La politique au JT

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La politique au JT
Éduquer aux médias avec TV5MONDE © CRDP de l’académie de Versailles, 2011
La politique au JT
« Tout est politique et la politique est dans tout. » Partant de cette tautologie, on serait tenté
de faire du JT un miroir fidèle du débat public. En portant un regard sur la « cité » (la polis),
le JT ne parle en fait que de politique. Et il en parle même de manière politique : en effectuant
des choix, en traitant un sujet ou en l'ignorant, en filmant une visite officielle en contre-plongée
pour suggérer que la foule est grande... Enjeu majeur de la communication politique d'aujourd'hui, le JT peut-il donc rendre compte objectivement du débat politique ?
Dans la bataille des idées et la lutte pour le pouvoir, la télévision est très tôt devenue un enjeu
stratégique de premier plan. D'aucuns diront même qu'il est un instrument de contrôle des esprits.
Le journal télévisé est alors devenu un élément d'appréciation assez pertinent du rapport qu'une
chaîne entretient avec le pouvoir politique en place. Le respect du droit à l'information pluraliste au
sein d'une rédaction permet d'estimer la conception que le pouvoir se fait des libertés démocratiques.
Mais en dehors même des présupposés idéologiques, la politique est un domaine difficile à traiter sur
le petit écran. Alexandre Baloud déclarait, en 1987, alors qu'il était responsable de la rédaction de
M6 : « La télévision n'est pas un outil idéal pour faire de l'information car une large part de l'actualité ne
se prête pas à l'image. Notamment l'information politique, économique et sociale, qui relève souvent
du concept. L'image télévisée devient alors une image prétexte. »
Si, comme l'affirmait Paul Virilio dans L' écran du désert en 1991, « la politique, c'est le temps de la
réflexion », elle s'oppose totalement au primat du scoop*, à l'obsession de l'instant présent, au goût du
spectacle qui entraînent un effet de dépolitisation. Et Virilio de conclure : « La vision dépolitisée, aseptisée du monde qu'offre le Journal Télévisé agit plus sur la partie la plus dépolitisée du public. [...] Cette
vision déshistoricisée et déshistoricisante, atomisée et atomisante, trouve sa réalisation dans l'image
que donnent du monde les actualités télévisées, succession d'histoires en apparence absurdes. »
La mainmise sur l'information télévisée, même si elle ne date pas d'aujourd'hui (Alain Peyrefitte,
ministre gaullien de l'Information, validait le contenu de chaque JT ; Georges Pompidou, président de
la République, rappelait à l'ORTF la consigne impérieuse d'être « la voix de la France »), est toujours une
tentation, sinon une réalité. Noël Mamère et Patrick Farbiaz écrivaient en 2009 dans Petits arrangements
entre amis : « Nicolas Sarkozy n'est ni Chirac, ni Mitterrand, pour lui la télévision n'est pas seulement un
instrument de propagande, mais le vecteur principal d'une politique globale. La question n'est pas de
contrôler le 20 h mais de disposer du “pouvoir écranique” [...] il faut contrôler l'ensemble de la télé. »
Qu'il s'intéresse à la politique intérieure ou à la politique étrangère, le JT devrait présenter chaque
élément comme inscrit dans l'Histoire, avec ses antécédents et ce que l'on peut en attendre comme
conséquences. Or trop souvent, pour satisfaire le marketing politique, le JT n'hésite pas à créer des
antagonismes factices entre les personnes (l'accent est toujours mis sur des individus), à bâtir des scénarios catastrophes (quitte à les dénoncer peu après) plutôt que de rechercher les causes profondes,
les enjeux véritables et d'expliciter les évolutions.
La télévision en général, et le journal télévisé en particulier, influent en retour sur la manière d'exercer
le pouvoir et de mener le débat public. La télégénie est devenue un atout essentiel de la communication des hommes politiques, et la notoriété de ceux-ci dépend étroitement de leurs apparitions
dans les JT, au risque de s'y trouver surexposés et de voir s'estomper la frontière entre vie publique et
vie privée. « Coachés » parfois par ceux-là mêmes qui les intervieweront demain sur le plateau*, les
politiques ont appris à adapter la forme de leur discours aux contraintes du média, à organiser leur
agenda sur le calendrier des chaînes, à donner une dimension émotionnelle aux enjeux de société et
à infléchir leurs décisions en fonction des réactions de l'opinion à un passage au JT.
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Pistes pour la classe
École
• Les élèves reconnaissent-ils des hommes et femmes politiques dans le JT ? On rassemblera et discutera les critères de cette reconnaissance par des enfants. On distinguera ainsi les hommes politiques
français des hommes étrangers en s'interrogeant sur les critères de distinction (propos traduits de la
langue, présence de symboles à l'écran – drapeau, site particulier –, identification par le bandeau*,
présentation par le journaliste...).
• On travaillera sur des images de guerre, de conflit armé (par exemple, l'attentat au Pakistan, dans le
JT de France 2, 13e-14e min). Après le visionnage du sujet* muet, on fera identifier le thème, les lieux,
les personnages : Quel est ce conflit ? Que savent les élèves de ses causes, de sa durée, de ses conséquences sur les sociétés ? Après ce travail collectif de recueil des hypothèses, on les vérifiera par un
visionnage avec le son cette fois-ci.
• On fera réfléchir les élèves sur la notion de point de vue, de jugement sur un homme politique, une
personnalité, en leur présentant, comme exemple dans la fiction, la séquence* sur la nécrologie de
Kane, au début du film d'Orson Welles Citizen Kane, puis un même type de sujet dans l'actualité télévisuelle récente.
Collège, lycée
• Comment la rubrique politique est-elle introduite dans les différents JT ? On s'appuiera par exemple sur
le JT de la RTBF, dont la rubrique est ouverte par un « Parlons politique ». À qui ce « parlons » renvoie-t-il ?
De quelle politique va-t-on parler ?
• On comparera le traitement sonore de deux reportages de chaînes différentes à propos d'un même
sujet* politique.
Sujet :
Chaîne 1
Chaîne 2
Interview
Micro-trottoir
Dialogue in (personnes filmées dans le reportage)
Commentaire in (rédigé et enregistré par le journaliste responsable du reportage)
Commentaire off (commentaire lu en direct par le journaliste ou présentateur du JT)
Musique
• L'éloquence. En s'appuyant sur une interview d'un homme politique, on repérera dans les propos et
la gestuelle de ce dernier des procédés oratoires qui montrent qu'il cherche à mieux communiquer et
passer à l'image : position des mains, orientation du regard, slogans, formules choc, maniement de l'interrogation, de l'exclamation, de l'anaphore, de la période – phrase formée de plusieurs propositions –,
essai d'introduction et de conclusion malgré les empressements du journaliste...
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• On travaillera sur la compréhension des informations de nature politique, à partir de l'exemple du sujet
sur le projet de loi sur les mines, dans le JT de Radio-Canada (14e-16e min) : Quelles sont les personnes
vues et entendues (noms, fonctions) ? Quelles sont les régions impliquées ? Quel est l'enjeu de l'information ? Quelles sont les réactions des intervenants ? Comment les faits sont-ils connectés par les
intervenants, par la journaliste, par la présentatrice ? Que retient-on du sujet ?
• Le champ lexical de la guerre. On visionnera plusieurs sujets consacrés à des conflits et on notera les
mots et expressions liés au thème de la guerre.
• On fera réfléchir les élèves sur la notion de point de vue et sur le rôle important de la bande-son, en
montrant l'extrait du célèbre documentaire Lettre de Sibérie, réalisé en 1957 par Chris Marker, dans
lequel il présente trois fois de suite la même séquence*, de quelques minutes, sur la ville d'Irkoutsk.
L'originalité de l'expérience tient dans le fait que chaque séquence repose sur un commentaire qui présente à tour de rôle des points de vue pro-soviétique, anti-soviétique, puis « neutre », et une bande-son
à chaque fois différente qui vient renforcer le contenu de chaque version.
Sujet 1
Sujet 2
Sujet 3
Personnes
Matériel/objet
Événements
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