Les associations françaises de solidarité et le marketing direct
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Les associations françaises de solidarité et le marketing direct
Les associations françaises de solidarité et le marketing « la mercantilisation du financement privé et l’émergence du « charity business » ont engendré une dérive d’une frange du secteur associatif et, par là même, des bouleversements lourds de conséquences pour le tiers secteur dans son ensemble (Antoine Vaccaro) Le dilemne : l’introduction d’un degré de professionnalisation important dans les méthodes de collecte et plus globalement dans l’organisation de l’association elle-même a-t-elle modifié le contenu idéologique de cette dernière ? Les associations françaises de solidarité et le marketing 1ère partie : Les facteurs de contingence environnementaux ¾ Professionnalisation de la collecte de fonds ¾ Professionnalisations financière et comptable ¾ Professionnalisation du recrutement 2ième partie : L’évolution de l’organisation 3ième partie : Les répercussions Les associations françaises de solidarité Un peu d ’histoire... ¾ Création de la Croix-Rouge en 1863 : neutralité de la victime, permanence, espace juridique ¾ Les laissés pour compte de la reconstruction : Emmaüs, ATD Quart monde ¾ Naissance des ONG : approche caritative, tiersmondisme, sans-frontièrisme ¾ Urgence/développement Les associations françaises de solidarité Un peu d ’histoire... ¾ Les années 80 : baisse de l’engagement, individualisme, solidarité mise en scène, charity show et marketing ¾ Pauvreté, précarité, exclusion : on se recentre sur la France Les associations françaises de solidarité : le secteur ¾ Environ 750 000 en France ¾ 15-20% du secteur associatif total ¾ 1500 peuvent collecter des fonds et 200 pratiquent activement la collecte de fonds ¾Santé -médical ¾ Tiers-monde ¾ Social laïque ¾ Social cultuel Les associations françaises de solidarité : le secteur ¾ Prépondérance du financement public ¾ Faiblesse des dons privés : 15 milliards ¾ Secteur social financé par l’Etat (60/40) ¾ Secteur international financé par les dons privés (80%) La professionnalisation de la collecte Répondre aux questions clés : ¾ Comment les associations se procuraient-elles des fonds avant le marketing ? ¾ Quelles sont les circonstances qui ont permis l’émergence du marketing ? ¾ Peut-on dire qu’il existe un marché, une offre, une demande ? ¾ Peut-on transposer les techniques de marketing ? ¾ Comment se présente le paysage de la collecte de fonds ? La professionnalisation de la collecte Avant l’ère du marketing ¾ Elan, quête, fête de charité, présence locale ¾ Investissement humain considérable ¾ Aucune stratégie à long terme ¾ Des opérations au coup par coup La professionnalisation de la collecte Les circonstances favorisantes ¾ Explosion du nombre de création d’association ¾ La crise économique et le chômage ¾ La volonté d ’un développement indépendant de l’Etat ¾ Le désengagement financier de l’Etat ¾ Le déclin des idéologies Les associations françaises de solidarité : le marché de la collecte Marketing commercial et marketing associatif Application et utilisation de la pensée et des techniques de marketing pour atteindre des objectifs sociaux en disséminant des idées et des causes sociales par l ’entremise d ’organisations privées, sans but lucratif. La professionnalisation de la collecte Les acteurs de ce marché L ’ETAT ¾ Intervient pour favoriser l ’acte de consommation, c ’est à dire le don, en proposant aux donateurs des avantages fiscaux en échange d ’un don ¾ Contrôle les appels aux fonds privés ainsi que l ’utilisation de ces fonds Tutelle réaffirmée de l ’Etat sur le secteur sans contrepartie économique notable La professionnalisation de la collecte Les acteurs de ce marché LE DONATEUR ¾ 6 millions de foyers, 20 millions d ’individus ¾ 62% des Français font des dons à au moins deux associations ¾ le nombre de donateur ainsi que le don moyen est en baisse ¾ Plus les revenus sont élévés, plus la proportion de donateurs augmente ¾ Mais ce sont les moins favorisés qui augmentent le plus leur don Les associations françaises de solidarité : le marché de la collecte Les acteurs de ce marché LE DONATEUR ¾ Cadres sup, retraités, professions libérales ¾ Les plus de 65 ans donnent huit fois plus que les moins de 65 ¾ 72% des pratiquants réguliers sont donateurs contre 46% des non pratiquants ¾ Hommes et femmes sont également représentés La professionnalisation de la collecte Les acteurs de ce marché LE DONATEUR : analyse des motivations ¾ Le don égoïste : motivé par notre propre intérêt ¾ Le don altruiste : aucune contrepartie ¾ Le don obligatoire : contre-don obligatoire Si le donateur en retire un bénéfice, on peut transformer le don en produit vendable et donc utiliser le marketing. La professionnalisation de la collecte Les acteurs de ce marché LA CONCURRENCE ¾ Un nombre d ’associations qui collectent des fonds en augmentation ¾ Des différences entre associations qui ne sont plus aussi marquées ¾ Un marché de donateurs en phase de maturité La concurrence favorise la concentration (80/20) Les barrières à l ’entrée sont importantes La professionnalisation de la collecte Le portefeuille des techniques de collecte ¾ Diversification importante des moyens de collecte ¾ Prédominance du marketing direct sur les outils traditionnels La professionnalisation financière et comptable ¾Jusqu’en 1991 : vide juridique en ce qui concerne le contrôle des fonds recueillis ¾ Scandales nombreux qui ont obligé l’Etat à légiférer : - l’obligation de déclaration préalable à la préfecture du siège de l’association des campagnes d’appel à la générosité publique - la production obligatoire d’un compte d’emploi des sommes recueillies (frais de fonctionnement, publicité, marketing, actions sur le terrain), accessible à tout adhérent ou donateur ¾- le contrôle de la comptabilité par un commissaire aux comptes pour toute association qui recueille plus d’un million de francs de dons ou subventions par an ¾- le droit de regard de l’inspection des finances sur les organismes bénéficiant de subventions de l’Etat ¾-le contrôle de la Cour des comptes sur l’utilisation des fonds. ¾ Transparence obligatoire vis-à-vis du donateur La professionnalisation du recrutement ¾ La bonne volonté ne suffit plus : besoin de compétences et d’experts au siège comme sur le terrain ¾ Recrutement de cadres venant de l’entreprise sans parcours militant ¾ Création de diplôme et 3ième cycle à l’université pour répondre aux besoins Les facteurs de contingence ¾ Premier bilan : une professionnalisation certaine du milieu associatif ¾ Certaines associations revendiquent le terme « entreprise associative » MAIS ¾Différence notable au niveau du degré de professionnalisation : Certaines associations sont restées très traditionnelles avec une base militante qui assure l’ensemble des fonctions clés dans l’organisation POURTANT ¾Même modèle de création au départ : loi de 1901 ¾ Même pression des facteurs de contingence L’évolution de l’organisation ¾ le cycle de vie d’une association : la période critique de la croissance, comment faire évoluer la structure et le fonctionnement ? (surtout pour les associations nées avant 1980) ¾ La culture joue un rôle fondamental dans le processus ¾ Deux exemples : Terre des Hommes France où la culture freine la professionnalisation et Villages d’enfants SOS où la professionnalisation a atténué la culture d’origine Les répercussions de la professionnalisation 1. Un pouvoir associatif grandissant et reconnu par l’Etat et par le grand public ¾ une légitimité et un savoir-faire qui se fonde sur : leur capacité à détecter et à prendre en charge dans l’urgence des nouvelles exclusions, ¾ leur action de proximité dans les domaines où le contact direct et personnalisé avec des personnes marginalisées est indispensable, ¾leurs ressources d’expérimentation et d’innovation sociale, ¾ leur savoir-faire, leur rapidité et leur indépendance dans l’organisation des secours d’urgence liés à des crises exceptionnelles, - leur rôle d’alerte et leur capacité à mobiliser les citoyens, ¾ leur rôle d’éducation et de prévention. Les répercussions de la professionnalisation 2. La difficile gestion bénévole/salarié ¾ comment faire cohabiter deux logiques différentes ? ¾ Les militants ont peur que les salariés ne détiennent le pouvoir décisionnaire et ne leur laissent que le pouvoir exécutif. ¾ Une association sans bénévole est-elle encore une association ? Les répercussions de la professionnalisation 3. Polémique autour des frais de fonctionnement ¾ l’ambiguïté du monde associatif : On nous voudrait plus professionnels, avec des structures plus complexes et en même temps que nous dépensions moins d’argent en fonctionnement ¾ le donateur n’accepte pas que son don serve à payer les personnes qui travaillent au siège. Ces dernières doivent selon cette conception vivre « pour » l’humanitaire et non pas « de » l’humanitaire Les répercussions de la professionnalisation 4. Une culture associative amoindrie ¾ Dilution de l’esprit fondateur des associations : « l’association est devenue plus lourde, plus difficile à gérer, l’âme d’origine est moins forte », « on est loin de la phase pionnier où la culture est très forte, c’est incontournable lorsque l’on se développe » ¾ Dans le cas des associations qui s’adressent au marché pour obtenir les moyens matériels et financiers leur permettant de mener à bien leur action, et qui fonctionnent parallèlement sur la base d’idéaux puissants à mille lieux du mercantilisme, le paradoxe est important et la conservation de leur identité très précaire Conclusion : des arbitrages difficiles Avoir une approche pragmatique de la collecte entraîne des paradoxes : ¾ Doit-on adapter la communication en fonction de ce que souhaite entendre le donateur pour obtenir des rendements ? ¾ Que reste-t-il du message propre de l ’association ? ¾ L ’action d ’une association doit-elle être conditionnée par le marché ? ¾ Risque de décalage entre le réalité et le terrain Conclusion : des arbitrages difficiles Les deux échecs possibles du monde associatif c’est soit de glisser dans un modèle syndical et ensuite politique, soit vers un modèle managérial, moderniste et entrepreneurial. Ce qu’il y a de sûr, c’est que si le monde associatif existe, c’est que cela représente des aspects et des fonctions bien particulières dans le fonctionnement de la cité et c’est ceci qu’il faut conserver (Pierre Gaborit)