Le Satellite a 5 ans en 2008! Rappel de la réforme de 2003 en

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Le Satellite a 5 ans en 2008! Rappel de la réforme de 2003 en
Direction de l’évaluation, de la statistique et de la révision Volume 6, n° 1 mars 2008
Le Satellite a 5 ans en 2008!
La Direction de l’évaluation, de la statistique et de
la révision est heureuse de souligner le
cinquième anniversaire de son bulletin de veille
internationale. Les 16 numéros publiés depuis
juillet 2003 ont abordé les réformes, les faits
saillants et les nouveautés touchant une dizaine de
pays.
Dans le tout premier Satellite, la réforme de 2003
du système de retraite français avait été
présentée. Cette réforme, qui a été adoptée par le
Parlement français à l’été 2003, est entrée en
vigueur le 1er janvier 2004. Elle a également mis
en place un processus obligatoire de suivi des
réformes tous les 5 ans.
Ce numéro fait donc le point, 5 ans plus tard, sur
l’évolution du système français. Les responsables
de ce système, soit les partenaires sociaux
(groupes
syndicaux
et
patronaux)
et
les
représentants de l’État, se sont d’ailleurs donné
rendez-vous en mars 2008 pour discuter de ses
différents paramètres en fonction des dernières
données économiques et sociales, démographiques
et financières.
Rappel de la réforme de 2003 en France
Il n’existe pas en France de régime de retraite
unique, universel et obligatoire pour tous les
travailleurs étant donné que certaines catégories
professionnelles avaient déjà un régime avant
l’arrivée du système public. Il existe entre autres
des régimes distincts pour les membres des
professions libérales non salariés, les agriculteurs,
les fonctionnaires et les travailleurs autonomes. Il
y a des régimes de base et des régimes
complémentaires, qui sont tous obligatoires.
Dans le principal régime pour les salariés du
secteur privé (Régime général d'assurance
vieillesse des travailleurs salariés, l’équivalent du
1
Régime de rentes du Québec) , la rente de retraite
1
Il s’agit de la pièce la plus importante du système français
puisque 65 % des travailleurs y cotisent (2005).
varie selon la durée de cotisation et l’âge de départ
à la retraite. Il faut d’abord avoir cotisé
160 trimestres (40 années) pour avoir droit à la
pleine rente de retraite sauf si l’âge de 65 ans est
atteint lors du départ à la retraite. Le droit à la
rente de retraite est toutefois ouvert à partir de
60 ans. La rente est réduite au prorata si la
personne a travaillé moins de 160 trimestres et si
elle n’a pas encore 65 ans. À taux plein, le taux de
remplacement du régime général est de 50 % du
salaire annuel moyen des 25 meilleures années de
la personne, dans les limites du plafond prévu.
Ce système est à répartition, c’est-à-dire que
l’ensemble des prélèvements pour la retraite
pendant une année équivaut à l’ensemble des
pensions d’une année. Il repose donc sur la
solidarité entre les générations.
La réforme de 2003 reposait principalement sur
l’augmentation du nombre d’années de cotisation
requises pour avoir droit à une pleine pension.
L’objectif pour 2008 est l’uniformisation des
différents régimes à 40 années de cotisation. De
plus, un passage de 40 à 41 années de cotisation
est prévu entre 2009 et 2012 à raison d’un
trimestre
par an. Entre 2013 et 2020,
l’augmentation du nombre d’années nécessaires se
fera en fonction des gains d’espérance de vie.
Cette réforme incite les travailleurs âgés à rester
plus longtemps sur le marché du travail en mettant
notamment en place une pénalité pour la retraite
anticipée2.
Ce qu’il reste à faire
La réforme de 2003 visait principalement le régime
général et les régimes de la fonction publique. Elle
a ainsi rapproché leurs règles de fonctionnement
portant sur l’exigence de 40 années de cotisation,
tout en maintenant certaines spécificités aux
régimes de la fonction publique. En revanche, elle
n’a pas traité la situation des régimes de retraite
spéciaux.
2
Pour en savoir davantage, voir Le Satellite de juillet 2003
(vol. 1, no 1).
Comme le précise le Conseil d’orientation des
retraites (COR)3, trois grands objectifs sont
toujours à atteindre en 2008 malgré la réforme de
2003.
1) Garantir la viabilité financière des régimes de
retraite
Il s’agit du principal objectif. Or, la réforme de
2003 qui maintenait, dans les cas de carrières
longues, une possibilité d’accès à la retraite
anticipée (la « mesure phare » de cette réforme
selon le COR), a, dans les faits, entraîné une forte
hausse des départs de travailleurs de 56 à 59 ans
(430 000 bénéficiaires depuis 2004). Cette hausse
plus importante que prévu, liée notamment à la
crainte d’un changement des règles, a eu un effet
sur la situation financière du système. Celle-ci s’est
dégradée plus que ce qu’annonçaient les
projections. Une hausse du taux de cotisation dans
le régime général et dans certains autres régimes
a d’ailleurs eu lieu le 1er janvier 2006. Néanmoins,
le déficit prévu de l’assurance retraite sera de
5,7 milliards d’euros en 2008.
Or, la conférence nationale des finances publiques
de janvier 2006 a défini l’engagement au
désendettement public comme une priorité
nationale. Cet engagement est très important pour
le gouvernement français pour trois raisons :
•
•
•
préserver le lien intergénérationnel;
accroître les marges de manœuvre pour
préparer l’avenir;
respecter les engagements européens, afin de
ne pas faire peser le coût des déséquilibres
financiers sur la politique monétaire de l’Union
européenne.
Étant donné que des marges de manœuvre
supplémentaires
sont
nécessaires
pour
le
financement des retraites, d’autres besoins
collectifs (éducation, santé, etc.) devront être
délaissés.
2) Assurer l’équité et la solidarité entre les
assurés, en particulier entre les générations
Pour garantir plus d’équité entre les différents
régimes, il était prévu que la durée de cotisation
pour une pension complète soit portée à 40 ans
pour tous les régimes en 2008. En dépit de grèves
massives de la fin de l’année 2007 des salariés liés
3
COR, Retraites : questions et orientations pour 2008
(2007), 4e rapport adopté en janvier 2007. Voir aussi le
5e rapport datant de novembre 2007 : Retraites : 20 fiches
d’actualisation pour le rendez-vous de 2008.
aux régimes de retraite spéciaux (régimes des
entreprises publiques actuelles ou anciennes :
SNCF, RATP, IEG, etc.), le nouveau gouvernement
Sarkozy a réussi à prolonger la durée de cotisation
minimale de ces régimes de 37,5 à 40 ans, et ce,
à partir du 1er juillet prochain jusqu’en 2012.
3) Augmenter le taux d’emploi des travailleurs
âgés
Parmi les pays européens, la France se caractérise
par l’un des plus faibles taux d’emploi des
personnes âgées de 55 à 64 ans : 37,8 % contre
42,5 % pour l’ensemble de l’Union européenne
entre 2003 et 2005. En réalité, il existe en France
une forte réticence des employeurs à recruter des
travailleurs âgés de plus de 50 ans.
En mars 2006, un accord national interprofessionnel a été signé par plusieurs organisations
syndicales et patronales (le Plan pour l’emploi des
seniors 2006-2010). Il vise à augmenter le taux
d’emploi des 55-64 ans pour parvenir à 50 % en
2010.
Ce
plan
prévoit
deux mesures
particulièrement intéressantes :
•
•
la retraite progressive : elle permet aux
salariés de plus de 60 ans de poursuivre à
temps partiel une activité tout en bénéficiant
d’une partie de leur pension;
l’augmentation de la surcote. Cette dernière
permet de majorer de 3, 4 ou 5 % la pension,
par année supplémentaire validée, en cas de
prolongement de l’activité au-delà de 60 ans
pour les assurés qui comptent plus de
40 années de participation.
La France ne se limite pas à ces mesures; elle
souhaite également faire avancer les mentalités.
Une campagne de communication nationale
destinée au grand public, aux employeurs et aux
salariés a été lancée à l’automne 2006 afin de
valoriser le potentiel des travailleurs âgés. Il
faudra attendre plusieurs années pour juger
pleinement de l’efficacité de ces mesures.
L’importance de l’information
Avec ces modalités diverses et afin que tous les
intervenants puissent suivre l’évolution du système
de retraite français, l’information s’avère un enjeu
important. La réforme de 2003 met l’accent sur la
liberté de choix en matière d’âge de départ à la
retraite et cette liberté ne peut s’exercer sans
avoir reçu auparavant de l’information précise sur
les droits à la retraite. À cet effet, plusieurs
moyens d’information ont été mis en place en
France, notamment :
•
•
un groupement d’intérêt public, le GIP Info
Retraite,
commun
aux
38 organismes
gestionnaires de régimes de retraite et de
services de l’État chargés de la liquidation des
pensions des fonctionnaires, a été créé en
juillet 2004 (www.info-retraite.fr);
un simulateur de retraite (m@rel) a été mis
en ligne le 21 juin 2006 (www.marel.fr); il
reçoit environ 6 000 visites quotidiennes.
COMMENTAIRES
Le système de retraite français fait face à des
difficultés majeures. À la lumière des résultats
obtenus
après
la
réforme
de
2003,
le
redressement est encore timide compte tenu de
l’ampleur de ce qui est exigé pour rééquilibrer sa
situation financière. Heureusement, dans son
récent rapport sur les retraites au Parlement et
dans ses dernières déclarations, le gouvernement
Sarkozy confirme la nécessité d’allonger la durée
de cotisation à 41 années. Ce changement est
prévu entre 2009 et 2012 pour le régime général
et entre 2009 et 2016 pour la fonction publique.
Malgré tout, le COR estime que la réforme de 2003
entraînera en 2020 un décalage de l’âge moyen de
départ à la retraite de +0,2 an dans le secteur
privé, et de +1,5 an dans la fonction publique.
L’allongement de la durée effective des cotisations
sera donc limité dans les faits. Comme le
recommande l’OCDE (Organisation de coopération
et de développement économiques), de nouvelles
réformes seront nécessaires pour éviter une
hausse régulière des taux de cotisation. Les
dispositifs incitant à la retraite anticipée devront
également être révisés.
En effet, plusieurs autres mesures sociales
n’encouragent pas les travailleurs âgés à demeurer
en emploi, principalement le système de dispense
de recherche d’emploi (DRE) réservé aux
chômeurs de plus de 57 ans. Ce système connaît
un succès important en France. Par ailleurs,
plusieurs entreprises renoncent à offrir des
formations en fin de carrière à leurs travailleurs
âgés. Ces réalités nuisent à la crédibilité de la
réforme de 2003.
En contrepartie, le Parlement français vient
d’adopter une nouvelle mesure obligeant les
entreprises à compter parmi leurs employés 8 %
de personnes âgées de 55 ans et plus. Il reste
néanmoins à mobiliser davantage les travailleurs
français afin qu’ils demeurent plus longtemps sur
le marché du travail; ce qui n’est pas là une mince
tâche!
Auteure : Dominique Lizotte
Direction de l’évaluation, de la
statistique et de la révision