Combustion associée aux terrils miniers de la région Nord-Pas

Transcription

Combustion associée aux terrils miniers de la région Nord-Pas
RESUME
Des « coal fires » (combustion de charbons) se produisent pratiquement partout dans le monde
que ce soit dans des mines, des remblais ou des terrils riches en charbon. Ils entraînent des phénomènes
particuliers qui sont autant de risques potentiels pour l’environnement : émissions nocives de gaz et de
particules, affaissements de terrain, métamorphisme thermique et fusion des sédiments
(pyrometamorphics : porcellanites, slags, paralavas) et formation de produits secondaires susceptibles de
contribuer à la pollution des nappes phréatiques et des sols.
Des mesures et analyses détaillées des gaz émis par la combustion ont été entreprises in situ
sur deux terrils miniers de la région Nord-Pas-de-Calais (Terrils n°76 Avion et 83 Fouquières-les-Lens).
La nature des différents gaz émis a été déterminée à l’aide d’un laboratoire mobile et une méthode
particulière de piégeage et d’analyse des gaz (chamber method). Leurs teneurs ont été mesurées et
comparées par rapport à la TLV (Threshold limit value) qui fixe leur seuil de nocivité pour la santé
publique et/ou de risque pour l’environnement. Le résultat le plus significatif concerne la teneur en CO2,
7%, qui excède de beaucoup la TLV. SO2 (<5 à 25ppm) et NOx (8 à 25ppm) sont également au-dessus de
la TLV. CO, avec des teneurs de l’ordre de 20-110 ppmv, est, pour sa part, le double ou proche de la
limite de la TLV. Les teneurs en CH4, le principal hydrocarbure détecté, sont comprises entre 47 et 260
ppm mais restent en dessous de la limite où il y a risque d’explosion. L’accès au public ne devrait pas être
pour autant autorisé, en raison de la faible teneur en O2 (<1% à 19%) autour de certains points d’émission
des gaz dans ces sites.
21 phases minérales ont été identifiées dans les dépôts qui se forment sur les débris de schistes
thermiquement altérés autour des points d’émission des gaz. Les minéraux les plus abondants sont la
thénardite et la bloedite, suivis de la konyaite, la glaubérite, l’aphthitalite, la langbeinite, l’arcanite,
le gypse, l’epsomite, l’hexahydrite, l’alunogen, la kalinite, la pickeringite, l’haltrichite, la
tschermigite, la mascagnite, la lecontite, de même que des halides (sel d’ammoniac, halite), du soufre
natif et deux nouveaux sulfates. Les éléments chimiques majeurs qui entrent dans la composition de ces
minéraux sont : S, N, H, O, Cl, Mg, K, Na, Al, Ca, Fe et Mn.
Ces phases minérales ainsi que l’origine du processus de leur formation sont analogues aux
minéraux qui se forment autour des fumerolles sur les volcans. Ces minéraux résulteraient de
l’altération hydrothermale de débris sédimentaires (schistes Carbonifères) par des solutions aqueuses
légèrement acides (pH entre 4 et 5,5) suite à la combustion. La plupart des minéraux précipiteraient dans
un environnement saturé en vapeur d’eau, à des températures comprises entre 40 et 265°C.
Le processus de minéralisation s’est effectué par étapes à partir d’une solution chimique
complexe. Le “Sel d’ammoniac” s’est formé par sublimation tandis que thénardite, bloedite, aphthitalite,
langebeinite, arcanite, glauberite, halite, gypse, epsomite, pickeringite, halotrichite, alunogen,
tschermigite, mascagnite et soufre natif se sont formés par condensation. La konyaite et l’hexahydrite
résulteraient de la déshydratation de certains dépôts in situ ou après l’échantillonnage à partir
respectivement de la bloedite et de l’epsomite. La kalinite proviendrait de la déshydratation de l’alun et la
lecontite pourrait être un produit d’altération de la phase native “ammonium aphthitalite”.
L’étude des inclusions fluides de la thénardite montre que sa cristallisation s’est effectuée à basse
température (≤150°C) dans un milieu aqueux de forte salinité dominée par Na2SO4 et NaCl pour
l’assemblage thenardite-bloedite-aphthitalite. Toutes les inclusions observées ont une origine primaire ou
˝pseudosecondaire˝.
Les sulfates et les halides identifiés sur les terrils sont solubles dans l’eau. Leurs dépôts sont donc
rapidement dissous par la pluie. Cela pourrait donc avoir un impact négatif sur la santé publique ainsi que
sur l’environnement. En effet, les sulfates contiennent, en plus des éléments S et N, des traces de métaux
lourds : As, Ba, Cu, Mo, Cs, Ni, Rb, Th, U... La dissolution des sels produits par les phénomènes d’autocombustion pourrait être des facteurs potentiels de pollution des nappes phréatiques et des sols qu’ils
restent à apprécier.
La plupart des sulfates décrits dans ce travail ainsi que l’étude portant sur les inclusions fluides
dans la thénardite constituent une première approche originale des effets induits par les gaz émis des
terrils et des mines de charbon en auto-combustion.
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