FRANCE – Immobilier résidentiel Évolutions récentes et
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FRANCE – Immobilier résidentiel Évolutions récentes et
Trimestriel – n°16/282 – 26 octobre 2016 FRANCE – Immobilier résidentiel Évolutions récentes et perspectives 2016-2017 Sommaire Un boom atypique Le marché résidentiel est en phase de net rebond depuis début 2015. Le nombre de transactions avait progressé de 15% en 2015. Mi-2016, les cumuls douze mois sont à nouveau en hausse de 15% environ et se rapprochent des points hauts du cycle précédent (2004-2007). Les prix repartent à la hausse, même si le mouvement reste modéré. Tendances récentes dans l’ancien et le neuf.........2 Niveau record de ventes dans l’ancien en 2016 ....................................................................2 Timide remontée des prix dans l’ancien .................2 Le boom actuel est toutefois assez atypique, avec des facteurs clairement haussiers, mais aussi des fragilités persistantes. Net rebond des ventes de neuf en 2016 ................2 La reprise récente est principalement liée à deux facteurs : Reprise de la construction en 2016 ........................3 des taux de crédit toujours plus bas, qui provoquent des effets de rattrapage ou d’aubaine et stimulent les ventes Encours de logements neufs en repli .....................3 Reprise du marché en 2015 et 2016 ........................4 Deux facteurs de soutien ........................................4 le plan de relance dans le neuf. Des fragilités persistantes .......................................5 Mais plusieurs fragilités persistent. L’environnement économique reste assez mitigé. De plus, les prix se sont peu corrigés et demeurent très élevés, même s’ils ne semblent plus surévalués. Le boom est ainsi atypique. Le marché est dopé par l’effet taux, mais les prix restent assez stables, avec des acheteurs vigilants et des vendeurs contraints de limiter leurs prétentions. Les anticipations de plus-values ne jouent donc pas et la dynamique haussière du marché semble limitée. En 2017, les déterminants du marché immobilier vont évoluer à peu près dans le même sens. Le seul facteur incertain est le niveau des taux de crédit. Deux scénarios sont possibles. Nous privilégions un scénario de légère remontée des taux OAT et des taux de crédit en 2017. L’effet d’aubaine pourrait donc s’atténuer. Mais un autre scénario est possible, un maintien des taux longs et des taux de crédit à un niveau très bas, voisin de celui de 2016. Dans notre scénario central de légère remontée des taux, les volumes de transactions dans l’ancien seraient en hausse de 5% en 2016 et en léger repli en 2017. Les volumes seraient en hausse de 15% dans le neuf en 2016 et à peu près stables en 2017. Les prix de l’ancien seraient en légère hausse, +1 à 2% par an. Dans l’autre scénario, le marché resterait très soutenu. Olivier ELUERE Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com Un boom atypique ...................................................5 Fin 2016-2017: marché soutenu, mais risque de légère inflexion .....................................................6 « Fondamentaux » favorables ................................6 Pas de risques majeurs sur les crédits habitat .......6 Contexte conjoncturel mitigé...................................6 Incertitude sur les taux de crédit .............................6 FRANCE – Immobilier résidentiel Evolutions récentes et perspectives 2016-2017 Olivier ELUERE [email protected] Tendances récentes dans l’ancien et le neuf Niveau record de ventes dans l’ancien en 2016 En 2015, les transactions de logements anciens s’étaient nettement redressées. Elles avaient atteint 803 000 unités, soit +15,7% sur un an1. Elles retrouvaient ainsi un niveau proche du boom immobilier de 2000-2007, après être restées relativement modérées pendant trois ans (2012-2014), autour de 700 000 unités par an. Les ventes progressent encore en 2016 et atteignent des records historiques. En août, le cumul douze mois atteint 843 000 unités, +14% sur un an. Les niveaux enregistrés entre mai et août, 836 000 en moyenne, dépassent les points hauts du cycle précédent, 827 000 en moyenne en 2004-2007. Le marché de l’ancien est donc très dynamique. Nous ne sommes pas pour autant dans un boom immobilier classique et l’euphorie actuelle reste relativement fragile. D’abord, les hausses de prix sont très modérées (cf. infra), alors qu’elles atteignaient 12% par an en 2004-2007. Ensuite, le dynamisme des ventes s’explique avant tout par un effet d’aubaine lié au niveau exceptionnellement bas des taux de crédit habitat. Mais certains facteurs négatifs persistent (environnement économique, niveau des prix, etc.) et toute inflexion sur les taux, mais aussi sur les prix, fragilisera le rebond actuel (cf. pages 4 à 7). France : transactions de logements anciens (par trimestre) 250 000 200 000 150 000 100 000 50 000 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 Nombre de transactions estimées Source : CGEDD, Notaires, CA France : prix des logements anciens En Ile-de-France, les ventes d’appartements anciens ont également fortement rebondi, avec une progression annuelle de 19% au T2 2016 (cumuls douze mois). 20 Timide remontée des prix dans l’ancien 10 Les prix des logements anciens se sont stabilisés en 2015 et sont en légère reprise en 2016. Ils étaient en baisse continue en 2012-2014, -2% par an en moyenne. En 2015, ils ont été quasistables, -0,4% sur un an au quatrième trimestre. La forte hausse des transactions conduit logiquement à un raffermissement des prix. Celui-ci reste toutefois lent et modéré. Au deuxième trimestre 2016, les prix se sont accrus de 0,6% sur un an, après 0,3% au premier. Ils sont remontés de 1,4% en Ile-de-France, de 0,3% en province et 2,6% à Paris. La baisse cumulée des prix dans l’ancien depuis le début du mouvement de correction (fin 2011) est faible, -7%, à comparer avec une hausse cumulée de 150% entre 1998 et 2011. Les données disponibles pour les villes et certaines régions s’arrêtent au premier trimestre 2016. Les prix se sont accrus de 0,7% en RhôneAlpes et 1,1% en Provence-Alpes-Côte d’Azur et ont stagné dans le Nord-Pas de Calais. Par ville, les évolutions de prix des appartements anciens restent contrastées : on note un recul de 10% à Nîmes, 7% à Poitiers, 5% à Grenoble. Les prix stagnent à Nice et Bordeaux et sont en hausse de 4% à Lyon, 6% à Metz et 8% à Clermont Ferrand. Les signes de raffermissement se confirmeraient sur les prochains mois. D’après les indicateurs avancés des Notaires Paris Ile-de-France, les prix des appartements en Ile-de-France seraient en octobre 2016 en hausse de 1,2% sur un an. À Paris, ils monteraient de 2,9%. a/a indice 120 15 100 5 80 0 60 -5 -10 40 97 99 01 03 05 07 09 11 13 15 Variation sur un an, % Indice base 100 T1 2010 Source : INSEE, Notaires, Crédit Agricole S.A. France : ventes de logements neufs 49 milliers par trim. 41 33 25 18 Net rebond des ventes de neuf en 2016 La reprise des transactions est également très nette dans le logement neuf, surtout dans le segment promoteurs. Les ventes promoteurs (programmes d’au moins cinq logements), qui avaient baissé entre 2011 et 2014, ont rebondi de 19% sur un an en 2015, à 1 10 91 94 97 00 03 Mises en vente Source : Ministère de l'Ecologie, CA 06 09 Source : Conseil général de l’environnement et du développement durable, d’après les bases fiscales et notariales N°16/282 – 26 octobre 2016 12 Ventes -2 - 15 FRANCE – Immobilier résidentiel Evolutions récentes et perspectives 2016-2017 Olivier ELUERE [email protected] 103 500 ventes. Cette reprise est imputable au segment investisseurs, avec des ventes en hausse de 44%, tandis que les ventes accédants ont stagné. En 2016, la reprise se poursuit. Au deuxième trimestre, le cumul douze mois est en hausse de 17% sur un an. L’année 2016 sera un très bon cru, 122 000 transactions prévues sur l’année, +18%. Le nombre de ventes est désormais comparable aux points hauts de 2006-2007, 127 000 ventes par an. Les ventes de maisons individuelles hors promoteurs se sont également redressées. En 2015, elles ont atteint 111 000 ventes, +11% sur un an. En 2016, elles accélèrent, +13% sur un an en août (cumul douze mois), à 120 500 unités. Le niveau annuel atteindrait 125 000 ventes, chiffre assez élevé, mais encore nettement en deçà des points hauts de 2006-2007 (189 000 unités par an). En Ile-de-France, les ventes de neuf (promoteurs), quasi-stables en 2014, +1,2%, se sont redressées en 2015, +11% sur un an et rebondissent de 39% au premier semestre 2016. France : encours de logements neufs milliers 130 mois 23 110 19 90 15 70 11 50 7 30 3 91 94 97 00 03 06 09 12 Encours à vendre Encours en mois de vente (éch. dr.) Source : Ministère de l'Ecologie 15 D’après l’enquête Insee auprès des promoteurs, la tendance sur la demande de logements neufs s’est nettement redressée sur les derniers mois à -5 en juillet, après -31 en janvier. Elle dépasse un peu sa moyenne de long terme (-9), pour la première fois depuis 2010. Encours de logements neufs en repli Les mises en vente de logements neufs (promoteurs) se sont accrues de 9% en 2015, à 102 000 unités, et progressent encore en 2016, à 113 000 en juin (cumul douze mois), +15% sur un an. L’encours de logements neufs (achevés, en cours ou en projet) proposés à la vente reste assez élevé, mais se réduit peu à peu. Il a atteint 101 100 unités au T2 2016. Le ratio encours/ventes, qui mesure le délai moyen d’écoulement de l’encours, est ramené à 9,8 mois de vente. L’encours était monté jusqu’à 15,6 mois de vente au T3 2014 et atteignait encore 11,8 mois fin 2015. L’encours se réduit assez lentement en niveau mais le ratio encours/ventes baisse rapidement du fait du rebond des ventes. Ce ratio reste toutefois supérieur au niveau moyen de 8,3 mois observé entre 1995 et 2011. Les stocks proprement dits (encours de logements achevés ou en cours de construction) sont faibles, 38 000 unités : 6% des encours sont achevés, 32% en cours de construction, 62% en projet. En Ilede-France, l’encours de logements neufs se réduit également. Il atteint 9,3 mois de vente au T2 2016, après 12,9 au T4 2014. France : prix des logements 15 10 5 0 -5 variation annuelle, % -10 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 Appartements neufs Logements anciens Source : Ministère de l'Ecologie, Insee-Notaires Les prix des logements neufs (promoteurs) sont quasi-stables. Les prix des appartements se sont accrus de 0,3% sur un an au deuxième trimestre 2016 (1,8% au deuxième trimestre 2015). Les prix des maisons sont remontés de 0,8% sur un an au T2, (-0,8% au T2 2015). Il s’agit des prix à la réservation. Reprise de la construction en 2016 France : permis de construire et mises en chantier de logements 600 La construction de logements, encore soutenue en 2011 (423 000 mises en chantier), avait nettement diminué de 2012 à 2014. Elle s’est stabilisée en 2015. Les mises en chantier ont atteint 351 800 unités, +0,3% sur un an, et les permis 383 100 unités, +1,8%. Le rebond des ventes de neuf ne s’est pas traduit par une reprise significative de la construction, du fait des délais de réaction assez longs entre l’acte de vente et le démarrage du chantier, de l’ordre de six à douze mois suivant les opérations. Cette reprise se met en place au cours de l’année 2016. En août 2016, les mises en chantier (cumulées sur douze mois) atteignent 363 500, +7,7% sur un an et les permis 417 800, +11,4% sur un an. Sur les trois derniers mois, les mises en chantier remontent de 5,7% sur un an, et les permis de 6,6%. Une hausse des mises en chantier de l’ordre de 10% est attendue cette année. N°16/282 – 26 octobre 2016 milliers, cumul 12m 500 400 300 200 98 00 02 04 Mises en chantier 06 08 10 12 14 Permis de construire Source : Ministère de l'Ecologie -3 - FRANCE – Immobilier résidentiel Evolutions récentes et perspectives 2016-2017 Olivier ELUERE [email protected] Reprise du marché en 2015 et 2016 Le marché résidentiel est en phase de net rebond depuis début 2015. Le nombre de transactions de logements avait progressé de 15% en 2015 (15,7% dans l’ancien et 15% dans le neuf). Mi-2016, les cumuls douze mois sont à nouveau en hausse de 15% environ et se rapprochent (voire dépassent) les points hauts du cycle précédent (2004-2007). Les prix repartent à la hausse, même si le mouvement reste encore modéré. Le rebond est également marqué sur le crédit habitat. La croissance de l’encours s’est renforcée, +3,9% sur un an fin 2015 et +3,5% en août 2016 (après +2,2% fin 2014). La production de nouveaux prêts à l’habitat a atteint un record historique en 2015, 220 milliards, +81% sur un an, et devrait encore progresser cette année (232 milliards en cumul douze mois en août), en liaison avec un marché immobilier soutenu et avec l’envolée des rachats de crédit. Pour autant, il n’est pas sûr qu’un nouveau cycle de reprise durable du marché immobilier se mette en place. Le boom actuel est assez atypique avec des facteurs clairement haussiers, mais aussi des fragilités persistantes. France : encours de crédits habitat ménages Mds € 1 000 %, a/a 20 800 15 600 10 400 5 200 0 0 98 00 02 04 06 Montants Source : BdF, Crédit Agricole 08 10 12 14 16 Croissance sur 12 m (dr.) Deux facteurs de soutien La reprise du marché s’explique principalement par : France : taux de crédit habitat 10 Des taux de crédit habitat toujours plus bas Les taux de crédit baissent régulièrement depuis 2012, en lien avec le repli continu du taux des OAT dix ans et une concurrence marquée entre institutions de crédit. Ils sont passés de 3,8% en moyenne annuelle en 2012 à 3,2% en 2013, 3% en 2014 et 2,3% en 2015 (taux des crédits nouveaux, crédit à long terme à taux fixe hors assurance). Ils sont un peu remontés fin 2015, mais rebaissent en 2016, jusqu’à 1,7% en août. Un coût du crédit aussi faible entraîne des effets de rattrapage ou des effets d’aubaine. Certains acheteurs potentiels, hésitants ou attentistes, passent à l’acte ou accélérent leur projet pour profiter de ces niveaux de taux très attractifs. Moyennes trimestrielles en % 8 6 4 2 0 96 Taux OAT 10 ans Les mesures de soutien au logement neuf Les mesures de soutien mises en place en 2015-2016, et en vigueur jusqu’à fin 2017, ont dynamisé le marché du neuf. L’accès au PTZ a été nettement renforcé : recentrage sur les zones assez ou peu tendues (B1, B2, C) ; plafond de ressources accru ; montant du prêt pouvant atteindre 40% de l’opération, contre 18 à 26% précédemment ; différé de remboursement et durée de prêt allongés ; PTZ éligible (sous conditions) pour les logements anciens à réhabiliter. L’objectif est de passer de 65 000 à 120 000 PTZ par an. Le dispositif Pinel est jugé attractif, avec un avantage fiscal, des formules possibles à six, neuf et douze ans, la possibilité de louer aux ascendants et descendants et un assouplissement de l’encadrement des loyers. Par ailleurs, les « fondamentaux » du marché (facteurs de soutien à la demande, solidité du marché du crédit) continuent à jouer favorablement (cf. page 6). Ces éléments conduisent à une nette reprise des ventes. La hausse des prix reste toutefois très mesurée pour l’instant, en dépit du dynamisme des ventes, ce qui constitue une des spécificités de cette reprise (cf. page suivante). Le marché est redevenu assez fluide, avec davantage d’acheteurs et de vendeurs. Le rebond concerne l’ensemble des biens, toutes surfaces confondues, et la plupart des secteurs géographiques. N°16/282 – 26 octobre 2016 98 00 02 04 06 08 10 12 14 16 Taux moyen d'un crédit habitat à taux fixe (TEG) Source : BdF, Crédit Agricole France : taux de crédit habitat 3,5 3,0 2,5 2,0 Moyennes mensuelles en % 1,5 Taux crédit habitat à long terme hors assurances Source : BdF, Crédit Agricole -4 - FRANCE – Immobilier résidentiel Evolutions récentes et perspectives 2016-2017 Olivier ELUERE [email protected] Des fragilités persistantes Il ne faut pas pour autant céder à l’euphorie. Un retournement du marché reste possible. Une remontée des taux serait évidemment un risque majeur. De plus, le boom actuel ne doit pas masquer plusieurs fragilités persistantes. Conjoncture mitigée France : prix des logements anciens et taux de chômage 20 6 % 15 10 La croissance du PIB reste assez faible, 1,3% attendu en 2016 après 1,2% en 2015, et le taux de chômage demeure élevé, proche de 10%. Les revenus des ménages se sont améliorés, grâce à une inflation quasi-nulle, mais les anticipations à moyen terme restent médiocres. De plus, certaines mesures fiscales prises en 2012-2013 continuent à peser sur la demande, notamment la réduction de l’abattement sur les plus-values immobilières et l’arrêt du PTZ dans l’ancien. Prix encore très élevés Le marché n’est pas véritablement « assaini ». Les prix se sont peu corrigés et demeurent très élevés. Dans la plupart des autres pays développés, une correction marquée des ventes et des prix s’était mise en place à partir de 2008 (avec une baisse cumulée des prix de 20 à 50% dans ces pays). Les prix sont ainsi redevenus attractifs. L’immobilier est désormais soit en creux de cycle (Italie), soit en début de reprise (Espagne, Pays-Bas), soit en net rebond au Royaume-Uni et en Irlande. À l’inverse, la correction du marché français a été tardive et mesurée, avec une baisse des prix de l’ancien de 7% seulement en cumulé depuis fin 2011. Avec notre approche, qui mesure la capacité d’achat d’un logement par un ménage « moyen », les prix étaient surévalués de 20% en 2008 et de 18% en 2012. Avec une légère baisse des prix et surtout le recul des taux de crédit, les prix sont à peu près revenus à leur valeur d’équilibre. Il aurait fallu qu’ils baissent davantage pour devenir clairement sous-évalués et enclencher une phase de reprise pérenne du marché. Or, ils commencent à remonter. Un boom atypique Compte tenu de ces facteurs, le boom actuel est atypique et pour l’instant assez différent du boom des années 2000. Les prix remontent peu malgré le rebond des ventes, ce qui peut sembler paradoxal. Mais les prix ayant peu corrigé (cf. supra), on n’est pas dans un cycle classique de remontée durable des prix à partir d’un point bas (comme ce fut le cas entre 2000 et 2007). Les prix restent assez stables avec des acheteurs vigilants et des vendeurs contraints de limiter leurs prétentions. Les anticipations (spéculatives ou non) de plus-values ne jouent donc pas. Or, ces mécanismes permettent d’entretenir la phase haussière du cycle (quand les prix montent, le marché est soutenu par les perspectives de plus-value et l’idée d’acheter rapidement avant que les prix ne soient encore plus chers). D’où un marché certes dopé par l’effet taux mais un peu contraint, avec une dynamique d’expansion limitée. Le marché sera soutenu tant que les taux restent bas et les prix à peu près stables. Mais si les prix accélèrent plus fortement, il risque de se retourner. Les volumes de vente sont importants, mais assez concentrés sur les secondo-accédants. La part des primo-accédants reste relativement modérée, du fait du niveau encore élevé des prix. Les investisseurs sont revenus dans le neuf, mais restent très réticents dans l’ancien (poids de la fiscalité et de la réglementation). Ces tendances sont confirmées par les enquêtes ACPR qui fournissent la structure de la production de crédit par type d’emprunteurs (cf. graphique ci-contre). N°16/282 – 26 octobre 2016 8 5 0 10 -5 -10 12 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09 11 13 15 Hausse des prix sur un an Source : Notaires, Taux de chômage (dr. inv.) Insee Capacité d'achat de logement des ménages 115 110 en m2 105 prix sous évalués 100 95 90 85 80 prix surévalués 75 70 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 12 14 16 Surface achetable avec taux d'effort à 30% Source : BdF, Notaires, calculs CA 60% 50% France : structure de la production de crédits habitat données lissées sur 12 mois 40% 30% 20% 10% 0% mars-12 mars-13 mars-14 mars-15 mars-16 Primo-accédants Secondo-accédants Rachats crédits ext. Investissement locatif Autres crédits Source : ACPR, Crédit Agricole S.A. -5 - FRANCE – Immobilier résidentiel Evolutions récentes et perspectives 2016-2017 Olivier ELUERE [email protected] Fin 2016-2017: marché soutenu, mais risque de légère inflexion Le rebond devrait se poursuivre en 2017, mais son ampleur dépendra du niveau des taux de crédit. Rappelons les principaux facteurs à l’œuvre. France : credit habitat ratio encours douteux/encours total 2,0 % 1,8 « Fondamentaux » favorables 1,6 Les facteurs structurels de soutien à la demande vont rester présents : désir d’accession à la propriété, démographie assez dynamique, phénomènes de décohabitation, préparation de la retraite, saturation du marché locatif, effet « valeur refuge ». Ce dernier facteur joue particulièrement. L’immobilier est jugé rassurant (aspect tangible, évolutions assez régulières, valorisation favorable sur longue période) par rapport aux placements financiers, qui sont actuellement très peu rémunérateurs (taux d’intérêt quasi-nuls), incertains et volatils. Pas de risques majeurs sur les crédits habitat Le modèle français de crédit habitat est prudent. Les critères d’octroi de crédit habitat demeurent assez stricts. Le taux d’effort moyen reste à peu près stable autour de 30% du revenu (29,4% en 2015). La durée initiale moyenne du prêt reste raisonnable, 18 ans en 2015, en baisse de 6 mois par rapport à 2014. La loan to value à l’octroi (montant du prêt/valeur du bien) est élevée, 84% en 2015, contre 81% en 2014 (production de crédits hors rachats). Le taux de créances douteuses sur encours de crédit reste assez bas, 1,55% en 2015 pour les crédits habitat, même s’il s’est accru depuis 2008. Il n’y a pas de montée significative des risques sur les crédits habitat et un resserrement marqué de l’octroi de crédit semble peu probable. 1,4 1,2 1,0 0,8 0,6 0,4 0,2 0,0 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 Source : ACPR France : prix des logements anciens et stocks de logements neufs 13 mois % 3 7 9 5 11 1 Contexte conjoncturel mitigé -3 Les facteurs conjoncturels vont rester plutôt mitigés. La croissance va demeurer assez modérée, 1,4% en 2017 après 1,3% en 2016, et le taux de chômage en recul mesuré, 9,7% en 2016 et 9,4% en 2017. De plus, les prix vont rester à un niveau élevé, ce qui empêcherait qu’une vraie dynamique haussière du marché se mette en place (cf. page 5). 15 -7 19 -11 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09 11 13 15 Hausse des prix sur un an Stocks neuf en mois de vente (dr. inv.) Source : Notaires, BdF Incertitude sur les taux de crédit Les taux de crédit seront le principal déterminant de l’évolution du marché sur les prochains trimestres. Ils se sont à nouveau repliés depuis le début de l’année, jusqu’à 1,7% en août. Sur les prochains mois, deux scénarios sont possibles, sachant que le niveau des taux de crédit dépend notamment de celui des obligations d’État à dix ans. Le scénario que nous privilégions est celui d’une remontée lente et graduelle des taux OAT dix ans au cours des prochains trimestres, vers 0,35% fin 2016 et 0,70% fin 2017, contre 0,15% en juillet-août 2016. Les taux dix ans sont très bas (et étaient même négatifs en Allemagne en juillet-août) du fait d’un cumul de facteurs : quantitative easing de la BCE, excès d’épargne à la recherche de sécurité, poussée d’aversion au risque post-Brexit, effet valeur refuge pour les pays coeurs de la zone euro. Les taux à long terme devraient toutefois peu à peu remonter : Une hausse « mécanique » des indices d’inflation à la charnière 2016-2017 devrait se mettre en place, en liaison avec la remontée des prix du pétrole : un pic d’inflation est attendu en février 2017 à 1,4% en glissement annuel en ZE contre 0,1% en juin 2016 et 1% en France contre 0,2% en juin 2016 N°16/282 – 26 octobre 2016 Inflation et inflation sous-jacente 4,0 3,5 a/a, % Prév. 3,0 2,5 2,0 1,5 1,0 0,5 0,0 -0,5 -1,0 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 Inflation totale Inflation sous-jacente Source : Insee, Crédit Agricole S.A. -6 - FRANCE – Immobilier résidentiel Evolutions récentes et perspectives 2016-2017 Olivier ELUERE [email protected] Un scénario de taux anormalement bas inquiète la BCE en raison de ses effets néfastes sur les banques (érosion des marges d’intermédiation et de la profitabilité) et sur le secteur de l’assurance. Le marché anticipe que la BCE va prolonger son QE au-delà de mars 2017. Mais elle devrait, à partir d’octobre 2017, réduire peu à peu ses rachats de titres puis stabiliser la taille de son bilan. L’effet d’aubaine pourrait donc s’atténuer. Les acheteurs seront moins pressés et plus hésitants, les taux n’étant plus à leur plancher. Le marché immobilier serait donc un peu moins dynamique en 2017. 900 Mais un autre scénario est possible, celui d’un maintien des taux longs et des taux de crédit à un niveau très bas, voisin de celui de début 2016, si les facteurs baissiers l’emportent. Dans ce cas, le marché immobilier resterait très soutenu en 2017. Mais une remontée des taux interviendra tôt ou tard et l’inflexion du marché serait ainsi décalée à 2018 ou 2019. 700 Dans notre scénario de légère remontée des taux, les volumes de transactions dans l’ancien seraient en hausse de 5% en 2016 (840 000 ventes) et en repli de 5% en 2017. Ils seraient en hausse de 15% dans le neuf en 2016 et à peu près stables en 2017, grâce aux mesures de soutien, notamment celles en faveur du PTZ, qui permettent un rebond du segment primo-accédants dans le neuf promoteurs. Les prix de l’ancien seraient en faible hausse (+1 à 2% par an). 300 France : ventes et prix de logements anciens milliers 20 % 15 800 10 5 600 0 500 -5 prév. 400 -10 -15 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 12 14 16 Ventes Variations de prix sur un an (dr.) Source : CGEDD, Notaires, CA Dans l’autre scénario, les ventes se stabiliseraient dans l’ancien et monteraient encore un peu dans le neuf en 2017. Les prix seraient en hausse un plus soutenue que dans le scénario central. Achevé de rédiger le 24 octobre 2016 Crédit Agricole S.A. – Études Économiques Groupe 12 place des États-Unis – 92127 Montrouge Cedex Copyright Crédit Agricole S.A. – ISSN : 1768-9538 Directeur de la Publication : Isabelle Job-Bazille Rédacteur en chef : Armelle Sarda Documentation : Gisèle Walter - Statistiques : Robin Mourier Réalisation & secrétariat de rédaction : Fabienne Pesty Contact : [email protected] Consultez les Études Économiques et abonnez-vous gratuitement à nos publications sur : Internet : http://etudes-economiques.credit-agricole.com iPad : application Etudes ECO disponible sur l’App store Android : application Etudes ECO disponible sur Google Play Cette publication reflète l’opinion de Crédit Agricole S.A. à la date de sa publication, sauf mention contraire (contributeurs extérieurs). Cette opinion est susceptible d’être modifiée à tout moment sans notification. Elle est réalisée à titre purement informatif. 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