note de lecture 1
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Note de lecture 1 The Political Economy of Peer Production Michel Bauwens texte disponible en pdf: http://virus.meetopia.net/pdf-ps_db/MBauwens_political-economy-of-peer-production.pdf Peer to peer L'émergence d'une architecture en réseau de type pair à pair [P2P] est à l'image du processus de fabrication identifié par K. Marx au XIXème siècle ( in Le Capital), un vecteur de puissantes transformations sociales [deeper transformation of the fundamentals of our social life]. Une nouvelle dynamique le pair à pair (ci-après «P2P») entraine l'émergence d'un troisième mode de production, un troisième mode de gouvernance et un troisième mode de propriété. Voir ci-après P2P désigne les processus dont les objectifs sont d'accroitre et d'améliorer la participation de pairs [equipotential participants]. P2P processus: • Troisième mode de production: produit de la valeur d'usage1 par la libre coopération des producteurs de contenus. Michel Bauwens reprend l'idée de la valeur d'usage: dans un troisième mode de production économique: les produits ne sont pas des valeurs d'échange destinés à générer des profits mais des valeurs d'usage pour une communauté d'utilisateurs. • Troisième mode de gouvernance: C'est la communauté des producteurs qui gère les processus P2P et non des corporations, ou le marché ou des entités hiérarchiques (gouvernement, armée, police etc...) • Troisième mode de propriété: la valeur d'usage est rendue librement accessible sur une base universelle, un régime de nouvelle propriété commune qui diffère du concept de propriété privée ou propriété public ( propriété de l'État).la propriété commune est la propriété générée par les ressources produites par les membres de la communauté- ensemble. Infrastructures Comme dans toute forme de transformations sociales et culturelles, les moyens de production et les infrastructures génèrent les processus de transformation. Infrastructures technologiques: L'ordinateur personnel comme machine universelle, Internet, réseau point à point [point to point] destiné à l'échange des contenus et la participation, contrôlé par un système de gouvernance distribuée. La communication virale et les réseaux maillés2 participent à l'extension de l'utilisation d'Internet en créant des sous-réseaux et exploitant ses capacités. Systèmes alternatifs de communication et d'information: réseaux autonomes, réseaux sociaux3 permettent la production de contenus par la coopération active, de nouvelles formes de médiation sont créées. 1 La valeur d'usage est la valeur «sociale» d'une marchandise, la valeur qu'on lui accorde en fonction de son utilité et du coût de sa fabrication ( matière première, coût social etc ..). La valeur d'échange opposée dialectiquement à la valeur d'usage transforme la marchandise même en valeur. Par ce procédé, la marchandise est coupée de sa valeur d'usage, elle devient une valeur dont l'échange est facteur de plus-values. Ce concept est particulièrement développé dans Le Capital de Karl Marx Livre 1 Ch1 La marchandise part.4: « Le caractère fétiche de la marchandise et son secret »texte disponible en .rtf: http://www.cyberaxe.org/home/archives/ARCHIVES %20ARTICLES/2005/caractere_fetichiste.rtf 2 Voir the community Wi-Fi movement, Open spectrum advocacy, file serving television ... 3 Plateformes participatives, production alternatives d'information en réseau (flux RSS, podcasts), émergence d'une 'culture de l'amateur' cybercultures-studies - CCC 09-10 | note de lecture 1 | NP | 12/11/09 | p.1 Infrastructures logicielles la création et la multiplication des outils technologiques de coopération4 et des langages permettent la participation des pairs dans la création d'une valeur d'usage, non récupérée par des intermédiaires économiques ou politiques [without the intermediary of manufacturing or distribution by for-profit enterprises] Infrastructure légale permet la création d'une valeur d'usage et sa non-appropriation par des corporations privées5 Infrastructure culturelle La production d'un savoir collectif, la distribution et la mise en circulation de l'intelligence collective pour créer une éthique de la coopération individuel dans un système de pairs. Les processus P2P ont besoin des réseaux distribués6 pour se déployer. La capacité de coopérer se vérifie dans le processus de coopération. Il n'y a pas d'intermédiaire. Les savoirs et les connaissances sont validés dans le processus de production7. Le filtre est à postériori non a priori. (validation par les pairs) « Anti-crédentialisme »8 dans le sens ou aucune validation de références, aucune autorité à produire n'est requise à priori. Holoptisme: la possibilité pour les pairs d'accéder à l'ensemble des productions par opposition à un système panoptique dans lequel l'accès aux productions est contrôlé et soumis à régulation par un petit nombre d'agents. ( par exemple tel qu'il est appliqué par le système de droit de propriété intellectuelle: ceux qui détiennent la propriété des contenus imposent des restrictions d'accès pour les autres). Ou dans l'exemple cité ici: la restriction du savoir, la hiérarchisation du savoir, le savoir destiné à une élite dont la masse est exclue, système hiérarchique déployé de haut en bas. Modes de production Selon l'ouvrage de référence de Alan Page Fiske9, les modes de productions sont attachés à des relations inter-subjectives. Michel Bauwens retient 4 types de relations inter-subjectives – 4 modèles de production. Chaque type de société utilise les quatre modèles en les mélangeant, mais il y a toujours un modèle dominant qui caractérise l'organisation sociale. Le modèle de l'économie du don [gift economy] le P2P est souvent considéré – a tort – comme une forme d'économie du don. Dans l'économie du don, il y a un devoir, une obligation de réciprocité, basé sur une forme de troc [barter]. échange contre échange de valeur égale ou considérée comme égale. Le P2P est basé sur la coopération libre. Il n'y a aucune contrainte de réciprocité Chacun participe selon son libre arbitre son désir et ses capacités. Dans les communautés P2P «pures», les pairs ne sont pas rétribués. Le don est entièrement basé sur la non-réciprocité. Le modèle P2P peut se développer dans le domaine de la production des biens immatériels ( duplication, réplication circulation sans coût ou à coût très faibles, productions pendant le temps libre). Bien que la question d'un revenu financier soit important, certaines communautés de l'économie du don appliquent des formes d'organisation P2P dans le mode de participation; relations horizontales entre pairs, coopération volontaire, etc … Le modèle hiérarchique le P2P n'est pas sans hiérarchie mais à hiérarchie flexible: des structures basées sur le mérite qui permettent la participation. Le leadership est distribué. Les projets sont conduits par des fondateurs de 4 Les applications du Web2 tel que les wikis, les blogs ou les forums) 5 La licence GNU/GPL, les initiatives des Creative Commons , le copyleft etc … protègent les productions de pairs contre leur appropriation commerciale par des tiers. 6 Michel Bauwens fait référence à Alexander Galloway, media theorist et artiste. Dans son livre «Protocol, How control exist after decentralisation» Galloway fait la différence entre réseaux distribués et réseaux décentralisés (dans lesquels l'existence de points /hubs sont nécessaires) Dans les réseaux distribués ( on parle plutôt de réseaux distribués non structurés – voir notes du cours n03), il n'existe pas de point de contrôle. 7 Ainsi dans les plateformes participatives tout le monde peut poster, tout le monde peut vérifier les contenus et proposer des modifications. 8 (crédentialism terme intraduisible en français signifie une importance donnée aux crédits, aux références. Souvent utilisé pour qualifier un rapport autoritaire au savoir, le savoir des experts, de l'académie. Anti-credentialism signifierait une position qui s'oppose à un savoir autoritaire validé par l'expertise de ceux qui détiennent le savoir, la doxia.... C'est dans ce sens qu'il faut le comprendre dans ce texte. 9 Alan Page Fiske, anthropologue, professeur au Département d'anthropologie UCLA - voir: article Human sociality http://www.sscnet.ucla.edu/anthro/faculty/fiske/relmodov.htm , Michel Bauwens fait référence à son livre «The Structure of Social Life», Free Press 1993 cybercultures-studies - CCC 09-10 | note de lecture 1 | NP | 12/11/09 | p.2 projet, supervisés par les pairs . Les projets sont soumis à l'approbation et la validation des pairs. Michel Bauwens décrit quatre degrés de développement historique des relations entre hiérarchie et participation 1. Les formes de culture dites autoritaires: pas de participation politique, le droit est définit de manière autoritaire et restrictive → la hiérarchie définit contrôle et réprime l'autonome et la coopération. 2. Les formes de culture dites faiblement démocratiques: participation aux institutions politiques (élections), mais pas dans les autres domaines sociétaux: religieux, économique, recherche (éducation, science) culture (accès à la culture) → la hiérarchie autorise la coopération et l'autonomie dans l'exercice des droits politiques seulement. 3. Les formes de culture dites fortement démocratiques: participation politique, représentativité et participation dans les autres domaines sociétaux: accès plus large aux modes de décision.→la hiérarchie autorise la co-opération et l'autonomie dans les domaines des décisions politiques, de la société civile, et – mais aussi dans une moindre mesure - dans les domaines économiques, religieux, sociaux, pédagogique... 4. Les formes de culture dites des « commons10 ». Inscrites dans une économie de l'abondance, de la multiplication et de l'immatériel (à la différence de l'économie de la rareté et de la réification), participation de tous dans tous les champs du développement humain, droits égaux. → La hiérarchie est spontanée et émerge en fonction des besoins de participation et d'autonomie Elle est supervisée par les pairs. Le modèle du partage [communal shareholding] Dans le P2P chacun participe volontairement à la construction d'une culture des commons, selon le principe communiste: «de chacun selon ses possibilités, pour chacun selon ses besoins». On peut lier partiellement cette nouvelle culture des commons aux anciennes formes de coopération; paysannerie communautaire [communal lands] ( moyen-age), mutuelles (coopératives) d'ouvriers du XIXème siècle... , bien qu'elle en diffère par ses caractéristiques immatérielles; non localisées: communautés globales,.liées entre elles par Internet, souvent rassemblées par affinité, accessibles, 'dégeocalisées', dans un contexte de production d'abondance.( immaterial goods). Le modèle du Marché: immanence vs transcendance Dans le P2P les individus sont libres de participer, suivant leurs besoins. Cela les rapproche d'un mode de Marché. Mais le P2P ne cherche pas à accroître des profits et aucune commande managériale n'est requise pour gérer les ressources. Les ressources sont produites sur la base du volontariat. La logique du Marché implique des agents dans un système distribué, travaillant chacun à son propre intérêt immédiat.(il n'y a pas de commons, pas de communautés, pas de pairs). Les marchés sont basés sur une coopération neutre, pas de réciprocité créée, pas de synergie dans la coopération. Les marchés échangent des valeurs et génèrent des profits. Ils ne créent pas de valeurs d'usage. Les marchés renforcent le pouvoir de quelques uns au détriment de tous les autres là ou le P2P permet la pleine participation de tous. Le modèle du capitalisme Le modèle capitalisme et le P2P sont interdépendants [highly interconnected]. Ainsi le P2P produit de la valeur d'usage sans générer de profit. Les pairs ne peuvent vivre d'un revenu et dépendent ainsi d'un revenu produit par le Marché. Le capitalisme dépend du P2P. Il s'est développé à travers les réseaux distribués. La productivité est de plus en plus basées sur des principes de coopération [cooperative teamworks]. voir le soutien de la plupart des compagnies de l'IT ( Internet Technology) pour les développements opensource. Le modèle capitaliste se sert des architectures P2P pour créer des plus-values dans le domaine des TIC.. L'utilisation et instrumentalisation des structures P2P rend le capitalisme contemporain dépendant de l'architecture P2P. C'est une dépendance systémique. La création de la valeur appartient aux pairs qui fournissent les ressources et innovent.(on le voit dans la récupération par les entreprises en ligne des contenus générés et créés par les utilisateurs des plateformes sociales du Web 2.0.). Par cette utilisation 10 The commons: sens figuratif le bien mutuel, le «bien collectif»; les ressources qui sont partagées par plus d'une personne. Cela va de l'eau, la terre aux logiciels. - the common good : le bien commun. Digital Commons: une propriété digitale souvent mais pas toujours dans le domaine public, se dit d'une propriété intellectuelle reproduite en utilisant des formats numériques. Le processus par lequel des biens collectifs sont transformés en propriété privée est désigné comme «enclosure» - etym.enclot – l'enclosure désigne: au départ un processus d'appropriation des terres durant la révolution industrielle en Grande Bretagne. D'abord l'appropriation de terrains publics, ensuite la substitution de l'ancien terrain ouvert par des fermetures – enclosure – de haies, de barrière etc … puis l'établissement du domaine, loué à des fermiers pauvres pour qu'ils y travaillent. cybercultures-studies - CCC 09-10 | note de lecture 1 | NP | 12/11/09 | p.3 croissante, on peut suivre l'expansion et l'influence des pratiques P2P dans la société. Le revenu universel11 (revenu global, revenu de citoyenneté) permettrait aux pairs d'être indépendants financièrement du Marché dans la productions de ressources pour le bien commun. Le modèle (la classe) des 'netarchistes' le P2P contribue à la création de nouvelles formes de capitalisme distribué et de nouvelles formes économiques qui recréent des solutions hétérogènes là ou il y a des positions monopolistiques. Ça créé des tensions. (exemple de la promotion et du développement de plateformes pour des solutions open-sources dans certaines entreprises des IT). Des nouveaux modèles d'entreprises recyclent les ressources créés par les coopérations entre pairs. Le capitalisme cognitif se définit par la primauté des valeurs immatérielles cognitives sur les valeurs figées du capitalisme industriel. Les vectorialistes 12se définissent par le contrôle sur les vecteurs de l'information et des médias. Michel Bauwens fait une extension aux modes opératoires P2P, comme les vectorialistes du capitalisme cognitif, à l'ère des réseaux participatifs, les netarchites sont ceux qui manipulent les ressources générées par les pairs et tentent de les transformer en plus value immatérielles. C'est la nouvelle classe des possédants.(ex. Amazon, Ebay, Facebook ... qui construisent leur fortune avec les productions (commentaires, reviews, liens partagés, commentaires et articles, carnets d'adresses, .. )de leurs utilisateurs. Les aspects transcendants du P2P • Permet la libre coopération des producteurs, qui ont accès à leurs propres moyens de productions, le résultat en terme de valeur d'usage supplante les alternatives économiques générées pour créer du profit. • La gouvernance de pairs transcende l'autorité du marché et de l'État. • Les nouvelles formes de propriété des commons, nouveau champ dynamique, transcende les limites des modèles de propriété privée et publique. Le P2P apparaît alors comme une alternative salutaire à l'heure ou le bilan du capitalisme global en terme de coût social, environnemental et culturel est désastreux. Le P2P s'appuie également sur de nouvelles pratiques culturelles, de nouveaux mouvements sociaux, de nouvelles recherches scientifiques qui font la promotion de son expansion pour des raisons éthiques, culturelles et sociales et en tout cas, recherchent et réclament des modèles alternatifs au capitalisme cognitif global; le mouvement des creative commons, les performances de remix, le mouvement des hackers, les hacktivistes, les mouvements du logiciels libres, les milieux de la recherche scientifique ...pourraient être considérés comme équivalent aux mouvements socialistes du siècle dernier avec l'émergence d'une nouvelle classe sociale: les travailleurs du savoir [knowledge workers] L'expansion d'un mode de production P2P • partout ou il y a un accès à une forme distribuée d'organisation ( télécommunication, communication virale, média, ressources informatiques partagées en réseau par exemple les projets BOINC, distributed.net …) • autres formes de capital distribué; par exemple: le carpooling13: deuxième mode de transport aux USA. • pratiques des équipes de communications, design, petites équipes de travail, travail par objectifs en équipe etc .. • modes de capital coopératifs, comme les banques de prêts inter-personnels, banques ZOPA14 11 Le revenu universel ou revenu de citoyenneté est une idée défendue par certains mouvements de la gauche radicale et alternative ( la mouvement du 'cognitive capitalism' Attac, etc .. et par certains syndicats. Ce revenu alloué à toute personne indépendamment de son travail, permettrait de libérer les personnes d'un revenu par le travail, et est une forme de lutte contre l'aliénation du travail salarié, ou la précarité ( lorsqu'il n'y a que le choix entre un travail misérable pathogène et aliénant, et la misère d'être sans emploi.). 12 Les vectorialistes sont décrits par Mackenzie Wark dans A Hacker Manifesto. Ils sont la classe qui possède le vecteur; c'est à dire l'information, sa diffusion et ses supports (les médias). Ils sont la nouvelle classe des possédants: selon l'idée que dans la société de l'information et du capitalisme cognitif, ceux qui possèdent l'information détiennent le pouvoir. Par analogie: dans le capitalisme industriel, ceux qui détenaient les modes de production industriels et le capital détenaient le pouvoir, dans le capitalisme pré-industriel et féodal, ceux qui possédaient la terre et ceux qui la travaillaient, détenaient le pouvoir. Etc.. 13 Le carpooling, car sharing ou co-voiturage est une organisation entre sujets (pairs) qui se partagent volontairement les trajets en utilisant une seule voiture pour plusieurs personnes et partageant les frais de transports; les SELS et les réseaux d'échanges , ou les sujets créent une bourse de service et s'échangent des services entre eux selon leurs compétences. 14 Banque ZOPA: Zone of Possible Agreement: fournit des prêts d'argents de personne à personne, sans intérêts cybercultures-studies - CCC 09-10 | note de lecture 1 | NP | 12/11/09 | p.4 • soutient au projet de revenu universel qui permettrait aux sujets de se libérer du travail rémunéré. La réforme des Marchés, de l'État et une réhabilitation des modèles d'économie du don et de l'échange, de la coopération et de la participation sur le mode de l'équivalence seraient les pré-requis pour un modèle économique politique alternatif basés sur la la culture des Commons et l'architecture P2P débiteurs,permettant ainsi d'éviter les prêts bancaires et les coûteux frais en terme d''intérêts sur les dettes. cybercultures-studies - CCC 09-10 | note de lecture 1 | NP | 12/11/09 | p.5