Les musiciens de Brême

Transcription

Les musiciens de Brême
Valise DECOUVERTE
Les musiciens de Brême
Ce document s'inspire de divers articles qui se font écho (dont il est parfois difficile de connaître la source
exacte) notamment : www.globaleducation.ch/.../Musiciens_de_Breme_Mme_Wernli.pdf;
www.cndp.fr/.../dossier_pedagogique_du_coq_a_l_ane.pdf . Ces documents sont toutefois à adapter car ils
se basent sur une autre traduction du texte que celle qui est proposée par La Joie de Lire (traduction
modernisée).
Ces pistes pédagogiques se veulent complémentaires au beau travail de Christophe Rigolot qui propose des
fiches prêtes à l'emploi: rigolot.christophe.free.fr/lateteatoto/lesmusiciensdebremeCE1.pdf (La Tête à Toto : des
outils pédagogiques pour apprendre à lire et à écrire au cycle 2)
1.
Résumé
Dans un village situé non loin de Brême, un meunier vit avec son âne. Ce dernier prenant de l'âge, son maître
décide de le tuer pour récupérer sa peau. Mais dans la nuit, sentant les ennuis venir, l'âne s'enfuit. Il décide de se
rendre à Brême pour devenir musicien. En chemin, l'âne rencontre un chien devenu trop âgé pour la chasse dont
son maître voulait se débarrasser. Il propose alors au chien d'aller avec lui à Brême pour s'engager dans
l'orchestre municipal. En chemin, l'âne et le chien rencontrent un chat et un coq dans la même situation qu'eux et
leur proposent de les suivre sur la route de Brême. Un soir, les quatre animaux découvrent une maison habitée
par des voleurs. Ils sont bien décidés à en prendre possession…
2.
Le contexte
Conte médiéval dont il existait plusieurs versions. L’histoire se racontait déjà au Moyen Age et il existait de
nombreuses versions de ce conte. Autrefois, ce n’était pas des brigands que les animaux chassaient, mais des
fauves: lion, loup et ours, animaux associés à la noblesse (héraldique). Quelque soit la version, ce sont toujours
les animaux moins nobles, errants, faibles, affamés ou vieux qui l’emportaient sur les forts, les nantis et les
puissants. Cet ordre inversé a fait le succès du conte auprès des gens du peuple qui avaient pu connaître le même
sort que les quatre animaux de l’histoire.
Brême au Moyen Age est un pôle d'attraction car une ville marchande importante de part sa position à proximité
de la Baltique. Les quatre compagnons musiciens veulent sans doute aller à Brême car une importante formation
musicale acceptait des musiciens errants de passages.
Les frères Grimm ont donc adapté un conte traditionnel ancien. Chez les Grimm, les héros de ce conte ne sont
pas des animaux de compagnie mais des animaux de ferme, ayant chacun une fonction précise de travail. Ce qui
explique que leurs maîtres puissent les considérer comme inutiles quand ils ne peuvent plus assumer leurs
tâches.
3.
Exploitations pédagogiques
3.1. Vocabulaire et expression
En plus du voc judicieusement travaillé par Christophe Rigolot (recherche d'équivalent dans une phrase)
on peut mettre l'accent sur l'utilisation des expressions dans le conte (recherche du sens en contexte).

gagner son pain : "Mais comment gagner mon pain maintenant ?"

être triste comme une pluie de trois jours: "Bientôt sur la route, ils virent un chat qui était triste comme
trois jours de pluie".

Jeter un coup d'œil aux quatre coins de l'horizon: "Alors qu'il jetait un coup d'œil aux quatre coins de
l'horizon avant de s'endormir, il vit briller une petite lumière…"

Le gîte et le couvert." – Levons-mous et allons-y; ici le gîte et le couvert ne sont pas bons".

En faire des gorges chaudes: "Le dernier qui me l'a raconté en fait encore des gorges chaudes."
Valise DECOUVERTE
Comme cette expression conclut le conte, il peut être intéressant d'un peu plus près sa signification:
Origine de l'expression: on pense que l'expression date du XIVe siècle, époque où la chasse se pratiquait aussi
avec des oiseaux de proie dressés. Comme, il n'était pas question que l'oiseau, une fois la proie attrapée, puisse la
manger, il recevait en récompense des rongeurs encore vivants (donc chauds) ou une partie de la viande de sa
proie (encore chaude également). C'est cette viande chaude qu'il faisait passer dans son gosier ou sa gorge qu'on
a d'abord appelé "gorge chaude". Ensuite, par extension, "faire gorge chaude" a signifié "se régaler, se rassasier".
À la fin du XVIe siècle, au figuré cette fois, "faire gorge chaude de quelqu'un" s'employait pour "se régaler de
plaisanteries faites au dépens de quelqu'un". Autrement dit, faire de quelqu'un ou quelque chose un objet
de plaisanteries méchantes, s'en moquer.
3.2. Structure
On peut faire travailler les élèves sur la structure du texte en leur faisant repérer les différents temps de l'histoire:
Situation initiale
La rencontre
Des maîtres
d’animaux
domestiques
(l’âne, le chien, le
chat, le coq) veulent
se débarrasser d’eux
devenus incapable
d’assumer leur tâche
à la ferme.
L’âne décide de
quitter la ferme et de
se rendre à la ville
de Brême pour
devenir musicien. Il
est bientôt suivi par
le chien, le chat, et le
coq.
La fuite des
brigands
L’union contre les
brigands
Situation finale
La nuit venue, ils
cherchent une
maison. Ils en
découvrent une
habitée par des
voleurs qu’ils feront
fuir en faisant de
leurs cris une terrible
fanfare.
Ils s’installent pour
la nuit après avoir
bien mangé.
Dans la nuit les
voleurs cherchent à
rentrer dans leur
maison. Mais le
chien le chat et le
coq les feront de
nouveau fuir.
Les quatre animaux
s’installent dans la
maison et ne se
rendront jamais à
Brême.
Le conte se structure donc très classiquement en une situation initiale, éléments déclencheurs (les rencontres), la
des péripéties (la fuite des brigands), une résolution (l'union contre les brigands) et une situation finale.
On remarquera que l'élément déclencheur est raconté sur un mode répétitif et accumulatif que les enfants
connaissent bien puisqu'il rappelle les contes en randonnées (rappel des caractéristiques ici).
Le tableau ci-dessous n'est pas à faire remplir totalement par les élèves mais peut être proposé avec des lacunes.
Il serait intéressant de faire formuler la situation initiale en groupe classe.
On peut demander aux élèves de rechercher dans leur mémoire des contes en randonnées qu'on leur aurait lu (ils
sont très souvent utilisés en 1-2e années et chaque Ribambelle en contient.
Valise DECOUVERTE
Par exemple
Situation initiale
Des maîtres veulent …………..
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
………………………………….
La rencontre
La fuite des brigands
L’…………………
La nuit venue, ils
décide de quitter la ferme
cherchent une
et de se rendre à la ville de ………………... Ils en
L’union contre les
brigands
Dans la nuit les
…………….... cherchent
à ……………………….
....................pour devenir
découvrent une habitée
…………………... Il est
par des
bientôt suivi par le
…………………… Ils
Mais le chat, le chien,
…………….., le
les font …………….en
l'âne et le coq les feront
……………….., et le
faisant de leurs cris une
……………………….
terrible
………………………….
Situation finale
Les quatre animaux
s’installent dans la maison
et ne se rendront jamais à
………………….
de nouveau fuir.
f……………………...
Ils s’installent pour la
nuit après avoir bien
mangé.
Quelle partie du texte est racontée de manière répétitive? La partie …………………………………………
Cette manière de raconter te fait-elle penser à une autre histoire que tu connais? Laquelle? …………………………………………………………………………….
.
Valise DECOUVERTE
3.3. Anaphores et surnoms
Une des difficultés de compréhension de ce conte vient des nombreuses anaphores, reprises grammaticales et
surnoms divers données aux personnages. L'élève doit être très attentif pour s'y retrouver. Pendant une lecture
orale, il est bien de donner l'explication pour habituer les élèves à faire cet exercice. On peut en outre leur faire
repérer le surnom donné à chaque animal:
Le chien
Taïaut
Le chat
Vieux Raminagrobis
Le coq
Chanteclair
L'âne
Grison
3.4. Reformulation

Le livre et ses illustrations un peu enfantines s'y prête particulièrement: on peut faire reformuler chacun des 8
épisodes en les faisant dessiner, sous forme de BD avec des bulles pour les dialogues (et les pensées) et une
légende:
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
L'âne et le maître qui songe à s'en débarrasser, l'âne qui décide de fuir
La rencontre de l'âne et du chien
La rencontre du chat
La rencontre du coq,
L'âne observant les brigands qui mangent
Les 4 animaux empilés et criant pour effrayer les brigands
Les animaux qui dorment et rêvent chacun à leur place
La visite du brigand et ses mésaventures.
Si on se lance dans ce travail d'illustrations il est peut-être opportun de ne pas montrer aux élèves les images du
livre dans un premier temps. La comparaison des dessins et des images du livre enrichira la discussion sur la
manière dont le livre est illustré (voir plus bas).

Les pages centrales du livres (17-18) nous y invite: on peut faire faire retracer
le chemin parcouru par les animaux (jusqu'à Brême où ils n'iront jamais) et
faire jouer les différents épisodes avec des petites marionnettes.

chacun des 8 épisodes peuvent aussi être joué devant la classe (on peut aussi
reproduire le plan du chemin parcouru sur une grande feuille, posée à terre).
3.5. Travail sur les illustrations
Réfléchir avec les élèves sur ces illustrations. Pourquoi nous semblent-elles
bizarres, décalées?
Elles mélangent les temps dans de joyeux anachronisme - chasseurs aux
fusils (de l'époque des frère Grimm?), brigands en habits de la fin du Moyen Age (époque des événements
racontés dans le conte) - et les lieux (Brême est associée à des Cow-boys du Far West et le vieux chat européen
fait des rêves d'Indiens)…
En réalité, si on y prête aussi attention, même quand elles paraissent tout à fait "à côté" du récit, on se rend
compte qu'elles renvoient toujours à un mot ou l'autre du texte. Ainsi, on peut imaginer qu'elles ont voulu
reproduire des illustrations d'un enfant qui mélangerait allégrement toute une série d'histoires, de dessins animés
et de films et qui ne comprendrait pas toujours bien les mots et les expressions utilisées. Ainsi, l'expression "un
chat triste comme trois jours sans pluie" est illustrée au sens propre. Lorsque le chien dit qu'il ne peut plus
chasser, l'enfant dessine un chien et un chasseur avec un fusil, ce qui dans son imaginaire lui fait penser à un
Cow-boy, d'où la présence des Indiens plus loin. Le coq (boiteux?) va devoir se faire manger. Ces deux faits sont
associés dans l'imaginaire de l'enfant à une jambe de bois et les fourchettes à des sabres croisés, de là le drapeau
de pirates…Le choix des couleurs, les décors géométriques renvoient aussi à quelque chose d'enfantin et
d'onirique, tout comme l'idée de dessiner des yeux aux nuages, maisons et lunes.
L'ensemble donne quelque chose de joyeux, très onirique et un peu subversif… On peut se demander du reste si
cet enfant qui mélange un peu les récits et s'en amuse, ne serait pas en fait "le dernier qui a raconté l'histoire [au
narrateur] et qui s'en fait encore des gorges chaudes". Ce grand méli-mélo d'images renverrait donc à la
moquerie finale de ce texte qui bouleverse l'ordre social établi. Tout comme le conte donne la victoire aux vieux
animaux mis au rebus, les illustrations sont la victoire de l'imagination sans limite de l'enfance, hors des logiques
des bien-pensants, des adultes, des fermiers, de ceux qui tirent les ficelles…
Valise DECOUVERTE
3.6. La fin et fausses interprétations
Il est important que les élèves comprennent bien la ruse finale des animaux. Pour cela, on peut leur faire mettre en regard, ce qui se fait réellement et ce que les voleurs
interprètent. Ce travail est important pour habituer les élèves à prendre conscience l'écart entre ce qui peut se passer dans une histoire et la compréhension que peuvent en
avoir des personnages et qu'il ne faut pas toujours se fier à ce que les personnages comprennent de la réalité. En tant que lecteur, on en sait souvent plus que les personnages
(on sait s'ils mentent, s'ils se trompent, s'ils prennent une mauvaise décision…). Cette construction mentale est souvent compliquée pour les élèves et il important de le
travailler spécifiquement
Ce qui se passe en réalité
Le texte
L'éclaireur vit que tout était silencieux. Il
entra dans la cuisine pour allumer une
lumière. Voyant les yeux du chat brillants
comme des braises, il en approcha une
allumette et voulut l'enflammer. Le chat ne
comprit pas la plaisanterie et, crachant et
griffant, lui sauta au visage. L'homme fut saisi
de terreur. Il se sauva et voulut sortir par la
porte de derrière. Le chien, qui était allongé
là, bondit et mordit les jambes. Et quand le
brigand se mit à courir à travers la cour,
passant par dessus le tas de fumier, l'âne lui
expédia un magistral coup de sabot. Le coq,
que ce vacarme avait réveillé et mis en alerte,
cria du haut de son perchoir: Cocorico.
Ce qui se passe en réalité
Reformulation avec les
élèves
Un voleur s'approche des
yeux
chat
avec
une
allumette, le chat lui saute à
la figure avec ses griffes; le
chien qui est couché vers la
porte, le mord à la jambe,
l'âne qui est vers le fumier,
rue, le coq crie Cocorico.
Ce que croient les voleurs
Le texte
Les fausses interprétations du voleur
(élèves):
Il y a dans notre maison une affreuse
sorcière qui a soufflé sur moi et m’a
griffé le visage de ses longs doigts.
Devant la porte, un homme muni d'un
couteau m'a blessé aux jambes. Dans
la cour il y a un monstre noir, qui m’a
frappé avec une massue de bois. Et
perché sur le toit, un juge de paix
criait: "Amenez-moi le malandrin"
J'ai fait ce que j'ai pu pour m'enfuir.
La sorcière = le chat
L'homme armé d'un couteau devant la
porte = le chien qui mord
Le monstre noir avec une massue = l'âne
qui rue
Le juge qui crie " Amenez-moi le
malandrin " = le coq qui crie Cocorico*
*Note
On comprend forcément un peu mieux la
confusion du brigand avec le texte
allemand: "Kikeriki!" devient aux oreilles
du voleur 'Bringt mir den Schelm her".
Valise DECOUVERTE
4.
Écritures
4.1. Comme le propose Christophe Rigolot, on peut imaginer une nouvelle rencontre, comme par
exemple une chèvre qui ne donnerait plus de lait mais bêlerait encore de la plus belle manière. Les
élèves imagineraient ainsi le dialogue (donc au présent) entre l'âne et la chèvre:
Tandis que les quatre compagnons cheminaient en direction de Brême, ils aperçurent soudain une chèvre, cornes
baissées, barbiche ébouriffée, bêlant comme une âme en peine.
"…………………………., dit l'âne. ……………………………."
"…………………………, répondit la chèvre. ………………………………………."
"…………………………., proposa l'âne. ……………………………."
La chèvre accepta et se mit en route avec ses nouveaux camarades.
4.2. Travailler sur les anachronismes relevés dans les illustrations.
Demander aux enfants de parsemer ce conte ou un autre récit traditionnel, d'objets, de situations,
voire de mots de notre époque. Amusement garanti.
5.
Interprétation du conte (symbolique et prolongement)
Les frères Grimm se moquent:
À l’époque des frères Grimm, la fanfare de Brême avait une mauvaise réputation et certains comparaient sa
musique à des cris d’animaux. Les animaux du conte vont constituer une fanfare mêlant braiments, miaulements,
aboiements et cocoricos.
Les frères Grimm interrogent:
La question de la vieillesse et la "mise au rebus, au ban de la société". Cette question garde toute son actualité
dans notre époque productive.
Demander aux élèves quelles tâches accomplissaient les quatre animaux à la ferme :
l’âne
portait des fardeaux,
le chat
chassait des souris,
le chien
protégeait ses maîtres,
le coq
servait de réveil matin
Ils comprendront ainsi pourquoi leurs maîtres estimaient qu’ils étaient devenus inutiles, puisqu’ils
ne pouvaient plus les accomplir. Puis introduire un débat sur la vieillesse.
Débat que l'on peut éventuellement poursuivre par l'écoute Des Vieux de Jacques Brel.
La question de solidarité, l’entraide : face à l’adversité les quatre animaux s’entraident et forme une entité
collective capable de mettre en fuite les voleurs.
Ce conte permet donc de formuler à la fois un avertissement : qui devient vieux n’est plus rentable et on risque
de se débarrasser de lui. Et un conseil : « L’union fait la force » ou d’évoquer la phrase des quatre mousquetaires
« Un pour tous, tous pour un ».
On pourra montrer aux élèves que les quatre animaux ont besoin d'être tous les quatre pour,
à deux reprises chasser les voleurs, que seul aucun des quatre n'y serait parvenu.
La question du voleur volé: Est-ce juste de voler des voleurs? Voler un voleur n'est-ce pas devenir soi-même
voleur? L'histoire des voleurs volés fait penser au conte des 1001 nuits "Ali Baba et les quarante voleurs".
Une analyse de la portée subversive des contes de Grimm par Denis Thouard se trouve ici:
www.cndp.fr/.../dossiers_pedagogiques/dossier_pedagogique_du_coq_a_l_ ane.pdf, p. 17-18.
Valise DECOUVERTE
6.
Contes en réseaux
-
-
Contes en randonnée avec des animaux: trop nombreux pour être cités, on trouve un répertoire assez
complet ici. Parmi les plus célèbres: La moufle; Le bonnet rouge.
Le thème du départ de la ferme : La maison sur la colline
Le thème des maisons isolées (lueur dans la nuit, habitées par des créatures malfaisantes) : Hansel et
Gretel , Le Petit Poucet
Le thème des brigands: Ali Baba et les 40 voleurs.
7.
Musiques en réseaux
-
Ecouter des œuvres qui ont cherché à associer des instruments, des mélodies aux animaux: on peut
penser au Carnaval des Animaux de Saint-Saëns ou à Pierre et Le Loup de Prokofiev

Documents pareils