Professionnel−le de l`action sociale: une identité
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Professionnel−le de l`action sociale: une identité
Professionnel−le de l’action sociale: une identité multiple et complexe Changement et transformation, globalisation et communication, flexibilité et mobilité sont des termes tout à fait actuels qui, d’un côté, peuvent être envisagés dans une optique d’opportunité et d’élargissement des perspectives, et, de l’autre, suscitent incertitudes, anxiétés et peurs, dans la mesure où les acquis et certitudes qui semblaient désormais établies sont actuellement discutées. Le changement de millénaire accentue peut−être symboliquement cette perception, de toute manière palpable dans les scénarios où se déroule la vie de chacun−e. Du côté du travail, il y a eu l’effritement d’un modèle productif qui, malgré tensions et conflits, permettait la sauvegarde de certains droits/devoirs entre les partenaires. La flexibilisation de l’emploi et la prolifération des travaux précaires sont en fait les conséquences de nouvelles formes de production et d’organisation du travail à l’intérieur de marchés fortement concurrentiels. Ce sont ces changements qui ont mis en péril les garanties et les fondements mêmes de l’Etat social. L’époque actuelle est en outre caractérisée par une mobilité toujours croissante des individus, à tel point que la figure du migrant semble la mieux adaptée pour la décrire, une époque successivement habitée par des nomades, des voyageurs, des navigateurs de réseaux informatiques. Il en découle de nouveaux métissages, de nouvelles contaminations culturelles qui se manifestent non sans heurt ou fragmentation. Dans cette perspective, le malaise n’est plus uniquement confiné dans des structures et des environnements protégés reservés à des catégories historiquement claires et bien définies (handicapé−e−s, malades mentaux, etc.), mais s’expriment à travers de nouvelles formes de souffrance, de vulnérabilité et de fragilité qui impliquent d’autres couches de population. Une réflexion sur l’identité de la profession Face à de telles transformations, le Département de travail social (Dipartimento di lavoro sociale, DLS) s’est trouvé dans l'obligation de promouvoir en son sein une réflexion sur l’identité et la formation du/de la professionel−le de l’action sociale, en tenant compte des expériences novatrices en cours dans la région (professionel−le−s de l’action sociale communaux, Service de soutien et d’accompagnement éducatif, etc.). L’intégration du Département de travail social (DLS) dans le cadre de la Haute école spécialisée de la Suisse italienne (Scuola universitaria professionale della Svizzera italiana, SUPSI) a certainement favorisé et accéléré la restructuration de la formation à l’intérieur du Département même. Le Tessin a réagi rapidement à la Loi fédérale sur les Hautes ecoles spécialisées (HES), entrée en vigueur en octobre 1996. En fait, la loi cantonale est entrée en vigueur en mai 1997 ; elle est allée de pair avec la réalisation de l’Université de la Suisse italienne (Università della Svizzera italiana), dans l’intention de souligner la nécessité de créer des synergies et des collaborations entre les deux institutions. Elles ont donc été instaurées sur un plan d'égalité tout en maintenant leurs spécificités. Après une analyse approfondie, la commission chargée du dossier a decidé d’intégrer l’Ecole supérieure de travail social (Scuola superiore di lavoro sociale) dans la Haute école spécialisée de la Suisse italienne (SUPSI). En effet, les importants changements socio−économiques amplifient et rendent plus complexes les charges, le rôle et les compétences de celles et ceux qui interviennent dans le milieu social. 1 Dans ce secteur aussi, il devient par conséquent indispensable au niveau de la formation (de base et continue) d'établir une meilleure préparation à la profession, tant du point de vue des connaissances techniques, de la maîtrise des méthodes et des instruments opératifs, que de la réflexion sur nos propres pratiques professionnelles. Redéfinir le profil des compétances Ces deux dernières années, au sein du Département, on a travaillé avec une certaine urgence à repenser et à redéfinir le profil des compétences du/de la professionel−le de l’action sociale, la spécificité de son rôle par rapport à d’autres portraits professionnels, les caractéristiques de son intervention et son champ d’action. D’après une analyse des besoins effectuée auprès d'organes directifs cantonaux, d'institutions sociales et d’entreprises, la nécessité de disposer d’un profil professionnel polyvalent et flexible est ressortie, qui serait à même de faire face aux rapides changements sociaux et culturels. On a relevé l’exigence de mieux cerner ce profil − fondamentalement unitaire − en distinguant deux facettes en fonction de leurs terrains spécifiques, des instruments et des modalités d’intervention: éducatrices et éducateur social−e assistant−e / conseiller−ère social−e. Pour ces deux profils, le premier objectif reste de programmer, gérer et vérifier les interventions éducatives et sociales destinées à développer les potentialités des usagères et usagers, en vue de leur procurer un niveau toujours plus élevé d’autonomie et d’intégration sociale. Si pour l’éducateur/trice la réussite de tels objectifs passe surtout à travers la relation, la gestion et le partage du quotidien, pour l’assistant−e social−e il s’agit par contre de gérer et coordonner des projets dans la complexité du réseau social et d’assistance, vu l’extension de l’offre de ressources et la variété des interventions sociales. Depuis octobre 2000, le Département du travail social (DLS) offre une formation de base commune − respectant une vision élargie du travail social et les interconnexions entre les deux profils professionnels − qui se différenciera progressivement en deux options par des modules particuliers, des laboratoires à caractère spécifique et des stages selon les différents contextes de travail. Outre l’élargissement de l’offre de formation, qui s’est aussi révélée nécessaire en réponse au grand intérêt manifesté par les jeunes et les adultes pour ce secteur, on entend renforcer le caractère modulaire de l’organisation formatrice en intégrant le système de reconnaissance professionnelle adopté au niveau européen (European Credit Transfer System). A la base de ce système, il y a la volonté de l’Union européenne de promouvoir la coopération entre les instances formatrices pour améliorer la qualité de l’instruction et favoriser la mobilité des étudiant−e−s. Une nouvelle proposition formatrice Etant donné le caractère − universitaire et professionnel − de l’Ecole (SUPSI), une forte volonté de professionnaliser le curriculum est apparue au sein du Département du travail social (DLS). Pourtant, tout en reconnaissant la nécessité de fournir aux étudiant−e−s une série de connaissances théoriques de base, il est clair que celles−ci ont un sens et une signification surtout si elles sont déclinées en termes de compétences professionnelles. 2 Il s’agit, en substance, d’une formation basée sur la théorie de la praxis, c’est−à−dire sur l’étroit rapport dialectique entre connaissance et compétence, activité et réflexion, école et travail. Avec cette nouvelle proposition formatrice on a voulu dépasser la logique purement disciplinaire en vue d’une formation développée autour de thématiques spécifiques, analysées sous l’angle interdisciplinaire. L’objectif de fond de la formation de base est de construire un−e "spécialiste de la quotidienneté”, un−e professionnel−le qui sache s'adapter, avec l’exigence de disposer de capacités et de compétences à tous les niveaux de l’intervention sociale: entre l’institutionnel et le territoire spécifique, entre le public et le privé, entre la dimension du projet et celle d’aide et de soin, entre la dimension éthico−politique et celle économique, entre tutelle et capacité d’entreprise. Un−e professionnel−le capable de travailler avec rigueur et créativité dans la définition des besoins et des potentialités des usagères et usagers mis au centre d’une action éducatrice intentionnelle, un professionnel−le à même d’instaurer et de gérer des relations positives avec les usagers, avec l’équipe, avec d’autres professionnel−le−s et d’autres services à l’intérieur et à l’extérieur des institutions. Une telle ouverture garantit au professionnel de l’action sociale la mobilité concrète, mentale, émotionnelle et professionnelle nécessaire pour affronter des défis divers et répondre aux intérêts spécifiques de chaque étudiant−e. Pour répondre justement aux exigences individuelles de formation et développer chez les étudiant−e−s la responsabilisation de la construction de leur propre parcours d’apprentissage, on a pensé proposer un choix de cours et de modules à option. Tout cela basé sur la conviction que la formation est avant tout un processus intérieur, lié tant au plaisir/désir personnel d’apprendre qu’à la nécessité de répondre au mieux aux exigences de ceux à qui notre action s'adresse. A l’intérieur du Département du travail social (DLS), on ressent cependant la nécessité de poursuivre la réflexion menée jusqu’ici ; d’un côté pour mieux clarifier et caractériser les profils professionnels de l’éducatrice/éducateur social−e, respectivement de l’assistant−e social−e ; de l’autre, pour élaborer et offrir aux étudiant−e−s des modèles théoriques de référence spécifiques qui leur permettront, une fois actifs professionnellement, de trouver une place solide au milieu des différents métiers du social. Wilma Minoggio, Scuola universitaria prfessionale della Svizzera italiana SUPSI, Dipartimento di lavoro sociale, Canobbio www.avenirsocial.ch 3