Fiche du film

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Fiche du film
Fiche n° 1219
QUI VIVE France
sortie : 12/11/2014 – 1h23
du 3 au 9 décembre 2014
QUI VIVE
Marianne Tardieu
Scénario : Retourné vivre chez ses parents, Chérif, la trentaine, peine à décrocher le concours d’infirmier. En attendant, il travaille comme vigile. Il
réussit malgré tout les écrits de son concours et rencontre une fille qui lui plaît, Jenny… Mais au centre commercial où il travaille, il perd pied face à
une bande d'adolescents désœuvrés qui le harcèlent. Pour se débarrasser d'eux, il accepte de rencarder un pote sur les livraisons du magasin. En
l'espace d'une nuit, la vie de Chérif bascule...
Adèle Exarchopoulos
Qui vive : joli titre pour un premier film réussi.
Deux mots qui ont du mal à s’accorder ainsi,
sans tiret, et qui renvoient l’un et l’autre à la
thématique voulue par la réalisatrice,
Marianne Tardieu. Qui ? Chérif, un agent de
sécurité comme on en croise à chaque fois
que l’on se rend dans un centre commercial.
Un talkie-walkie à la main, il scrute les va-etvient des clients, prêt à intervenir au moindre
incident suspect.
A en juger par l’imperceptible moue qu’il fait
lorsque son chef lui demande de réajuster
son nœud de cravate, ce boulot ne semble
guère l’emballer. D’ailleurs, on ne va pas
tarder à l’apprendre, Chérif souhaite
ardemment faire autre chose, changer de vie,
quitter cette grande banlieue qui l’étouffe. Par
trois fois déjà, il a raté le concours d’infirmier.
Cette fois, espère-t-il, ce sera la bonne.
Pour l’heure, Chérif est sur le qui-vive.
Impossible de relâcher son attention, ne
serait-ce qu’à cause de cette bande de jeunes
désœuvrés, constamment à traîner devant
l’entrée du centre commercial, à l’affût du
moindre prétexte pour l’humilier.
Lui, si calme, si charmant, si attentionné malgré son âge, il vit encore ses parents – il
Reda Kateb
ne supporte plus trop cette vie, même si, c’est
vrai, il a des potes sympas, à commencer par
Adbou, un entraîneur de foot qui de temps à
autre vient faire le vigile avec lui, et Dedah,
son ami d’enfance qui tourne souvent dans le
quartier au volant de son 4x4 Audi.
Et puis, il y a aussi cette jolie fille Jenny
(Adèle Exarchopoulos), qu’il a croisée l’autre
jour dans le bus. Elle faisait une sortie
scolaire avec des enfants du quartier qui ont
immédiatement reconnu et fêté Chérif, leur
ancien accompagnateur. Allez, encore un peu
de patience et tout finira bien par s’arranger…
Sauf que rien ne s’arrangera. Un faux pas
viendra tout remettre en cause, l’avenir
professionnel et l’avenir amoureux de Chérif.
Les cités ont parfois des lois qui n’ont pas
grand-chose à voir avec celles de la
République.
Qui vive est un film ni franchement gai ni
franchement optimiste. C’est l’histoire d’un
type bien qui voudrait s’en sortir dignement et
avec élégance et qui, parce qu’on le pousse à
bout, finit par commettre une grave erreur.
C’est Reda Kateb qui interprète le rôle de
Chérif. Sans faire de bruit, modestement, il
est en passe de devenir, à 37 ans, l’un des
acteurs les recherchés du cinéma français.
Trafiquant rappeur dans « Engrenages »,
Gitan dans « Un prophète », caïd dans
« Mafiosa », terroriste dans « Zero Dark
Thirty »,
médecin
hospitalier
dans
« Hippocrate », on le verra bientôt dans les
films de Joachim Lafosse et de Ryan Gosling.
Sa qualité ? Sa modestie justement, une
capacité rare à ne pas se mettre en avant,
manière sans doute de laisser les spectateurs
venir à lui. Avec sa gueule de boxeur qui
laisse transparaître la moindre émotion, le
moindre sentiment, il faut le voir dans Qui
vive, sanglé dans son costume cravate,
faisant du surplace devant les caisses de
l’hypermarché. Son envie d’un autre monde,
d’une autre humanité, se lit sur son visage.
Si la réussite de Qui vive lui doit beaucoup, il
ne faudrait pas, pour autant, passer sous
silence à la fois l’écriture et la mise en scène
de Marianne Tardieu. Simplement, sans
fioritures ni caricature, elle a su trouver le ton
juste pour évoquer la vie en grande banlieue.
A la fois social et noir, son film déborde
d’humanité. Il y a âme qui vive : l’expression
résumerait finalement assez bien son propos.
Le Monde
La réalisatrice Marianne Tardieu animera la projection de son film le jeudi 4 décembre à 20h
Pour
son premier film, la jeune Marianne
Tardieu investit l’espace d’une cité (…). À
travers ce personnage plein d’espoir, Qui
vive tente de dialectiser cet espace
d’exiguïté existentielle où il est difficile de
se départir de la place à laquelle les uns
assignent les autres. Ainsi, Chérif demeure
le pion bon camarade, un peu gamin, pour
les élèves d’une école où il a travaillé, le
garçon des cités un peu loser pour le jury
du concours d’infirmier, alors que, dans le
même temps, les jeunes de la cité le
renvoie progressivement à la place de
« boloss » qui veut s’en sortir. Peut-il
inverser le sens de ces regards sur lui ?
C’est tout le dilemme du film, social dans
un premier temps mais qui devient moral
lorsque Chérif tente d’arranger son sort en
forçant le destin.
Le film se place alors du côté du fait
divers : un ami d’enfance aux activités
louches, doué d’un certain bagout, qui ne
joue pas au bon samaritain sans
contrepartie, protège Chérif de jeunes qui
en ont fait leur tête de turc au centre
commercial. Pour pouvoir vivre une vie
plus stable depuis sa rencontre avec
Jenny, la jeune pionne qui le remplace à
l’école, Chérif fragilise tout sur un pari,
celui d’acheter la loyauté de son ami en lui
refourguant une combine au centre
commercial. Le récit trouve ainsi un moyen
de s’emballer dans le drame et de poser
l’ambiguïté morale de la quête de Chérif à
la fois libératoire mais aussi individuelle
aux yeux de la communauté confinée que
représente la cité.Pour ce premier essai,
outre la dramaturgie de la cité, notamment
autour de la question du regard, c’est par
le casting que le film se distingue. Reda
Kateb trouve ici un premier rôle qui déploie
enfin son jeu naturaliste, précis dans les
gestes du quotidien comme dans
l’expression de sentiments très ténus. Le
travail affiné de ses expressions donne au
personnage de Chérif une ambiguïté
intéressante – la force du film tient même
en grande partie dans les reliefs mouvants
de son visage et la modulation de son port.
Face à lui, Adèle Exarchopoulos, dans son
premier rôle post-Vie d’Adèle, confirme
que, dans un rôle aussi étroit que celui de
la fiancée du héros, jolie et originale, sa
présence déborde et intensifie tout sur son
passage. Dans un plan-médaillon, elle
révèle une grâce prolétaire aujourd’hui trop
rare, déjà au cœur du film de Kechiche et
sur laquelle le film s’appuie entièrement
Critikat.
A l’image de Chérif, son protagoniste, tardif aspirant infirmier perdu entre les possibles de spécialisation, assujetti aux rondes
dolentes d’un job alimentaire de vigile qui le soumet aux persécutions d’une bande de jeunes, le premier long métrage de Marianne
Tardieu prend tout son temps. Il hésite, renâcle, tâtonne à pas flottants, tarde à circonscrire le champ de ses papillonnantes
opérations, à arrêter un horizon clair aux indéterminations et dérives de sa fiction.
Faut-il retenir ici l’équipée socio logico-naturaliste en territoire banlieusard, la bluette à peine ébauchée et aussitôt abandonnée,
l’étude de caractères tendre et timorée comme l’est son objet ? Ou encore le thriller de casse minable ou la fable existentielle sur les
tourments de la culpabilité ? Cette irrésolution n’est pas sans charme et présente ce louable mérite de détourner le récit de la
tentation du discours. Faute de jamais trancher tout à fait au gré de sa baguenauderie entre les divers genres, Qui vive trouve à
offrir une chose à laquelle il ne semble pas tout à fait hasardeux de river les regards et il s’agit d’un personnage - une figure
d’individu aux ultra contemporaines indécisions, placé sous la caresse d’une certaine lumière, à l’inflexible principe de douceur.
Or, in tranquille héros dont le souffle court, accordé aux inspirations de celui qui lui prête corps, imprime quelques frissons
princiers au film, ledit personnage se révèle magnifique, et ce, par la grâce de la puissance feutrée de son acteur. Environné par de
beaux seconds rôles (la révélation Moussa Mansaly, les trop rares Serge Renko et Guillaume Verdier), Reda Kateb impose ici un
registre de pesanteur subtile, de souveraine présence dans le retrait. Une manière à lui de ciseler chacune de ses scènes par les
nuances aériennes d’une intensité comme lestée, de les porter toutes entières alors même qu’il paraît se laisser traverser par elles
avant seulement de s’en inventer, à contretemps, le très poreux acteur. Libération
« Qui vive trace son propre sillon, entre vérisme précis et
romanesque en sourdine. Partant du postulat que le maillage social
des quartiers, ou cités ou banlieues relève du pré-requis, le film ne
s’embarrasse pas de séquences d’exposition et emboîte fissa le pas
à Chérif(...). Marianne Tardieu n’ouvre ainsi des pistes sentimentale
et policière que pour nourrir le portrait de son personnage. Malgré
son arrière-fond nécessairement politique, le regard sans fard qu’il
porte sur la société -mineurs en déshérence, petites frappes
imposant leur loi, salariat précaire et en proie à l’humiliation de sa
hiérarchie, anonymat glaçant des grandes surfaces-, et sans jamais
rogner sur la noirceur de son récit, ce film ménage quelques puits
de lumière : il y a là de l’espoir –en l’espèce, celui d’une place à
bord de « l’ascenssur social »-, de l’amour -état de possible du
moins, en la personne d’Adèle– et pour tout dire une bienveillance
salutaire à l’égard de ses personnages, jamais honnis pour leurs
erreurs,
aussi
tragiques
soient-elles.
Juste, modeste et sensible, Qui vive est une réussite.
Fiches du cinéma
D’autres occasions de revenir au Cinémateur :
Plus de dix ans après les attentats du 11 Septembre 2001, la ville de
Hambourg a du mal à se remettre d’avoir abrité une importante cellule
terroriste à l’origine des attaques contre le World Trade
Center. Lorsqu’un immigré d’origine russo-tchétchène, ayant subi de
terribles sévices, débarque dans la communauté musulmane de
Hambourg pour récupérer la fortune mal acquise de son père, les
services secrets allemands et américains sont en alerte. Une course
contre la montre s’engage alors pour identifier cet homme très
recherché : s’agit-il d’une victime ou d’un extrémiste aux intentions
destructrices ? du 3 au 9 déc
Ciné-ma différence
Le samedi
20 décembre à 14h POUR TOUS
A LA POURSUITE DU ROI PLUMES
Soirée unique
le mercredi 10 décembre à 20h
en partenariat
avec le Comité loi 1905
dans le cadre de la Semaine de la
laïcité
Et TIMBUKTU d’Abderrahmane Sissako 10 au 23 dec
LE PARADIS de Alain Cavalier 10 au16 dec