref des
environnements qui vont implicitement créer des conditions idéales.
D’autant plus que, selon Jean Houssaye50, « il faut que l’élève se sente … en sécurité pour
s’impliquer dans la tâche. » (p47)
L’Aide Personnalisée est un temps spécifique dans la journée scolaire pour plusieurs
raisons. D’abord parce que son lieu d’existence peut être original : certains enseignants vont
à l’extérieur quand le temps le permet, certains endroits de la classe pas forcément investis
habituellement comme le coin-lecture ou l’espace informatique sont mis à profit.
Ensuite la situation d’apprentissage est inédite puisque les élèves travaillent soit par petits
groupes (2 à 3 élèves au maximum) soit de manière totalement individualisée.
De plus, « la situation d’apprentissage n’est pas seulement marquée par le lieu et par les
personnes mais aussi par un moment » (p79) selon Charlot51 et justement, le moment de
l’Aide Personnalisée est particulier puisque celle-ci se déroule en dehors des heures de
classe.
Par contre, pour que le moment d’apprentissage soit favorable, il semble important qu’il
respecte les rythmes chrono-biologiques de l’enfant, spécifiques selon l’âge mais aussi selon
le rythme de vie des familles. Nous constatons déjà que la mise en place d’un temps d’Aide
Personnalisée convenable ne sera pas aisée.
Hubert Montagner, spécialiste reconnu des rythmes psychobiologiques des enfants, nous
apprend que la vigilance des enfants en classe est à son optimum entre 9H00-9H30 et 11H le
48 Rochex J.Y. Entre apprentissage et socialisation : le rapport au savoir, Communication au symposium De la famille aux
savoirs : dynamiques éducatives dans les sociétés complexes actuelles, oct-nov 2002, Timimoun, Algérie
49
Charlot, B. Du Rapport au Savoir Eléments pour une théorie Anthropos Economica, Paris, 2005
50 Houssaye, J. Les trois facettes de la motivation in Sciences Humaines n°12 de février-mars 1996
51
Charlot, B. Du Rapport au Savoir Eléments pour une théorie Anthropos Economica, Paris, 2005
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matin et entre 14H et 16H-16H30 l’après-midi. L’amplitude des plages dépendant fortement
de l’âge des enfants. Plus ils sont âgés plus la plage horaire s’étend, sans toutefois jamais
dépasser 16H30.
Il paraît difficile de trouver un moment favorable à la mise en place de l’Aide Personnalisée
dans une journée scolaire déjà très lourdement chargée si on la compare à celle des autres
enfants européens. D’autant plus que la semaine de quatre jours, en vigueur à l’heure
actuelle est, toujours selon les chrono-biologistes, contraire au bien-être des élèves.
C’est peut-être tout l’aménagement du temps scolaire qu’il faudrait repenser.
Tout de même, à ce moment de la réflexion et quelque soient les activités proposées
pendant ce temps d’aide, les élèves se trouvent dans une situation inédite qui peut être
spécialement aménagée pour les mettre à l’aise, adaptée pour qu’ils se sentent en
« sécurité cognitive» et donc favorable à leurs apprentissages.
L’Aide Personnalisée permet-elle réellement aux élèves d’avoir une expérience
positive pendant ce moment d’école en plus ? Pourra-t-elle éventuellement aider les élèves
à se sentir bien à l’école ? Cet environnement particulier peut-il créer de meilleures
conditions de travail pour les élèves en difficulté ? Nous pouvons le penser
puisque l’apprentissage opère lorsque l’élève rencontre une occasion favorable d’apprendre
et lorsque lui-même est disponible pour en profiter pleinement.
En fait il s’agirait de créer en Aide Personnalisée les trois niveaux de ritualisation de Philippe
Meirieu52 indispensables en classe : « le rituel d’aménagement de l’espace, le rituel de
répartition du temps, le rituel de codification des comportements. » (p97)
D’ores et déjà, nous pouvons supposer que l’Aide Personnalisée puisse avoir une
influence positive sur l’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée. En effet,
comme nous l’avons vu, il est possible qu’elle permette aux élèves d’avoir une meilleure
confiance en eux mais aussi qu’elle leur donne envie de travailler. De plus la situation d’Aide
Personnalisée permet de faciliter la relation entre l’élève et l’adulte médiateur. Elle permet
aussi à l’élève de bénéficier d’activités de travail adaptées à son mode de fonctionnement
cognitif. Enfin, il est possible pour l’enseignant de créer un environnement favorable à
l’apprentissage.
A l’aide du dispositif méthodologique décrit ci-après, nous allons tenter de tester la validité
de ces hypothèses à partir d’un échantillon réduit et peu représentatif mais qui va permettre
de mener une recherche exploratoire. Ce questionnement et ces hypothèses auront-ils un
intérêt pour une recherche plus large en sciences de l’éducation ?
52
Meirieu, P. Apprendre… oui, mais comment ESF, Issy-les-Moulineaux, 1987
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2. Le dispositif méthodologique
Nous nous situons dans une démarche exploratoire et à ce titre les élèves interrogés
dans le protocole sont peu nombreux. Il s’agit en effet avant tout, de vérifier la validité des
hypothèses proposées dans cette recherche.
Ainsi notre démarche est-elle de nature qualitative : interroger les élèves sur leur
« ressenti » pendant la prise en charge en Aide Personnalisée afin de tracer les contours
d’une expérience scolaire plus ou moins positive.
2.1. Choix de la population étudiée
L’Aide Personnalisée est un dispositif mis en place à l’école élémentaire c'est-à-dire de la
maternelle au CM2. Il nous a semblé opportun d’interroger en première intention des élèves
de l’école primaire, déjà entrés dans les apprentissages.
Etant nous même affectée dans une école élémentaire, il était aisé d’interroger les enfants
de cette école ; des autorisations écrites ont été nécessairement demandées à Madame
l’Inspectrice de l’Education Nationale de Thionville (Moselle) ainsi qu’aux parents des
enfants concernés par l’Aide Personnalisée.
Etant nous –même impliquée dans l’école, nous prenions le risque que les élèves aient une
attitude portée à répondre à nos attentes ou à celles de leurs enseignants respectifs. Dans la
crainte d’être jugé, dans l’espoir de « se faire bien voir » ou pour faire plaisir à l’interviewer.
Mais nous pouvions aussi espérer que les élèves soient plus en confiance et donc plus
enclins à partager leur regard sur l’Aide Personnalisée.
L’introduction de l’entretien mettait l’accent sur l’anonymat des réponses afin de permettre
aux élèves d’être sincères.
« Je voudrais te poser quelques questions pour savoir ce que tu penses de l’Aide Personnalisée.
J’aimerais que tu répondes en me disant exactement ce que tu penses, tu peux dire tout ce que tu veux,
cela restera entre nous, les questionnaires sont anonymes (explication éventuelle).
Les réponses que tu me donneras vont servir à réfléchir sur l’Aide Personnalisée, pour savoir si les élèves
s’y sentent bien pour travailler.
J’ai besoin de ton aide pour cela. Est-ce que tu es d’accord ?
Quand je parle d’Aide Personnalisée, est-ce que tu sais exactement de quoi je parle ?
(C’est le temps que tu passes avec ton maître, ta maîtresse après la classe, quand les autres élèves sont
partis.)
Tu es prêt(e) ? Alors on commence. »
Le premier choix a été d’interroger un élève au hasard par niveau de classe. Finalement il
a paru plus intéressant de « choisir » avec chaque enseignant d’abord un enfant qui vienne
depuis suffisamment longtemps en Aide Personnalisée mais aussi un enfant qui soit capable
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Page 30
de raconter, d’expliquer ce qu’il ressent. En effet un élève peu loquace n’aurait peut-être pas
apporté suffisamment de matière à exploiter.
C’est une prise de position qui biaise très probablement l’enquête puisque les élèves sont
choisis en fonction d’un critère. Mais étant donné le faible nombre d’entretiens proposés, il
était important de garantir l’obtention d’informations exploitables.
Replaçons-nous dans un contexte de recherche exploratoire. Les résultats des entretiens
serviront à justifier l’existence et l’intérêt du questionnement.
De plus, si les élèves ont été choisis, l’école l’a été aussi. Il s’agit d’ailleurs d’une école de
grande mixité sociale située dans un quartier de cités HLM où les élèves en difficultés
scolaires concernés par l’Aide Personnalisée ne manquent pas. Les résultats aux Evaluations
Nationales y sont d’ailleurs sensiblement inférieurs aux moyennes nationales.
A partir de la population étudiée, un groupe de cinq enfants de différents niveaux
choisis dans une seule et même école, il a fallu ensuite réfléchir à la manière la plus efficace
et la plus « parlante » de recueillir des données.
2.2. Choix du mode de collecte des informations
Le mode de collecte des informations a été effectué à partir de la spécificité du public. En
effet, interroger de jeunes enfants n’est pas simple. Ils ne sont pas encore forcément
capables de développer des idées à partir d’un thème, fut-il très restreint. A priori leurs
réponses devaient être laconiques et souvent sans élargissement de l’idée de départ. Dans
ce cas les questions doivent être très ciblées et dans la mesure du possible aborder tous les
thèmes de la recherche.
De plus, les enfants de l’école élémentaire sont encore trop souvent mal à l’aise avec la
lecture pour que l’on puisse être sûr qu’ils aient bien compris une question. Il n’était donc
pas possible de leur proposer des questionnaires à remplir seuls.
Il s’agissait donc de trouver une méthode très directive, avec des questions fermées ne
nécessitant pas de prise de parole longue et qui mettent en confiance les enfants. Il fallait
surtout éviter de les mettre en difficulté. Tout de même, ces questions pouvaient donner
une idée précise du sentiment des enfants. S’ajoutent quelques questions ouvertes qui
permettent, au moins aux plus grands, d’avoir un espace de parole disponible pour
développer leur pensée.
La forme aboutie du mode de collecte des informations se présente comme un entretien
directif, où chaque question a été écrite préalablement et est posée de vive voix à l’enfant
interviewé lors d’un entretien en face à face. Il était prévu que les réponses soient très
courtes, il devait être possible de les retranscrire à la main au fur et à mesure.
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Voici le questionnaire soumis aux élèves lors des entretiens :
1) D’après toi, l’Aide Personnalisée, à quoi ça
sert ?
16) Est-ce que parfois tu as peur de
poser des questions ?
2) Qui a décidé que tu viendrais en Aide
Personnalisée ?
17) Et en classe, as-tu parfois peur de
poser des questions ?
3) Et toi, étais-tu d’accord ?
18) Est-ce que tu te sens bien pour
travailler en Aide Personnalisée ?
4) Souhaites-tu continuer à venir ?
19) Est-ce que tu as assez de temps
pour travailler ?
5) A ton avis, pourquoi le maître (la maîtresse)
a proposé que tu viennes en Aide
Personnalisée ?
6) Est-ce que tu trouves que tu réussis mieux
pendant l’Aide Personnalisée ?
20) Est-ce que tu réussis à te
concentrer ?
7) A ton avis pourquoi ?
21) Est-ce que tu sais pourquoi ?
22) Et en classe, est-ce que tu réussis
à te concentrer ?
8) Est-ce que, en Aide Personnalisée, tu as envie 23) Aimes-tu travailler avec les autres
de réussir ?
enfants de l’Aide Personnalisée ?
9) Est-ce que tu sais pourquoi ?
24) Est-ce que tu sais pourquoi ?
10) Est-ce que tu penses que tu es un bon
élève ?
25) Est-ce qu’en Aide Personnalisée tu
fais la même chose qu’en classe ?
11) Sinon, est-ce que tu penses que tu
deviendras bientôt un bon élève ?
26) Que penses-tu du travail proposé
en Aide Personnalisée ?
12) Sinon, est-ce que tu penses qu’il est
possible que tu deviennes un bon élève ?
27) Est-ce que tu as envie de travailler
en Aide Personnalisée ?
13) Qui s’occupe de toi en Aide Personnalisée ?
28) Saurais-tu dire pourquoi ?
14) Est-ce que tu lui dis quand tu n’as pas
compris ?
29) Et en classe, as-tu envie de
travailler?
15) Est-ce que tu lui poses des questions ?
30) Es-tu content de venir en Aide
Personnalisée ?
2.3. Déroulement des entretiens
Les entretiens ont duré huit à dix minutes et ce temps de passation a permis aux élèves
de rester concentrés et attentifs jusqu’à la fin. Ils se sont déroulés sans difficultés
particulières, dans un bon esprit et avec une réelle volonté de collaboration de la part des
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Page 32
élèves. C’est d’ailleurs ainsi que l’interview leur a été présentée en préambule : l’interviewer
avait besoin de leur aide pour entamer une réflexion sur l’Aide Personnalisée afin
d’expliciter les points forts et les lacunes de ce moment d’aide ainsi que leur opinion, leur
ressenti quant à son déroulement.
Sur les cinq enfants interrogés, tous ont pris leur rôle très au sérieux et ont répondu
facilement à l’ensemble des questions.
Cependant, ils ont eu des attitudes très différentes : trois d’entre eux ont réellement « joué
le jeu », ayant presque des postures d’adultes lors de l’entretien même si l’un d’entre eux a
largement digressé en abordant des sujets importants pour lui mais qui n’avaient plus aucun
rapport avec le questionnaire. Concernant les deux autres, l’un n’a eu de cesse de trouver la
situation incongrue ; malgré son sérieux dans les réponses, il était amusé d’être là et ne s’est
pas départi de son sourire. Le dernier enfant quant à lui est resté à sa place d’enfant et a
répondu de façon tout à fait naturelle.
Dans l’ensemble, et c’est tout à fait remarquable, les enfants étaient extrêmement fiers
que nous leur demandions leur avis, que leur opinion soit sollicitée par un adulte et prise en
compte dans une réflexion sur leur « ressenti » à l’école.
Malgré tout il faut rappeler que seuls cinq enfants tous issus d’une seule et même école
ont été interrogés. L’échantillon est trop modeste et trop peu représentatif pour pouvoir en
généraliser les conclusions.
C’est seulement pendant le déroulement des entretiens qu’il est possible de repérer
certaines erreurs dans la typologie des questions.
Par exemple, pour les questions 16 et 17 « Est-ce que parfois tu as peur de poser des
questions ? » et « Et en classe, as-tu parfois peur de poser des questions ? », il a semblé
évident lors de la lecture des questions aux élèves que le mot « peur » n’était pas approprié.
Les élèves, tous de sexe masculin (c’est d’ailleurs un biais de l’enquête même s’il s’avère que
la grand majorité des enfants pris en charge en Aide Personnalisée dans cette école sont des
garçons), avaient une réaction très spontanée qui consistait à répondre « non » au fait qu’ils
puissent avoir peur de quelque chose, peu importe de quoi, plutôt que répondre à la
véritable question qui concernait le fait d’être suffisamment à l’aise avec l’adulte pour
pouvoir l’interroger.
Il semble que ces élèves n’aient simplement pas voulu reconnaître qu’ils puissent avoir peur.
Il aurait fallu trouver une tournure de phrase et un vocabulaire plus appropriés. Par
exemple : « Est-ce que tu poses les questions que tu as envie de poser ? » et
« Pourquoi poses-tu ces questions? »
Une autre erreur concerne les questions du type « A ton avis pourquoi ? », « Saurais-tu
dire pourquoi ? ». Les élèves ont parfois répondu « je ne sais pas » ou d’autres fois reconnu
qu’ils n’avaient pas compris la question. En fait, il s’avère qu’ils avaient oublié la question
précédente et ne savaient plus de quoi nous parlions. Il aurait fallu que l’interviewer fasse à
chaque fois un rappel de la question précédente afin que l’interviewé sache précisément ce
que concernait la question qui était posée.
Les élèves ont tous été remerciés à la fin de l’entretien pour leur collaboration à cette
réflexion sur l’Aide Personnalisée.
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Page 33
Une fois les entretiens effectués, il s’agit de tenter un début d’interprétation des
réponses des élèves interrogés.
2.4. Traitement des résultats
Les élèves interrogés dans le cadre de cette recherche exploratoire sont tous les cinq
en assez grande difficulté scolaire. Ils connaissent l’Aide Personnalisée au long cours ; ils ont
tous commencé dès le début de l’année scolaire et étaient déjà pris en charge l’année
précédente. D’ailleurs trois d’entre eux ont connu un maintien en fin de cycle deux (il s’agit
des élèves n°1, n°3 et n°4) car ils n’étaient pas encore entrés dans la lecture. L’élève n°2
présente un profil particulier ; c’est un ENAF (Enfant Nouvellement Arrivé en France) de
janvier 2009. Il a commencé l’apprentissage du français à ce moment là et ses difficultés
concernent uniquement la langue. C’est l’élève n°3 qui présente les difficultés les plus
profondes. En classe de CM1 il n’est pas du tout entré dans les apprentissages et semble
toujours se demander ce qu’il fait à l’école. C’est aussi cet élève qui a répondu avec le plus
grand sérieux à l’enquête ; il semblait se poser en spécialiste de l’Aide Personnalisée.
Plusieurs sous-thèmes se dégagent à la lecture du tableau croisé récapitulatif des
réponses des élèves en entretien : les conceptions qu’ont les élèves au sujet de l’Aide
Personnalisée, l’estime de soi ou la confiance en soi, l’envie de travailler pour réussir, la
relation à l’adulte, les activités proposées en Aide Personnalisée, l’environnement et enfin ce
qui tient de l’opinion générale sur l’Aide Personnalisée.
Les
conceptions
La
confiance
en soi
L’envie de
travailler
pour
réussir
Elève
n°1
A rattraper ce
qu’on a pas
fait en classe.
… j’écris pas
bien, je lis
pas bien.
Parce que si
je réussis
pas je vais
redoubler.
Elève
n°2
A travailler
mieux.
Pour que je
passe au CM1.
Non parce
que je sais.
Parce que
j’ai envie de
réussir, de
bien
travailler en
classe et à
l’école.
Même en
classe j’ai
envie.
Pour faire la
lecture
mieux.
Elève
n°3
A nous aider
dans nos
difficultés.
Oui parce
que j’ai
encore des
difficultés.
Parce que
j’ai besoin
d’aide.
Pour avoir
de bonnes
notes.
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
La relation à
l’adulte
Les activités
en AP
L’environnement
en AP
Non, dès fois
oui, on révise
un petit peu.
Bien, on fait
des petits
jeux.
Pour montrer à
la maîtresse que
j’y arrive.
Oui, si j’y arrive
pas.
Parce qu’on
fait la lecture
tout le
temps.
Parce qu’on
apprend plus
de choses.
C’est bien, on
révise ce
qu’on arrive
pas à faire.
Opinion
générale sur
l’AP
Je suis content
d’y aller, j’ai
dit à mes
parents que je
voulais y aller,
et ils ont dit la
bonne réponse
que j’allais y
aller.
Parce que y’a pas de
bruit.
Il est bien. (Le
travail en AP)
Parce que je suis
plus seul, j’y arrive
pas quand il y a
plein de monde.
Mieux. (Je réussis à
me concentrer)
Parce que y a pas de
bruit autour de moi.
Ils me dérangent
pas. Ils sont gentils
et tranquilles. (Les
autres élèves en AP)
Page 34
Elève
n°4
A progresser
où on a des
difficultés, à
nous aider.
Pour
m’améliorer.
Pas trop.
(Est-ce que
tu penses
que tu es un
bon élève ?)
Pour
progresser
dans mon
travail.
Elève
n°5
A améliorer
notre travail
en classe.
Pas trop.
Parce que
j’ai des
difficultés
en classe.
Oui, un peu
mieux. (Estce que tu
trouves que
tu réussis
mieux en
AP ?)
Ca va servir
pour le
collège.
On peut
discuter sur le
travail, le maître
nous aide plus,
on peut parler
quand on y
arrive pas.
C’est
intéressant, on
travaille
tranquillement,
on peut discuter
plus longtemps
sur ce qu’on a
pas compris.
Parce qu’on est
moins et le
maître a le
temps d’aller
chez tout le
monde.
C’est bien, on
fait des petits
jeux dans le
travail mais
pour y arriver
mieux.
Oui, ça
m’intéresse.
Oui, quand même,
on est moins, on est
plus concentré.
Oui, c’est plus calme
qu’en classe.
Les élèves me
dérangent pas.
On peut parler
quand on y arrive
pas.
Oui mais ça
passe vite.
Parce que le
maître fait
des
exercices,
des jeux.
Ca dépend des
exercices. J’ai plus
de temps en Aide
Personnalisée.
Ca dépend du bruit
des autres. (En
classe)
Parce qu’ils sont
moins bruyants. (En
AP)
Bien, ça sert
pour le travail
en classe.
Ca m’aide dans
mes difficultés.
L’Aide
Personnalisée,
ça dure pas
assez
longtemps.
2.4.1.
Les conceptions et les attentes des élèves au sujet de l’Aide
Personnalisée
A la question, « d’après toi, l’Aide Personnalisée, à quoi ça sert ? », et « Pourquoi astu envie de travailler en Aide Personnalisée ? » (qui suivait la question « As-tu envie de
travailler en Aide Personnalisée ? »), voici ce que les élèves ont répondu :
Les conceptions
L’envie de travailler
pour réussir
Elève n°1
« A rattraper ce qu’on a
pas fait en classe ».
Elève n°2
« A travailler mieux.
Pour que je passe au
CM1 ».
« Parce que j’ai envie
de réussir, de bien
travailler en classe et à
l’école.
Même en classe j’ai
envie. »
« Pour faire la lecture
mieux. »
Elève n°3
« A nous aider dans nos
difficultés ».
« Pour avoir de bonnes
notes. »
Elève n°4
« A progresser où on a
des difficultés, à nous
aider.
Pour m’améliorer ».
« A améliorer notre
travail en classe. »
« Pour progresser dans
mon travail ».
Elève n°5
« Oui, un peu mieux.
(Est-ce que tu trouves
que tu réussis mieux en
AP ?)
Ca va servir pour le
collège. »
Extrait du tableau n°1
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 35
Nous constatons que les élèves interrogés ont une réelle attente vis-à-vis de l’Aide
Personnalisée. Ils comptent sur ce temps de soutien pour progresser dans leurs
apprentissages scolaires, pour avoir moins de difficultés en classe, pour avoir de meilleures
notes, pour « passer » dans la classe supérieure.
Leur vision de l’Aide est très positive. Selon eux, ça doit fonctionner. On peut d’ores et déjà
prévoir quelques désillusions si l’échec scolaire persiste, ce qui sera probablement le cas
pour certains d’entre eux. L’Aide Personnalisée n’est certainement pas un remède miracle,
en tout cas pas a priori pour les élèves en grande difficulté qui comme nous l’avons vu
précédemment nécessiteraient des prises en charge spécialisées.
Notons d’ailleurs que le RASED (Réseau d’Aides Spécialisées aux Enfants en Difficulté) n’est
plus présent sur l’école concernée par cette recherche.
Après l’étude des conceptions qu’ont les élèves de l’Aide Personnalisée, arrêtonsnous sur la question de l’estime de soi et de la confiance des élèves en leurs capacités
d’apprentissage.
2.4.2.
La confiance en soi
Voici un extrait des deux tableaux récapitulatifs des réponses des élèves :
(L’élève interrogé) pense-t-il qu’il est
un bon élève ?
Sinon pense-t-il qu’il deviendra
bientôt un bon élève ?
OUI
NON
3
Et 2 pas trop
0
2 sur les 2 élèves
concernés
0
Extrait du tableau n°2
L’estime de soi, la
confiance en soi
Elève n°1
Elève n°2
Elève n°3
Elève n°4
Elève n°5
Les conceptions
« … j’écris pas bien, je
lis pas bien.
Parce que si je réussis
pas je vais redoubler. »
« Non parce que je
sais. »
« A rattraper ce qu’on a
pas fait en classe ».
« Oui parce que j’ai
encore des difficultés.
Parce que j’ai besoin
d’aide. »
« Pas trop. (Est-ce que
tu penses que tu es un
bon élève ?) »
« A nous aider dans nos
difficultés ».
« Pas trop.
Parce que j’ai des
difficultés en classe. »
« A travailler mieux.
Pour que je passe au
CM1 ».
« A progresser où on a
des difficultés, à nous
aider.
Pour m’améliorer ».
« A améliorer notre
travail en classe. »
Extrait du tableau n°1
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 36
Il est tout à fait intéressant de constater que les élèves ont dans l’ensemble une idée très
objective de leur situation scolaire : ils ne se sentent pas forcément en échec (3 élèves sur 5
se considèrent comme de bons élèves, les 2 autres pensent qu’ils ne sont « pas trop » des
bons élèves mais qu’ils le deviendront bientôt), mais ils reconnaissent facilement qu’ils ont
des difficultés et qu’ils ont besoin d’aide pour pouvoir les surmonter.
Ces résultats rejoignent une constatation de Benoît Galand53, enseignant-chercheur à
l’université de Louvain selon lequel la plupart des élèves même en difficulté ont une assez
bonne estime d’eux-mêmes. Ce qui leur manque, c’est la confiance en leurs capacités
d’apprentissage.
Tout de même, la peur du redoublement, pour un élève, montre une réelle inquiétude face
à l’avenir scolaire même si celui-ci se considère pourtant comme un bon élève…
Ces enfants pris en charge dans le cadre de l’Aide Personnalisée ont des difficultés qu’ils
connaissent et reconnaissent, pourtant nous pouvons supposer qu’ils gardent pour la
plupart confiance dans leur avenir scolaire puisqu’ils souhaitent et pensent pouvoir
progresser.
Aurions-nous eu les mêmes résultats avec des élèves en difficulté non pris en charge en Aide
Personnalisée ? Est-ce qu’il est, nous pouvons l’espérer, dans la nature enfantine d’avoir
naturellement confiance en l’avenir ou est-ce que l’Aide Personnalisée contribue, même
marginalement, à renforcer ce sentiment ?
Tout de même, ces enfants se sentent capables de surmonter leurs difficultés et cette
attitude positive est un facteur propre à favoriser la réussite scolaire.
Mais ont-ils envie de travailler pour réussir ?
2.4.3.
L’envie de travailler pour réussir
L’envie de travailler
pour réussir
Elève n°1
Elève n°2
Elève n°3
Elève n°4
« Parce que j’ai envie
de réussir, de bien
travailler en classe et à
l’école.
Même en classe j’ai
envie. »
« Pour faire la lecture
mieux. »
« Pour avoir de bonnes
notes. »
« Pour progresser dans
mon travail ».
Extrait du tableau n°1
(L’élève interrogé) Est-ce qu’il a envie
de travailler en Aide Personnalisée ?
OUI
NON
5
0
4
1 pas toujours
0
Et en classe, a-t-il envie de travailler?
Extrait du tableau n°2
53
Galand, B. Réussite scolaire et estime de soi in Sciences Humaines n° spécial n°5 octobre-novembre 2006
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 37
Les élèves ont en général tous envie de réussir leur scolarité. Mais ont-ils réellement
envie de travailler pour atteindre cet objectif ? Ne préfèreraient-ils pas que cela « vienne
tout seul » ?
Tous les élèves interrogés ont envie de travailler en Aide Personnalisée. Afin de mieux
réussir en classe, pour avoir de bonnes notes, pour réussir leur scolarité « ça va servir pour le
collège ». Quatre enfants ont envie de travailler et de réussir en Aide Personnalisée mais
aussi en classe. Un élève reconnaît qu’en classe, il n’a pas toujours envie de travailler.
Les élèves de l’échantillon ont envie de travailler en Aide Personnalisée et comme cela a été
abordé précédemment, ils ont confiance en l’avenir et en la possibilité de sortir de leurs
difficultés scolaires.
Il est possible dès lors de supposer que la prise en charge en Aide Personnalisée, en dehors
du travail qui y est effectué, puisse être vécue par les élèves d’abord comme une
reconnaissance de leurs difficultés et de leur volonté de s’en sortir mais aussi comme un
processus, une volonté de la part des adultes et de l’Institution d’affronter réellement la
difficulté scolaire.
L’enfant était-il d’accord pour venir
en Aide Personnalisée
OUI
NON
5
0
5
0
Souhaite-t-il continuer à venir ?
Extrait du tableau n°2
Non seulement les élèves interrogés ont tous adhéré sans hésiter au projet d’Aide
Personnalisée, mais ils auraient tous insisté auprès de leurs parents pour pouvoir y aller et
un enfant a même été l’initiateur en demandant lui-même aux enseignants d’être pris en
charge : « Je suis content d’y aller, j’ai dit à mes parents que je voulais y aller, et ils ont dit la
bonne réponse que j’allais y aller. »
C’est en quelque sorte un cercle vertueux, les difficultés sont reconnues, officialisées par
l’ensemble des personnes concernées, elles sont évaluées puis ciblées par les enseignants,
l’élève est accompagné dans son envie de réussir et cette volonté renforce encore celle des
adultes qui l’entourent de l’y aider.
Insistons sur le fait que ces élèves sont en assez grand difficulté, dans une école de
grande mixité sociale où les situations de rapports à l’école sont très variées. En effet,
certaines familles attendent beaucoup de l’Institution scolaire et lui font toute confiance.
D’autres ont une grande méfiance à l’égard d’une école qui ne préparerait pas à la vie active.
Si nous mettons de côté l’enfant n°2 (ENAF), les élèves de l’échantillon ne sont pas a priori
promis à aimer l’école. Ils ont depuis le début de leur scolarité une relation difficile avec
l’école et les apprentissages, des résultats scolaires faibles et même pour l’un d’entre eux
une relation conflictuelle permanente avec les adultes.
Deux de ces élèves ont passé des évaluations nationales en 2010 (classe de CM2) avec des
résultats globaux de 51/100 et 17/100, résultats très moyens et très insuffisants par rapport
aux résultats de l’école.
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 38
Si les élèves sont contents de venir en Aide Personnalisée et ont envie d’y travailler pour
réussir, qu’en est-il de leur relation à l’adulte pendant cette prise en charge ? Est-il possible
grâce aux entretiens de constater que l’Aide Personnalisée favorise la relation entre l’élève
et son enseignant ?
2.4.4.
La relation à l’enseignant
La relation à l’adulte
Elève n°1
Elève n°2
Elève n°3
Elève n°4
Elève n°5
« Pour montrer à la maîtresse que j’y arrive.
Oui, si j’y arrive pas. »
« On peut discuter sur le travail, le maître nous aide plus, on peut parler quand
on y arrive pas.
C’est intéressant, on travaille tranquillement, on peut discuter plus longtemps
sur ce qu’on n’a pas compris. »
« Parce qu’on est moins et le maître a le temps d’aller chez tout le monde ».
Extrait du tableau n°1
(L’élève interrogé) Est-ce qu’il le dit à
son enseignant quand il n’a pas
compris ?
Est-ce qu’il lui pose des questions ?
Est-ce qu’il a parfois peur de poser
des questions ?
OUI
NON
5
0
3
1 ça dépend de l’exercice
1 parce qu’il sait
0
5
0
5 mais 2 après une hésitation
Et en classe ?
Extrait du tableau n°2
Les enfants apprenant ont besoin de reconnaissance ; celle de leurs parents, de leur
entourage mais aussi celle de leur enseignant. Il s’agit d’un point abordé par un des élèves
interrogés. En disant « pour montrer à la maîtresse que j’y arrive », celui-ci démontre, si
besoin était, que le côté affectif joue un grand rôle, que ce soit en Aide Personnalisée ou en
classe. Sauf qu’en classe, les élèves sont nombreux. Il est plus difficile d’accorder une
attention particulière à chacun. En Aide Personnalisée par contre, une véritable relation de
confiance peut s’instaurer. Ce sont les élèves en difficulté qui en ont le plus besoin. Ce sont
eux aussi qui en bénéficieront le plus.
« On peut discuter sur le travail, le maître nous aide plus, on peut parler quand on y arrive
pas. C’est intéressant, on travaille tranquillement, on peut discuter plus longtemps sur ce
qu’on n’a pas compris. »
Là encore c’est le privilège de la relation qui est mis en avant. Ici l’élève ne réclame plus
une reconnaissance de la part de l’adulte car il est plus âgé (CM2). Par contre, il met l’accent
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 39
sur le temps qui va lui être consacré « on peut discuter plus longtemps » et sur les
informations supplémentaires qui vont être mises à sa disposition par rapport à ce qui a été
fait en classe « le maître nous aide plus, … on peut discuter plus longtemps sur ce qu’on n’a
pas compris ». En effet, les élèves en difficulté ont souvent besoin de ré-explications et
même d’explications différentes, sur un autre mode. Ils ont aussi besoin de temps
supplémentaire pour assimiler une notion.
« Parce qu’on est moins et le maître a le temps d’aller chez tout le monde ». Là encore
l’élève insiste sur une plus grande disponibilité de son enseignant, disponibilité qui semble
être importante pour lui.
De plus, nous constatons à la lecture des résultats que les élèves sont à l’aise en Aide
Personnalisée dans le sens où ils ne craignent pas de poser des questions à leur enseignant
alors que cela leur semble moins évident en classe : deux enfants répondent qu’ils n’ont pas
peur de poser des questions en classe mais après une hésitation. L’un d’entre eux expliquera
d’ailleurs qu’il ne posera pas une question dont il sait qu’il devrait connaître la réponse (sur
une leçon qui était à apprendre par exemple), de peur de se faire disputer.
Il semble évident que la relation en Aide Personnalisée est plus simple pour l’élève comme
pour son enseignant, l’élève est là pour pallier ses difficultés scolaires, pas pour savoir a
priori.
Après les conceptions qu’ont les élèves de l’Aide Personnalisée, leur confiance en
eux, leur envie de réussir et la relation avec leur enseignant, intéressons-nous au thème
suivant abordé dans les entretiens : les activités proposées aux élèves dans le cadre de l’Aide
Personnalisée.
2.4.5.
Les activités en Aide Personnalisée
Les activités en AP
Elève n°1
Non, dès fois oui, on
révise un petit peu.
Bien, on fait des petits
jeux.
Elève n°2
Parce qu’on fait la
lecture tout le temps.
Parce qu’on apprend
plus de choses.
C’est bien, on révise ce
qu’on arrive pas à faire.
Elève n°3
Elève n°4
C’est bien, on fait des
petits jeux dans le
travail mais pour y
arriver mieux.
Oui, ça m’intéresse.
Elève n°5
Parce que le maître fait
des exercices, des jeux.
Extrait du tableau n°1
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 40
« On révise », « on fait des petits jeux », « on fait de la lecture tout le temps », les
activités proposées en Aide Personnalisée semblent être très variées, ce qui n’est pas
surprenant puisqu’aucune demande institutionnelle n’a été faite pour ces deux heures
hebdomadaires. L’objectif est fixé puisqu’il s’agit d’aider les élèves en difficulté et de faire
reculer l’échec scolaire mais les moyens pour y parvenir sont pour l’instant laissés à la
discrétion des enseignants qui n’ont pas reçu de formation pour cela.
Il est d’ailleurs intéressant de remarquer ici que les enseignants spécialisés de l’Education
Nationale ne sont pas soumis à l’obligation de service de l’Aide Personnalisée.
Aucun enfant ne fait remarquer que le travail en Aide Personnalisée soit rébarbatif ou
contraignant, par contre ils sont tous satisfaits des activités proposées « bien », « il est
bien », « c’est bien » et ils ont tous envie de continuer à venir.
« Parce qu’on apprend plus de choses. », dit un élève. Pourquoi ce sentiment ? Peut-être
parce que le temps est plus dense, les activités sont plus intenses puisqu’elles sont
davantage individualisées. L’élève est peut-être aussi plus disponible, plus concentré. Que
peut apporter à l’élève l’environnement particulier de l’Aide Personnalisée ?
2.4.6.
L’environnement en Aide Personnalisée
L’environnement en AP
Elève n°1
Elève n°2
Elève n°3
Elève n°4
Elève n°5
Parce que y’a pas de bruit.
Parce que je suis plus seul, j’y arrive pas quand il y a plein de monde.
Mieux. (Je réussis à me concentrer)
Parce que y a pas de bruit autour de moi.
Ils me dérangent pas. Ils sont gentils et tranquilles. (Les autres élèves en AP)
Oui, quand même, on est moins, on est plus concentré.
Oui, c’est plus calme qu’en classe.
Les élèves me dérangent pas.
On peut parler quand on y arrive pas.
Ca dépend des exercices. J’ai plus de temps en Aide Personnalisée.
Ca dépend du bruit des autres. (En classe)
Parce qu’ils sont moins bruyants. (En AP)
Extrait du tableau n°1
L’espace et le temps peuvent être des éléments clés pour l’apprentissage. Certains
moments sont plus propices que d’autres. Il est important que les élèves aient suffisamment
de temps pour penser et réfléchir, ils doivent être à l’aise dans leur environnement afin
d’être disponibles pour le travail scolaire.
Dans les entretiens, les cinq élèves interrogés ont déclaré se sentir bien pour travailler en
Aide Personnalisée.
D’ailleurs concernant les rythmes chrono-biologiques, il pourrait sembler étonnant que les
élèves interrogés n’aient pas évoqué la fatigue pendant l’Aide Personnalisée qui s’ajoute à
vingt-quatre déjà bien remplies de travail hebdomadaire.
Il se trouve que dans l’école concernée, l’Aide Personnalisée fonctionne de façon peut-être
particulière : pour commencer, les horaires de l’école sont tels que les élèves finissent leur
journée à 15H50. Ensuite il a été décidé par le conseil d’école de proposer l’Aide
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 41
Personnalisée trois fois par semaine à raison de quarante minutes à chaque fois. Ainsi les
élèves pris en charge finissent leur journée à 16H30 les lundis, mardis et jeudis ce qui n’est
pas en contradiction avec leur rythme biologique qui consiste à ne pas dépasser 16H30 pour
les apprentissages strictement scolaires.
Ce n’est bien sûr pas le cas pour d’autres écoles. Certaines proposent l’Aide Personnalisée
deux fois par semaine de 16H30 à 17H30, d’autres sur la pause méridienne… Les conditions
sont loin d’être les mêmes pour tous.
Les élèves de l’échantillon pointent des conditions de travail favorables. Mais en aurait-il été
de même avec les enfants d’une école différente qui profitent de l’Aide Personnalisée sur
d’autres créneaux et dans d’autres conditions ?
L’avantage présenté par l’Aide Personnalisée et qui a été remarqué par chacun des
élèves interrogés, c’est le calme. Il semble que le bruit produit par les autres élèves de la
classe soit une réelle gêne lors des apprentissages. A l’heure actuelle, nous sommes loin en
effet des salles de classe des années cinquante où l’ordre et le silence étaient les maîtresmots. De nos jours il semble que les classes soient plus bruyantes. Les élèves peuvent se
gêner les uns les autres, ce sont eux qui le disent : « Oui, c’est plus calme qu’en classe, les
élèves me dérangent pas ».
Alors que nous savons que les élèves en difficultés scolaires ont déjà, la plupart du temps,
des difficultés pour se concentrer.
« Parce que y’a pas de bruit », « Parce que je suis plus seul, j’y arrive pas quand il y a plein
de monde », « Parce que y a pas de bruit autour de moi », « Ils me dérangent pas. Ils sont
gentils et tranquilles », « Oui, quand même, on est moins, on est plus concentré », « Oui, c’est
plus calme qu’en classe ».
(L’élève interrogé) Est-ce qu’il réussit
à se concentrer ?
Et en classe, est-ce qu’il réussit à se
concentrer ?
OUI
NON
4 et 1 mieux
0
1
1 oui et non, ça dépend
des fois
1 oui, mais moins qu’en
Aide Personnalisée
1
1 ça dépend du bruit des autres
Extrait du tableau n°2
Les élèves sont très clairs mais aussi tout à fait unanimes : ce temps d’Aide Personnalisée
leur permet de se concentrer, de ne pas être dérangés par les autres pendant leur travail, de
travailler dans le calme. L’Aide Personnalisée semble être une « bulle » où les élèves seraient
enfin disponibles pour réfléchir.
Pourtant il est de la responsabilité d’un enseignant de créer ces conditions favorables à
l’apprentissage durant le temps de classe ; chaque enfant devrait pouvoir s’y concentrer et y
réfléchir sans être dérangé. Est-ce que les exigences des professeurs auraient à ce point
baissé que les élèves ne puissent plus travailler dans le calme en classe ? Est-ce que le
silence ne serait plus une priorité ? Ou est-ce que les capacités de concentration des élèves
auraient diminué au point qu’ils ne soient plus capables de travailler dans un environnement
scolaire classique ?
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 42
Le calme dans une classe permet de se concentrer mais aussi parfois de pouvoir parler.
Un élève déclare « On peut parler quand on y arrive pas », ce qui sous-entend qu’il ne le
peut pas ou qu’il ne l’ose pas en classe. Est-ce que le maître est trop occupé par le groupeclasse pour être suffisamment disponible ? Est-ce que l’élève craint le maître pour ne pas
oser prendre la parole ou est-ce que l’élève craint le groupe-classe et sa réaction s’il pose
une question ? Certains élèves ont besoin d’un grand temps d’écoute et d’une grande
disponibilité de la part de l’adulte pour pouvoir prendre la parole, surtout au milieu des
autres. L’enseignant n’a peut-être pas toujours ce temps là à lui accorder.
Dernier aspect de l’environnement en Aide Personnalisée : la gestion du temps. Un élève
déclare : « J’ai plus de temps en Aide Personnalisée. » Les enfants n’ont pas tous le même
rythme, de développement mais aussi d’apprentissage. Par l’exigence de ses programmes,
l’école impose une cadence qui n’est pas adaptée à tous et encore moins aux élèves en
difficulté scolaire qui ont souvent besoin de plus de temps pour assimiler une nouvelle
notion. C’est ce temps supplémentaire que permet l’Aide personnalisée et que les élèves
n’ont pas manqué de remarquer.
D’ailleurs nous avons relevé deux remarques éloquentes des élèves en guise de
conclusion sur l’environnement en Aide Personnalisée : A la question « Est-ce que tu as assez
de temps pour travailler en Aide Personnalisée » un élève répond : « Oui, mais ça passe
vite. » Quant à son camarade, il déclare lui tout à fait spontanément à la fin de l’entretien :
« L’aide Personnalisée, ça dure pas assez longtemps ».
Dans l’ensemble les élèves nous font part de conditions de travail en Aide Personnalisée
qu’ils jugent favorables ; plus de calme qui permet de mieux se concentrer, plus de temps
pour travailler.
Cela paraît logique dans la mesure où les élèves sont moins nombreux mais nous pouvons
tout de même nous interroger sur la raison qui fait que ces conditions de travail ne semblent
pas être retrouvées en classe.
Les différents thèmes issus de l’analyse des entretiens trouvent tous un intérêt plus
ou moins grand à l’Aide Personnalisée.
L’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée semble positive dans l’ensemble, en
tout cas pour l’échantillon étudié qui est, rappelons-le, de taille trop réduite et trop peu
représentatif pour que nous puissions en tirer quelque conclusion que ce soit.
Pour autant cette étude nous permettra peut-être de savoir si une recherche de plus grande
ampleur serait d’un quelconque intérêt.
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
Page 43
3. L’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée
L’Aide Personnalisée a été imposée aux enseignants comme aux élèves de l’école
élémentaire par le Ministère de l’Education Nationale sans concertation préalable, sans une
réelle définition des modalités de prise en charge et surtout parallèlement à une suppression
progressive des RASED (Réseau d’Aides Spécialisées aux Enfants en Difficulté), interrompue
depuis.
Celle-ci a reçu un accueil très mitigé de la part du corps professoral. Pourtant et comme il
se devait, l’accueil a été mis en place et les élèves ainsi que leurs enseignants ont donné vie
à cette nouvelle forme d’aide.
Malgré beaucoup de réticences de la part des syndicats et des enseignants, malgré des
chercheurs dubitatifs et une opinion publique très partagée sur un sujet resté sensible, il
faut constater et prendre la mesure de l’expérience des élèves dans ce moment de leur vie
scolaire.
En effet, ils attendent concrètement de l’Aide Personnalisée qu’elle leur permette de
surmonter leurs difficultés scolaires afin qu’ils deviennent de « bons » élèves et puissent
réussir dans leur projet d’élève.
Plusieurs thèmes sont apparus comme saillants dans l’expérience scolaire des élèves en
Aide Personnalisée : dans l’ordre d’importance d’abord l’environnement de travail plus
propice à la concentration ainsi que la relation à l’adulte qui se trouve facilitée par la plus
grande disponibilité de celui-ci. Ensuite les élèves interrogés disent avoir envie de travailler
en Aide Personnalisée afin de réussir leur scolarité et apprécient globalement les activités
qui leur sont proposées. Enfin il est possible de supposer que l’Aide Personnalisée puisse les
aider à avoir confiance en eux à l’école.
3.1. L’expérience scolaire en Aide Personnalisée : une expérience très positive
Les résultats des entretiens montrent très globalement que l’expérience scolaire des
cinq élèves interrogés pendant le temps d’Aide Personnalisée est très positive. Ils sont tous
« contents » de venir en Aide Personnalisée et surtout ils ont envie de continuer à y venir.
Deux thèmes ont été choisis par les élèves comme étant les plus marquants de cette
expérience scolaire, ce sont les deux thèmes le plus souvent évoqués. En premier lieu
l’environnement en Aide Personnalisée, car il permet davantage la concentration et la
réflexion, en second lieu la relation à l’enseignant qui se trouve favorisée et facilitée pendant
l’Aide Personnalisée.
3.1.1.
L’environnement en Aide Personnalisée
C’est le point fort de l’Aide Personnalisée, celui qui a été mis en avant par l’ensemble des
élèves interrogés.
Selon B. Charlot, « apprendre, c’est déployer une activité en situation…» et « la situation
d’apprentissage n’est pas seulement marquée par le lieu et par les personnes mais aussi par
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un moment ». De plus, « on apprend lorsque l’on a des occasions d’apprendre, des moments
où l’on est plus disponible ».
La situation d’apprentissage est essentielle, elle peut favoriser l’expérience scolaire des
élèves et leur permettre d’apprendre.
C’est ce qu’ont remarqué eux aussi les élèves. Pendant ce moment d’aide, ils
bénéficient d’une situation d’apprentissage adéquate car débarrassée de tous les
parasitages du groupe-classe : le bruit, l’agitation, la gestion des conflits et de la discipline
par l’enseignant, les prises de parole intempestives, les déplacements inopportuns ou
encore les moqueries des autres élèves de la classe.
Finalement tout ce qui peut faire la force d’une situation d’apprentissage c'est-à-dire
l’existence d’un groupe, de ses médiations et de son émulation peut aussi être ce qui va
empêcher à certains moments certains élèves d’apprendre.
Le calme et le silence sont indispensables à la réflexion, surtout pour des enfants
ayant déjà des difficultés à se concentrer. Cette possibilité n’est pas offerte aux enfants de
toutes les classes et dans ce cas, l’Aide Personnalisée peut prendre le relais et devenir ce
moment privilégié pour « penser ».
De plus, en Aide Personnalisée, la présence d’un seul petit groupe d’élèves permet d’éviter
en grande partie les conflits, les gênes ou les rivalités. Là encore c’est ce que nous
apprennent les élèves interrogés en entretien. En Aide Personnalisée, les autres élèves « ne
les dérangent pas ».
La situation d’apprentissage est essentielle pour que les élèves aient une expérience positive
de l’école. En Aide Personnalisée, ils trouvent, et ce sont eux qui le disent, une situation de
travail favorable.
Rappelons tout de même qu’il ne s’agit que de deux heures hebdomadaires. Deux
heures qui ne privent aucunement l’élève de relations socio-cognitives indispensables avec
ses pairs, mais qui lui permettent de bénéficier d’un moment qui peut être considéré comme
privilégié eu égard à ses besoins spécifiques d’enfant en difficulté.
Il ne s’agit pas de mettre ces enfants à l’écart, il s’agit au contraire de saisir une opportunité
de temps individualisé. Pour l’élève, cela peut être l’occasion de se rassurer pour être
ensuite plus à l’aise en classe avec les autres. Pour l’enseignant, c’est l’occasion de mieux
connaître le fonctionnement cognitif de l’élève en difficulté pour ensuite l’aider plus
efficacement pendant la classe.
Ajoutons que les élèves de l’Aide Personnalisée continuent à suivre l’intégralité des
enseignements et activités de la classe avec leurs camarades. Ils ne travaillent pas « à côté »
des autres mais font toujours partie intégrante du groupe-classe en participant à ses projets.
La différenciation pédagogique peut alors s’avérer plus aisée, plus souple, peut-être plus
efficace. L’enseignant aura de meilleures facultés d’adaptation et davantage de réactivité.
Pouvons-nous aller jusqu’à dire que l’Aide Personnalisée lui permettrait de différencier
davantage ?
D’ailleurs, selon Dominique Glasman, «l’individualisation (en classe), loin de s’opposer à la
différenciation pédagogique, peut en constituer une des modalités, avec plus de degrés de
liberté dans l’enseignement primaire. » (p145).54
54
Glasman, D. Questions sur l’aide individualisée, in Education et formations n°65 janvier-juin 2003
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Même si l’Aide Personnalisée se réduisait à du préceptorat, ce ne serait jamais qu’à raison
de deux heures par semaine sans toucher à l’intégrité du groupe-classe. Ainsi posé, cela
présente un certain nombre d’avantages pour les élèves et pour leurs enseignants et peu
d’inconvénients a priori.
Il reste tout de même deux risques à la mise en place de l’Aide Personnalisée qu’il ne
s’agit pas ici de minimiser : la surcharge cognitive dans les cas où les horaires de l’école ne se
prêtent pas à une gestion appropriée des rythmes scolaires et le risque de stigmatisation
toujours possible et auquel il faut réfléchir avec prudence.
L’enquête s’est adressée à une catégorie d’élèves particulière : ceux présentant des
difficultés scolaires. Nous pouvons supposer que d’autres élèves davantage dans « la
norme » ne ressentiraient pas de la même manière l’expérience de ce temps d’aide. Pour les
élèves de l’Aide Personnalisée, le calme semble essentiel pour travailler. Peut-être tout
simplement parce qu’ils connaissent leurs difficultés pour se concentrer.
Quant aux autres élèves, ceux qui n’ont pas été interrogés, peut-être qu’ils ne sont pas
gênés par le bruit de la classe et parviennent à réfléchir dans leur environnement habituel.
Nous ne pouvons pas déduire de ce travail que les classes de l’échantillon soient trop
bruyantes. Nous pouvons par contre supposer que les élèves concernés par l’Aide
Personnalisée ont de réelles difficultés pour se concentrer et y parviennent mieux pendant
ce temps là.
Il est intéressant de garder à l’esprit que cette recherche a permis d’interroger des
enfants à profil ; ils nous ont fait part de ce qu’ils voyaient de positif dans l’Aide
Personnalisée de leur point de vue d’enfants en difficulté, notamment concernant
l’environnement de travail qu’ils jugent favorable à leur réflexion.
Il en va de même concernant la relation à l’adulte, elle revêt une importance particulière
pour les enfants de l’Aide Personnalisée interrogés lors de l’enquête.
3.1.2.
La relation à l’enseignant en Aide Personnalisée
C’est le deuxième point fort qui ressort des entretiens avec les élèves. Selon eux, en
Aide Personnalisée « on peut discuter sur le travail, le maître nous aide plus, on peut parler
quand on y arrive pas. C’est intéressant, on travaille tranquillement, on peut discuter plus
longtemps sur ce qu’on n’a pas compris. » Ou encore : « Parce qu’on est moins et le maître a
le temps d’aller chez tout le monde. »
Voilà qui est éloquent : le maître (ou la maîtresse) est plus disponible et les élèves s’en
rendent compte. De plus, ils apprécient cette situation et reconnaissent les avantages qu’elle
présente pour eux. La centration sur l’individu est emblématique de l’évolution de notre
société. Elle a trouvé écho chez les élèves qui semblent avoir besoin d’une relation
individualisée voire exclusive. Ils apprécient que leur enseignant s’occupe d’eux en
particulier, qu’il ait suffisamment de temps disponible pour eux.
On apprend grâce à la médiation. Cette condition nécessaire de l’apprentissage est
connue depuis le début du XXème siècle et les recherches du psychologue russe Lev
Vygotsky. En effet, il démontrait dès cette époque que l’enfant apprend en passant par deux
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étapes distinctes de développement. La première est celle où il apprend grâce à la médiation
de l’adulte. La deuxième appelée ZPD (Zone Proximale de Développement) est celle qui
intervient juste après et où l’enfant va être capable de résoudre les mêmes problèmes mais
seul. La ZPD est « la distance qui existe entre le potentiel latent d’un enfant et les réalisations
effectives »55 (p850). En effet, « c’est dans l’interaction avec les adultes que l’enfant acquiert
d’abord les mécanismes mentaux supérieurs de la pensée. La richesse des interactions avec le
milieu sera donc un facteur essentiel de l’épanouissement intellectuel », selon le Dictionnaire
des Sciences Humaines de Jean-François Dortier (p849).
L’interaction avec l’adulte est essentielle alors qu’elle est concomitamment d’une très
grande disparité selon les enfants et les milieux dont ils sont issus.
Elle est essentielle et fort injustement répartie, cela justifie le fait qu’elle soit une des
priorités de l’école.
Cependant est-elle aisée à mettre en place dans une classe ? Surtout est-elle toujours
adaptée à tous les élèves et notamment à ceux présentant des difficultés d’apprentissage ?
Bien sûr certains dispositifs sont plus propices que d’autres aux interactions, avec l’adulte
d’une part et avec les pairs d’autre part et nous savons combien ces dernières sont elles
aussi essentielles au fonctionnement cognitif.
Mais ne pouvons-nous pas penser que des interactions individualisées spécialement
adaptées aux élèves de l’Aide Personnalisée pourraient être un complément bénéfique aux
interactions de la classe ?
Dans les textes officiels, les thématiques de l’aide individualisée et de la centration
sur l’individu sont sur le devant de la scène depuis la loi Jospin n° 89-486 du 10 juillet 1989.
En effet il s’agissait alors de « mettre l’enfant au centre du système éducatif » c'est-à-dire
d’adapter le monde de l’école aux besoins de chaque enfant. C’est la constitution des cycles
mais aussi l’apparition de dispositifs d’aide individualisée, notamment dans les collèges.
D’ailleurs selon Dominique Glasman, ce mode de travail est une attente de la part des
élèves. Des enquêtes réalisées auprès de lycéens lui permettent de dire que l’ « on dispose
de suffisamment d’éléments pour établir qu’il existe, sinon une demande toujours explicite,
au moins une attente d’appui individuel au travail scolaire, tant chez les élèves que, parfois,
chez leurs parents, et pour penser que, lorsque l’institution scolaire, ou des structures
périphériques proposent une aide individualisée, elles ne créent pas artificiellement un
« besoin ». »56 (p 146)
Pour autant, selon le même auteur, il existe de nombreux biais à l’individualisation qu’il
s’agit de prendre en compte. Elle peut notamment négliger la spécificité socialisatrice de
l’école ou encore conduire à s’adapter au niveau des élèves et à réduire les exigences.
Les enfants en difficulté à qui l’Aide Personnalisée a été proposée nous disent dans
les entretiens qu’ils apprécient d’avoir pour une fois, un maître ou une maîtresse disponible,
qui a et qui prend le temps de les écouter, de les comprendre, de les aider.
La relation quasi-individualisée des élèves avec leur enseignant deux heures par semaine
semble être pour eux à même de favoriser leur expérience scolaire en Aide Personnalisée.
55
56
Dortier, J.F. Dictionnaire des Sciences Humaines Ed. Sciences Humaines, Paris, 2004
Glasman, D. Questions sur l’aide individualisée, in Education et formations n°65 janvier-juin 2003
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Page 47
3.2. L’expérience scolaire en Aide Personnalisée : une expérience positive
3.2.2.
L’envie de travailler pour réussir
L’envie de travailler c’est en quelque sorte le moteur de l’apprentissage. Permettonsnous de filer cette métaphore en écrivant que les élèves ont besoin de carburant pour faire
fonctionner ce moteur et donc de trouver une raison pour avoir envie de travailler. Comme
le dit Bernard Charlot, il est nécessaire de favoriser « la mobilisation du sujet ».
Or, il se trouve que les élèves interrogés pris en charge en Aide Personnalisée nous disent
avoir envie de travailler pendant ce temps spécifique. Pourquoi ? Et cela va-t-il durer ? La
nouveauté du dispositif ne rendrait-elle pas celui-ci plus attirant ?
Tout de même, les enfants interrogés en 2010 suivent le dispositif depuis sa mise en place
en 2008, le caractère de nouveauté ne semble plus saillant.
Est-ce que la reconnaissance des difficultés des élèves ou la mise en place d’activités
spécifiques afin de les aider peut être ce « carburant » ? Est-ce que le face à face avec
l’adulte qui ne laisse aucune possibilité d’évitement peut donner paradoxalement envie de
travailler?
L’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée semble positive. Elle favoriserait
l’envie de travailler et l’envie de travailler est une condition indispensable à la réussite
scolaire.
3.2.3.
Des activités adaptées
L’Aide Personnalisée a été mise en place dans les classes pour justifier la suppression
des heures de classe du samedi matin. Elle concerne les élèves en difficulté, aux enseignants
de s’organiser ensuite avec une éventuelle prise en charge de ces mêmes enfants par le
RASED puisque ces deux aides sont de nature différente et peuvent donc tout à fait exister
ensemble.
Toutefois et contrairement aux prises en charge par le RASED, les enseignants des classes qui
accueillent les enfants en Aide Personnalisée n’ont bénéficié d’aucune formation. De plus il
existe peu de directives officielles concernant la teneur de cette aide, les activités qu’il serait
judicieux d’y proposer. Au final, chaque enseignant met en place des activités qu’il a
choisies, en fonction d’objectifs qu’il a définis pour chacun de ses élèves en fonction de leurs
facilités, de leurs difficultés mais aussi de leur personnalité.
A priori tout existe pour l’instant en matière d’activités d’Aide Personnalisée. En effet
les élèves interrogés sont partagés sur le sujet ; pour trois d’entre eux il s’agit de petits jeux,
pour l’un d’entre eux d’exercices, pour deux autres de révisions. Deux enfants disent faire la
même chose qu’en classe, les autres disent le contraire. Tout laisse même à supposer que
cela varie d’une séance à l’autre et que les enseignants alternent différents types d’activités
et de supports au fil des séances.
D’ailleurs selon L. Lescouarch et S. Grandserre, « Certaines (les activités en Aide
Personnalisée) sont organisées exclusivement sur une logique de reprise, l’enfant refaisant à
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Page 48
l’identique et sous le contrôle vigilant de l’enseignant ce qu’il n’a pas réussi dans la classe.
D’autres, après prise en compte des réflexions de didacticiens, sont organisées autour de
l’idée d’anticipation : on prépare l’enfant à la notion qui va être vue dans la journée. Enfin,
d’autres enseignants misent sur le contraste an abordant les notions sous une forme
différente (exercices ludiques, autres méthodes…)57(p141).
Ainsi il est difficile de savoir ce qui plaît tant aux élèves dans les activités de l’Aide
Personnalisée qui n’ont finalement a priori rien de spécifique en tant que telles.
Si ce n’est à supposer que ce ne sont pas les activités elles-mêmes mais peut-être
plus probablement, comme nous l’avons vu précédemment, la situation d’Aide
Personnalisée en tant que telle qui plaît aux élèves.
Car comme le dit Jacky Beillerot58, « l’enseignant doit favoriser les conditions
d’apprentissage et c’est la complexité de ces ingrédients (la relation, la situation) qui fait que
les élèves apprennent ». (p61)
3.3. L’expérience scolaire en Aide Personnalisée peut-elle favoriser la confiance
en soi ?
Les résultats des entretiens montrent qu’au sujet de la confiance en soi, les résultats
sont plutôt mitigés. Les élèves interrogés ont tout à fait conscience de leurs difficultés. Ils
nous disent : « … j’écris pas bien, je lis pas bien » ou bien « Oui parce que j’ai encore des
difficultés. Parce que j’ai besoin d’aide » ou encore « Parce que j’ai des difficultés en classe ».
Ils se jugent plus ou moins sévèrement mais en tout cas n’estiment jamais que leurs
difficultés soient définitives. En effet, sur les cinq élèves interrogés, trois pensent qu’ils sont
de bons élèves et les deux autres qui ne se considèrent « pas trop » comme de bons élèves
pensent tout de même qu’ils vont bientôt le devenir.
Finalement, ils ont une assez bonne estime d’eux-mêmes tout en ayant parfois des doutes
sur leurs capacités d’apprentissage.
Mais tous comptent sur l’Aide Personnalisée pour les aider à surmonter leurs
difficultés. A la question, « D’après toi, l’Aide Personnalisée, à quoi ça sert ? », ils répondent
« A travailler mieux. Pour que je passe au CM1. »
« A nous aider dans nos difficultés. A progresser où on a des difficultés, à nous aider. Pour
m’améliorer. »
« A améliorer notre travail en classe. »
Il semblerait que les élèves fassent confiance au dispositif d’Aide Personnalisée pour
les aider à sortir de leurs difficultés scolaires. Ils n’ont peut-être pas assez confiance en euxmêmes mais en tout cas ils ont confiance en l’avenir et en une possibilité de meilleurs
résultats scolaires. Il nous semble que les élèves comptent sur l’Aide Personnalisée pour les y
aider, mais pensent-ils réellement que l’Aide Personnalisée puisse leur permettre de sortir
57
Grandserre, S. et Lescouarch, L. Faire travailler les élèves à l’école Sept clés pour enseigner autrement, ESF, Issy-lesMoulineaux, 2009
58
Beillerot, J. Le miracle de l’apprentissage entretien in Sciences Humaines n°12 de février-mars 1996
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de l’échec scolaire ? Y croire est un premier pas vers la réussite, mais si l’Aide Personnalisée
n’est pas à la hauteur, cela sera-t-il suffisant ?
Il serait particulièrement intéressant d’approfondir le thème de la confiance en soi
des élèves. Les recherches en sciences de l’éducation confirment que la confiance en soi (qui
passe par l’estime de soi) est un élément déterminant pour avoir une expérience positive à
l’école mais aussi pour avoir une relation positive à « l’apprendre ».
D’ailleurs, les résultats de l’enquête internationale PIRLS (Progress in International Reading
Literacy Study) de 200159 ont montré que les élèves français manquaient justement de
confiance en eux.
Que les élèves interrogés, en difficultés scolaires et pris en charge en Aide Personnalisée,
aient suffisamment d’estime d’eux-mêmes pour se considérer comme de « bons » élèves ou
en voie de le devenir est un point très positif.
Qu’ils fassent confiance à l’Aide Personnalisée pour les aider à surmonter leurs difficultés
scolaires est une étape importante vers la réussite.
Pourtant fonder trop d’espoirs sur un si « jeune » et si perfectible dispositif d’aide peut
sembler bien naïf et propre à engendrer de belles désillusions.
Bien sûr nous sommes loin d’une quelconque évaluation du dispositif, qui
demanderait un lourd travail d’enquête avec un suivi de cohortes sur un temps assez long.
Mais les quelques élèves interrogés et les théories analysées nous laissent penser que
l’expérience scolaire des élèves en Aide Personnalisée est positive, en tout cas pour
l’échantillon étudié.
59
http://media.education.gouv.fr/file/32/4/4324.pdf [consulté le 19-04-10]
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Page 50
Conclusion
« Dire qu’un objet, ou une activité, un lieu, une situation, etc. lié au savoir a du sens, ce
n’est pas simplement dire qu’il a de la « signifiance » (qu’il peut s’inscrire dans un ensemble
de relations), c’est aussi dire qu’il peut provoquer un désir, mobiliser, mettre en mouvement
un sujet qui lui trouve de la valeur. Le désir est le ressort de la motivation et donc, de
l’activité - non pas le désir nu mais le désir d’un sujet engagé dans le monde, dans des
relations avec les autres et avec lui-même »60. (p96)
C’est ainsi que Bernard Charlot résume à quel point une situation d’apprentissage mais aussi
tous ses ressorts à savoir le lieu, l’activité, l’objet mais on pourrait ajouter la relation
pédagogique, sont déterminants dans l’activité de l’élève.
L’Aide Personnalisée peut-elle favoriser l’expérience scolaire des élèves?
Les circonstances de travail avec le maître après la classe sont particulières : il semblerait
qu’elles permettent un environnement de travail favorable et une relation privilégiée des
élèves avec leur enseignant. Il semblerait qu’elles aident les élèves à avoir envie de travailler
et que ces derniers apprécient de bénéficier d’activités adaptées. Reste cette question :
l’Aide Personnalisée pourrait-elle aider les élèves à reprendre confiance en eux ? En tout cas
il semble qu’elle leur permette d’avoir confiance en l’avenir, en une possibilité
d’amélioration de leurs résultats scolaires.
L’ensemble de ces thèmes nous amène à conclure que l’expérience scolaire des
élèves interrogés lors de cette enquête est dans l’ensemble positive.
Bien sûr de tels résultats ne sont pas généralisables. Bien sûr dans d’autres écoles et d’autres
circonstances, l’expérience des élèves ne sera probablement pas la même.
Mais à l’heure où en France, les critiques envers l’Aide Personnalisée sont nombreuses et les
espoirs minces en ce qui concerne son utilité, les conclusions de ce travail peuvent rassurer
quelque peu les maîtresses et les maîtres qui s’investissent chaque jour dans ce dispositif.
L’Aide Personnalisée est beaucoup décriée. En l’occurrence il semble que quels que
soient ses effets positifs, elle restera certainement insuffisante pour les élèves en grande
60
Charlot, B. Du Rapport au Savoir Eléments pour une théorie Anthropos Economica, Paris, 2005
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difficulté, tant par son faible taux horaire que par le manque de formation spécifique des
enseignants qui la dispensent.
Mais pour les autres élèves, dont les difficultés sont « ordinaires », qui manquent de
confiance en eux, qui n’ont pas vraiment envie de travailler, qui ont besoin de beaucoup
d’attention ou encore d’activités qui soient adaptées à leur façon d’apprendre, l’Aide
Personnalisée est peut-être ce qui leur fallait.
C’est aussi l’opinion de Sylvie Cèbe, professeure de Sciences de l’Education à l’université de
Genève qui nous dit à propos de l’instauration de l’Aide Personnalisée : « cette décision […]
me paraît juste et équitable d’abord parce qu’elle porte en creux une définition de la
difficulté scolaire comme un phénomène ordinaire qu’on trouve dans toutes les classes
ordinaires et qui est donc à la charge des enseignants ordinaires. »61
L’Aide Personnalisée est très récente et il reste beaucoup à faire pour parfaire sa mise en
place. Son organisation dans le temps notamment gagnerait à être réévaluée afin qu’elle
respecte davantage les rythmes de l’enfant. Sa spécificité comme situation d’enseignement
ensuite, pour laquelle les enseignants eux-mêmes sont en demande de formation et d’outils.
Pourtant, elle est peut-être un dispositif essentiel pour un grand nombre d’enfants en mal
d’école, qu’il est urgent de réconcilier avec le savoir.
61
Cèbe, S. Entretien in la revue Enseignant publiée par le Se-Unsa, lundi 14 décembre 2009
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Page 52
Bibliographie
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Dunod.
Grandserre, S. L. (2009). Faire travailler les élèves à l'école, Sept clés pour enseigner autrement.
Issy-les-Moulineaux: ESF Editeur.
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Lescouarch, L. (2007). Modélisation des pratiques pédagogiques de Maîtres E en RASED. Congrès
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Spécialisée à Dominante Pédagogique (ASDP) en Réseau d'Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté
(RASED) Thèse de doctorat en sciences de l'éducation. Rouen: Université.
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Paris: Dunod.
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Page 53
4. Annexes
4.1. Tableau récapitulatif n°1 des réponses des élèves aux questions ouvertes
Les
conceptions
La
confiance
en soi
L’envie de
travailler
pour
réussir
Elève
n°1
A rattraper ce
qu’on a pas
fait en classe.
… j’écris pas
bien, je lis
pas bien.
Parce que si
je réussis
pas je vais
redoubler.
Elève
n°2
A travailler
mieux.
Pour que je
passe au CM1.
Non parce
que je sais.
Parce que
j’ai envie de
réussir, de
bien
travailler en
classe et à
l’école.
Même en
classe j’ai
envie.
Pour faire la
lecture
mieux.
Elève
n°3
A nous aider
dans nos
difficultés.
Oui parce
que j’ai
encore des
difficultés.
Parce que
j’ai besoin
d’aide.
Pour avoir
de bonnes
notes.
Pour montrer à
la maîtresse que
j’y arrive.
Oui, si j’y arrive
pas.
Elève
n°4
A progresser
où on a des
difficultés, à
nous aider.
Pour
m’améliorer.
Pas trop.
(Est-ce que
tu penses
que tu es un
bon élève ?)
Pour
progresser
dans mon
travail.
Elève
n°5
A améliorer
notre travail
en classe.
Pas trop.
Parce que
j’ai des
difficultés
en classe.
Oui, un peu
mieux. (Estce que tu
trouves que
tu réussis
mieux en
AP ?)
Ca va servir
pour le
collège.
On peut
discuter sur le
travail, le maître
nous aide plus,
on peut parler
quand on y
arrive pas.
C’est
intéressant, on
travaille
tranquillement,
on peut discuter
plus longtemps
sur ce qu’on a
pas compris.
Parce qu’on est
moins et le
maître a le
temps d’aller
chez tout le
monde.
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La relation à
l’adulte
Les activités
en AP
L’environnement
en AP
Non, dès fois
oui, on révise
un petit peu.
Bien, on fait
des petits
jeux.
Parce qu’on
fait la lecture
tout le
temps.
Parce qu’on
apprend plus
de choses.
C’est bien, on
révise ce
qu’on arrive
pas à faire.
C’est bien, on
fait des petits
jeux dans le
travail mais
pour y arriver
mieux.
Oui, ça
m’intéresse.
Parce que le
maître fait
des
exercices,
des jeux.
Opinion
générale sur
l’AP
Je suis content
d’y aller, j’ai
dit à mes
parents que je
voulais y aller,
et ils ont dit la
bonne réponse
que j’allais y
aller.
Parce que y’a pas de
bruit.
Parce que je suis
plus seul, j’y arrive
pas quand il y a
plein de monde.
Mieux. (Je réussis à
me concentrer)
Parce que y a pas de
bruit autour de moi.
Ils me dérangent
pas. Ils sont gentils
et tranquilles. (Les
autres élèves en AP)
Oui, quand même,
on est moins, on est
plus concentré.
Oui, c’est plus calme
qu’en classe.
Les élèves me
dérangent pas.
On peut parler
quand on y arrive
pas.
Ca dépend des
exercices. J’ai plus
de temps en Aide
Personnalisée.
Ca dépend du bruit
des autres. (En
classe)
Parce qu’ils sont
moins bruyants. (En
AP)
Il est bien. (Le
travail en AP)
Oui mais ça
passe vite.
Bien, ça sert
pour le travail
en classe.
Ca m’aide dans
mes difficultés.
L’Aide
Personnalisée,
ça dure pas
assez
longtemps.
Page 54
4.2. Tableau récapitulatif n°2 des réponses des élèves aux questions fermées
OUI
NON
5
0
5
0
Trouve-t-il qu’il réussit mieux
pendant l’Aide Personnalisée ?
5
0
Est-ce qu’il a envie de réussir en Aide
Personnalisée ?
5
0
3
Et 2 pas trop
0
L’enfant était-il d’accord pour venir
en Aide Personnalisée
Souhaite-t-il continuer à venir ?
Pense-t-il qu’il est un bon élève ?
Sinon pense-t-il qu’il deviendra
bientôt un bon élève ?
2 sur les 2 élèves
concernés
0
5
0
3
1 ça dépend de l’exercice
1 parce qu’il sait
0
5
0
5 mais 2 après une hésitation
Est-ce qu’il se sent bien pour
travailler en Aide Personnalisée ?
5
0
Est-ce qu’il a assez de temps pour
travailler ?
3
Est-ce qu’il le dit à son enseignant
quand il n’a pas compris ?
Est-ce qu’il lui pose des questions ?
Est-ce qu’il a parfois peur de poser
des questions ?
Et en classe ?
1 n’a pas le temps de finir sa ligne
d’écriture,
1 ça dépend des exercices, a plus de
temps en Aide Personnalisée
Est-ce qu’il réussit à se concentrer ?
4 et 1 mieux
Et en classe, est-ce qu’il réussit à se
concentrer ?
Aime-t-il travailler avec les autres
enfants de l’Aide Personnalisée ?
1
1 oui et non, ça dépend
des fois
1 oui, mais moins qu’en
Aide Personnalisée
0
1
1 ça dépend du bruit des autres
4 oui
1 ça ne le dérange pas
0
Est-ce qu’en Aide Personnalisée il fait
la même chose qu’en classe ?
2
3
Est-ce qu’il a envie de travailler en
Aide Personnalisée ?
5
0
4
1 pas toujours
0
Et en classe, a-t-il envie de travailler?
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
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Mis en place en 2008, le nouveau dispositif d’aide aux enfants en
difficultés scolaires baptisé « Aide Personnalisée » interroge quant à la
façon dont il a été reçu par les élèves. En effet, voici un temps d’école
proposé en plus (à raison de deux heures par semaine) à des enfants
déjà sous pression scolaire, qui peinent en classe et obtiennent des
résultats décevants.
Quelle peut être leur expérience scolaire lorsqu’ils viennent en Aide
Personnalisée ? Quel peut être leur « ressenti » pendant ce temps
d’école en plus ?
Plusieurs thèmes sont apparus comme déterminants de cette expérience
scolaire lors d’entretiens avec les élèves : un environnement de travail
favorable, une relation privilégiée avec l’enseignant, l’envie de travailler,
des activités adaptées et enfin la confiance en soi.
Globalement, l’expérience des élèves interrogés se révèle plutôt positive.
Ils ont le sentiment de travailler mieux et de progresser en Aide
Personnalisée.
Comment ce processus se met-il en place ? Que va apporter la situation
d’Aide Personnalisée aux élèves au point qu’ils aient tous envie de
continuer à y venir ?
C’est ce que nous avons voulu approfondir lors de cette recherche
exploratoire.
Isabelle Valle M1 FOAD Université de Rouen
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