la success story

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la success story
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Aerotrade
28.10.2011
Airbus
Didier KATZENMAYER
RESPONSABLE DE LA CONSOLIDATION
DE LA SUPPLY CHAIN
Serge ASSORIN
PRÉSIDENT
N
é empiriquement après la Seconde Guerre
mondiale chez Toyota, systématisé par le
même constructeur japonais après la crise du
pétrole de 1974, le concept d’entreprise étendue
n’a été théorisé qu’en 1996, avec la parution du
livre Lean Thinking de James Womack et Daniel
Jones. L’ouvrage propose cinq principes1 à appliquer à toute la chaîne de valeur totale – incluant
l’entreprise, ses fournisseurs et ses clients – pour
optimiser chacune des activités. L’évolution d’Airbus, constructeur d’avions devenu architecte
intégrateur, démontre que cette idée n’est pas
une rationalisation après coup ni une chimère
d’expert, mais une réalité créatrice de richesses
qui peut favoriser la transmission des capitaux
intellectuels et savoir-faire des grandes entreprises vers les PME-PMI au bénéfice de tous et de
la qualité de la production. La création début 2010
d’Aerotrade, plate-forme mutualisée d’achats de
matières premières rassemblant aujourd’hui dix
des fournisseurs d’aérostructures d’Airbus et d’Aerolia, est une application concrète et innovante
de l’entreprise étendue à la Supply Chain.
L’idée germe en 2007 au sein du pôle Aerospace
Valley, à la faveur d’échanges entre Airbus, le
GIFAS2 , la Direccte3 , la Région Midi-Pyrénées
et des fournisseurs du secteur aéronautique
d’Aquitaine et de Midi-Pyrénées, à partir d’un
constat simple. Après avoir transféré à ses soustraitants au fil des programmes les savoir-faire
et les achats de matières premières, le volume
consommé par les fournisseurs était devenu plus
important que celui d’Airbus. Comment, dans
cette situation, l’avionneur pouvait-il s’assurer de
la suffisance de l’approvisionnement, du contrôle
des prix et continuer à déléguer les achats à ses
fournisseurs sans les fragiliser ? L’équation trouve
sa solution dans Aerotrade, qui voit le jour deux
ans plus tard. « C’est une SAS qui rassemble dix personnes morales à parts égales, indique son président Serge Assorin, dirigeant de Sudaero. Elle n’a
pas vocation à faire des bénéfices, mais à répondre
à un besoin de fonds de roulement de ses actionnaires, qui en auront besoin pour maintenir leur
R&D et leur position technologique. Il a fallu la
construire pas à pas. D’abord, la prise en charge
des achats de matières premières n’était pas une
évidence pour des PME ou des ETI. Mais nous étions
tous conscients qu’à chaque fois que nous avions
suivi les recommandations d’Airbus sur la logistique ou la qualité nous y avions gagné, passant
d’un statut presque artisanal au stade industriel.
Ensuite, il fallait créer un consensus entre tous les
membres fondateurs, qui sont aussi des concurrents. Cela a été possible parce qu’il ne s’agissait
que de partager de l’endettement et en démontrant que dans le domaine des achats matières,
le delta des prix pratiqués d’une société à l’autre
pouvait s’élever à 40 %. L’intérêt financier et les
gains potentiels de la mutualisation sont devenus très lisibles pour chacun. »
C’est encore aux ressources du bon sens que
Serge Assorin fait appel pour construire les outils
nécessaires au fonctionnement d’Aerotrade.
« Afin de garantir la cohésion, j’ai organisé chez
Sudaero des réunions par métiers : des qualiticiens,
des acheteurs, des logisticiens… qui très vite ont
laissé de côté l’étendard de leur entreprise d’origine pour s’impliquer dans les projets communs.
C’est ainsi que le groupe d’informaticiens a mis au
point un système permettant à chaque entreprise
de passer, depuis son site et selon ses besoins, ses
appels de commandes. » ll se réjouit des effets de
cette unité : « Grâce à ce travail collaboratif, les
concurrents d’autrefois se dépannent aujourd’hui
en matières ou en traitement de surface pour
répondre à la demande d’Airbus ou d’Aerolia. »
Ainsi soudée, Aerotrade deviendra pleinement
opérationnelle début 2012, à réception d’une
aide de l’État et des banques apportant les fonds
propres nécessaires : « Les achats auxquels nous
allons procéder représentent au minimum 40 %
« J’ai pour mission de faciliter les relations entre
Airbus et sa base fournisseurs dans un contexte de
réorganisation industrielle. Airbus a lancé depuis
plusieurs années un mouvement de structuration
de sa chaîne d’approvisionnement afin de faire
face aux fortes augmentations de cadence
et donc à un important volume de production
nécessitant que nos fournisseurs tiennent leurs
engagements en termes de livraison et qualité,
dans un contexte concurrentiel international.
Aujourd’hui, Airbus a vocation à se concentrer
sur un métier d’architecte intégrateur final, tout
en conservant son savoir-faire au travers de
Centres d’excellence technologiques et industriels.
À ce titre, nous ne cessons d’augmenter notre
volume de sous-traitance et souhaitons
rendre notre panel fournisseurs entièrement
responsable de la fabrication de ses produits,
en leur confiant progressivement et de manière
sécurisée l’achat de la matière première.
La création de la société SAS Aerotrade est une
réponse concrète apportée par des industriels de
taille moyenne, qui ont su s’adapter à la stratégie
des donneurs d’ordre du secteur, en proposant
un dispositif à même de prendre en compte cette
évolution. En externalisant et regroupant la gestion
de l’approvisionnement matière, les 10 associés
d’Aerotrade - et demain les 20 -, pourront développer
plus efficacement leurs outils industriels et investir
dans leur savoir-faire. Cette initiative, outre le fait
qu’elle sécurise les approvisionnements, permet de
réduire autant que possible l’impact financier de
cette prise en charge matière par chaque entreprise,
notamment en termes de trésorerie ; cela minimise
le délai de portage financier de chaque structure.
Les industriels impliqués verront de facto :
• leur compétitivité renforcée et pourront ainsi rester
positionnés auprès des avionneurs et équipementiers
du secteur, y compris à l’exportation,
• leur valeur ajoutée individuelle et collective
augmentée, favorisant ainsi le développement
régional et national du tissu industriel de la
filière. Cette démarche s’inscrit pleinement
dans le cadre du renforcement de notre chaîne
d’approvisionnement : maturité de la Supply Chain. »
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du chiffre d’affaires de chaque associé. » Après
quoi l’entreprise pourra s’ouvrir à des membres
associés : fournisseurs des sociétaires fondateurs que la plate-forme aidera à se structurer, à fiabiliser leurs approvisionnements et à
monter en prestation ou autres acteurs de
l’aéronautique. « Plus nous serons nombreux,
plus nous intéresserons les providers et meilleurs seront les prix que nous obtiendrons. Notre
business plan prévoit 256 M5 d’achat matières
en 2016, ce qui devrait nous permettre d’obtenir d’excellentes réductions. Dans un deuxième
temps, j’espère mutualiser les achats d’équipements où les études que j’ai réalisées ont fait
apparaître des deltas de 1 000 %… Et peut-être
ensuite les assurances. » Ᏹ
Définir la valeur, créer de la valeur, lisser les flux, tirer par la demande,
tendre vers la perfection.
1
2
Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales.
Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la
consommation, du travail et de l’emploi.
3
Aerotrade en bref
Activité La SAS Aerotrade est une plateforme d’achats
mutualisés dédiée au secteur aéronautique, née de la
réflexion menée depuis 2007, par des sous-traitants du
secteur aéronautique, Airbus, la Direccte (anciennement Drire), le Gifas, la Région Midi-Pyrénées dans le
cadre du plan ADER 2 (Plan d’actions pour le développement des entreprises régionales de sous-traitance)
et avec le soutien du pôle de compétitivité Aerospace
Valley. Présidée par le PDG de la société SUDAERO,
Serge Assorin, elle a été créée le 28 décembre 2009.
Son capital social définitif pour les 10 associés s’élève
à 1,5 M5. Son démarrage opérationnel est prévu pour
janvier 2012.
Entreprises partenaires (à ce jour) CAUQUIL
(31), MAZ’AIR /groupe AIRIA (09), ESPACE / ACE
Aéronautique (31),MECAHERS (31), ESKULANAK /
groupe LAUAK (64),SOTIP (31), FIGEAC AERO (46),
TORUS (Segneré et Safial-Profor) (65), MAP (64),
SUDAERO (31) .
Chiffre d’affaires 171 M5 (CA HT consolidé pour les
10 actionnaires exercice 2010) .
Implantation Toulouse (31).
Objectif 2016 (estimations) Rassembler 20 partenaires sur le plan national, représentant 4 000
emplois dans le secteur aéronautique, et un CA HT
consolidé de 400 M5.