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13/14 1 « ORCHESTRA DI PIAZZA VITTORIO » DOSSIER PÉDAGOGIQUE Dossier proposé dans le cadre du dispositif Lycéens à l’Opéra, financé par la Région Rhône-Alpes. Dossier réalisé sous la direction de David Camus Coordination générale Élodie Michaud Rédaction des textes Jonathan Parisi Suivi de fabrication Aurélie Souillet Document disponible en téléchargement sur www.operatheatredesaintetienne.fr Contacts Fanny Loingeville Chargée du développement des publics 04 77 47 83 60 / [email protected] Clarisse Giroud Chargée de la médiation et de l'action culturelle 04 77 47 83 62 / [email protected] « CARMEN » ORCHESTRA DI PIAZZA VITTORIO Élaboration et arrangement musical Mario Tronco et Leandro Piccioni Direction artistique et musicale Mario Tronco Chorégraphie Giorgio Rossi Chef de chœur Laurent Touche Conception décor et mise en espace Lino Fiorito Adaptation du livret, chœur et transitions Serge Valletti Création lumières Bruno Marsol Costumes Katia Marcanio Ingénieur du son Gianni Istroni Son plateau Francesco Ferraioli Accompagnement du projet Giacomo Scalisi Carmen Cristina Zavalloni Don Jose, harmonium, castagnettes Sanjay Khan Micaela Elsa Birgé Orchestra di Piazza Vittorio Escamillo Houcine Ataa Zuniga, flûtes Carlos Paz Duque Le Dancaïre, gitan, trompette Omar Lopez Valle Contrebandier, gitan, percussion Ernesto Lopez Maturell Remendado, gitan, djembé, dumdum El Hadij Yeri Samb (Pap) Basse et contrebasse Pino Pecorelli Percussions Raul Scebba Pianoforte, synthétiseur Leandro Piccioni Oud Ziad Trabelsi Cymbalum Marian Serban Guitares Emanuele Bultrini Musiciens invités Violon Ion Stanescu Trombone, accordéon, synthétiseur Simon Sieger Clarinette Paolo Rocca Artistes du Chœur Lyrique et de l’Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire dirigés par Leandro Piccioni Formation Dhoad Tablas Amrit Hussain Voix Percussion Jhori Mahendra, Kular, Sarwar Danseuses Sapera Ganga, Sapera Manju, Sapera Chanda Romafest Danseurs Ovidio Toti, Vizi Dezso, Adam Josef, Biga Imre Voix off Gwenaël Morin, Virginie Colemyn Grand Théâtre Massenet Jeudi 17 octobre : 20h Vendredi 18 octobre : 20h Samedi 19 octobre : 18h Durée 1h35 sans entracte - En français surtitré Production Les Nuits de Fourvière / Département du Rhône L’Orchestra di Piazza Vittorio a été créé par Mario Tronco et Agostino Ferrente Coproduction Opéra Théâtre de Saint-Étienne Costumes et décors réalisés dans les ateliers de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne SOMMAIRE p.06 p.13 p.20 p.25 DÉCOUVERTE DE L’ŒUVRE Georges Bizet La genèse de Carmen Personnages et argument Guide d'écoute CARMEN ÀUne L’OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE production atypique Les maîtres d'œuvre Les solistes L'orchestre et les chœurs Iconographie commentée de la production PISTES PÉDAGOGIQUES Piste 1 - Carmen ou l'émancipation féminine Piste 2 - Mettre en scène la mutinerie des cigarières Piste 3 - Carmen dans tous ses états... RESSOURCES SUPPLÉMENTAIRES L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne / Présentation générale Petite histoire d’une production ANNEXES p.28 Voix et tessitures Composition de l'orchestre Glossaire Bibliographie sélective DECOUVERTE DE L'OEUVRE GEORGES BIZET (Paris 1838 - Bougival 1875) Né en 1838 à Paris, Alexandre César Léopold Bizet reçoit lors de son baptême le prénom de Georges (l'usage voulait alors qu'un enfant reçoive un prénom supplémentaire à cette occasion). Il est le fils d'une pianiste et Georges Bizet, photographie d'un perruquier, reconverti d'Étienne Carjat un an avant sa naissance en professeur de chant. Les premiers enseignements musicaux du jeune Bizet sont alors assurés par ses parents euxmêmes. Tandis que la famille entière jusqu'à son oncle François Delsarte, professeur de chant très réputé, l'immerge dans la musique, Georges montre d'étonnantes dispositions. À l'âge de neuf ans, il entre au Conservatoire de Paris où il étudie le piano, l'orgue, l'harmonie et la composition. Diplômé d'un premier prix de piano en 1852, il obtient en 1855 un premier prix d'orgue et de fugue, avant de composer en un mois seulement sa première symphonie, la Symphonie en ut majeur. En 1857, Bizet participe à un concours d'opérette* organisé par Offenbach. Sa première œuvre scénique, Le Docteur Miracle, remporte alors le premier prix ex aequo avec celle de Charles Lecocq. Composées sur le même livret imposé, les deux opérettes seront jouées en alternance au Théâtre des Bouffes-Parisiens. Cette même année, alors qu'il n'a que 19 ans, Bizet obtient le Grand Prix de Rome pour sa cantate Clovis et Clotilde (prix le plus prestigieux pour un compositeur). Il s'installe ainsi pour trois années à la Villa Médicis, lieu qui offre un cadre de travail idéal aux jeunes lauréats. En 1860, c'est dans une situation précaire qu'il rentre à Paris. En pianiste brillant, Bizet retranscrit de nombreuses œuvres célèbres pour le piano, ce qui lui permet de subsister. Divers projets d'opéras 6 vont également l'occuper, mais cherchant toujours une forme de perfection musicale, Bizet se refusera à l'écriture facile, flattant les oreilles du public bourgeois. Il détruira alors de nombreuses partitions avant de les achever. Ce n'est qu'en 1863, lorsque Léon Carvalho, directeur du Théâtre-Lyrique, lui commande un opéra que le compositeur parvient au bout de son entreprise. Les Pêcheurs de perles sont ainsi joués lors de dix-huit représentations et rencontrent un succès mitigé malgré les critiques très encourageantes de confrères tels que Berlioz. Quelques années plus tard, Bizet épouse Geneviève Halévy et intègre ainsi une grande famille juive très influente dans le Paris de l'époque. En effet, le père de Geneviève était non seulement le professeur de composition de Bizet, mais également compositeur, membre de l'Institut et secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-Arts, tandis que son cousin Ludovic Halévy était un librettiste réputé (il réalisera d'ailleurs le livret de Carmen avec Henri Meilhac). Après la guerre de 1870, Bizet est nommé chef des chœurs de l'Opéra de Paris, mais il se retire au bout d'une petite année, préférant le poste de chef de chant qu'on lui propose à l'Opéra-Comique. C'est dans cette salle qu'il créé Djamileh en 1872, année où il compose également L'Arlésienne, son premier grand succès, et la suite pour piano à quatre mains Jeux d'enfants, probablement sa pièce la plus inspirée, la plus libre et la plus personnelle. Son style s'affirmant peu à peu et s'affranchissant du carcan social dans lequel il évolue, Bizet se penche sur son nouveau projet, un opéra réaliste mettant en scène non pas de riches princes et bourgeois, mais des bohémiens et contrebandiers : Carmen. Malheureusement, le 3 juin 1875, soit trois mois exactement après la création de Carmen, Bizet meurt subitement, sans pouvoir profiter de la consécration de ce qui reste aujourd'hui encore le plus grand chef d'œuvre de l'opéra français. Carmen un opéra-comique ? OUI ! Même si l'héroïne meurt à la fin de l'œuvre, Carmen est bien un opéra-comique ! Tout simplement parce que le terme d'opéra-comique ne veut en aucun cas dire que l'œuvre est drôle. Il s'oppose seulement au genre de l'opéra (tout court), entièrement chanté et ne pouvant être joué qu'à l'Opéra de Paris (actuel Opéra Garnier). Carmen est une œuvre où alternent passages chantés et passages parlés, et relève ainsi de l'opéra-comique, genre qui constitue le répertoire de la salle du même nom : l'Opéra-Comique (sur l'actuelle place Boieldieu). * les termes suivis d'un astérisque sont à retrouver dans le glossaire p29 LA GENÈSE DE CARMEN Durant l'été 1872, alors qu'il organise les répétitions de L'Arlésienne, Bizet médite déjà son futur projet. Ainsi, quand les directeurs de l'Opéra-Comique, Messieurs Du Locle et Leuven, lui commandent une nouvelle œuvre, le compositeur s'entoure des librettistes Henri Meilhac et Ludovic Halévy et propose immédiatement Carmen. Si Du Locle se montre peu enthousiaste, il reste moins catégorique que Leuven qui trouve impensable que le rôle-titre puisse être assassiné sur la scène de l'OpéraComique : « Carmen ! ... La Carmen de Mérimée ? ... Est-ce qu'elle n'est pas assassinée par son amant ? ... Et ce milieu de voleurs, de bohémiennes, de cigarières ! ... À l'Opéra-Comique ! ... Le théâtre des familles ! ... Le théâtre des entrevues de mariages ! ... Nous avons, tous les soirs, cinq ou six loges louées pour ces entrevues... Vous allez mettre notre public en fuite... C'est impossible ! » (LACOMBE, Georges Bizet). Promettant d'accentuer l'esprit coloré et enthousiaste de l'œuvre en adoucissant les traits les plus noirs du drame, Halévy remporte finalement l'approbation de Leuven qui conclue néanmoins leur entretien en lançant : « Je vous en prie, tâchez de ne pas la faire mourir ». Six mois plus tard, alors que Bizet cherche déjà l'interprète idéale pour le rôle-titre, Leuven démissionne de son poste de directeur ; le maintien de Carmen au programme de l'Opéra-Comique demeure sans doute parmi les raisons de son départ. Pourtant, lors de l'écriture du livret, Meilhac et Halévy atténuent considérablement la noirceur de la nouvelle de Mérimée. Les librettistes ajoutent même de nouveaux personnages plus rassurants, dont Micaëla qui se pose comme l'alternative féminine douce et romantique, et passent sous silence certains épisodes comme la prostitution de Carmen. Convaincu de tenir un sujet non seulement pertinent, mais capable de faire éclore son style compositionnel, Bizet participe activement à la rédaction du livret. Le compositeur veille à l'agencement des scènes, à la cohérence de l'évolution dramatique. Il réécrit même certains passages entiers du texte, expliquant qu'il souhaite entendre précisément tel ou tel mot dans la bouche de ses personnages. Le texte final de la Habanera, par exemple, demeure presque entièrement de la main du compositeur, qui se révéla bien plus inspiré que Halévy ! Le choix du rôle-titre va également mobiliser toute l'énergie de Bizet, car il faut trouver à la fois une chanteuse et une actrice ; certaines interprètes pressenties ont par ailleurs refusé le contrat, refroidies par cette fin tragique et le tempérament débridé du personnage ! Dans ce panorama peu favorable, une chanteuse semble pourtant vouloir interpréter le rôle de Carmen plus que toute autre : il s'agit de Célestine GalliMarié. En effet, la mezzo-soprano alors âgée de trentecinq ans défend, tout comme Bizet, une conception nouvelle du mouvement scénique, plus vraie, et surtout affranchie des poses stéréotypées de l'époque. Bizet pousse alors Du Locle à signer rapidement l'accord qui engage Galli-Marié. Connaissant la situation financière difficile de l'Opéra-Comique, celle-ci acceptera même de réduire ses cachets pour être sûre que l'œuvre voie le jour. C'est en octobre 1874 et dans un contexte compliqué que les répétitions commencent. La partition est jugée trop difficile et met en difficulté certains musiciens et chanteurs. De la même manière, les audaces de Bizet quant à la mise en scène sont montrées du doigt et perçues comme des atteintes à la tradition. Mais plus encore, il semblerait que Du Locle ne croit pas au succès de Carmen. Ne misant pas sur l'œuvre pour relever la situation financière de l'Opéra-Comique, le directeur se désinvestit alors totalement du projet, au point de ne prendre part ni à la conception des costumes, ni à celle des décors, et de confier la mise en scène à Charles Ponchard, son régisseur de scène. Bizet ne reçoit d'ailleurs pas plus de soutien de la part de ses librettistes, craignant bien trop de risquer leur réputation auprès du public des "honnêtes gens". 7 Le 3 mars 1875, devant Gounod, Delibes, Massenet, Offenbach, Daudet ou encore Dumas fils, Carmen est créée. L'œuvre suscite immédiatement les plus vives critiques. Si la musique est jugée hybride, c'est la condamnation morale du livret et du personnage de Carmen qui se fait la plus virulente. Carmen est traitée de « louve dans la bergerie », « bête fauve », « abominable rôle qu'on ne devrait jamais porter à la scène » (articles de presse au lendemain de la première). Les critiques jouent même aux redresseurs de l'ordre social : « il faudrait la bâillonner et mettre un terme à ces coups de hanches effrénés en l'enfermant dans une camisole de force après l'avoir rafraîchie d'un pot à eau versé sur la tête » (Le Siècle, 8 mars 1875). Bref ! Il semblerait que le public parisien "bien pensant" de la fin du XIXe siècle ne soit pas prêt à voir sur scène une femme qui puisse simplement séduire les hommes plutôt que de se laisser séduire ! Malgré ce contexte de création peu engageant, Carmen, proposée dans sa version avec récitatifs chantés (les dialogues parlés étant inexécutables à l'étranger) sera jouée à Vienne en octobre 1875, puis à Stockholm, Saint-Pétersbourg, Londres, New-York, Dublin en 1878, rencontrant chaque fois un succès plus grand. L'audace de Bizet reste, aujourd'hui encore, d'avoir su montrer des êtres de chair et de sang, en mouvement, pris dans des enjeux sociétaux plus grands qu'eux et non figés dans une "réalité artificielle". Carmen, de la condamnation à la consécration... 8 Peu soutenue par le directeur de l'Opéra-Comique qui ne croit pas en son possible succès, malmenée par les chanteurs qui n'en comprennent pas la musique, descendue par la critique dès le lendemain de la première, Carmen n'était vraiment pas destinée à devenir ce chefd'œuvre universellement connu. Lors des répétitions, on raconte même que les interprètes de Carmen et Don José, tout deux fidèles à Bizet, ont menacé de quitter la pièce si l'on s'opposait encore aux volontés du compositeur. Mais à force d'acharnement et de conviction, Bizet aura réussi à faire éclore une œuvre dont la plus grande qualité reste la sincérité, musicale comme dramatique. De célèbres critiques... Saint-Saëns : « Enfin j'ai vu Carmen, c'est un chef d'œuvre et je ne te l'envoie pas dire. » Nietzsche à propos de la Habanera : « C'est un exercice de séduction, irrésistible, satanique, ironiquement provocant. C'est ainsi que les anciens imaginaient Eros. Je ne connais rien de semblable en musique. » (Lettres à Peter Gast) Théodore de Banville, lui, approuve la disparition de « ces jolies poupées bleu ciel et rose qui firent la joie de nos pères au profit de vrais hommes et de vraies femmes, éblouis et torturés par la passion. » (Le National, 8 mars 1875) Nietzsche : « Cette œuvre délivre ! [...] J'envie Bizet d'avoir eu le courage de cette sensibilité plus méridionale, plus brune, plus brûlée... Enfin l'amour, l'amour re-transposé dans la nature originelle... L'amour dans ses moyens de guerre, dans son principe de haine mortelle des sexes. » (Lettres à Peter Gast) Célestine Galli-Marié de l'Isle dans Carmen, peinture de Doucet, 1886. PERSONNAGES ET ARGUMENT Personnages principaux L’action en deux mots… Carmen (mezzo-soprano) - bohémienne Don José (ténor) - brigadier Escamillo (baryton) - célèbre toréro Micaëla (soprano) - jeune paysanne Frasquita (soprano) - bohémienne amie de Carmen Mercédès (mezzo-soprano) - bohémienne amie de Carmen Le Dancaïre (baryton) - contrebandier Le Remendado (ténor) - contrebandier Moralès (baryton) - brigadier Zuniga (basse) - lieutenant Carmen, cigarière au charme dévastateur, est conduite en prison suite à une émeute ayant éclaté à la manufacture de tabac. Mais tandis que le brigadier Don José la surveille, celle-ci use de ses charmes pour s'enfuir. Désormais fou d'amour pour la jeune bohémienne, Don José n'aura de cesse de la retrouver. Mais l'insaisissable Carmen a déjà en tête bien d'autres projets... Argument Acte I : Sur une place à Séville, des soldats désœuvrés attendent la relève de la garde tout en observant les cigarières travaillant à la manufacture. Micaëla, une jeune navarraise, cherche en vain Don José, un brigadier auquel elle fut promise en mariage. Bousculée par les soldats entreprenants, elle repart. C'est l'heure de la pause pour les cigarières qui se pressent à l'extérieur. Parmi elles, Carmen, clamant l'amour frivole et ses plaisirs (Habanera), fait une apparition remarquée de tous. Tous, sauf Don José qui se tient volontairement à l'écart. Ne supportant pas ce désintérêt pour son numéro, Carmen décide de narguer le brigadier. Elle décroche alors une fleur de son corsage et la lance à Don José, déjà envoûté. Plongé dans ses pensées, Don José reçoit la visite de Micaëla qui lui apporte des nouvelles de sa mère et du pays. Mais une bagarre éclate à la manufacture et deux cigarières, dont Carmen, sont interrogées. Comme elle provoque ouvertement les soldats qui la questionnent, Don José reçoit l'ordre de conduire Carmen en prison. Sur le chemin, alors qu'elle achève de le séduire, Don José desserre quelque peu la corde, lui permettant de s'enfuir... pour lui, cherchant à le posséder toujours plus et lui proposant même de la suivre dans la montagne. Mais les clairons sonnent bientôt la garde et Don José doit se présenter à l'appel. Carmen l'accuse alors de ne pas l'aimer réellement. Quand Zuniga, lui aussi charmé par Carmen, frappe à la porte, une bagarre éclate entre les deux soldats. Les contrebandiers séparent les deux hommes et ligotent Zuniga, obligeant désormais Don José à déserter... Acte III : Dans la montagne, Carmen subit les reproches de Don José qui la tient pour coupable de la perte de son honneur. Elle tire les cartes avec Frasquita et Mercédès qui se voient chacune un avenir heureux ; mais à son tour, c'est inlassablement la même prédiction funeste : la mort. Alors qu'il monte la garde, Don José aperçoit un homme en approche. C'est Escamillo, venu jusqu'ici par amour pour Carmen. Ne supportant pas l'intrusion de son rival, Don José défie le toréro en duel. L'apparition successive de Carmen puis de Micaëla, venue ramener José à la raison, met un terme aux provocations des deux hommes. Tandis qu'Escamillo convie Carmen aux prochaines fêtes de Séville, Don José se résout à suivre Micaëla, tout en avertissant Carmen, sur la menace, qu'ils se reverront... Acte II : À la taverne de Lilas Pastia, à la tombée de la nuit, les bohémiens se réunissent. Carmen et ses amies Frasquita et Mercédès engagent une danse tandis qu'une foule, célébrant la victoire d'Escamillo, fait son Acte IV : Dans les rues de Séville, la foule se presse à la approche. Le célèbre toréador de Grenade profite alors corrida. Avant d'entrer dans l'arène, Escamillo répète à de cette ovation publique pour séduire Carmen, qui fait Carmen tout l'amour qu'il lui porte. Mais Frasquita et pourtant mine de lui résister. Mercédès mettent Carmen en garde du retour de Don L'aubergiste feint la fermeture de la taverne pour José, déjà dissimulé parmi les spectateurs. permettre aux contrebandiers de se réunir et de Décidée à lui faire face une bonne fois pour toutes, planifier leur prochain coup. Deux d'entre eux, Le Carmen rejoint Don José. Il se montre tour à tour Dancaïre et le Remendado sollicitent alors l'aide de suppliant et menaçant, la confortant dans sa décision. Carmen, Frasquita et Mercédès. Mais Carmen refuse Se dressant devant Don José et devant son propre de prendre part à ce nouveau plan, prétextant être destin, Carmen lui rend la bague symbole de leur amour amoureuse. Sorti de prison où il a été détenu un mois passé, tandis qu'elle reçoit les coups de poignard Maquette costume de LalaMusique parCarmen, Marie-Frédérique Fillon,rejoint mise en scène de Laurent Brethome. pourdu avoir facilité fuite de Don José désespérés de son ancien amant... enfin celle qui a hanté ses pensées. Carmen danse 9 GUIDE D'ÉCOUTE Le guide d'écoute suivant propose de découvrir l'œuvre à travers 4 extraits musicaux parmi les plus célèbres de la partition : le prélude, la habanera, la chanson bohème et l'air du toréador. Tout en découvrant les "tubes" de l'œuvre, il sera proposé de réfléchir à la vie d'une œuvre lyrique après sa composition. En effet, la partition de Bizet, même si elle tient toujours lieu de référence principale, est si célèbre à travers le monde qu'elle a pu inspirer des générations et des générations d'artistes. Reprise, réinterprétée, remodelée, parfois complètement réadaptée, Carmen est une œuvre vivante qui peut prendre des visages parfois surprenants ! C'est d'ailleurs ce que propose l'Orchestra di Piazza Vittorio en présentant une nouvelle version de Carmen très haute en couleurs et riche de nombreuses influences musicales. Nous proposons alors pour chaque piste musicale étudiée, d'observer une forme de réécriture ou d'adaptation de Carmen, qu'elle soit orchestrale, vocale, scénique, etc. 10 Note Les versions discographiques de Carmen sont si nombreuses et souvent si différentes qu'il est très difficile de n'en proposer qu'une seule. Nous conseillons alors aux amoureux du timbre chaud et sensuel de La Callas de se procurer la version enregistrée avec Georges Prêtre, aux curieux souhaitant redécouvrir l'œuvre dans une version plus contrastée d'écouter la version de Michel Plasson avec le duo Gheorghiu / Alagna, ou encore de se tourner vers la solide version de Claudio Abbado, interprétée par Teresa Berganza (Carmen) et Placido Domingo (Don José). 1 - Prélude Le prélude de Carmen s'articule autour des trois thèmes principaux de l'œuvre : le thème de la corrida, le thème du toréador et le thème du destin. Le thème de la corrida situe l'œuvre dans son contexte géographique. Il pose le décor hispanisant, son esprit de fête, vif, coloré et éclatant. Le thème, dans la tonalité* franche de La majeur, se développe dans un flot de doubles croches et use de nombreux trilles* qui participent à l'effervescence générale et génèrent une très grande vitalité. L'orchestre très fourni et jouant fortissimo* nous laisse imaginer cette foule dense et animée qui se presse à la corrida. Le thème du toréador succède immédiatement à celui de la corrida. Les accords très secs et pompeux des trompettes et des trombones accompagnent le thème joué par les cordes sur un rythme de marche très solennel. Après une montée spectaculaire, c'est tout l'orchestre qui reprend ce thème à l'unisson*. Le thème du destin, quant à lui, parcourt véritablement toute l'œuvre. Il apparaît toujours joué à l'orchestre et jamais aux voix. Comme une sorte de prédiction, ce thème n'est jamais très loin, fréquemment réexposé, comme quelque chose d'inéluctable, mais il n'est finalement ni connu, ni énoncé d'aucun personnage, excepté l'orchestre. Symbolisant le destin tragique de Carmen, ce thème se construit sur la gamme tzigane* et utilise la seconde augmentée* (cercle rouge), intervalle de couleur orientalisante. La courbe sinueuse de la mélodie traduit, quant à elle, non seulement le tempérament imprévisible de Carmen, mais également le parcours tortueux de sa vie amoureuse. Les différentes Carmen orchestrales Vidéo surprenante du prélude de Carmen interprété par un orchestre d'Iphone ! https://www.youtube.com/watch?v=mHnfVGtniaY 10 2 - Habanera - « L'amour est un oiseau rebelle... » La Habanera de Carmen est certainement l'air le plus célèbre de la partition et probablement même, l'air le plus célèbre de tous les opéras. La habanera est une danse traditionnelle espagnole dont l'origine est vraisemblablement havanaise ; elle apparaît en Europe au XIXe siècle. Le rythme habituel de la habanera, à 2 temps (croche pointée double croche, deux croches - voir cercle rouge), installe ici un caractère très dansant, déhanché et du même coup sensuel, qui se prête parfaitement bien à la situation dramatique. En effet, la très séduisante Carmen nous livre ici sa vision de l'amour, cet « oiseau rebelle que nul ne peut apprivoiser ». Les différentes Carmen vocales La musique elle-même, son rythme, sa mélodie et son orchestration ne sont pas les seuls paramètres permettant de faire de la Habanera ce moment si captivant et sensuel. Car, en effet, d'un chef d'orchestre à l'autre, d'une chanteuse à l'autre, cet air (comme n'importe quel air d'opéra) peut prendre des visages très différents. Nous proposons alors, pour comprendre l'importance de l'interprétation, de comparer différentes versions de la Habanera, chantées par Maria Callas, Teresa Berganza, Régine Crespin, Julia Migenes et Angela Gheorghiu. Nous pouvons alors nous demander ce que dégage chacune des voix entendues et tenter de trouver des adjectifs pour les qualifier. Ainsi, laquelle de ces Carmen semble le mieux incarner votre vision du personnage ? 3 - Chanson bohème - « Les tringles des sistres* tintaient... » Il s'agit bel et bien ici d'une chanson, puisque les personnages qui l'interprètent, Carmen, Frasquita et Mercédès, se mettent eux-mêmes en scène dans la taverne de Lilas Pastia, en accompagnant leur chant par une danse. Le thème musical par sa couleur, sonne typiquement andalou et progresse, à la manière du Boléro de Ravel, selon un immense crescendo* et accelerando* orchestral (cercle rouge). L'effet ainsi provoqué est celui d'une danse magique et ensorcelante de la part des zingarellas, qui dans des « tralala » répétés et accélérés, nous transmettent à la fois toute leur ivresse, leur frénésie, leur fureur de vivre. Les différents arrangements de Carmen Extrait du film Carmen Jones d'Otto Preminger, où la chanson bohème devient le tube jazzy d'un cabaret noir-américain ! https://www.youtube.com/watch?v=slb3EqGZMEY 11 4 - Air d'Escamillo : « Votre toast je peux vous le rendre... » L'air du toréador, s'il figure parmi les plus célèbres de l'œuvre, n'a pourtant pas été souhaité par Bizet mais par ses librettistes qui avaient exigé à cet endroit de la partition un véritable air de bravoure. L'anecdote raconte même que Bizet aurait confié son agacement au chef d'orchestre Charles Lamoureux : « Ah ! Ils veulent de l'ordure ! Et bien ils en auront ! ». Cédant finalement, le compositeur aurait même apporté l'air à Halévy en disant : « Tiens ! Voici ta saleté ! ». L'air d'Escamillo est ainsi, non pas une "saleté", mais une page musicale très pompeuse et conquérante, peignant un personnage plutôt arrogant. Et pour cause, l'air, loin d'être aisé pour le chanteur, réclame un vaste ambitus* vocal, descendant jusqu'au si bémol grave (cercle gris) et montant jusqu'au fa aïgu (cercle rouge). 12 Les différentes Carmen scéniques Remplissant sa mission désormais prépondérante d'aller à la rencontre de son public, l'opéra s'invite parfois dans des lieux de notre quotidien, comme en témoigne cet air d'Escamillo interprété sur une toute autre scène que celle d'un théâtre ! https://www.youtube.com/watch?v=bymQ0j4LcLY « CARMEN » À L’OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE UNE PRODUCTION ATYPIQUE Créée en juin 2013 dans le cadre des Nuits de Fourvière de Lyon, en collaboration avec l'Opéra Théâtre de SaintÉtienne, la version de Carmen de Mario Tronco et de l'Orchestra di Piazza Vittorio qu'il dirige a de quoi surprendre. C'est une véritable relecture que cette production propose, tant au niveau musical que de l'adaptation du livret et de la mise en scène. Elle pousse à l'extrême les notions de réadaptation et de réactualisation propres à toute production lyrique (voir biographie de l'Orchestra di Piazza Vittorio p.17). Pour cette production de Carmen, l'Orchestra di Piazza Vittorio collabore notamment avec des musiciens originaires du Rajasthan et de la Roumanie, et des artistes du Chœur lyrique et de l'Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire. Échange avec Mario Tronco autour de son adaptation de Carmen Sous quel angle avez-vous lu et réinventé l’histoire de Carmen ? Carmen est une histoire contemporaine : elle parle d’une tragédie qui peut survenir chaque jour dans le monde. On entend de plus en plus parler de ce phénomène qu’on appelle le "féminicide" – à savoir ces femmes qui meurent sous les coups, par jalousie, ces "morts par amour", comme on les nomme. C’est un fait aussi déconcertant qu’une guerre, et c’est ce que nous voulons raconter : une histoire d’amour entre un garçon et une femme plus âgée, qui finit en tragédie. Nous voulons raconter la générosité des femmes, et un peu l’égoïsme des hommes. Car les premières aiment de manière passionnée, quand les seconds, souvent, aiment l’idée de posséder… Cette histoire, nous l’avons imaginée comme si elle se passait dans deux mondes séparés : un monde terrestre, représenté par une caravane de nomades qui va du Rajasthan vers l’Espagne, et un monde supraterrestre, incarné par le chœur de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne. Le chœur regarde cet autre monde, cette caravane qui passe sur la terre, où a lieu cette énième tragédie de jalousie qu’est Carmen. Et comme il a déjà vu cette histoire des milliers de fois, il décide d’interagir avec elle : il guide les personnages, leur donne des conseils, il va même jusqu’à les remplacer. Il intervient donc un peu comme le chœur grec, comme la Conscience : c’est un personnage à part entière. L’histoire est la même que celle de Carmen, mais nous avons beaucoup travaillé sur la psychologie des personnages. À ce propos, quels traits de caractère avez-vous donnés à Carmen, Don José et Micaëla, qui forment le triangle amoureux de cet opéra ? Et comment avez-vous arrêté votre choix sur les solistes qui les interprètent ? Nous n’avons pas imaginé une Carmen "mangeuse d’hommes" et sans cœur, mais au contraire une Carmen très amoureuse de Don José. Et c’est précisément parce qu’elle en est très amoureuse qu’elle décide de le sauver en le maltraitant, en le faisant s’éloigner d’elle ; mais Don José est lui-même si épris d’elle qu’il reste avec elle… Je choisis toujours des acteurs qui présentent des similitudes avec les caractères de leurs personnages. Cristina Zavalloni est une force de la nature, une femme dont l’énergie peut même faire peur : c’est quelqu’un qui vous prend par la main et que vous seriez prêt à suivre n’importe où, parce que, un peu comme Carmen, elle vous entraîne… Sanjay Khan, lui, est une âme pure, un garçon de 19 ans qui a un rapport à l’amour totalement – et merveilleusement – infantile. Il est d’une telle pureté qu’on peut l’imaginer en devenir fou et tuer une femme… Quant à Elsa Birgé, elle a à la fois le visage d’une enfant et la détermination d’une femme forte : elle incarne donc d'une très belle manière le rôle de Micaëla, qui est en fait une fausse perdante. Dans Carmen comme dans notre spectacle, c’est elle qui, à la fin, emportera Don José. Elle attendra longtemps ; mais tôt ou tard, il lui reviendra. 13 14 Comme toujours avec l’Orchestra di Piazza Vittorio, la musique elle-même raconte une histoire. Quel récit avezvous souhaité tisser en intégrant dans votre relecture de Carmen des arrangements empruntés aux musiques du Rajasthan ou de Roumanie ? La culture gitane appartient au Rajasthan. Son voyage a commencé là-bas il y a très longtemps – deux mille ans – et a impliqué diverses parties du monde, des Balkans à l’Espagne jusqu’au Maroc. Nous profitons de la grande variété que nous avons sur scène, et de la présence de musiciens originaires du Rajasthan et de la Roumanie, pour raconter cette histoire en musique (voir Focus cidessous). Et cela donne effectivement un voyage tout à fait cohérent. Quand nous avons commencé les répétitions avec les musiciens du Rajasthan, le joueur de cymbalum [le Roumain Marian Serban], les yeux pleins de larmes, m’a dit : « Tu sais, Mario, ce sont eux, mes ancêtres : moi, je viens de là, je suis leur descendant ». Musicalement cela s’entend, c’est impressionnant : même lorsqu’ils jouent ensemble pour la première fois, ils connaissent les codes de manière atavique1. Et ils interprètent de façon très naturelle la partition de Carmen, même si elle est classique – il faut dire qu’elle raconte le monde gitan d’une manière extraordinaire… Quant à nous, d’une certaine façon, nous cherchons aussi à apporter notre monde. Il s’agit d’une vraie réécriture de Carmen, qui nous ressemble beaucoup, qui ressemble à l’Orchestra di Piazza Vittorio. Y a-t-il des moments où, tous deux, vous avez le sentiment d’aller trop loin, de vous égarer dans ce travail de recherche et d’invention qui est le vôtre ? Bien sûr. Dans ce genre de tâche, il y a toujours des moments de doute. Retravailler des opéras merveilleux comme Carmen ne sert a priori à personne ! Et très souvent, nous nous demandons en effet : « Mais pourquoi ?... Cette œuvre est déjà tellement belle ! » Cependant, il est intéressant de mettre en scène un opéra avec des personnes qui ne viennent pas du milieu de l’opéra, de le faire chanter par des interprètes qui ne soient pas toujours des chanteurs lyriques, de se réapproprier un répertoire populaire d’une manière véritablement populaire. Si nous faisions jouer l’opéra comme tel, nous n’y arriverions pas : ce n’est pas dans notre culture ni dans nos capacités techniques. Cette approche restitue une vérité à l’opéra, et même quelquefois à la composition… Avec Leandro, nous cherchons à mettre la composition à nu, à la rendre la plus simple possible et à comprendre où se trouve le centre de l’émotion. Même jouée à la guitare avec des accords simples et chantée par une voix non lyrique, une aria peut revêtir une très grande beauté ; parce qu’elle atteint alors un niveau d’émotion qui nous donne l’impression d’avoir compris ce moment particulier où l’auteur l’a composée. C’est peut-être la part la plus intéressante de notre travail – ou, tout au moins, celle qui nous amuse le plus. L’objet de l’Orchestra di Piazza Vittorio n’est pas simplement de mélanger ou de juxtaposer des cultures et des musiciens en apparence éloignés, mais bien de trouver entre eux des liens cohérents, de voir comment ils peuvent interagir et se répondre. L’Orchestra di Piazza Vittorio est en fait une sorte de miracle, et le grand mérite en revient aux musiciens, qui sont des personnes curieuses, passionnées par les cultures des autres. Je me souviens de notre premier jour de répétition, il y a dix ans. Chacun regardait l’instrument de l’autre en disant : « Qu’est-ce qu’il est beau ! Mais comment est-ce qu’on l’accorde ? Et celui-ci, quel son donne-t-il ? ». C’est cette curiosité qui rend possible le travail sur les partitions que nous accomplissons avec Leandro Piccioni. Extraits d'une conversation avec Richard Robert, Conseiller artistique aux Nuits de Fourvière 1 - dû à des habitudes ancestrales Focus Les Gitans Dhoad du Rajasthan (Nord-Ouest de l'Inde) proposent une musique subtile, ethnique et spirituelle, aux confluents des cultures gitanes, hindoues et musulmanes, un mélange qui n’est pas sans rappeler une musique sacrée du Pakistan. LES MAÎTRES D’ŒUVRE Mario Tronco Direction artistique et Lino Fiorito Conception décor et musicale mise en espace Né à Caserte en Italie, Mario Tronco est compositeur, arrangeur et pianiste. En 1980, il commence à jouer avec le groupe Piccola Orchestra Avion Travel avec lequel il travaille pendant 25 ans. Après des débuts sur la scène rock underground et une brève période pop à la fin des années 80, le groupe est salué avec l'album Bellosguardo (1992). La critique relève son originalité et sa grande capacité à renouveler la tradition de la chanson italienne, avec un style original, sophistiqué, élégant et fluide. En 2000, il remporte au festival de San Remo le prestigieux prix de la critique et du jury (meilleure chanson et meilleurs arrangements) pour Sentimento. Le besoin incessant d’explorer de nouveaux horizons musicaux conduit les membres d'Avion Travel à rechercher des projets aussi différents que possible; c’est ainsi que Mario Tronco crée l’Orchestra di Piazza Vittorio auquel il se consacre à plein temps. Léandro Piccioni Élaboration et arrangement musical Chef d’orchestre, arrangeur et pianiste, il collabore avec Mario Tronco depuis Avion Travel et depuis la formation de l’Orchestra di Piazza Vittorio, au sein duquel il réalise les orchestrations des cordes, collabore aux arrangements et à la direction d’orchestre. Il a composé de nombreuses musiques de films. La chanson Amore Fermati , orchestrée pour le film Lascia perdere, Johnny lui a valu une nomination pour un David di Donatello en 2008. Il est également soliste pour Ennio Morricone et l’Orchestra Roma Sinfonietta.. Né en Italie en 1955, il partage maintenant sa vie entre Naples et Cologne. Il est plasticien et décorateur pour le cinéma et le théâtre. Depuis 1980, il a participé à de nombreuses expositions personnelles ou collectives en Italie et à l’étranger et ses œuvres ont fait l’objet de publications dans des catalogues ou des livres. Il est l’un des membres fondateurs de la compagnie de théâtre d’avant-garde Falso Movimento, et a collaboré avec les metteurs en scène M. Bolognini, A. Capuano, T. De Bernardi, M. Martone et T. Servillo. Il a travaillé comme chefdécorateur sur tous les films de Paolo Sorrentino dont Il Divo, prix du jury du festival de Cannes en 2008 et prix Dante Ferretti du meilleur décor en 2009. Giorgio Rossi Chorégraphie Giorgio Rossi est né à Tradate (nord est de l’Italie). À quatre ans à peine il découvre le clown Dimitri sur scène dans son univers surréel et comprend alors que le théâtre sera toute sa vie. Il a fondé le Sosta Palmizi Network avec la chorégraphe Rafaella Giordano. Depuis 1987, il a réalisé plus de vingt-cinq chorégraphies en Italie et à l’étranger. Il a aussi collaboré avec des cinéastes, des musiciens et des écrivains. Parallèlement à son parcours de danseur et chorégraphe, il enseigne l’art poétique du mouvement dans des écoles de prestige à Pékin, Londres… 15 LES SOLISTES Laurent Touche Chef de chœur 16 Chef du Chœur Lyrique Saint-Étienne Loire, Laurent Touche est régulièrement invité dans de nombreuses institutions musicales pour son travail sur la musique française en France et à l’étranger. Il débute sa formation musicale au CRR de Saint-Étienne d’où il sort diplômé des classes de piano, hautbois, musique de chambre, écriture, solfège et analyse. Licencié en musicologie, il étudie ensuite l’accompagnement au CRR puis au CNSMD de Lyon. Une longue collaboration avec l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne le conduit successivement aux fonctions de chef de chant, chef de chœur et chef assistant, lui permettant ainsi de prendre part à de nombreuses productions lyriques depuis 1995, tout en poursuivant parallèlement ses activités de pianiste accompagnateur et de chef d’orchestre dans divers théâtres et festivals. Cristina Zavalloni Carmen Née en 1973 à Bologne, elle a étudié le chant lyrique et la composition au Conservatorio G.B. Martini à Bologne. Son talent vocal à multiples facettes et son parcours éclectique l’ont amenée tour à tour dans le champ du jazz, du chant lyrique, du baroque, et de la musique de chambre du XXe siècle. Des compositeurs contemporains comme Louis Andriessen ou Luca Mosca écrivent pour elle rôles et compositions (Opéra Signor Goldoni, La Fenice, 2007). On la retrouve sous la direction de Rinaldo Alessandrini dans Le Couronnement de Pompée à l’Opéra du Rhin (2005). Elle collabore depuis 2006 avec Alain Platel, les Ballets C de la B et le compositeur Fabrizio Cassol, sur Vsprs (inspiré par Monteverdi) ou Pitié ! (inspiré par Bach et La Passion selon St Mathieu). Sanjay Khan Don José Âgé de 19 ans, ce jeune prodige est issu des Dhoad Gitans du Rajasthan (cf Focus p.14). Les Dhoad, famille de musiciens gitans, viennent du désert du Thar, au Nord-Ouest de l’Inde. L'ORCHESTRE ET LE CHŒUR LYRIQUE Elsa Birgé Micaela Née dans une famille de musiciens, elle s’initie au chant dès son plus jeune âge. Parallèlement, elle se forme à l’école Nationale du Cirque A. Fratellini dès 8 ans. Devenue trapéziste, elle se produit avec le Vrai-Faux Mariage de la Caravane Passe (Cabaret Sauvage, Bataclan, tournée en France et en Europe). Création 2010 : duo Fille de la mer, spectacle mêlant cirque et musique. Création 2012 : Comment ça va sur la terre ?, concert poétique pour petits et grands avec Linda Edsjö et Michèle Buirette. Aussi, elle perfectionne sa technique vocale aux côtés de Martina A. Catella (Glotte-Trotters), référence en chants traditionnels du monde. L'Orchestra di Piazza Vittorio L'Orchestra di Piazza Vittorio est composé actuellement de dixhuit musiciens de dix nationalités différentes. Explorant le potentiel que représente ce panaché de racines et de cultures, il développe un langage et une musique uniques, qui s'inspirent des influences et traditions musicales de chacun. Ainsi l'orchestre mêle des univers très différents, allant entre autres du classique au rock, à la pop, en passant par le reggae, brasse des sonorités du monde entier, incorpore des instruments peu connus, des airs universels déjà anciens,... pour créer une musique inclassable. L'Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire Créé en 1987, l’OSSEL a su s’élever au rang des grands orchestres français. En devenant Directeur musical de l’orchestre en 2003, Laurent Campellone entreprend un travail en profondeur sur la qualité artistique de cet ensemble. L’OSSEL est un acteur culturel incontournable qui accomplit une mission essentielle d’éducation et de diffusion du répertoire symphonique et lyrique. L’Orchestre a su acquérir une solide réputation, en particulier dans le répertoire romantique français. Le Chœur Lyrique Saint-Étienne Loire Placé sous la responsabilité musicale de Laurent Touche, le Chœur Lyrique SaintÉtienne Loire constitue aujourd’hui un outil de niveau professionnel incontestable grâce à la rigueur apportée au recrutement de chacun des artistes, tous susceptibles, outre leur travail collectif, d’assurer des prestations individuelles de qualité. L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne est désormais reconnu comme l’un des acteurs incontournables de la vie lyrique française. Pour cette production de Carmen, les artistes du Chœur lyrique et de l'Orchestre Symphonique sont dirigés par Leandro Piccioni. 17 ICONOGRAPHIE COMMENTÉE DE LA PRODUCTION Ci-dessous des éléments servant à définir l’esthétique de l’ensemble de la production, notamment en matière de costumes. Des photographies de personnes comme d'accessoires ou de bijoux sont incorporés aux croquis de la costumière Katia Marcanio, permettant aux couturières de se baigner dans l’univers esthétique souhaité par le metteur en scène. Notons que l'ensemble des costumes de Carmen ont été réalisés dans les ateliers de couture de l'Opéra Théâtre de Saint-Étienne. 18 Les décors de Carmen ont également été réalisés dans les ateliers de l'Opéra Théâtre de Saint-Etienne. Ici, il s'agit davantage d'un travail de mise en espace, réalisé par Lino Fiorito, incorporant musiciens et chanteurs dans un même lieu scénique. 19 20 PISTES PEDAGOGIQUES PISTE 1 CARMEN OU L'ÉMANCIPATION FÉMININE Objetif : Comprendre la vision de la femme que propose l'œuvre Outils : Livret de Carmen Mots-Clés : Condition féminine, conservatisme, féminisme Cette piste pédagogique propose d'étudier l'image de la femme que défend l'œuvre. En effet, Carmen et Micaëla, les deux personnages principaux, incarnent des figures féminines extrêmement différentes. Dans les extraits du livret proposés, il peut être intéressant de relever les informations que l'on apprend sur chacune des deux femmes, mais aussi les champs lexicaux utilisés et enfin la façon dont chacune parle d'ellemême et dont les autres personnages, notamment masculins, s'adressent à elles. Dès lors, en trouvant des adjectifs pour les qualifier, il sera possible de faire le portrait de chacune des deux femmes, avant de réfléchir sur ce que chacune d'elle révèle de la condition féminine au XIXe siècle. Ainsi, qu'incarne chacune des deux femmes ? Qu'est ce que chacune instaure comme rapport à l'homme ? Enfin, quelles autres œuvres depuis Carmen proposent une lecture engagée de la féminité ? Extraits possibles Pour Micaëla : Acte I, n°2, Micaëla et Moralès ; Acte I, n°3, Don José et Moralès ; Acte I, n°7, Duo entre Micaëla et Don José ; Acte III, n°22, air de Micaëla. Pour Carmen : Acte I, n°6, Dialogue entre Carmen et Don José ; Acte I, n°9, Dialogue entre Carmen et Don José ; Acte III, n°20, Trio des cartes entre Carmen, Frasquita et Mercédès. Thématiques à observer Les symboles, prénoms, couleurs et croyances : Si Micaëla apparaît au premier acte avec une jupe bleue (couleur de l'habit de la Vierge), Carmen, elle, est faite de rouge et de noir, les couleurs des cartes dans lesquelles elle lit l'avenir, couleurs de la passion mais aussi de la mort. Ainsi, tandis que Carmen lit la bonne aventure (Acte III, n°20), Micaëla prie le seigneur de la protéger (Acte III, n°22). Les seuls prénoms des deux personnages féminins les opposent déjà, Micaëla venant de l'archange Michaël, et Carmen venant de "charme". Enfin, à diverses reprises, Don José dit à Carmen qu'elle est le diable (Acte III, n°19), tandis que l'héroïne utilise elle-même le champ lexical du sortilège : « le charme a opéré » (Acte I, n°9). Les origines géographiques et la condition sociale : Micaëla est une jeune paysanne, venue de Navarre, région d'enfance de Don José. Si elle est orpheline, c'est peutêtre seulement pour la rendre plus attachante et la relier plus encore à l'ordre familial, puisqu'elle a été recueillie par la mère de Don José, dont elle porte d'ailleurs un message. Carmen de son côté n'est jamais reliée à quelque famille que ce soit. Plus encore, c'est une bohémienne, qui n'a donc pas de terre spécifique, une nomade, un personnage libre et affranchi. Le rapport aux hommes : Tandis que Micaëla vouvoie systématiquement chaque homme auquel elle s'adresse, y compris Don José qu'elle connaît pourtant depuis l'enfance, Carmen, elle, tutoie rapidement ses interlocuteurs, surtout lorsqu'il s'agit d'arriver à ses fins : "où me conduirez-vous ?", suivi de "laisse-moi m'échapper !" (Acte I, n°9). De la même manière, les hommes, notamment les soldats, vouvoient tous Micaëla, jeune paysanne respectable, alors qu'ils tutoient sans hésitation Carmen : "ce ne sont pas des chansons que je te demande, c'est une réponse" (Acte I, n°9). Enfin, quand Micaëla prie Don José de rentrer au pays pour revoir sa mère (Acte III, n°24), Carmen, elle, ordonne qu'il la suive dans la montagne (Acte III, n°17). 21 PISTE 2 METTRE EN SCÈNE LA MUTINERIE DES CIGARIÈRES Objectif : Se mettre à la place des acteurs et du metteur en scène en essayant de jouer un extrait de l'œuvre Outils : Extrait du livret de Carmen, extraits vidéos Mots-Clés : mise en scène, espace de jeu, jeu d’acteur, gestuelle Cette piste pédagogique propose aux élèves de s’essayer à la mise en scène afin de comprendre que chaque nouvelle production, à l’opéra, propose un regard neuf et unique sur l’œuvre. En prenant comme support le texte de la scène de mutinerie entre les cigarières (Acte I, n°8), les élèves se répartiront en groupes comportant 12 interprètes (4 cigarières sopranos, 4 cigarières altos, Zuniga, Don José, et 2 soldats) et 1 ou plusieurs metteur(s) en scène. Chaque groupe pourra alors se réunir sous forme d’ateliers pour réfléchir à la façon de mettre en scène ce passage, c'est-à-dire la façon d’organiser cette scène dans l’espace : quel espace de jeu définir, où se positionner, à quelle distance les uns des autres, quand se déplacer… et la façon de la jouer : quels attitudes, gestes, regards, quelle intonation de voix, quel débit de paroles, quels accessoires, etc… ? Dans cette scène, les cigarières tentent d'expliquer au lieutenant Zuniga les raisons de la bagarre ayant éclaté à la manufacture de tabac. Deux groupes se forment immédiatement, l'un soutenant Carmen et l'autre Manuela... 22 ACTE I, n°8, Les cigarières, Don José, Zuniga, des soldats Les ouvrières sortent rapidement et en désordre. Cigarières sopranos Au secours ! au secours ! n'entendez-vous pas ? Cigarières altos Au secours ! au secours ! messieurs les soldats ! Cigarières sopranos C'est la Carmencita ! Cigarières altos Non, non, ce n'est pas elle ! Cigarières sopranos C'est la Carmencita ! Cigarières altos Non, non, ce n'est pas elle ! Cigarières sopranos C'est elle! C'est elle! Elle a porté les premiers coups ! Cigarières altos entourant le lieutenant Ne les écoutez pas ! Cigarières sopranos entourant le lieutenant Ne les écoutez pas ! Toutes les cigarières Monsieur, écoutez-nous ! écoutez-nous! écoutez-nous ! Monsieur, écoutez-nous ! Cigarières altos elles tirent l'officier de leur côté La Manuelita disait et répétait à voix haute, qu'elle achèterait sans faute un âne qui lui plaisait. Cigarières sopranos même jeu Alors la Carmencita, railleuse à son ordinaire, dit : Un âne, pour quoi faire ? Un balai te suffira. Cigarières altos Manuelita riposta et dit à sa camarade : Pour certaine promenade, mon âne te servira ! Cigarières sopranos Et ce jour-là tu pourras à bon droit faire la fière ! Deux laquais suivront derrière, t'émouchant à tour de bras. Toutes les cigarières Là-dessus, toutes les deux se sont prises aux cheveux, toutes les deux, toutes les deux se sont prises aux cheveux ! Zuniga avec humeur Au diable tout ce bavardage ! Prenez, José, deux hommes avec vous et voyez là dedans qui cause ce tapage ! Cigarières sopranos C'est la Carmencita ! Cigarières altos Non, non, ce n'est pas elle ! Cigarières sopranos Si fait, si fait; c'est elle ! Cigarières altos Pas du tout ! Cigarières sopranos Elle a porté les premiers coups ! Zuniga assourdi Holà! Éloignez-moi toutes ces femmes-là ! Cigarières sopranos C'est la Carmencita qui porta les premiers coups ! Cigarières altos C'est la Manuelita qui porta les premiers coups ! Cigarières sopranos La Carmencita! Cigarières altos La Manuelita Cigarières sopranos La Carmencita! Cigarières altos La Manuelita Cigarières sopranos Si! Cigarières altos Non! Cigarières sopranos Si! Cigarières altos Non! Cigarières sopranos Si! Cigarières altos Non! Cigarières sopranos Si! Si! Si! Si! Zuniga Voyons, brigadier... Maintenant que nous avons un peu de silence... qu'est-ce que vous avez trouvé là-dedans ? Don José J'ai d'abord trouvé trois cents femmes, criant, hurlant, gesticulant, faisant un tapage à ne pas entendre Dieu tonner... D'un côté il y en avait une, les quatre fers en l'air, qui criait : Confession ! confession! je suis morte... Elle avait sur la figure un X qu'on venait de lui marquer en deux coups de couteau, en face de la blessée j'ai vu... Il s'arrête sur un regard de Carmen Zuniga Eh bien ?.. Don José J'ai vu mademoiselle... Zuniga Mademoiselle Carmencita ? Don José Oui, mon lieutenant... Zuniga Et qu'est-ce qu'elle disait, mademoiselle Carmencita ? Don José Elle ne disait rien, mon lieutenant, elle serrait les dents et roulait des yeux comme un caméleon. 23 PISTE 3 CARMEN DANS TOUS SES ÉTATS... Objectif : Identifier les moments forts, incontournables de l'œuvre et observer leurs possibles mutations Outils : Livret de Carmen, recherches personnelles Mots-clés : Réécriture, transposition, adaptation Cette piste pédagogique propose, après la lecture du livret de Carmen ou de son argument, de s'intéresser aux scènesclés, incontournables, de l'œuvre et d'en trouver les échos, les réadaptations dans les arts en général. Il est alors possible, soit d'étudier la réécriture de Carmen, de la nouvelle de Mérimée au livret de l'opéra de Bizet, soit de chercher d'autres versions de l'œuvre, dans le cinéma, la peinture, ou même la bande-dessinée. Nous proposons alors dans un premier temps, d'identifier les moments et symboles forts de l'œuvre. Après avoir cherché d'autres versions ou réécritures de l'œuvre, il s'agira alors d'observer ce que sont devenus ces passages-clés. Il sera alors intéressant de déterminer sur quel plan se situe la réécriture : le plan musical, scénaristique, scénique, l'univers visuel, le lieu dramatique ? Enfin, une réflexion plus globale pourra être menée sur l'essence même de Carmen, afin de dégager la colonne vertébrale de l'œuvre et d'observer les éléments qui demeurent intangibles et sans lesquels le mythe de Carmen n'est plus identifiable. 24 1. Carmen d'Olivier Py, 2012. / 2. Carmen Jones d'Otto Preminger, 1954. / 3. Carmen, Delcourt, 2012. / 4. Blancanieves de Pablo Berger, 2012. RESSOURCES SUPPLEMENTAIRES L’OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE Bénéficiant d’une notoriété nationale et internationale importante, l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne se situe parmi les maisons d’opéra les plus dynamiques en termes de public. L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne est un établissement de la Ville de Saint-Étienne soutenu par le Conseil général de la Loire, la Région Rhône-Alpes et le Ministère de la Culture. Le Chœur Lyrique Saint-Étienne Loire et l’Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire placés sous la direction musicale de Laurent Campellone sont les acteurs essentiels d’une programmation qui sait également s’ouvrir aux artistes de tous les horizons. La vocation première de l’Opéra Théâtre de SaintÉtienne est une vocation lyrique : avec ses propres ateliers de construction de décors et de réalisation de costumes, l’Opéra Théâtre produit et coproduit chaque saison de nouvelles œuvres lyriques. L’institution a également pour mission de proposer au plus grand nombre une programmation riche avec une exigence de qualité dans les domaines de la musique classique (musique symphonique, musique de chambre...), de la danse, du théâtre, en allant également vers des formes aussi diverses que le cirque, le cabaret... L’Opéra Théâtre remplit également une mission capitale auprès du jeune public, proposant une saison dédiée, riche et variée. Enfin, dans le domaine de l’action culturelle et de la médiation, l’Opéra Théâtre, en relation avec de nombreux partenaires (universités, Éducation nationale, écoles de musique..), souhaite développer ses propositions aux personnes n’ayant pas spontanément accès à la culture (politique tarifaire, décentralisation des concerts...). Des visites guidées sont également organisées. Certaines représentations sont précédées 1 heure avant le début du concert d’un Propos d’avant-spectacle (présentation sous la forme d’une conférence). 25 PETITE HISTOIRE D’UNE PRODUCTION Le directeur détermine les différents "titres" qui seront programmés durant la saison. Il choisit ensuite un metteur en scène pour la production d’un opéra. Ce dernier associe un certain nombre de collaborateurs au projet dont un décorateur éclairagiste et un costumier. À ces derniers d’imaginer la conception des décors et des costumes tout en se conformant à des critères résolument déterminés : état d’esprit du spectacle, contexte historique et découpage acte par acte de l’ouvrage, caractéristiques techniques de la scène, budget consacré à la production. La première étape concrète du projet consiste généralement en la présentation des maquettes. Celles-ci sont paramétrées par le directeur technique qui connaît toutes les contraintes du théâtre, tandis que les responsables d’ateliers conseillent les concepteurs pour définir les techniques et les matériaux les plus adaptés à la réalisation des décors et costumes. 26 Le premier travail de construction se déroule dans les ateliers de menuiserie et de serrurerie qui réalisent chacun de leur côté les différents éléments du décor. L’assemblage du décor est ensuite confié à l’atelier de construction. Les parties monumentales sont conçues comme un puzzle qui doit pouvoir se manipuler et s’assembler en scène avec aisance et rapidité. Légers tout en étant rigides, les différents éléments sont confectionnés dans des dimensions qui leur permettent d’être transportés dans des containers pour les tournées à venir. Une fois la base structurelle du décor réalisée, celle-ci est habillée par l’atelier de décoration après avoir fait occasionnellement l’objet d’un équipement électrique (installation de moteurs, d’éclairages ou de dispositifs sonores). Son personnel, constitué de peintres et de sculpteurs issus, dans la majorité des cas, d’écoles des Beaux-Arts, doit être rompu à toutes sortes de techniques de reproduction : faux marbres, faux stucs, peintures de genre sur tous supports, fabrication d’ornements et d’accessoires (casques, boucliers, ceintures, parures, etc.) dans des matériaux divers : bois, acier, terre, matières synthétiques (mousse de polyuréthane expansée, résine, latex). Dans un décor, ne sont construites et peintes que les parties laissées apparentes au public. L’aspect donné aux différents accessoires répond aux critères de la vraisemblance et de l’illusion. L’art des ateliers de création d’un théâtre est un art du faux : tel chaudron de cuivre martelé est fabriqué en mousse, tel socle de granit a pour support une armature de fer ou de bois, elle-même recouverte de toile plissée peinte alors en trompe-l’oeil, etc. Une fois achevé l’ornement du décor, celui-ci est installé sur la scène pour effectuer les essais d’éclairage. Certaines retouches sont apportées par la suite : estompage d’une colonne trop brillante, rehaussements de couleur d’un accessoire, finition des joints des éléments à assembler. Pour la confection des costumes, le costumier procède à l’échantillonnage des étoffes, de leurs coloris, de l’harmonie qu’elles peuvent générer une fois assemblées. Parfois, lors d’exigences particulières, certains tissus font l’objet d’une fabrication spéciale tandis que d’autres sont retravaillés à seule fin de provoquer un effet singulier. Transformations des couleurs, modifications de la texture : la réalisation de costumes de scène constitue un travail artisanal où chaque pièce mérite une attention particulière pour s’adapter au mieux à la personnalité de l’interprète qui la portera. Une fois les textiles sélectionnés, l’élaboration du patron de chaque costume, ainsi que la coupe des tissus et leur assemblage, sont effectués sur mannequin. Après un essai en l’état, le costume est à nouveau ouvragé et se trouve agrémenté d’accessoires, de bijoux et différents autres ornements, jusqu’à trouver son aspect quasi définitif. De la même façon que pour le décor, les costumes nécessitent réajustements et retouches jusqu’aux dernières répétitions. Dans tous les cas, tous les éléments de décoration et de costumes réalisés pour un spectacle sont répertoriés et classés afin que lors des représentations aucun incident ne puisse venir altérer le déroulement du spectacle. C’est souvent au lendemain de la “générale” que le travail de création s’achève tout à fait. Atelier de fabrication des costumes Atelier de constructuion des décors : menuiserie Atelier de construction des décors : serrurerie Atelier de construction des décors Représentation de La Princesse de Trébizonde (mai 2013- Opéra Théâtre de Saint-Étienne) 27 Montage des décors sur le plateau du Grand Théâtre Massenet ANNEXES VOIX ET TESSITURES Une voix pour un personnage Les différents registres de la voix humaine s’adaptent par leur extension, leur timbre, leur caractère et leurs capacités techniques à différents genres de personnages. Le choix que fait le compositeur est donc très important pour que le rôle incarné par le chanteur soit crédible. Voix de femmes 28 Soprano C’est la voix la plus aiguë chez les femmes. Il existe plusieurs caractères de voix. La soprano "colorature" : capable de faire des vocalises rapides et de monter dans les extrêmes aigus du registre. Ce sont généralement des rôles de magiciennes, de poupées, de personnages enchantés en lien avec le surnaturel et le monde des dieux. La soprano "lyrique" : une voix claire et expressive qui s’adapte aux personnages des amoureuses, des jeunes filles. La soprano "dramatique" : elle a une couleur obscure, veloutée idéale pour incarner des personnages plutôt graves comme les reines, les femmes fières ou d’âge mûr. Personnage de soprano très connu : la Reine de la Nuit (La Flûte enchantée). Mezzo-soprano C’est la voix moyenne chez les femmes. La voix de mezzo s’adapte aux personnages de jeunes garçons, de femmes séduisantes ou à des personnages au caractère tragique. Personnage célèbre de mezzo très connu : Carmen (Carmen) Alto C’est une des voix féminines les plus graves. C’est une voix souvent utilisée pour personnifier des nourrices, des vieilles dames ou des guerriers. Il existe une voix encore plus grave, c’est celle de contralto. Voix d’hommes Ténor C’est une des voix les plus aiguës chez les hommes (on trouve également une voix encore plus aiguë : celle de contre-ténor). Selon la couleur et le caractère de la voix, on distingue le ténor "léger", "lyrique" ou "dramatique". C’est souvent la voix du ténor qui incarne les héros à l’opéra. Ténors célèbres : Roberto Alagna, Luciano Pavarotti, Placido Domingo... Baryton C’est la voix moyenne chez les hommes. Les rôles attribués au baryton sont par exemple : Comte Almaviva (Les Noces de Figaro), Barbe-bleue, Falstaff, Pelléas. Barytons célèbres : Dietrich Fischer-Diskau, José Van Dam... Basse C’est la voix la plus grave chez les hommes. Souvent la voix de basse incarne des personnages terribles comme des démons, des hommes méchants, parfois aussi la basse représente la voix de Dieu. COMPOSITION DE L'ORCHESTRE Trompettes Trombones Cors Piano Harpe Violons II Violons I Clarinettes Bassons Flûtes Hautbois Altos Chef Tubas Contrebasses Violoncelles GLOSSAIRE Accelerando Tonalité Terme italien désignant une accélération progressive du mouvement à un temps donné de la partition. Étendue d’une mélodie entre sa note la plus grave et sa note la plus aiguë. Une tonalité se définit comme un monde sonore. Dans cet ensemble de sons, une gamme choisie fait autorité et sert de base à l’écriture mélodique et harmonique. La tonalité peut être de do, de fa, de la, etc., elle peut être majeur ou mineur et permet donc de multiples visages et sensations sonores. Crescendo Trilles Terme italien désignant une augmentation progressive de l'intensité sonore, allant par exemple de la nuance piano (doux) à la nuance fortissimo (très fort). Alternance très rapide entre deux notes conjointes (ex : mi et fa) utilisée comme ornement mélodique avant de s’arrêter sur la note suivante. Fortissimo Unisson Terme italien désignant une nuance d’intensité sonore et signifiant « très fort » (par opposition au pianissimo). Technique musicale consistant à faire chanter ou jouer à tous les exécutants, la même ligne musicale et le même rythme parfaitement en même temps. Ambitus Gamme tzigane Gamme spécifique proposant un agencement des sons différents de celui de la gamme majeure ou mineure et produisant des couleurs sonores orientalisantes et dansantes. Opérette BIBLIOGRAPHIE À sa naissance, l'opérette est un genre théâtral qui incorpore quelques chansons populaires. Au XIXe siècle et notamment sous l'impulsion d'Offenbach, l'opérette gagne en envergure et vise désormais une forme de critique sociale, impliquant la composition d'une véritable partition qui alterne numéros chantés, dansés, et dialogues parlés. Sur Carmen Carmen, L'Avant-Scène Opéra n°26, Paris : Éditions Premières loges, 2007. MAINGUENEAU, Dominique, Carmen, les racines d'un mythe, Paris : Sorbier, 1985. MERIMEE, Prosper, Carmen, Paris : Larousse (Petits classiques), 2008. Seconde augmentée Sur Bizet LACOMBE, Hervé, Georges Bizet, Paris : Fayard, 2000. THIEBLOT, Gilles, Georges Bizet, Paris : Bleu nuit, 2012. La seconde augmentée est un intervalle, c'est à dire une distance sonore entre deux sons. Entre do et ré, par exemple, l’intervalle est petit, tandis qu'entre do et si il est très grand (do, ré, mi, fa, sol, la, si…). Chaque intervalle possède sa couleur propre. La seconde augmentée, de son côté, révèle un caractère dansant et une couleur orientalisante. Sistre Instrument de musique venu de l'Égypte antique formé d'un morceau de bois en arc de cercle, sur lequel sont positionnés des tringles agrémentées de coques de fruits ou de rondelles métalliques s'entrechoquant lorsque l'instrument est secoué. Le sistre, muni autrefois d'un bâton pour l'empoigner, est aujourd'hui devenu le tambour de basque, composé d'une peau tendue sur un cadre agrémenté de petites cymbalettes métalliques. Sur l'opéra, ses métiers et la mise en scène BOISSON, Bénédicte ; FOLCO, Alice ; MARTINEZ, Ariane, éd., La mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, Paris : puf, 2010. BOLL, André, L’Opéra, spectacle intégral, Paris : Olivier Perrin, 1963. L'envers du décor, ouvrage collectif, catalogue de l'exposition du Centre National du Costume de Scène, Montreuil : Gourcuff Gradenigo, 2012. 29 30 Retrouvez l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne sur internet www.operatheatredesaintetienne.fr Jardin des Plantes - BP 237 42013 Saint-Étienne cedex 2 [email protected] Locations / réservations du lundi au vendredi de 12h à 19h 04 77 47 83 40