La requête de l`Église de Scientologie relative aux

Transcription

La requête de l`Église de Scientologie relative aux
du Greffier de la Cour
CEDH 266 (2013)
19.09.2013
La requête de l’Église de Scientologie relative aux déclarations publiques
des autorités belges sur l’enquête la concernant a été rejetée
Dans sa décision en l’affaire Asbl Église de Scientologie c. Belgique (requête no 43075/08), la Cour
européenne des droits de l’homme déclare, à l’unanimité, la requête irrecevable. Cette décision est
définitive.
L’affaire concerne la plainte de l’association sans but lucratif (asbl) l’Église de Scientologie selon
laquelle les déclarations aux médias des autorités belges quant à l’enquête dont elle faisait l’objet
constituaient une violation du droit à un procès équitable et de la présomption d’innocence.
La Cour rappelle que l’équité d’une procédure s’apprécie au regard de la globalité de celle-ci. En
l’absence de jugement définitif sur l’ « accusation » litigieuse par les juridictions belges, la partie de
la requête relative à l’éventuelle violation du droit à un procès équitable est donc prématurée et
doit à ce titre être rejetée. De plus, étant donné que les seuls éléments de preuve produits par la
requérante sont des articles de presse, la Cour considère que le contenu des propos prétendument
tenus par les autorités ne saurait leur être imputé de manière incontestable. Ainsi, rien ne permet
de démontrer qu’en renseignant le public sur les enquêtes en cours ces dernières ont manqué à leur
obligation de discrétion et de réserve que commande le respect de la présomption d’innocence.
Principaux faits
La requérante, l’asbl Eglise de Scientologie, est une personne morale de droit belge dont le siège
social se trouve à Bruxelles (Belgique). En 1997, une instruction fut ouverte contre celle-ci pour
escroquerie et abus de confiance. Entre 1999 et 2007, plusieurs quotidiens belges publièrent des
commentaires attribués à des officiers du ministère public et dont certains mettaient en cause la
requérante. Invoquant notamment la violation de la présomption d’innocence, cette dernière
déposa successivement cinq plaintes contre X avec constitution de partie civile, lesquelles furent
systématiquement classées sans suite par les autorités.
Entre temps, en 2007, la requérante avait également saisi la chambre des mises en accusation de la
Cour d’appel d’une demande tendant à ce qu’elle déclare irrecevables les poursuites la concernant,
au motif que les déclarations du ministère public à la presse violaient le secret de l’instruction,
méconnaissaient la présomption d’innocence et portaient atteinte au droit à un procès équitable. En
2007, sa requête fut déclarée recevable mais non fondée, et son pourvoi en Cassation fut rejeté en
2008. L’audience devant la chambre du conseil pour le règlement de la procédure fut ajournée en
2010. D’après les informations figurant dans les observations des parties, le règlement de la
procédure n’est pas encore intervenu à ce jour.
Griefs, procédure et composition de la Cour
La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits de l’homme le 5 août 2008.
Invoquant l’article 6 § 1, l’Eglise de Scientologie se plaignait d’une violation de son droit à un procès
équitable par le ministère public pour avoir fait connaître publiquement son opinion sur les faits qui
lui étaient imputés avant la présentation du réquisitoire dans le cadre du règlement de la procédure.
Sous l’angle de l’article 6 § 2, elle arguait également que le ministère public avait fait des
déclarations publiques reflétant son sentiment sur sa culpabilité au mépris de la présomption
d’innocence.
La décision a été rendue par une chambre de sept juges composée de :
Mark Villiger (Liechtenstein), président,
Ann Power-Forde (Irlande),
Ganna Yudkivska (Ukraine),
André Potocki (France),
Paul Lemmens (Belgique),
Helena Jäderblom (Suède),
Aleš Pejchal (République Tchèque), juges,
ainsi que de Claudia Westerdiek, greffière de section.
Décision de la Cour
Article 6 § 1
La Cour rappelle que l’équité d’une procédure s’apprécie au regard de la globalité de celle-ci. Par
conséquent, elle n’est en principe susceptible de se prononcer sur une éventuelle violation du droit
à un procès équitable que lorsque, notamment, les juridictions de jugement compétentes ont été
saisies et ont statué définitivement sur l’ « accusation » litigieuse. Tel n’étant pas le cas en l’espèce,
la Cour considère cette partie de la requête comme prématurée et la rejette pour non-épuisement
des voies de recours internes.
Article 6 § 2
La Cour rappelle qu’une atteinte à la présomption d’innocence peut émaner non seulement d’un
juge ou d’un tribunal mais aussi d’autres autorités publiques comme des membres du parquet. Pour
qu’il y ait une telle atteinte, il suffit d’une formulation donnant à penser qu’une telle autorité
considère l’intéressé comme coupable alors qu’il n’a pas été définitivement jugé comme tel. Si cette
disposition n’empêche pas les autorités de renseigner le public sur les enquêtes en cours, il convient
néanmoins qu’elles le fassent avec toute la discrétion et toute la réserve que commande le respect
de la présomption d’innocence.
Néanmoins, se pose en l’espèce la question de la preuve du contenu des déclarations prétendument
attentatoires à la présomption d’innocence que la requérante attribue à des membres du parquet.
En effet, ces dernières n’ont ni fait l’objet d’un enregistrement audio ou audiovisuel, ni d’une
transcription dans des documents incontestablement imputables aux autorités mises en cause - tels
que des actes de procédure ou des communiqués de presse officiels. Les seuls éléments produits par
la requérante sont des articles de presse, dont la responsabilité revient aux journalistes qui en sont
les auteurs, et qui pourraient fort bien ne pas refléter dans leurs nuances la teneur des propos
tenus. Rien ne permet d’établir qu’en s’exprimant publiquement sur l’enquête en cours les autorités
ont manqué à leur obligation de discrétion et de réserve.
Par conséquent, la Cour conclut que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit
être rejetée.
La décision n’existe qu’en français.
Rédigé par le greffe, le présent communiqué ne lie pas la Cour. Les décisions et arrêts rendus par la
Cour, ainsi que des informations complémentaires au sujet de celle-ci, peuvent être obtenus sur
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Conseil de l’Europe en 1959 pour connaître des allégations de violation de la Convention
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