Enseignant à temps partiel ou maître auxiliaire?
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Enseignant à temps partiel ou maître auxiliaire?
reissoD Dossier Formation professionnelle suisse Enseignant à temps partiel ou maître auxiliaire? Pour délimiter ses fonctions, on parle communément «d’enseignant auxiliaire». Cette appellation peut être péjorative, le mot «auxiliaire» étant défini ainsi par le Petit Robert 1 de 1990: Adj. 1° Qui aide par son concours, (sans être indispensable). V. accessoire, adjoint, annexe, complémentaire, second. N. 2° Employé recruté à titre provisoire par l’administration – (non fonctionnaire). On va donc parler dans cet article de «maîtres aux Ecoles professionnelles à temps partiel». C’est, à notre sens, le terme qui convient pour désigner une fonction, un métier qu’ils accomplissent avec toute leur énergie et leur conscience professionnelle. 32 8 1999 André Steiner Du côté de la sélection C ’est un boulanger, c’est un ingénieur, un patron de restaurant, un médecin, une personne porteuse d’une maîtrise fédérale, c’est aussi un enseignant de culture générale qui complète ses heures, une infirmière, un maître coiffeur, un vendeur, un notaire, un architecte, un juriste, un électricien, un peintre, un cuisinier, un photographe … En tout, plus de deux cent professions. Toutes ces personnes sont généralement recrutées par les centres de formation professionnelle pour transmettre durant quelques heures par semaine leurs connaissances et leur savoir-faire. On a sélectionné les meilleurs, ceux qui veulent bien donner un peu de leur temps et de leur précieuse expérience aux apprentis. Dans les écoles professionnelles que nous connaissons, cet enseignant est un élément essentiel qui intègre dans un milieu scolaire son savoir-faire, sa pratique professionnelle, son expérience quotidienne. Les maîtres à temps partiel représentent environ les 80% du personnel enseignant aux écoles professionnelles. D Du côté du statut Autrefois, on ne rétribuait l’enseignant à temps partiel qu’avec les 80% du salaire d’un maître nommé! L’enseignant auxiliaire ne touchait que ses heures d’enseignement effectives (les jours fériés n’étaient donc pas payés). Aujourd’hui, grâce au travail des syndicats d’enseignants et des sections cantonales, les choses ont changé. Cet «enseignant» dont la fonction principale reste l’exercice de sa profession, est engagé, selon les cantons, soit sous contrat de droit privé CO, soit selon des Ordonnances relatives à l’en- gagement du personnel enseignant. Dans sa profession, qu’il soit patron ou employé, il est engagé pour quelques heures par semaine pour un semestre, pour une année. Mais il peut, selon le nombre d’apprentis, les besoins, perdre le semestre suivant, 3, 5,19 … leçons hebdomadaires. Son salaire d’enseignant n’est donc pas assuré. Son statut de maître dépend d’une relation de confiance qu’il doit sans cesse établir et maintenir avec son directeur, ses apprentis, ses collègues. Par ce système d’engagement, une école professionnelle peut ainsi garder les meilleurs éléments, éliminer les moins motivés, si leurs performances deviennent moins satisfaisantes. Ainsi, la fragilité de son statut fait de cet enseignant un homme souvent discret. Dossier reissoD Formation professionnelle suisse L’enseignant à temps partiel découvre la pédagogie en faisant ses premières expériences «sur le terrain». Trop souvent seul, parfois en s’appuyant sur le cours du collègue qui l’a précédé, il démarre avec peu d’éléments de références pédagogiques. Généralement avec beaucoup d’enthousiasme, fort de ses connaissances pratiques et de son expérience, il découvre ou redécouvre le monde de l’enseignement, de la pédagogie. Pas toujours facile de comprendre les apprentis, quand on n’a pas d’autres références pédagogiques que celles qui remontent à sa propre scolarité … Pas facile non plus de savoir comment parler judicieusement à un jeune qui éprouve des difficultés relationnelles ou des blocages. L’enseignant à temps partiel découvre petit à petit la portée de certaines phrases, de certains mots dans une classe. Il s’aperçoit avec les années que ce métier n’est pas aussi simple qu’il le croyait avant de le pratiquer personnellement. Un maître de technologie qui enseigne 6 leçons hebdomadaires en une journée m’avouait récemment qu’il ne savait pas pourquoi, mais que ce jour-là, à 17 heures, il avait l’impression d’être lessivé alors qu’il lui semblait qu’il n’avait rien fait d’autre que … d’expliquer, de parler à ces jeunes. Il découvre par la pratique une réalité, un aspect du «plus beau métier du monde». donc leurs propres soucis professionnels …) pour s’engager souvent «à fond» et avec enthousiasme dans un emploi fréquemment précaire, dans des conditions parfois difficiles, pour donner à leurs élèves le meilleur d’eux-mêmes avec toute la patience requise … FPS voudrait également les inciter à adhérer plus massivement et à s’engager dans les Associations cantonales, celles-ci étant précisément en train de chercher à améliorer leur statut. Si tous les enseignants à temps partiel voulaient se donner la main ... Du côté des revendications – – – – – – Du côté du perfectionnement – S’il tient le coup, s’il persévère, si on est content de lui, on l’incite – et dans certains cantons on l’oblige – à suivre des cours de pédagogie, souvent mis sur pied par L’ISPFP. Il en revient avec des prises de conscience nouvelles, il découvre ainsi le monde complexe de la pédagogie et de la psychologie. Il aborde avec un autre regard certaines réalités. «J-C.B: Je ne savais pas qu’il ne fallait pas parler plus de 15 minutes car, après ce laps de temps, les élèves ne m’entendaient plus; je ne me souvenais plus non plus qu’être assis pendant 10 heures c’est un peu long; j’ai découvert que nous possédions un cerveau complexe et que le cerveau affectif est essentiel.» Son statut pour les cours de perfectionnement n’est pourtant pas encore bien défini dans tous les cantons. La perte de gain n’est pas toujours compensée, selon l’école et le canton. Inégalité de traitement? Avec le numéro spécial qui leur est destiné, FPS voudrait rendre un hommage particulier à ces femmes et à ces hommes qui acceptent de quitter leur propre travail et ne craignent pas, pour quelques heures hebdomadaires, de laisser leur chantier, leur étude, leur bureau, leur atelier (et Egalité dans le secondaire II (même traitement horaire dans toutes les écoles : lycée, école de commerce, etc.). Nomination des maîtres employés par contrat de droit privé engagés dans les écoles à plus de 55%. Moratoire sur l’introduction des contrats de prestations. Collaboration intercantonale et cours décentralisés. Réduction des inégalités entre les cantons suisses. Harmonisation du temps de travail au niveau fédéral pour toutes les catégories d’enseignants et harmonisation des échelles de salaires. Quantité et pénibilité du temps de travail des enseignants à prendre en compte. Du côté des sections qui vous défendent Pour la Suisse romande: Jura et Jura bernois AMEP, M. Vincent Baume, Rte de Montancy 486, 2903 Villars-sur-Fontenais, tél. No 032/466.29.14 Fribourg AFEP, Vaud la SVMEP, M. Peter Christen, Place Petit St. Jean 25, 1700 Fribourg, tél. No 026/481.62.72 Neuchâtel SAEN: M. Philippe Milardo, Rue Charles Perrier 7, 2074 Marin, tél. No 032/753.58.52 Valais, AVEP, Mme Ghislaine Allaman, Rue de Viannes 10, 1920 Martigny, tél. No 027/722.50.78 Vaud, SVMEP, M. Alain Hubler, Case postale 1397, 1001 Lausanne, tél. No 021/729.36.81. 33 8 1999 Du côté de la pédagogie reissoD Dossier Formation professionnelle suisse Du côté de la FPS La professionnalisation comme stratégie d’amélioration du statut et des conditions de travail des enseignants. Bien que la FPS ne puisse pas interférer dans les situations cantonales (pays fédéraliste) et analyser les conditions de travail des enseignants, il est cependant évident que l’on ne peut dissocier les conditions de travail des politiques de renforcement du rôle des enseignants dans un monde en changement. La préoccupation face à la dégradation du statut des enseignants toujours plus sollicités est cependant répandue. 34 8 1999 Bien que les situations cantonales soient très diverses, la revalorisation du statut des enseignants apparaît souvent comme une condition nécessaire au renforcement de leur rôle. Mais cette revalorisation ne peut pas être le produit d’une seule mesure ou d’un seul facteur. A cet égard, l’amélioration de la situation matérielle des enseignants, notamment leur salaire et les autres avantages sociaux, est une condition nécessaire mais non suffisante de la revalorisation de leur statut: c’est l’ensemble des facteurs éducatifs qui doit être amélioré. Dans une politique intégrée de revalorisation du statut des enseignants, la professionnalisation constitue la stratégie la plus prometteuse à moyen et à long terme. En plus des recommandations faites en ce qui concerne leur recrutement, leur formation, leur participation à la gestion et leur autonomie dans la prise des décisions pédagogiques, la revalorisation du statut des enseignants peut se faire selon les lignes d’action suivantes: – – – – – – favoriser le professionnalisme des enseignants, notamment en leur assurant une formation initiale et un perfectionnement professionnel continu de haut niveau, en établissant des profils de carrière diversifiés étayés par des systèmes d’évaluation appropriés et en améliorant les conditions matérielles et le statut social des enseignants; fournir les ressources nécessaires pour assurer cette formation au niveau universitaire; HEP, ISPFP; mettre en œuvre des stratégies systématiques de valorisation par l’intermédiaire des médias, des innovations et des expériences réussies des enseignants et des groupes d’enseignants; favoriser l’exploitation efficace de la recherche pédagogique et l’utilisation pertinente de l’information existante, aussi bien dans le processus d’enseignement et d’apprentissage que dans la prise de décision; prendre des mesures incitatives pour encourager les enseignants à améliorer leurs performances. Ces incitations ne seront pas seulement de nature financière, mais elles pourraient inclure des possibilités de formation spécialisée, de reconnaissance publique et des possibilités de carrière; trouver le bon équilibre entre les droits et les responsabilités des enseignants, comme le préconise la Recommandation OIT/UNESCO concernant la condition du personnel enseignant.