Nous croyons. La violence n`aura pas le dernier mot.
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Nous croyons. La violence n`aura pas le dernier mot.
BP10278_Hungertuch_Seiten 9.11.2004 7:26 Uhr Les artistes La tenture de carême est une œuvre collective réalisée par sept femmes latino-américaines qui purgent une peine de prison à Francfort. Elle évoque leur vie en Amérique latine, leur foi et la détresse qui les a amenées à convoyer de la drogue vers l'Europe. Le vécu individuel de chacune n'apparaît qu'en filigrane. L'une de ces femmes traversait toute la mégapole de Sáo Paolo à pied pour aller travailler et pouvoir payer à manger à ses enfants et les envoyer à l'école. Quand elle a perdu son emploi, elle s'est prostituée pour gagner son pain. Poussée par le désespoir, elle a accepté de convoyer de la drogue, ce qui l'a amenée en prison à Francfort. La violence de la faim et de la pauvreté sont le lot quotidien des créatrices de la tenture. Pour cette raison, elles l'ont intitulée «Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour». Le pain quotidien auquel elles aspirent signifie aussi, pour elles, la force spirituelle indispensable pour surmonter la violence qu'elles subissent et pour vivre dans la dignité. Description de la tenture Seite 2 Nous croyons. La violence n'aura pas le dernier mot. Tenture de carême latino-américaine La campagne œcuménique de l'Action de Carême, Pain pour le prochain et Etre partenaires s'intitule «Nous croyons. La violence n'aura pas le dernier mot». C'est un véritable défi. La tenture de carême, conçue par des femmes latino-américaines ayant convoyé de la drogue, le montre. lence et enlève à la mort son aiguillon. La résurrection de Jésus le jour de Pâques montre que son cheminement d'amour inconditionnel n'est pas dépourvu de sens, ne débouche pas sur la mort, mais mène à la vie. Réflexion de l'artiste: «Pourquoi ai-je peint une colombe sur une croix? C'est l'irruption de Dieu dans ma vie. La colombe symbolise le Saint-Esprit, l'Esprit vivant de Dieu, dont Jésus est rempli. Quiconque croit en lui surmonte la faim et la guerre.» (Adriana) Le fil rouge Des femmes qui protestent Chaque femme a peint le labyrinthe de sa vie. Le fil qui court sur le fond relie ces labyrinthes les uns aux autres. Il représente la solidarité qu'elles ont vécue en donnant une forme collective à leur destin individuel. Ce sont les Chiliennes des classes moyennes et aisées qui ont commencé à taper sur leurs casseroles du haut de leurs balcons pour exiger la démission du président Allende. Plus tard, des femmes pauvres d'Argentine et d'autres pays latinoaméricains ont repris cette forme de protestation dans la rue. Aujourd'hui, le tintamarre de casseroles et de couvercles est devenu un symbole de l'action collective des femmes contre la faim et l'injustice. C'est un exemple de résistance pacifique qui permet de dépasser la violence des rapports de pouvoir. L'enfant de la rue Les enfants de la rue sont des exemples visibles de la pauvreté, de la violence à l'état brut. «Les bambins réclament du pain; personne ne leur en présente.» (Lamentations 4, 4). Il y a des millions d'enfants de la rue dans le monde. Le plus souvent, les parents ne sont pas en mesure de prendre soin d'eux. Dans les pays en guerre ou dans les régions durement touchées par le SIDA, des orphelins sont également livrés à euxmêmes. Pour surmonter ces formes de violence liées à la guerre et à la pauvreté, de nombreuses institutions offrent à des enfants un toit et la possibilité d'apprendre quelque chose. Dans des pays comme le Pérou ou le Brésil, les enfants de la rue ont même mis sur pied leurs propres organisations d'entraide. Réflexion de l'artiste: «Je souhaite que les enfants de la rue puissent manger à leur faim chaque jour, aller à l'école, jouer et recevoir une bonne éducation.» (Julia) La colombe devant la croix Ce motif religieux exprime le lien paradoxal entre la religion et la violence. Ce sont des chefs religieux qui ont voulu la mort de Jésus. L'ambivalence de la religion face à la violence ne saurait s'exprimer plus clairement. Mais le cheminement pacifique de Jésus jusqu'à la Croix est aussi à l'origine d'une foi qui casse la spirale de la vio- Réflexion de l'artiste: «Les femmes ont le courage de manifester haut et fort et d'attirer l'attention des responsables politiques sur leur situation.» (Lisa) Des mains qui s'activent Sur la tenture de carême, on voit trois corbeilles remplies de haricots. Des mains de différentes couleurs s'activent dans ces paniers bien remplis. Le partage des fruits de la terre et du travail des hommes pourrait permettre à tous de vivre dans la dignité. Mais dans l'hémisphère sud, on travaille souvent du matin au soir, par familles entières, sans arriver à nouer les deux bouts. Le revenu des gens qui travaillent baisse, alors que la fortune des possédants augmente: c'est une forme de violence structurelle. «Ils n'ont pas le sens de l'action droite, ces entasseurs de violences et de rapines dans leurs palais», disait déjà le prophète Amos (Amos 3, 10). Le système économique mondial actuel accélère ce processus. Mais il existe des alternatives, des formes de commerce justes et équitables. La fondation Max Have- laar par exemple, garantit aux producteurs des pays pauvres un revenu qui leur permet de subvenir à leurs besoins. Réflexion de l'artiste: «Si tout le monde collabore et partage, il y aura suffisamment pour chacun.» (Luisa) Une cuisine populaire Cette image d'une cuisine populaire latinoaméricaine montre comment répondre à court terme à la faim. En s'organisant à l'échelle d'un quartier, on peut répartir entre tous le peu qu'il y a. Les marmites sont pleines, mais les assiettes restent vides, l'image montre qu'à long terme, ces initiatives locales ne suffisent pas. Pour enrayer cette forme de violence, il faut que les rapports internationaux changent fondamentalement. Il s'agit de faire valoir à grande échelle ce qui se pratique déjà en petit. Jésus montre la voie en nourrissant cinq mille hommes dans le désert (Marc 6, 30-44): là où le partage se fait avec amour, tous sont rassasiés. Réflexion de l'artiste: «Je souhaite voir des hommes et des femmes prêts à partager.» (Josefa) «Cristo quita hambre y sed», «le Christ calme la faim et la soif». La foi dans le Ressuscité donne à la vie sa force et son sens. Un engagement sans éthique et sans fondement spirituel, même contre la violence, risque fort de tourner à vide. Du pain et des roses, des mains qui partagent Le pain est un symbole de vie. C'est aussi une image du souci de Dieu pour le bienêtre corporel. Dieu veille à ce que l'homme tire «son pain de la terre» et que «le pain réconforte le cœur des humains» (Psaumes 104, 14s.). Statistiquement, les terres cultivées fournissent presque un kilo de céréales par jour et par personne, et pourtant 800 millions d'hommes et de femmes souffrent de la faim. Nous sommes-nous habitués à cette violence structurelle? La communauté internationale est-elle prête à faire tout ce qu'elle peut pour atténuer cette injustice? Dans la Bible, le pain est aussi un symbole de nourriture spirituelle. Jésus se désigne lui-même comme «le pain vivant» (Jean 6, 51). Le souci du corps et celui de l'âme sont inséparables. L'Eglise primitive invitait les fidèles à «rompre le pain» pour célébrer l'Eucharistie ou la Sainte-Cène, et ce geste faisait partie d'une agape à laquelle tous apportaient leur contribution. Là où le pain se partage, la vie devient partage, là s'effectue le miracle, et tous sont rassasiés. C'est l'annonce du royaume de Dieu: «Qui a semé dans les larmes, moissonne dans la joie» (Psaume 126, 5); la guerre sera évitée par l'arbitrage (Michée 4,3–4); «la paix sera le fruit de la justice» (Esaïe 32, 17). Les roses, symboles d'un amour plus fort que la violence, renvoient peut-être à cela. Elles rappellent que l'homme ne vit pas de pain seulement, mais qu'il a faim d'amour, de justice et de communauté. Les roses sont un symbole de la Vie qui est en soi digne d'amour Les «menus» (bordure inférieure de la tenture) «Hoy arroz»» (aujourd'hui, il y a du riz). Le menu du jour renvoie à la première denrée alimentaire au monde : le riz, dont se nourrit la moitié de l'humanité. Plus de 800 millions de femmes, d'hommes et d'enfants ne mangent pas à leur faim. C'est la forme de violence la plus massive que subissent les humains. Il y a assez à manger pour chacun, mais les biens sont mal répartis. La clef pour mettre fin à cette violence réside dans le partage et l'instauration de conditions économiques équitables à l'échelle mondiale «Sangue è vida», le sang c'est la vie. Cette parole biblique correspond au vécu des créatrices de la tenture. Le sang est indissociable de la féminité et de l'accouchement. Mais ces femmes ont aussi fait l'expérience de la violence sexuelle. Le sang dont il est question ici symbolise la violence imposée à des centaines de milliers de femmes. Pour la dépasser, il faut que les femmes aient droit à la parole, que leur travail pour la paix soit reconnu, que justice leur soit rendue. Réflexion de l'artiste: «J'ai eu l'idée de représenter des mains qui rompent le pain et versent le vin, les biens que Dieu nous donne; et des roses comme signes de l'amour de Dieu.» (Elisa) Urs Brunner-Medici, Action de Carême Beat Dietschy, Pain pour le prochain La tenture de carême, imprimée sur toile, est disponible en grand format (280 x 194 cm) et en petit format (136 x 83 cm) au prix respectif de Frs 190 ou Frs 40.– A commander auprès de Pain pour le prochain, Av. du Grammont 9, 1007 Lausanne, ou à l'Action de Carême, centrale du matériel, case postale 2856, 6002 Lucerne. PAIN POUR LE PROCHAIN ACTION DE CARÊME