Demandes de documents de travail sur l`impôt par l`ARC

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Demandes de documents de travail sur l`impôt par l`ARC
2015 numéro 40
22 juin 2015
FiscAlerte —
Canada
Demandes de documents de travail sur
l’impôt par l’ARC
Nos bulletins
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La Cour fédérale (la «CF») a récemment rendu sa décision dans Minister of
National Revenue v. BP Canada Energy Company, 2015 FC 714, affaire portant
sur la question de savoir si la ministre du Revenu national peut contraindre un
contribuable, en vertu du paragraphe 231.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu
(la «Loi»), à produire, aux fins de ses vérifications actuelles et futures, des
documents de travail sur la provision pour impôts préparés par le contribuable
(«documents de travail») ayant servi à calculer les provisions pour comptabiliser
les passifs d’impôt éventuel dans les états financiers consolidés du contribuable.
Depuis 2004, la politique de la ministre est de ne pas systématiquement
demander les documents de travail sur la provision pour impôts tout en
conservant son droit d’en demander la production, lorsque approprié.
Faits
La société mère ultime de la contribuable est une société cotée en bourse qui est
tenue, aux fins de la présentation de l’information financière et à d’autres fins
réglementaires, de préparer des états financiers consolidés conformément aux
principes comptables généralement reconnus (les «PCGR»). Pour être conformes
aux PCGR, la société cotée en bourse et ses filiales (y compris la contribuable dans
cette affaire) doivent calculer une provision pour comptabiliser les passifs d’impôt
éventuel, provision qui inclut une estimation de l’impôt que la société cotée en
bourse ou l’une de ses filiales pourrait devoir payer si la ministre devait contester
les positions prises dans la déclaration de revenus dont la contribuable est
incertaine. Le calcul tiendrait compte du passif d’impôt en question et de la
probabilité que la ministre conteste avec succès ces positions.
En l’espèce, le calcul de la provision était
appuyé par des documents de travail préparés
par le personnel interne de la contribuable. Ces
documents relevaient les points litigieux («liste
de points litigieux») et quantifiaient le risque lié
aux positions fiscales qui, selon la contribuable,
pourraient ne pas être maintenues par les
tribunaux advenant une contestation de la part
de la ministre. Dans le cadre d’une vérification,
la ministre avait demandé la production des
documents de travail en vertu du
paragraphe 231.1(1) de la Loi. La contribuable
avait produit une copie des documents de
travail, censurant la liste de points litigieux, et
avait refusé de produire une liste non censurée.
La ministre avait déposé une demande auprès
de la CF afin d’obtenir une ordonnance
d’exécution en vertu du paragraphe 231.7(1) de
la Loi pour contraindre la contribuable à fournir
à la ministre les documents de travail non
censurés.
Les parties reconnaissaient que la liste de points
litigieux des documents de travail non censurés,
si elle était fournie, donnerait une feuille de
route à la ministre pour qu’elle concentre ses
ressources en matière de vérification sur les
points de préoccupation. La contribuable
s’opposait à la production de ces documents non
censurés au motif :
1. qu’elle ne répondait pas aux exigences
législatives pour une ordonnance
d’exécution;
2. que, même si les exigences législatives
étaient remplies, la CF devait exercer son
pouvoir discrétionnaire pour que la
production de cette liste ne soit pas exigée.
L’argument des exigences
législatives
La contribuable avait fait valoir que la ministre
n’avait pas besoin des documents de travail
pour terminer sa vérification puisque :

la politique de la ministre était de ne
demander ces types de documents que dans
des circonstances exceptionnelles;



la liste de points litigieux (soit l’information
essentiellement recherchée) visait des
années d’imposition déjà prescrites;
les documents de travail n’avaient pas été
préparés par suite d’une exigence de la Loi,
mais plutôt d’une exigence réglementaire
dont l’application adéquate désavantageait la
contribuable dans le cadre de la vérification
de la ministre, engageant en fait la
contribuable dans la vérification;
les documents de travail reflétaient des
opinions subjectives de la contribuable qui ne
pouvaient être considérées comme étant
liées au calcul du revenu imposable en vertu
de la Loi.
La CF n’a retenu aucun des arguments de la
contribuable et a conclu que les exigences
législatives pour une ordonnance d’exécution
étaient respectées. La CF a conclu que la politique
de la ministre de ne pas demander
systématiquement les documents de travail sur la
provision pour impôts n’était pas un élément
pertinent. La ministre était plutôt en droit d’exiger
la documentation de la contribuable pour les
vérifications actuelles ou futures, et ce droit ne
revenait pas à contraindre la contribuable à
s’autovérifier. La CF a statué qu’il revient à la
ministre de déterminer ce qu’elle veut et ce dont
elle a besoin pour réaliser une vérification
exhaustive et complète. Le fait que les documents
de travail avaient été créés et conservés par suite
d’exigences réglementaires en dehors du cadre de
la Loi n’était pas pertinent. Les documents de
travail constituaient un document de fiscalité
important de la contribuable. Ils étaient donc
pertinents au paiement de l’impôt en vertu de la Loi
et pouvaient par conséquent être exigibles aux
termes du paragraphe 231.1(1).
L’argument du pouvoir
discrétionnaire
La contribuable avait argué que, même si les
exigences législatives étaient remplies, la CF
devait exercer son pouvoir discrétionnaire pour
que la contribuable ne soit pas obligée de
produire des copies non censurées des
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documents de travail, ce qui entraînerait la
divulgation de la liste de points litigieux. Cette
divulgation constituerait une autovérification
obligatoire par la contribuable, faussant ainsi le
fonctionnement du régime fiscal canadien. La
production des documents de travail non
censurés serait contraire à la propre politique
de la ministre et à l’intérêt public de faire une
divulgation complète et franche des risques
fiscaux aux fins de la présentation de
l’information financière sans craindre des
répercussions sur la vérification fiscale. De plus,
la contribuable avait allégué que la ministre
agissait de mauvaise foi à l’égard de ses
demandes et qu’elle effectuait des recherches à
l’aveuglette, ce qui était contraire à sa
responsabilité de mener des vérifications en
toute bonne foi.
Encore une fois, la CF a rejeté les arguments de la
contribuable. Les vérifications ne sont pas
effectuées à l’aveuglette et, dans le cadre de cette
vérification, la ministre avait clairement indiqué
son objectif d’obtenir les documents de travail
pour les utiliser dans le cadre des vérifications
actuelles et futures, ce qui était légitime. La
demande des documents de travail ne constituait
pas une preuve que la ministre avait agi de
mauvaise foi. Toutefois, même si tel avait été le
cas, cela n’aurait aucune incidence sur le droit de
la ministre de contraindre la contribuable à lui
fournir les documents de travail non censurés. Il
revenait à la ministre, et non à la CF, de
déterminer si sa demande était contraire aux
pratiques du secteur ou à l’intérêt public.
Finalement, la demande de la ministre pour la liste
de points litigieux non censurée ne pouvait être
considérée comme une autovérification
obligatoire, puisqu’on n’avait pas demandé à la
contribuable de créer des documents, seulement
de produire les documents déjà existants.
Leçons tirées
Bien que, depuis un certain temps, la politique
de la ministre soit qu’elle a droit à la
documentation de la contribuable, telle que les
documents de travail sur la provision pour
impôts, c’est la première fois que la ministre
conteste un refus de produire de tels documents
de travail devant les tribunaux. Même si cette
affaire porte sur les documents de travail
préparés par la contribuable, le raisonnement qui
y est présenté pourrait vraisemblablement
s’appliquer aux documents de travail d’audit
préparés aux mêmes fins.
La décision peut encourager l’Agence du revenu
du Canada à demander ces documents de travail
au début de chaque vérification de sociétés
publiques.
La ministre ayant réussi à avoir gain de cause,
les contribuables devraient faire preuve de
prudence à l’égard de la nature et de l’étendue
de l’information qu’ils incluent lors de la
préparation et de la mise à jour des documents
de travail sur la provision pour impôts. Certains
contribuables ont pris l’habitude d’obtenir une
opinion juridique concernant les provisions pour
impôts aux fins des états financiers lorsque ces
informations sont de nature délicate. Le
contribuable peut ainsi invoquer le privilège des
communications avocat-client.
La contribuable a jusqu’au 8 septembre 2015 pour
appeler de la décision devant la Cour d’appel
fédérale.
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