Intérêt de l`étude des écosystèmes fossiles - Quentin Gautier
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Intérêt de l`étude des écosystèmes fossiles - Quentin Gautier
UMR6553 ECOBIO Université de Rennes 1 Intérêt de l’étude des écosystèmes fossiles en Ecologie Rapport bibliographique de Master 2 Ecologie-Environnement Parcours Ecologie Fonctionnelle, Comportementale et Evolutive Présenté par Quentin Gautier Encadrant du stage : Monsieur Philippe Vandenkoornhuyse Année universitaire 2009-2010 Sommaire Introduction ............................................................................. 1 Le pollen et l’analyse palynologique ....................................... 3 Outil d’étude de l’environnement et du climat au Quaternaire ......................... 3 Vers une meilleure compréhension de la mise en place des écosystèmes actuels................................................................................................................. 5 Limites de l’approche palynologique ................................................................ 6 Travaux en paléoécologie ........................................................ 8 Paléontologie d’environnement : détermination des facteurs biotiques et abiotiques des paléoécosystèmes ....................................................................... 8 Paléogéographie et évolution : approche pluridisciplinaire ............................ 10 Nouvelles stratégies ............................................................... 11 Le pyroséquençage de masse ........................................................................... 12 Enjeux scientifiques ......................................................................................... 13 Conclusion ............................................................................. 14 Liste des figures Figure 1 : Evolution de 1775 à 2000 des proportions estimées de la couverture terrestre à partir des séries chronologiques intégrées par référence à la carte de 1775 (d’après Petit & Lambin, 2002) ............................................................................................................................ 4 Figure 2 : Biomes dérivés des pollens et plantes macrofossiles datant de 6000 ans BP (d’après Jolly et al., 1998a) ...................................................................................................................... 6 Figure 3 : Représentation schématique des grands types de cénogrammes (d’après Montuire & Desclaux, 1997)...................................................................................................................... 9 Figure 4 : Principe du pyroséquençage : technique d’addition séquentielle de nucléotides en temps réel (d’après Lamoril et al., 2008) ................................................................................. 12 Pour réaliser le plus correctement possible mon rapport bibliographique, je suis allé puiser les informations scientifiques dont j’avais besoin dans divers médias. Celui que j’ai le plus usité est la base de données Web of Sciences que l’on peut retrouver dans ISI Web of Knowledge. En entrant les mots clefs voulus tels que : «ancient DNA», «fossil», «paleoecosystem», etc. ou bien les noms d’auteurs importants dans les domaines qui m’intéressaient, j’ai pu obtenir l’essentiel de mes publications (articles, reviews). Le moteur de recherche Google m’a également servi pour obtenir parfois (mais très rarement) des publications scientifiques que Web of Sciences ne pouvaient me fournir dans son intégralité. En outre, Google a aussi été un bon moyen pour obtenir des informations complémentaires. La bibliothèque universitaire m’a permis, quant à elle, de me procurer des ouvrages généraux (la palynologie, la paléoécologie) réalisés par des chercheurs spécialisés dans le domaine scientifique désiré afin d’accroitre ma compréhension des éléments de base essentiels à mon objet d’étude. Enfin, mes lectures et mes discussions hors cursus scolaire ont également été mis à contribution pour élaborer ce rapport. Introduction De nos jours, l’idée que les fossiles, et plus généralement les environnements passés, reflètent l’Histoire est aujourd’hui si courante que nous avons tendance à y voir une vérité de toujours (Goodfriend et Gould, 1996) or cela n’a pas été toujours le cas. Plusieurs savants grecs de l’Antiquité, tels le poète et philosophe Xénophane, l’historien Hérodote ou le géographe Strabon, interprétèrent de façon correcte la nature des fossiles. Pourtant, c’est la conception erronée d’Aristote (fossiles façonnés directement dans la boue à partir d’une « force formatrice » mystérieuse) qui, pendant deux mille ans, fit référence. Cependant, à partir du début du XIXe siècle, la véritable nature des fossiles fut réellement démontrée grâce à l’établissement des premiers principes de la géologie moderne. Mais c’est principalement le livre L’origine des espèces, de Charles Darwin publié en 1859, qui bouleversa les idées reçues en sciences biologiques, notamment en paléontologie, zoologie et biogéographie, allant même au-delà (au niveau philosophique et religieux) avec la théorie de la sélection naturelle. Dorénavant, les données fossiles sont regardées et appréhendées de manières totalement différentes. Les scientifiques peuvent désormais essayer de reconstituer les environnements passés à la lumière de l’Evolution. 1 Les études historiques sur les écosystèmes se justifient d’emblée par le fait que les écosystèmes actuels résultent d’une évolution longue de 3,8 milliards d’années (Gall, 1995). C’est ainsi que l’évolution de la structure des écosystèmes est étudiée à différentes échelles de temps et souvent de manière différente par les écologues, les systématiciens, les paléontologistes, les préhistoriens et les archéozoologues. C’est malgré tout un sujet qui unit toutes les disciplines qui traitent du vivant et de son environnement. Les écologues mettent l’accent sur les structures et les processus actuels et subactuels dans les écosystèmes, les systématiciens infèrent l’histoire phylogénétique des taxons et de leur fonction dans les écosystèmes, les paléontologues, les préhistoriens et les archéozoologues s’attachent d’avantage à documenter directement l’évolution des écosystèmes par les documents diachroniques mis à jour (Grandcolas, 1998). L’origine de la biodiversité et les caractéristiques qu’elle a héritées du passé conditionnent bien souvent son maintien. En d’autres termes, aucune étude sur les systèmes actuels ne peut aboutir ou amener à une meilleure compréhension, même sur un unique plan fonctionnel, sans que l’on ait connaissance de l’origine des taxa, des fonctions ou des milieux concernés (Grandcolas, 2003). Cette compréhension se place donc dans un contexte systémique où les organismes ne sont pas considérés comme des entités nécessairement indépendantes les unes des autres ou de l’environnement. Il s’agit alors de comparer les écosystèmes présents et passés sur des sites écologiquement équivalents (même climat et/ou même région géographique) à travers leurs caractéristiques à différentes époques, actuelles, subactuelles ou passées (Walker et Laporte, 1970 dans Gall, 1995). Le présent sert donc de référentiel pour l’écosystème passé. Même si l’écosystème présent peut ne pas correspondre à un écosystème existant dans le passé, les grandes lois qui régissent sa structure permettent a minima de se « référencer » à certains des facteurs que l’on cherche à interpréter dans l’écosystème passé et permet des interprétations fonctionnelles par analogie (Najt & Grandcolas, 2002). Plusieurs champs de recherche peuvent permettre d’apporter des éléments de réponse pour la reconstitution des paléoécosystèmes. Le but de ce rapport bibliographique sera de montrer la pertinence de l’étude des écosystèmes fossiles en Ecologie en réalisant non pas un éventail complet des différents actions de recherches (le domaine étant très vaste ce qui risquerait d’aboutir à un catalogue d’approches) mais en se focalisant principalement sur certains champs d’applications qui mettent en évidence, et de manière significative, l’intérêt que suscite ces paléoenvironnements pour de nombreuses branches des sciences biologiques. Ce rapport s’articulera ainsi, selon une chronologie bien définie, autour de plusieurs champs de recherche n’utilisant pas les mêmes outils mais étant néanmoins complémentaires pour la reconstitution des environnements passés. Il s’agira donc d’utiliser une chronologie historique des domaines et outils d’études portant sur les paléoécosystèmes pour mettre en lumière l’évolution et les progrès réalisés dans la compréhension 2 et l’utilisation de ces écosystèmes fossiles grâce notamment à l’augmentation de l’échelle du pas de temps des observations scientifiques, offrant au domaine de l’écologie la possibilité d’accéder à des informations à la fois diachronique (évolution et interactions) et synchroniques (conséquence d’une perturbation environnementale) pouvant ainsi permettre de valider des hypothèses de façon plus robuste. Le pollen et l’analyse palynologique Parmi les différents fossiles qui permettent d’étudier l’histoire des écosystèmes, le grain de pollen est un fossile très remarquable de par sa taille et son aspect. De cette cellule, ne mesurant que quelques microns et émis par les plantes à fleurs ou à cônes pour assurer leur reproduction, seule l’enveloppe externe, l’exine, se fossilise de part sa composition chimique complexe constituée d’un polymère résistant, la sporopollénine (Lézine, 2008). Il présente, en outre, une telle variété de forme que l’on peut aisément reconnaître la plante ou la famille de plante qui l’a émise et reconstituer finalement l’environnement végétal contemporain de l’échantillon géologique que l’on veut étudier (Lézine, 2008). Le pollen est donc un instrument puissant de reconstitution de l’histoire de l’évolution. C’est d’ailleurs l’outil le plus employé jusqu’à présent pour reconstituer les modifications environnementales et climatiques dans les études du Quaternaire (Edwards & Macdonald, 1991), même si de nouvelles méthodes émergent (voir page 11). Outil d’étude de l’environnement et du climat au Quaternaire La palynologie intervient largement dans l’étude de l’évolution des plantes. Doyle (1976 dans Lézine, 2008) a démontré que la morphologie des grains de pollen des plantes à fleurs s’était diversifiée au cours du Crétacé passant par la modification morphologique des types de grains de pollens au cours des temps géologiques. Grâce à cette diversification des grains de pollen, la méthode palynologique est fondée sur le principe que le présent est la clé du passé. La palynologie quaternaire a ainsi fourni plusieurs milliers d’enregistrements de la végétation passée principalement en Europe et en Amérique du Nord depuis les travaux pionniers de Lennart Von Post qui élabora en 1916 les touts premiers diagrammes polliniques à Oslo (Boyd et Hall, 1998). L’interprétation des données polliniques sous forme de diagramme peut mener à différentes activités de recherche dans le domaine de l’Ecologie telles que la diversité floristique, la 3 quantification du changement climatique (Elenga et al., 1991) etc. mais on se focalisera plus précisément sur la modification de l’usage des terres qui est un sujet d’une importance cruciale pour l’impact qu’il produit sur la biodiversité. D’ailleurs, la question de l’action anthropique de l’homme sur le paysage s’est posée dès les premières analyses palynologiques en Europe. Petit et Lambin (2002), par exemple, ont procédé à une reconstitution historique du changement de l’usage des terres en comparant des cartes de différentes années avec des données de télédétections dans les Ardennes belges. Les résultats obtenus ont révélé que la couverture terrestre et la structure du paysage ont été soumis à des profonds changements sur le territoire de Lierneux (Fig. 1). Les principales modifications observées au niveau de la couverture du sol sont l’expansion des prairies et des terres agricoles (environ 45% en 2000 contre environ 15% en 1775) et le reboisement avec des espèces de conifères (environ 50% en 2000 contre 0% en 1775) au détriment des arbres feuillus, des landes et des prés humides, conduisant à une structure plus fragmentée du paysage. Figure 1 : Evolution de 1775 à 2000 des proportions estimées de la couverture terrestre à partir des séries chronologiques intégrées par référence à la carte de 1775 sur le territoire de Lierneux (d’après Petit & Lambin, 2002) Vers la fin de l’Holocène, l’homme intervient donc de façon de plus en plus visible sur son environnement naturel et son emprise ancienne sur le paysage a profondément modifié l’usage des terres. Pèlachs et al. (2009) montrent l'impact anthropique positif réalisé sur une forêt de sapin de la péninsule ibérique à la faveur de la population de hêtres. En effet, la déforestation due aux activités agricoles a exercé une pression sélective sur la forêt et a permis l'expansion de Fagus sylvatica jusqu’à un maximum entre 2000-1300 ans « before present » (BP). L’augmentation de l’intensification de la pratique agricole à partir de 1300 BP a été telle que la population de hêtres a disparu vers 800 BP. Les données palynologiques de cette région ont ainsi permis de conclure que l'impact humain, et non le climat, est le facteur d'influence le plus important dans le développement des forêts de hêtres. Il existe bien évidemment beaucoup 4 d’autres exemples dans la littérature scientifique (Cruise et al., 2009 ; etc.). Néanmoins, il devient dans certains cas difficile de discerner la part du climat de celle de l’Homme dans les modifications paléoenvironnementales enregistrées par les diagrammes polliniques (Prentice et al., 1998) car différents paramètres confondant peuvent se combiner. Par exemple, Keller et al. (2002) ont combiné l’analyse palynologique à la modélisation des écosystèmes dans le nord de l’Italie et ont prouvé que le climat et la dynamique interne des écosystèmes étaient les principaux facteurs ayant influencé l’évolution des paysages jusqu’à 7000 BP, l’influence de l’homme dominant après. Par contre, là où l’impact anthropique sur l’environnement n’est que très récent, notamment en Afrique, voir même dans certains lieux en Amérique du Sud et en Océanie, le climat et les paramètres environnementaux associés a vraisemblablement joué un rôle majeur dans la dynamique spatiotemporelle des changements des écosystèmes (Jolly et al., 1998b ; Prieto, 2000) en modifiant la richesse spécifique de la flore locale voir même provoquant de grandes extinctions lors de grandes crises biologiques (Pole & Vajda, 2009). Vers une meilleure compréhension de la mise en place des écosystèmes actuels Le principal atout de la méthode palynologique réside dans le fait que la palynologie concerne un grand nombre d’espèces végétales dont les grains de pollen se retrouvent dans un même échantillon, chacune des espèces possédant ses propres particularités biologiques et écologiques de même que ses propres modes de temps d’adaptation au changement de l’environnement et du climat (Boyd et Hall, 1998). A partir d’un assemblage palynologique du passé, il est donc non seulement possible d’étudier chaque espèce de plante individuellement mais aussi l’ensemble de l’association végétale qu’elle forme d’autant plus que le pollen est produit abondamment par les plantes. De même, si l’on met côte à côte plusieurs sites polliniques pour une période donnée, on peut reconstituer l’environnement végétal d’une région encore plus large, d’un continent (Jolly et al., 1998a ; Fig. 2) ou de la totalité du globe (Harrison et Prentice, 2003). Lorsque les données sont suffisamment nombreuses, on peut également reconstituer la biogéographie des plantes en utilisant des données diachroniques vraies et expliquer la composition actuelle des écosystèmes, notamment forestiers (Brewer et al., 2002). En outre, dénombrer les grains de pollen déposés au fond des lacs ou des océans et les identifier permet aussi de comprendre comment les paysages actuels se sont formés et comment les plantes se sont adaptées aux variations des climats anciens (Hooghiemstra et al., 2006). L’analyse palynologique s’intéresse ainsi à différentes échelles de temps et d’espace. On voit alors tout l’intérêt de cette discipline des sciences de l’environnement car, en se référant au passé, on comprend comment les 5 plantes s’adaptent aux changements climatiques, à quelle vitesse elles migrent vers des lieux plus favorables à leur reproduction et à leur développement. Enfin, ce type d’approche permet de comprendre et d’interpréter les règles de succession par l’effet de contraintes anthropiques, de contraintes d’interactions biotiques et de variations climatiques (Boyd et Hall, 1998). Par ces différentes résolutions temporelles, la palynologie permet donc d’étudier les variations à long terme de l’environnement et du climat comme la dernière période glaciaire (Prieto, 2000 ; Subally & Quézel, 2002) mais aussi les variations rapides, liées à des évènements catastrophiques ponctuels ou à des crises climatiques d’une ou plusieurs décennies. Figure 2 : Biomes dérivés des pollens et plantes macrofossiles datant de 6000 ans BP (d’après Jolly et al., 1998a) Limites de l’approche palynologique Parmi les « paléo-marqueurs » de l’environnement et du climat, l’analyse palynologique présente donc un certain nombre d’atouts, mais également de limites qu’il faut savoir saisir et quantifier (Nielsen & Vad Odgaard, 2003) si l’on veut interpréter correctement les données. L’outil palynologique se voit ainsi limité par l’utilisation même du grain de pollen en tant que fossile. En effet, les enregistrements palynologiques complets couvrent, pour la plupart d’entre eux, seulement les périodes les plus récentes de l’histoire de la Terre : l’Holocène et la dernière glaciation (soit du dernier maximum glaciaire, il y a 21000 ans, jusqu’à aujourd’hui). Au-delà, des données polliniques existent également mais avec des séquences d’échantillonnages discontinues et incomplètes, ce qui nuit à la qualité des interprétations. Certaines séries, en marge de la palynologie, sont néanmoins très longues et plutôt bien conservées comme les enregistrements marins des grands programmes internationaux comme ODP (Ocean Drilling Project) qui 6 recoupent plusieurs millions d’années (Oosting et al., 2006) ou les affleurements géologiques qui ont donné accès en Afrique à des indications très précieuses sur l’environnement des tout premiers hominidés (Rettalack et al., 1990). Mais des longues séquences continues sont extrêmement rares en milieu continental à part quelques exceptions notables comme en Colombie ou certains sites ont livré des séries continues de plusieurs centaines de milliers d’années en allant même jusqu’à 3,5 millions d’années (Hooghiemstra, 1984 dans Lézine, 2008) ou bien des séries lacustres en Europe comme celles de Tenaghi Philippon (Tzedakis et al., 2006) ou du Velay (Beaulieu et al., 2006) qui ont donné accès à des enregistrements extrêmement détaillés d’un ou plusieurs cycles climatiques. Ainsi, l’échelle de temps est la principale limite de cette approche dans la majorité des cas d’études, du fait de données incomplètes. La reconstitution des écosystèmes fossiles devient donc extrêmement difficile, la plupart du temps, lorsque l’on se retrouve avec un pas de temps de plusieurs dizaines de milliers d’années. L’analyse palynologique est également confrontée à d’autres problèmes importants, et ce même dans les périodes les plus récentes. Tout d’abord, il faut garder à l’esprit que la méthode palynologique se base généralement sur des taxons polliniques qui ne correspondent que très rarement à des espèces botaniques proprement dites mais plutôt à un ensemble d’espèces d’un même genre ou d’une même famille dont les individus n’ont pas forcément les mêmes exigences environnementales (Lézine, 2008). De plus, au fur et à mesure des progrès des analyses palynologiques, de nombreuses situations qualifiées de « non-analogues », c'est-à-dire que la ressemblance entre les échantillons fossiles et les échantillons des données modernes est faible (Nielsen et Vad Odgaard, 2003), surgissent même dans le passé le plus récent des écosystèmes. Davis et Shaw (2001) démontrent, par ailleurs, que l’association des plantes à l’intérieur de l’écosystème n’a pas toujours été identique à l’actuelle. En outre, Keller et al. (2002) ont montré que différencier les effets du climat et de l’homme sur la dynamique de certains écosystèmes (forestiers ici) apparaît comme un défit majeur des sciences de l’environnement et surtout que ce défit ne peut être relevé par la seule approche palynologique. Enfin, si les assemblages fossiles donnent généralement des informations précises sur la diversité floristique il est difficile de percevoir de quelle façon la représentation quantitative d’un taxon reflète l’importance qu’il prenait dans l’environnement, comment étaient organisées les communautés végétales et quelle était leur place dans le paysage à l’échelle locale et micro-régionale (Vincens et al., 2006). Pour les aspects quantitatifs, l’hypothèse forte d’une relation linéaire entre émission de pollen et nombre d’individu d’une espèce et entre espèces doit être prise. De plus, l’hypothèse d’un état de conservation identique entre grains de pollen doit être émise. 7 Dès lors, Il parait nécessaire et primordial de faire appel à d’autres stratégies pour obtenir un champ d’application plus large, notamment en augmentant l’échelle temporelle des observations. La reconstitution des écosystèmes fossiles passe donc d’une analyse purement palynologique à la réalisation de travaux complémentaires, qui englobent et s’étendent dans divers champs de recherche allant de la physiologie à la biochimie la plus moderne. Ce type de travaux de recherche, possédant différents outils nécessaires pour parvenir à une reconstitution plus fine des paléoécosystèmes étudiés a été regroupé sous le terme de paléoécologie (Lawrence, 1974 dans Gall, 1995). Travaux en paléoécologie D’un point de vue général, la paléoécologie étudie les relations des êtres vivants fossiles avec leur milieu de vie, sous les aspects physico-chimiques (paléobiotope) aussi bien que biologiques (paléobiocénose). A un premier niveau d’observation, les rapports s’établissent donc avec l’environnement. Lawrence (1974 dans Gall, 1995) parle d’une paléontologie d’environnement, réunissant la paléoécologie et la taphonomie (diagenèse fossile). La première comprend les environnements qui ont caractérisé les organismes pendant leur vie alors que la seconde se rapporte aux environnements rencontrés par les vestiges d’organismes fossiles. Cependant à un second niveau d’observation, les travaux en paléoécologie soulignent principalement les rapports avec l’évolution d’une part et la paléobiogéographie d’autre part. Ils permettent de reconstituer les modes de vie et les conditions d’existence des organismes fossiles, d’interpréter les anciens milieux et leur dynamique, et impliquent une démarche fondamentalement pluridisciplinaire pour drainer et confronter les informations provenant de la paléontologie, de la sédimentologie, de la géochimie ou de la géologie structurale (Roger, 1970). Paléontologie d’environnement : détermination des facteurs biotiques et abiotiques des paléoécosystèmes La paléoécologie peut être considérée comme l’association de l’écologie actuelle avec la taphonomie. L'étude des faunes mammaliennes, notamment, a largement contribué à la connaissance des paléoenvironnements et de la dynamique climatique au cours du Quaternaire (Montuire et Desclaux, 1997). C'est donc à partir de plusieurs séquences d’inférence, que les processus de transformation des assemblages vivants passés vont pouvoir être reconstitués, en 8 essayant de s’affranchir au maximum des incertitudes liées aux processus taphonomique et d’échantillonnage. En effet, les faunes fossiles ne sont généralement pas le reflet exact de la faune originale (Van Kolfschoten, 1995) du fait qu’elles peuvent être affectées par différents facteurs tels que la prédation humaine préhistorique, les rapaces nocturnes concentrateurs de microfossiles ou encore les prédateurs accumulateurs d’ossements de macrofossiles (e.g. la hyène). Il faut donc tenir comptes de ces restrictions d’ordre taphonomique et prendre les faunes représentatives (Montuire & Desclaux, 1997). Il existe ainsi de nombreuses méthodes permettant de reconstituer les environnements et de déduire les conditions climatiques comme la méthode des cénogrammes (Legendre, 1986) qui est une représentation graphique des communautés de mammifères (Fig. 3). Selon le type de cénogramme (distribution continue, discontinue), le type d’environnement (fermé ou ouvert) et les conditions climatiques (arides ou humides) peuvent être caractérisés. Dans un habitat ouvert, les espèces de poids moyens sont rares voire absentes, tandis qu’elles sont abondantes dans un milieu fermé. Dans des conditions humides, les grandes espèces sont abondantes, tandis qu’elles sont rares en conditions arides. Il est donc possible de reconstituer l’évolution des environnements durant une période géologique en ayant l’avantage de prendre en considération l’ensemble de la communauté mammalienne (Legendre, 1986). Il est bien entendu nécessaire de la coupler avec d’autres méthodes d’analyses paléoécologiques complémentaires pour obtenir un meilleur reflet de la composition des habitats entre autres. Un des principaux résultats de ce type d’études c’est le constat général, à partir de l’installation des cycles glaciaires, d’une alternance de milieu plutôt fermé pendant les périodes interglaciaires et plus ouvert pendant les périodes les plus froides (Montuire & Desclaux, 1997). Figure 3 : Représentation schématique des grands types de cénogrammes (d’après Montuire & Desclaux, 1997) L’étude des microfossiles (diatomées, foraminifères, coccolithes…) est également très employée en paléoécologie car elle permet de répondre à des problèmes biologiques (étude de la notion d'espèces, lois de l'évolution, origine de la vie et disparition de la vie lors de certaines 9 crises…) et ce sur des échelles de temps allant jusqu’à plusieurs dizaines de millions d’années. On peut citer, comme exemple parmi un nombre considérable de publications sur le sujet, l’étude de Goubert et al. (2001) sur des foraminifères ou des diatomées fossilisés au Sud-est de l’Espagne qui a permis de rendre compte des changements paléoenvironnementaux survenus lors de la «crise de salinité Messénienne» (fin du Miocène, environ 7 millions d’années) et de son impact sur la biodiversité benthique. Les auteurs ont montré que pendant cette période évaporitique, les conditions écologiques dans la colonne d’eau étaient favorables par intermittence au développement des organismes marins. De plus, le faible pourcentage d’espèces éteintes (5%) à la limite Messénien/Pliocène associé aux occurrences de foraminifères benthiques dans l’unité évaporitique, a indiqué que l’infralittoral n’a pas été complètement modifié et/ou modifié pendant cette crise. Paléogéographie et évolution : approche pluridisciplinaire Les liens existant entre les organismes anciens et leur milieu sont un sujet complexe et multidisciplinaire. Par conséquent de nombreux fossiles et assemblages se sont avérés être des indicateurs sensibles du milieu de dépôt, de la paléobathymétrie, de la température de l'eau et de la salinité etc. (Gall, 1995) comme le montre, par exemple, l’étude sur les assemblages monospécifiques du trilobite Balcoracania dailyi réalisée par Paterson et al. (2007) dans des strates du Cambrien en Australie. En reconstituant certaines paléocommunautés, il a été possible de reconstruire en partie les facteurs abiotiques régissant les paléoécosystèmes étudiés. En effet, ces auteurs ont monté, à l’aide de distributions taille-fréquence couplées à des données taphonomiques, que l’assemblage de fossiles représentait une population vivant dans un environnement soumis à des variations physico-chimiques liées au balancement des marées influencé par la lagune. Les assemblages fossiles peuvent également être des indicateurs pertinents de l’évolution biologique. Martinez-Delclos et al. (2004) ont montré que des processus taphonomiques (dans le cas présent des groupes d’insectes préservés dans de l’ambre ou des roches carbonatées) peuvent avoir un impact majeur sur les études phylogénétiques et paléobiogéographiques, en déterminant plus précisément le véritable moment de l'origine et de l'extinction des groupes étudiés et en identifiant les radiations et les extinctions majeures survenues comme lors de la crise Permien-Trias. Ainsi, ces études taphonomiques peuvent être essentielles à la reconstruction des assemblages de fossiles, à l'interprétation des conditions de sédimentation et de l'environnement où les espèces vivent et meurent, et à l'investigation des interactions entre les espèces étudiées et les autres organismes (Martinez-Delclos et al., 2004). Plus généralement, les interprétations paléoécologiques issues des répartitions de fossiles 10 dépendent donc souvent des comparaisons établies avec les espèces et les peuplements vivants pertinents et de la détermination de liens existant entre les fossiles et les roches qui les renferment. Toutes ces données provenant de la paléoécologie sont considérables et si on les utilise conjointement avec d'autres données, elles peuvent permettre d'améliorer d'une manière spectaculaire les reconstitutions paléoenvironnementales ou paléogéographiques (Smith, 1989). Le parallélisme de la paléoécologie avec l'écologie ne doit néanmoins pas faire oublier que certaines notions clés de celle-ci, en particulier celle de biomasse, sont peu utilisables en paléobiologie car impossibles à traduire en chiffres précis. Au contraire, les modifications subies par les différents milieux au cours des temps géologiques apportent une dimension nouvelle, diachronique, qui est celle de l'évolution du monde inorganique (Grandcolas, 2003). Dans tous les cas, des analyses multiproxies sont à privilégier, puisque chaque discipline intervenant en paléoécologie présente des cadres spatio-temporels différents, ce qui les rend complémentaires. Cependant, nous sommes loin de disposer d’un nombre suffisant de données (Grandcolas, 1998), même en ce qui concerne les bas niveaux de la hiérarchie (niche), qui sont les plus étudiés, ou pour les milieux continentaux (lacustres et peuplement végétaux) qui ont donné lieu à de nombreuses études. Le développement de nouvelles méthodes de recherches s’avère alors absolument nécessaire pour étudier l’évolution des écosystèmes en particulier pour pouvoir tester de façon robuste des théories ou hypothèses d’écologie déduites le plus souvent d’images instantanées contemporaines (séries temporelles très étroites), donc essentiellement à partir des données synchroniques, où l’adaptation par exemple ne peut pas être considérée de façon parfaitement ad hoc. Nouvelles stratégies Depuis la description de la structure de l’ADN en 1955 jusqu’à nos jours, la biologie a connu une suite de remarquables progrès scientifiques liés à des avancées technologiques dont le séquençage constitue l’un des évènements clés. Ce dernier s’est ensuite démocratisé dans de nombreux laboratoires d’écologie (Lamoril et al., 2008). L’ADN ancien (ADNa) a reçu, quant à lui, beaucoup d’attention à partir du milieu des années 1980, lorsque la première séquence d’un animal éteint a été découverte (Gugerli et al., 2005). Depuis, la majorité des études sur l’ADNa, ou des biomolécules, porte sur les animaux à l’exception des plantes cultivées retrouvées sur les sites archéologiques (Gugerli et al., 2005). Cet ADNa présente une particularité : il est 11 généralement assez fortement dégradé. En dépit de cette dégradation, des cibles génétiques courtes peuvent être analysées et les techniques nouvelles de séquençage développées à partir de 2005, dont le pyroséquençage, constituent un progrès technologique révolutionnaire dans l’approche de la reconstitution de nombreuses communautés d’espèces appartenant à différentes paléobiocénoses car elles sont bien adaptées à l’analyse de ces fragments courts. Le pyroséquençage de masse Il s’agit d’une méthode permettant d’analyser la synthèse d’ADN cible en temps réel. Le principe de base de la méthode consiste à lier une amorce à l’ADN cible de taille inférieure à 500 pb, puis à ajouter séquentiellement et dans l’ordre une base à partir de l’extrémité de l’amorce (Shapiro, 2008). Chaque base est marquée par un fluorophore différent dont le signal est mesuré par bioluminescence à condition que la base complémentaire de la cible soit incorporée (Lamoril et al., 2008). La séquence est ainsi déduite en fonction de l’ordre d’incorporation des nucléotides sur l’ADN complémentaire de la cible néosynthétisée (Fig. 4). Quatre enzymes sont nécessaires pour la réaction : une ADN polymérase, une ATP sulfurase, une luciférase et une apyrase. Cette méthode performante, totalement automatisée, permet de séquencer de courts fragments d’ADN. L’arrivée d’automates, tel que le 454 (société Roche) permettant le séquençage massif parallèle, a engendré le développement de cette technique à une échelle nouvelle ouvrant ainsi à la possibilité d’accéder à des questions de recherche qui ne pouvaient pas être envisagées précédemment (Lamoril et al., 2008). Figure 4 : Principe du pyroséquençage : technique d’addition séquentielle de nucléotides en temps réel (d’après Lamoril et al., 2008) Grâce à ces progrès de la biologie moléculaire, l'analyse de l’ADNa (et plus généralement des molécules fossiles) issu des restes archéologiques ou paléontologiques quaternaires connaît un développement rapide. On peut citer ici la multiplication des travaux sur le mammouth (Barnes et 12 al., 2007 ; Schwarz et al., 2009) ou encore sur l’Homme de Néanderthal (Green et al., 2006 ; Noonan et al., 2006) qui a permis un accroissement rapide des connaissances sur le sujet. Par ailleurs, cette approche de séquençage de masse est extrêmement pratique et efficace lorsqu’il n’y a pas de macrofossiles et que l’abondance des grains de pollen est faible (Willerslev et al., 2007) et d’autant plus pratique que 10% de la superficie émergée de la Terre est couverte par les glaciers et les calottes glacières. De surcroît, et en raison de leur température basse et constante, les glaciers et le pergélisol pourraient contenir la plus ancienne banque de données d’acides nucléiques et de cellules microbiennes sur Terre (Willerslev et al., 2007), ce qui pourrait aider grandement à reconstruire les écosystèmes du passé. Il est nécessaire toutefois d’admettre que l’état de fragmentation et de dégradation des molécules anciennes (Shapiro, 2008), ainsi que la présence fréquente d’inhibiteurs constitue une difficulté technique importante (Hebsgaard et al., 2005). L’ADNa possède, en raison d’une répartition non homogène des jeux de données dans le temps, l’avantage potentiel d’autoriser des inférences sur des évènements anciens et de permettre la calibration d’arbres avec une échelle de temps «absolue » (Endicott et al., 2009). Cela nécessite la modélisation de phénomènes évolutifs et la mise en place de tests statistiques d’hypothèses (Dunn et al., 2007 ; Endicott et al., 2009). Les travaux de paléogénétique doivent donc nécessairement s’inscrire dans le cadre de collaborations interdisciplinaires. Enjeux scientifiques Sous réserve d’une validation chronologique et biomoléculaire de ces données au cas par cas, validation qui est encore loin de relever de la routine, l’utilisation d’ADNa est ainsi susceptible de constituer un puissant outil paléobiologique, en complément des approches morphologiques habituellement utilisées dans les diverses domaines de la paléontologie (paléoanthropologie, archéobotanique, archéozoologie). Ces différents domaines scientifiques concernés peuvent être déclinés selon les différents niveaux d’intégration biologiques, du peuplement à l’individu. À l’échelle des peuplements ou des communautés (inter-spécifique), l’analyse de séquences d’ADNa évoluant selon un rythme de mutation lent, tels que les gènes mitochondriaux (e.g. le cytochrome b ou l’ARNr 18S), contribue à situer des taxons éteints par rapport à ceux dont on connaît les caractéristiques génétiques (Endicott et al., 2009). Willerslev et al. (2007) ont montré, par exemple, que le Sud du Groenland était habité par une grande diversité d'arbres conifères et des insectes durant les derniers millions d'années et ont mis également en évidence des modifications temporelles de diversité végétale. La paléogénétique peut donc contribuer à la compréhension de la mise en place des différentes vagues de peuplements quaternaires, y compris les plus récentes. De même, l’utilisation d’ADNa peut contribuer à la 13 compréhension de la mise en place des communautés à des échelles de temps beaucoup plus conséquentes. En outre, les recherches dans ce domaine à cette échelle d’intégration interspécifique peuvent être développées avec une relative facilité, car elles peuvent s’en tenir à des séquences d’ADN mitochondrial, plus abondant et plus facile à amplifier que l’ADN nucléaire (Ramakrishnan & Hadly, 2009). Pourtant, de plus en plus, les analyses actuelles intègrent des séquences nucléaires (Endicott et al., 2009) ce qui s’explique par le fait qu’il n’est pas toujours possible d’obtenir des arbres robustes sur la base des séquences mitochondriales. À l’échelle infraspécifique, d’autres traceurs moléculaires à plus fort taux de mutation peuvent être utilisés dans le but d’analyses populationnelles pour comprendre des scénarios évolutifs et tester des hypothèses phylogéographiques (Ramakrishnan & Hadly, 2009). Ces approches basées sur l’ADNa sont susceptibles de fournir de multiples informations sur la dynamique des populations comme la biogéographie, la translocation d’espèces, le parasitisme, la domestication, etc. (Gugerli et al., 2005). Elles concernent également l’origine biologique et la diversité des animaux domestiques et les introgressions de lignées domestiques déplacées dans les populations sauvages locales (Leonard et al., 2002 dans Ramakrishnan & Hadly, 2009). La paléogénétique permet ainsi de déceler et de reconstituer les déplacements anciens, climatiques ou anthropogènes (transferts), de plantes ou d’animaux, sauvages ou domestiques, que la plupart des outils morphologiques ne peuvent documenter (Ramakrishnan & Hadly, 2009). Elle va donc jouer un rôle important dans la connaissance des processus invasifs anciens ou plus récents. Les migrations humaines anciennes, ainsi que l’anthropologie et les origines humaines (Adcock et al., 2001) peuvent être documentées de la même manière, avec toutefois des difficultés techniques accrues, inhérentes au contrôle et au traçage des contaminations par les ADN modernes (Willerslev et al., 2004). Conclusion Tout au long de ce rapport bibliographique, nous avons vu l’intérêt d’étudier les écosystèmes passés en Ecologie et que cette compréhension des paléoécosystèmes passe obligatoirement par une approche pluridisciplinaire avec des outils différents mais complémentaires (Harrison & Prentice, 2003). A terme, de multiples comparaisons entre écosystèmes présents et passés à diverses périodes et échelles de temps demandent donc un effort d’intégration. Les changements fonctionnels détaillés et leurs significations dans les écosystèmes 14 sont étudiés à des échelles fines et pour des périodes souvent plus récentes, tandis que les grands patrons de l’évolution des faunes et des flores dans les écosystèmes majeurs (e.g. forêt tropicale) sont appréhendés sur des échelles de temps plus importantes (Grandcolas, 2003). C’est l’intégration de ces différentes échelles d’étude des écosystèmes qui permet de comprendre à la fois l’origine et le maintien de la biodiversité. Il faut cependant bien garder à l’esprit que la paléoécologie est limitée à l’étude des organismes dont les fossiles sont préservés, ainsi les assemblages des écosystèmes sont déformés par rapport à la réalité (Boyd et Hall, 1998). Entre paléoécologie et écologie actuelle, ce sont donc les objets d’étude, les stratégies d’échantillonnage et les limites spatio-temporelles qui diffèrent. Toutefois, les connexions entre les deux disciplines sont plus importantes pendant le Quaternaire, puisqu’on accède aux mêmes espèces, d’où une approche actualiste possible (Jolly et al., 1998a et 1998b). Au Tertiaire, on est alors plus réduit à des inférences (Ramakrishnan & Hadly, 2009). La technique du pyroséquençage de masse a permis de palier en partie ce problème en rallongeant l’échelle de temps et en affinant les résultats obtenus (Lamoril, 2008). Cependant, cette discipline de paléogénétique étant relativement récente, des progrès en termes de méthodes et de fiabilité sont à attendre (Hebsgaard et al., 2005). En prenant en compte les écosystèmes passés, l’Histoire introduit indubitablement du «bruit» et des contraintes dans les systèmes écologiques qui doivent être intégrées aux modèles théoriques (Gall, 1995). Pourtant, la prise en compte de l’Histoire est dans le même temps une stratégie extrêmement intéressante pour permettre d’atteindre en profondeur la réalité des systèmes écologiques. L’Ecologie, en général, ne porte que sur des études dépassant rarement la vingtaine d’années alors que l’étude des paléoécosystèmes permet de remonter parfois jusqu’à plusieurs millions d’années. Aujourd’hui, comme le disaient Delcourt et Delcourt, « le défi de tout paléoécologue est de reconstruire avec le plus de détails possibles les patrons précis de distribution et d’abondance des individus et des populations ». L’Ecologie va-t-elle dès lors devenir une science historique, comme l’est en partie l’Evolution, au sens où elle reposerait essentiellement sur l’analyse des traces du passé et la reconstruction d’événements passés? Il y a peu de chances, même si la paléoécologie est une science aujourd’hui en plein développement. Il n’en est pas moins certain qu’une écologie évolutionniste pleinement consciente de sa dimension historique, notamment grâce à la reconstitution des paléoécosystèmes, pourra contribuer à rapprocher toujours plus l’écologie de l’évolution afin de parfaire notre compréhension du vivant. 15 Références bibliographiques Adcock G. J., Dennis E. S., Easteal S., Huttley G. A., Jermiin L. S., Peacock W. J. & Thorne A., 2001. Mitochondrial DNA sequences in ancient Australians: implications for modern human origins. Proceedings of the National Academy of Sciences, USA, 98, pp. 537-542. Barnes I., Shapiro B., Lister A., Kuznetsova T., Sher A., Guthrie D. & Thomas M. G., 2007. Genetic structure and extinction of the Woolly Mammoth, Mammathus primigenius. Current Biology, 17, pp. 1072-1075. Beaulieu J. L. de, Andrieu-Ponel V., Cheddadi R., Guiter F., Ravazzi C., Reille M., Rossi S., 2006. 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Science, 317, pp. 111-114. 20 Résumé Les études historiques sur les écosystèmes se justifient d’emblée par le fait que les écosystèmes actuels résultent d’une évolution longue de 3,8 milliards d’années. Cependant, l’Ecologie ne porte que sur des études dépassant rarement la vingtaine d’années. Pourtant, la prise en compte de l’Histoire est dans le même temps une stratégie intéressante pour permettre d’atteindre en profondeur la réalité des systèmes écologiques. Cette compréhension des paléoécosystèmes passe obligatoirement par une approche pluridisciplinaire. En effet, selon le type d’étude portant sur des paléoécosystèmes donnés, l’échelle de temps sera très différente allant de quelques centaines à plusieurs millions d’années. Ainsi, les changements fonctionnels détaillés et leurs significations dans les écosystèmes sont étudiés à des échelles fines et pour des périodes souvent plus récentes, tandis que les grands patrons de l’évolution des faunes et des flores dans les écosystèmes majeurs sont appréhendés sur des échelles de temps plus importantes. C’est donc l’intégration de ces différentes échelles d’étude des écosystèmes qui permet de comprendre à la fois l’origine et le maintien de la biodiversité. Il faut toutefois bien garder à l’esprit que la paléoécologie est limitée à l’étude des organismes dont les fossiles sont préservés. Le séquençage d’ADN ancien développé depuis peu, a permis de palier en partie ce problème en rallongeant l’échelle de temps et en affinant les résultats obtenus. Mots clefs : Paléoécosystème ; Palynologie ; ADN ancien ; fossile Abstract Historical studies on ecosystems are justified at the outset by the fact that ecosystems today are the result of a long trend of 3.8 billion years. However, Ecology does as studies rarely exceeding twenty years. However, taking account of History is at the same time an interesting strategy to achieve deep reality of ecological systems. This understanding of paleoecosystems must pass through a multidisciplinary approach. Indeed, depending on the type of study of paléoécosystèmes given the time scale is very different from a few hundred to several million years. Thus, the detailed functional changes and their significance in ecosystems are studied at fine scales for periods often more recent, while the big patterns of the evolution of fauna and flora in the major ecosystems are apprehended on scales times larger. Thereby integration of these different scales of ecosystem studies for understanding both the origin and maintenance of biodiversity. It must however keep in mind that the paleoecology is limited to the study of organisms whose fossils are preserved. The sequencing of ancient DNA developed recently, has some bearing on this problem by lengthening the time scale and refining results. Key words: Paleoeocsystem ; Palynology ; DNA Ancient ; Fossil