Le 12 avril, le boxeur Sébastien Cornu dispute la ceinture du

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Le 12 avril, le boxeur Sébastien Cornu dispute la ceinture du
SPORT
SÉBASTIEN CORNU, BOXEUR PROFESSIONNEL
L’ASCENSION DU SCORPION
L
Le 12 avril, le boxeur Sébastien Cornu dispute la ceinture du championnat
intercontinental de la fédération WBF, catégorie super-plume, au Kényan
David Kiilu. Une étape charnière de la carrière de ce professionnel, venu
de la banlieue parisienne, désormais installé à Rennes.
un gars de 70 kg. » Au point que de nombreux
boxeurs de sa catégorie rechignent à essuyer la
droite de celui que l'on surnomme le « Scorpion ».
L'arachnide est d'ailleurs tatoué sur son omoplate. Sébastien Cornu s'est peaufiné un look au
millimètre. Son collier de barbe, finement taillé,
se termine sur deux bijoux brillant à ses oreilles.
Son crâne est impeccablement rasé. Huit années
de boxe n'ont pas marqué particulièrement son
visage. Tout juste devine-t-on, aux coupures sur
ses sourcils, que ses arcades ont déjà cédé aux
R. Joly
orsqu'il monte sur la balance, c'est
le couperet. Comme s'il pesait ses
bagages avant d'embarquer à bord
d'un avion. Sébastien Cornu, 28 ans,
ne doit jamais dépasser les 58,967 kg.
Précisément, la limite exacte en poids de sa catégorie, les « super-plumes ». Un intitulé qui va
bien au boxeur professionnel du Cercle Paul-Bert
(CPB). Cette précision, on la retrouve aussi dans
ses coups : « Ils sont secs, ils piquent, observe son
entraîneur, Cédric Laporterie. Il frappe comme
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Le Mensuel
Mensuel/avril 2012
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assauts de ses adversaires… Pas de marques
indélébiles, mais une gueule de boxeur, indéniablement. Et une présence qui laisse penser que le
bonhomme a le sens de la maîtrise. De l'électricité
semble circuler dans ses mains.
La carte et le crayon
L'entretien commence, sans chichi. Sébastien
Cornu sort tout juste de son entraînement, salle
Louis-Volclair, à deux pas du métro Italie, dans le
quartier du Blosne, à Rennes. Collants noirs, veste
de survêt', il s'assoit sur un coin de table. Répond
aux questions en sportif professionnel. Décontracté. Après quelques minutes de conversation,
il s'en va vers le fond de la salle. Revient une feuille
de papier à la main, en continuant à mâchonner
un chewing-gum, ce qui lui donne un petit côté
marlou à la Robert de Niro. Il tend une photo
imprimée : on y voit la ceinture Intercontinental de la WBF, une fédération moins prestigieuse
que les WBA, WBO, ou WBC… Mais elle constitue
son Graal : le 12 avril, il combattra David Kiilu, un
Kényan d’1 m 80, à la réputation déjà faite. Le combat le plus important de la carrière de Sébastien,
avec celui disputé en finale du championnat de
France. En juin 2011, face à Romain Jacob, il avait
perdu aux points.
Voilà un défi de taille pour ce bonhomme d'1 m 72.
A l’image de son parcours de combattant qui s'est
battu pour franchir les obstacles. Sébastien Cornu
a grandi à Chatou, en banlieue parisienne (Yvelines), où il a été élevé par sa mère, avec son frère
jumeau -« Celui qu'on fera sortir d'une trappe sous
le ring après six rounds face au Kenyan ! », rigole
Franck Teissedre, son manager.
« J'ai connu là-bas quelques démêlées avec la justice », revèle pudiquement le boxeur. Les potes,
les conneries… « Un jour, sa mère en a eu marre.
Elle a pris un crayon, elle s'est mis un bandeau
sur les yeux, et elle l'a pointé au hasard sur une
carte », raconte son manager. Il s'est retrouvé à
Drucourt, 600 habitants, dans l'Eure. Pour faire
vivre la famille, sa mère a continué matin et soir les
allers-retours avec Paris, où elle travaillait.
Sébastien a commencé la boxe en région parisienne, avec Laurent Boucher comme encadrant.
Une référence dans le milieu de la boxe. Il a alors
20 ans, un âge tardif pour se lancer. Son déménagement en Normandie n'interrompt pas sa carrière. C'est là qu'il rencontre celui qui ne l'a plus
quitté, Franck Teisseidre. « J'ai découvert un mec
passionné, écorché vif », se souvient l'intéressé.
ÉCHOS SPORT
R. Joly
Après une saison où le courant ne passe pas avec
la direction du club de Lisieux, Sébastien Cornu
s'entraîne seul. Il rencontre Cédric Laporterie, qui
le prend sous sa coupe, au CPB, où il trouve l'encadrement et les infrastructures qui lui permettent de s'épanouir.
Domaine interdit
Il vit désormais à Bourgbarré, en pleine cambrousse, avec sa femme. Loin de la banlieue parisienne. « Je me sens bien à la campagne. Je peux
aller faire mes deux footings hebdomadaires de
12 km. » Un cadre de vie qui tranche avec celui
de son passé. « On traînait dans les cages d'escalier… Quand j'y repense, je me dis qu'on était
vraiment cons. »
Ce passé, justement, il l'aborde peu. « Oulala !
C'est un peu le domaine interdit », explique Franck
Teissedre. Il en garde les traces. « Il est assez
réservé, il a beaucoup de mal à faire confiance »,
estime Cédric Laporterie. Une impression qu'il ne
« LA BOXE EST UN SPORT OÙ
S. CORNU
8 novembre 1983 Naissance à
Gisors (Eure)
Avril 2005 Premier combat en
amateur
2008 Passage chez les
professionnels
Juin 2012 Perd aux points
en finale du championnat de
France face à Romain Jacob
IL FAUT AIMER PRENDRE DES COUPS
Sébastien Cornu
nous a pas du tout laissée lors de notre rencontre.
Son coach y voit le signe d'un changement : « Il
a compris que tous les gens qui l'entouraient
n'étaient pas mauvais et n'essayaient pas de profiter de lui. »
Son parcours de vie ressemble à celui d'un scénario de film. Celui du p'tit gars de banlieue qui
n'a pas basculé dans un cercle vicieux, car il pouvait se défouler sur les rings. Comme nombre de
boxeurs, pourrait-on penser. « Ils ne courent pas
les salles, loin de là », corrige Cédric Laporterie.
Sébastien Cornu acquiesce : « A Paris, j'ai vu des
lascars qui essaient… Ils aiment donner des coups,
mais pas en prendre. Ils arrivent à découvert et se
font cogner. Ils ne reviennent pas. La boxe est un
sport où il faut aimer prendre des coups. » Le 12
avril prochain, il espère qu’il en donnera plus que
son adversaire. Ce sera après le moment de vérité
sur la balance, la veille, lors de la pesée. Comme
à chaque combat, il ne faudra pas dépasser les
58,967 kg.
Xavier Thierry
[email protected]
LES SPORTS INDIVIDUELS
BIENTÔT AIDÉS PAR RENNES
MÉTROPOLE ?
»
Sébastien Cornu, ici dans
la salle d'entraînement,
Louis-Volclair. Il prépare
son combat du 12 avril au
rythme de quatre heures
d'entraînement par jour.
L
es sports collectifs vont-ils devoir partager la manne
financière accordée par Rennes Métropole avec les disciplines
individuelles ? La collectivité a reçu plusieurs demandes dans ce
sens de la part des « laissés-pour-compte » du sponsoring sportif.
Elle phosphore sur la question.
Cette saison, elle a contourné la loi qui confère aux
municipalités –plutôt qu'aux communautés d'agglomération–
la compétence sportive. Dans ce but, elle a décidé d'aider les
clubs en communiquant à travers le sport, notamment grâce à
l'achat d'espaces publicitaires. 520 000 € ont été répartis entre
dix clubs de haut niveau. Cesson Rennes Métropole handball
a reçu 250 000 €, le Stade rennais 150 000 €, le Rennes volley
100 000 €. D'autres équipes de niveaux inférieurs ont chacune
reçu 10 000 € : Rennes Métropole handball, Rec Volley féminin,
Avenir de Rennes basket féminin…
Ce budget concerne des sports collectifs. Pourtant, des clubs
de haut niveau dans des disciplines individuelles galèrent
financièrement. Leurs responsables aimeraient être aidés. Les
dirigeants du club de tennis de table de Thorigné-Fouillard
(troisième division) ont rencontré Michel Gautier, vice-président
délégué à la communication, ces dernières semaines. Ils ont
récemment renoncé à un déplacement à Maribor (Slovénie), pour
disputer une compétition européenne, faute de moyens financiers.
L'agglomération a reçu plusieurs demandes de ce type. Elle a
déjà répondu négativement par courrier au club de triathlon de
Cesson-Sévigné. La communication de Rennes Métropole indique
toutefois « qu'elle communiquera sur le sujet en fin de saison ».
EN BREF
DES PONGISTES ARCHI-GÂTÉS
Les amateurs de ping-pong de Thorigné-Fouillard ne roulent pas sur l'or. Ils pratiquent
pourtant dans un bel équipement à trois millions d'euros. Leur salle de tennis de table,
d'une valeur d'1,5 million d'euros, est intégrée à un complexe comprenant également
une salle de basket de la même valeur. A quelques kilomètres de là, Cesson-Sévigné a
inauguré en octobre une nouvelle salle de 2 000 m2 à plus de deux millions d'euros. Ce
qui fait dire à Sébastien Thomas, trésorier du club thoréfoléen: « Nous avons deux des
cinq plus belles salles de tennis de table en France à quelques kilomètres d'écart. »
LE RENNES VOLLEY, VAINQUEUR SANS GAIN
Retrouvez un diaporama sonore du combat
de Sébastien Cornu prévu le 12 avril sur
La victoire historique du Rennes volley 35 en Coupe de
France n’aura aucune répercussion sur les finances du
club. La Fédération française de volley n'a prévu aucun
gain pour le vainqueur. Pas de panique : le coprésident,
Thibault Mativet, est persuadé que cette première ligne
de palmarès va permettra de convaincre de nouveaux
partenaires privés.
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