V Enseigner et apprendre des langues
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V Enseigner et apprendre des langues
V Enseigner et apprendre des langues Le chapitre V de ce volume traite de l'enseignement et de l'apprentissage de compétences qui deviennent de plus en plus importantes pour l'intégration européenne et au regard de la mondialisation: les compétences linguistiques et leur enseignement. Ce chapitre comporte deux contributions qui ont une signification essentielle pour la formation professionnelle et l'éducation permanente: l'une traite de l'apprentissage des langues, au cours de la formation professionnelle, et l'autre de l'utilisation des nouvelles technologies pour l'enseignement et l'apprentissage de langues étrangères. Gruber et alii résument certains résultats de projets, dans le cadre du programme Leonardo da Vinci, relatifs à l’apprentissage de langues dans la formation professionnelle. Ils demandent que l'apprentissage des langues soit étroitement lié à la situation au travail et aux exigences professionnelles concrètes. L'apprentissage de langues étrangères revêt une double importance dans la vie professionnelle: d'une part, il pèse de plus en plus lourd dans le développement de la personnalité et comme élément de l'éducation “culturelle” générale et, d'autre part, il est nécessaire en vue de la mobilité à l'intérieur du pays d'origine, mais surtout si l'on vise une activité professionnelle dans d'autres régions de l'UE. L'application et l'utilisation des techniques des multimédias modernes peuvent améliorer considérablement l'apprentissage des langues. L'enseignement par ordinateur devrait, toutefois, être complété par d'autres méthodes et formes d'enseignement qui permettent un contact direct avec les professeurs et des personnes ayant pour langue maternelle la langue étudiée. Les méthodes traditionnelles de l'enseignement de la grammaire et du vocabulaire n'aboutiraient pas à une réelle compétence linguistique. Dans le cadre des projets, des concepts en vue de nouvelles formes d'enseignement ont été développés, de même que des références en vue de l'utilisation de nouveaux TIC dans le cadre de l'apprentissage des langues. Ces derniers devraient revêtir un intérêt majeur pour les élèves et les enseignants de la formation professionnelle. A Tendances dans l’étude des langues dans l’enseignement et la formation professionnels - Le programme Leonardo da Vinci et l’apprentissage des langues à des fins professionnelles Sieglinde Gruber1; Lasnier, Jean-Claude; Rüschoff, Bernd et alii 1 Introduction “Quant à la formation professionnelle, initiale et continue, elle doit tout particulièrement faire une large place à l'apprentissage des langues. Celui-ci a une double portée pour la vie active, puisque c'est un élément important de culture générale et, en même temps, un atout pour l'accès à l'emploi, à l'intérieur du pays d'origine ou, grâce à la mobilité qu'il permet d'envisager, à l'intérieur de l'Union”.2 Ce Livre blanc insiste sur le fait que la maîtrise de trois langues communautaires3 est l’un des éléments essentiels de l’accès au savoir. Toutefois, cette exigence doit être analysée dans le contexte complexe de l’enseignement et de la formation professionnels où un tel objectif peut sembler, en réalité, ambitieux et ne pas refléter les développements en cours dans la plupart des États membres, si ce n’est dans la totalité. Elle devrait plutôt être considérée comme un objectif à moyen et à long termes. Il faudrait tout d’abord élaborer un certain nombre de stratégies assez différentes pour traduire cet objectif dans la réalité. En Europe, la mobilité revêt une importance primordiale pour tous les employés, mais surtout pour les ouvriers. La maîtrise de plusieurs langues ne favorise pas seulement le développement personnel et le plan de carrière, elle contribue également à développer un véritable sentiment de citoyenneté européenne. L’objectif essentiel reste néanmoins d’offrir de nouvelles opportunités d’emploi et de mobilité professionnelle au-delà des frontières nationales. Le multilinguisme encourage les jeunes à tirer pleinement avantage de la dimension européenne de l’enseignement et de la formation professionnels, en élargissant l’éventail des possibilités dans tous les pays où cela est prévu. Cette question est encore plus importante pour les employeurs d’aujourd’hui et de demain. De nombreuses études ont montré que de nombreuses entreprises perdaient d’importantes parts de marché parce qu’elles étaient incapables de s’exprimer dans la langue de leurs clients, surtout quand il s’agit d’une langue peu courante. C’est pourquoi il est essentiel d’élargir la connaissance des langues au-delà des trois langues traditionnellement utilisées dans les relations économiques et commerciales - l’anglais, le français et l’allemand. La connaissance d’une langue étrangère et son utilisation dans un contexte professionnel peuvent revêtir diverses formes. Certains acquièrent les rudiments de la langue pour pouvoir communiquer, d’autres se contentent de développer leur compréhension écrite et orale de la langue, d’autres encore ont besoin d’acquérir de meilleures compétences pour rédiger des documents complexes. Si la communication est un élément essentiel de la réussite dans un environnement multilingue, la formation aux langues étrangères doit être considérée en fonction des situations professionnelles dans lesquelles la pratique des langues est réellement 1 L’auteur est administrateur principal à la DG XXII “Éducation, Formation et Jeunesse”, de la Commission européenne. Les opinions exprimées dans le présent document n’engagent que lui. 2 Commission européenne, Enseigner et apprendre - Vers la société cognitive, Livre blanc, Bruxelles, 1995. 3 Voir le Livre blanc, op. cit., quatrième objectif nécessaire. Le contenu de cette formation s’appuie sur un certain nombre d’éléments qui intègrent plusieurs dimensions: les aptitudes à la communication et l’expertise liée à une fonction, la pratique orale de la langue (maîtrise d’une ou de plusieurs langues étrangères) ainsi que la sensibilisation aux questions culturelles et la compréhension de différentes cultures et schémas de comportement, etc. Ainsi, si l’apprentissage des langues à des fins professionnelles (VOLL - Vocationally Oriented Language Learning) doit devenir une compétence clé transférable, qui doit s’intégrer aux différentes composantes de la formation professionnelle, dans le cadre du processus d’apprentissage tout au long de la vie, il doit inclure les éléments précédemment mentionnés et les associer dans une approche globale intégrée. L’environnement du travail exige de plus en plus des aptitudes intégrées à la communication (compétences clés ou de base) pour résoudre des tâches holistiques exigeantes et en constante mutation. Dans ce contexte, l’apprentissage des langues ne suit généralement pas de règles linguistiques clairement définies, par exemple aller progressivement des structures simples vers les structures complexes, mais répond à des besoins de communication et est étroitement lié aux performances centrées sur les tâches. C'est pourquoi l’apprentissage des langues associe facilités et difficultés dès la première leçon. Au cours des dernières années, la formation aux langues étrangères a été caractérisée essentiellement par les éléments suivants: une grande flexibilité, une diversification des méthodes et des outils pédagogiques et une tendance vers l’apprentissage autonome. Aucune méthode n’est mise en pratique intégralement; l’enseignement et la formation des langues s'appuient de plus en plus sur une recherche dynamique dans l'éventail d’approches et de méthodes proposées (y compris les approches dites “alternatives” axées sur la suggestion, le jeu de scènes et le jeu de rôles). Par conséquent, une grande diversité de méthodes et de techniques a été mise au point et appliquée pour répondre aux objectifs spécifiques des besoins en communication dans des environnements en mutation. En raison des développements récents des technologies de l’information et de la communication, l’accent est mis, à présent, sur les approches méthodologiques qui simulent des situations professionnelles réelles et planifient le contenu du langage en y associant des codes utilisés dans des situations professionnelles intégrées. L’apprentissage fonctionnel des langues ne répond pas toujours aux besoins des individus dans leur environnement de travail. C’est pourquoi il faut restructurer différemment les séquences d’apprentissage: des situations réelles, même complexes, aident davantage les élèves à communiquer et à améliorer leurs performances orientées vers la tâche que des situations fragmentées en unités faciles à enseigner. 2 L’apprentissage des langues à l’aide des technologies de l’information et de la communication Le programme Leonardo da Vinci4 continue à soutenir, via les technologies de l’information et de la communication, des approches novatrices et de nouveaux développements dans l’apprentissage des langues à des fins professionnelles. Grâce aux performances accrues des processeurs et des capacités de stockage des supports optiques, la formation multimédia autonome (off line) et les logiciels correspondants, proposés sur CD-ROM, par exemple, connaissent un développement fulgurant, aussi bien qualitatif que quantitatif. Depuis 1995, la formation à distance, via Internet, fait l’objet d’un certain engouement, d’abord comme 4 Volet III.1 interface de communication avec le formateur, puis comme un véritable vecteur de formation multimédia s’appuyant sur les réseaux numériques à intégration de services (RNIS). Pour la première fois, la plupart des projets de langues réussis dans l’appel d’offres du programme Leonardo da Vinci de 1996 ont opté pour la production d’outils pédagogiques électroniques plutôt que pour les matériels imprimés (voir le tableau 1). Tableau 1 Appels d’offres 1995 et 1996 - Types d'outils pédagogiques 70 61 59 60 50 Appel 1995 Appel 1996 40 Total 30 21 20 9 10 0 Docum ents im prim és Supports audio Supports video Logiciels En 1996, le développement des outils ou des logiciels de formation pour Internet était aussi populaire que celui des CD-ROM. Toutefois, si l’on compare les chiffres obtenus en 1995 et en 1996 (voir le tableau 2), il semble que l’intérêt grandisse pour Internet au détriment du CD-ROM. Tableau 2 Appels d'offres 1995 et 1996 - Multimédia en ligne et hors ligne 50 46 45 40 35 31 30 Appel 1995 25 Appel 1996 Total 20 15 10 5 0 Internet CD-ROM Les nouvelles technologies de l’information et de la communication disposent d’un potentiel considérable pour faciliter l’acquisition des langues. Ils fournissent, par exemple, un accès à la pratique active de la langue grâce à la vidéoconférence et à l'audioconférence. Ils répondent aux différents besoins des élèves en matière de types, de styles et de rythmes d’apprentissage. Ils permettent de réduire les problèmes d’accès (temps et lieu). Ils sont attrayants, toujours renouvelés, facilement personnalisables, pour répondre aux besoins spécifiques, et stimulent la motivation d’apprendre à apprendre. Au cours des vingt dernières années, différentes approches méthodologiques ont été associées aux différents supports utilisés comme aides au processus d’apprentissage des langues. Il se peut que le CD-ROM et Internet ne soient pas la solution définitive, mais simplement une mode de plus. D’autres approches méthodologiques ont, par le passé, joui d’un engouement similaire pendant un certain temps, tel l’apprentissage par la grammaire et la traduction, la méthode directe, les méthodes audiovisuelles, les approches orientées vers la communication et les rapprochements entre différentes cultures. Elles subsistent, mais sont passées à l’arrière-plan par rapport aux nouvelles méthodes mentionnées. Les technologies de l’information et de la communication disposent du potentiel nécessaire pour permettre une approche éclectique. Toutefois, cette capacité même risque de poser des problèmes, dans la mesure où des logiciels attrayants peuvent être développés et commercialisés sans trop se soucier de l’approche méthodologique ni du contenu pédagogique. L’apprentissage et l’acquisition des langues étrangères, particulièrement dans le cadre des technologies de l’information et de la communication, doivent être considérés en termes de processus cognitif et constructiviste associé aux stratégies de traitement et de production des langues correspondantes ainsi qu’aux stratégies nécessaires d’apprentissage. Surtout dans le cas d'une structure d’apprentissage des langues à des fins professionnelles, la construction du savoir ne se limite pas à l’acquisition de compétences linguistiques: le développement d’aptitudes à la communication et, peut-être plus encore, l’éveil à la sensibilité de l’apprentissage sont aussi importants. Le chapitre suivant a été rédigé par Bernd Rüschoff5. Il souligne plusieurs aspects théoriques qu’il convient de considérer lors de la conception d’applications multimédia dans le contexte de projets linguistiques internationaux6. 3 Améliorer la formation et l’apprentissage des langues étrangères en renforçant l’utilisation des nouvelles technologies 3.1 Les technologies de l’information et de la communication, l’apprentissage des langues et la société de l’information Lorsque l’on évoque le défi que représentent les nouvelles technologies de l’information et de la communication pour l’éducation, il est souvent dit qu’il nous faut changer radicalement notre approche de l’enseignement et de l’apprentissage afin de mieux préparer les générations futures à vivre et à travailler dans la société de l’information. Ainsi, le philosophe français Pierre Levy souligne que l’avènement des technologies de l’information nous amènerait à repenser les procédures d’enseignement et de formation, mais parle de “société du savoir” pour décrire les résultats des récentes évolutions technologiques et sociales. Cela paraît logique, car, même si nous vivons dans une société où l’information est de plus en plus disponible et accessible sur des réseaux mondiaux, les technologies de l’information et l’accès 5 Bernd Rüschoff est professeur d’anglais à la Pädagogische Hochschule de Karlsruhe. Une étude détaillée a été publiée sur ce sujet: Rüschoff, B. et Wolff, D., Fremdsprachenlernen in der Wissengesellschaft: Zum Einsatz der Neuen Technologien in Schule und Unterricht, Hueber, Munich, 1988. 6 mondial à l’information ne sont qu’une facette de notre époque marquée par de profondes mutations. L’information doit être traitée et transformée en connaissances. Par conséquent, dans les siècles à venir, il ne suffira plus pour vivre, de travailler et d'apprendre à collecter et à stocker des informations, de retenir des faits. L’objectif ultime de l’enseignement et de l’apprentissage sera donc d’aider les élèves à développer des stratégies de recherche, de production et de diffusion des connaissances. Il apparaît clairement qu’il nous faut repenser certains concepts et stratégies d’enseignement et d’apprentissage: enrichissement des activités en classe, réorganisation de la structure des cours, possibilités d’apprentissage plus autonome et orienté vers les élèves. Les nouvelles technologies jouent déjà un rôle important dans ce processus et peuvent être considérées comme un élément qui vient enrichir l’environnement pédagogique du futur. Cependant, les différents aspects d’un tel environnement d’apprentissage enrichi par les technologies doivent être pris en compte à l’heure de concevoir un support multimédia et des outils pour l’apprentissage des langues. contenu des outils contexte Modes d’ apprentissage ENVIRONNEMENT D’APPRENTISSAGE ENRICHI PAR LES TECHNOLOGIES Rôle de l’enseignant et de l’élève Rôle des outils MÉTHODOLOGIE Comme le suggère le schéma ci-dessus, le contexte d’utilisation et le contenu des outils d’apprentissage des langues doivent être pris en compte à l’heure de débattre des outils enrichis par les technologies. Cela nous amène automatiquement à nous demander quels sont les modes d’apprentissage les plus pertinents dans un environnement enrichi par les technologies. D’entrée de jeu, les équipes de projet doivent voir si de tels outils sont nécessaires et, si oui, pourquoi. Sont-ils destinés à un apprentissage en classe, par soi-même, ou s’inscrivent-ils dans un scénario d’apprentissage télécoopératif? En outre, il faut évaluer l’efficacité des stratégies d’enseignement et des procédures de navigation intégrées au cours. Ces aspects doivent être considérés eu égard à l’évolution du rôle des outils (enrichis par les technologies). Il ne s’agit plus de développer des outils d’enseignement, mais des outils d’apprentissage, d’autant qu’il ne faut pas oublier la compétence d’“apprendre à apprendre” lorsque l’on parle des concepts pédagogiques, d’enseignement et d’apprentissage pour l’avenir. De surcroît, l’autonomie de l’élève est l’une des compétences clés indispensable à la société du savoir. Néanmoins, cette autonomie n’implique pas des cours en libre accès ou un apprentissage individualisé. “Les nouvelles technologies de l’apprentissage des langues ont eu tendance à utiliser l’autonomie pour justifier leur existence. Les logiciels informatiques d’apprentissage des langues sont un exemple d’une technologie qui prétend promouvoir l’autonomie en offrant tout simplement la possibilité d’étudier par soi-même. Cette prétention est souvent suspecte, les options et les rôles proposés aux élèves étant limités. Néanmoins, l’on peut considérer que les technologies de l’éducation, au sens large du terme (d’après le manuel de l’ordinateur), soutiennent plus ou moins l’autonomie.” (Benson, P.; Voller, P, 1997, p. 10) L’autonomie de l’élève est un concept qui dépasse largement le simple fait “d'offrir la possibilité d’étudier par soi-même” (Holec, H., 1988). Les outils enrichis par les technologies ne favorisent l’autonomie que s’ils permettent à l’élève de participer activement au processus d’apprentissage, d’acquisition de la langue et de construction du savoir, lui permettant ainsi de décider, peu à peu, quels sont les outils et les stratégies d’apprentissage qui sont le mieux adaptés à l’objectif qu’il poursuit. Enfin, les rôles de l’enseignant et de l’élève doivent être redéfinis et repensés lorsque l’on conçoit des outils pouvant réellement aider les élèves à développer les stratégies de construction du savoir évoquées ci-dessus. Les élèves doivent être considérés comme autant de partenaires au processus d’apprentissage et non plus comme de simples bénéficiaires d’instruction. Les enseignants doivent, eux, redéfinir leur rôle: ils conseillent, animent et transmettent des connaissances, comme cela a été dit à maintes reprises au cours de ces dernières années. En outre, on doit aussi supposer que les outils informatiques faciliteront la mise en place d’un tel cadre méthodologique et contribueront à régler un grand nombre de problèmes pratiques, notamment dans le domaine de l’exploitation des ressources authentiques. Autre principe important à suivre lorsque l’on conçoit des outils d’apprentissage: garantir l’authenticité de l’interaction élève-logiciel, des stratégies pédagogiques claires et des procédures de navigation simples. La question de l’authenticité, dans le contenu, la tâche et l’interaction avec la classe, est, en effet, “cruciale” pour la méthodologie d’apprentissage linguistique (van Lier, 1996, p. 123). Par conséquent, d’aucuns avancent que les nouvelles technologies sont l’outil idéal pour aider les enseignants à “élargir leur palette d’initiatives pédagogiques créatives” (Little et al., 1989, I). S’agissant de l’acquisition et de l’apprentissage des langues, cela doit être considéré comme un processus dynamique et interactif, “étudier, apprendre, revoir et rappeler n’étant pas de simples activités d’entrée-sortie, pas plus que ne l’est l’utilisation de la langue.” (Di Vesta, 1974, p. 28) 3.2 Toile de fond théorique et méthodologique Afin de prolonger notre réflexion sur les nouveaux concepts de méthodologie d’apprentissage des langues étrangères en lien avec les nouvelles technologies, dans ce que l’on appelle une “ère post-communicative” (Wolff, 1994), j’aimerais vous livrer une citation extraite d’un roman, qui, dès 1978, avait, de manière quasi prophétique, prédit le rôle que pourraient jouer les nouvelles technologies dans l’éducation, à une époque où la plupart des éducateurs sousestimaient le rôle potentiel des ordinateurs dans les systèmes d’éducation: “Les gens ne comprennent rien aux ordinateurs. Ils voient des machines accomplir des tâches mathématiques considérables. Le boulier du XXe siècle. Mais c’est bien plus que cela. Les enfants de demain visiteront les plus grandes bibliothèques du monde sans bouger de chez eux. Ils fixeront un écran et, sous leurs yeux, se dérouleront l’histoire, la science, la genèse de l’univers, tout. Ils pourront acquérir des connaissances en appuyant sur un bouton. (St. James, Ian, 1978, p. 376) Cette citation n’est pas du tout extraite d’un roman de science-fiction et ne s’inscrit pas non plus dans un contexte éducatif. En réalité, c’est un informaticien qui s’exprime ainsi dans un thriller économique pour expliquer au directoire de son entreprise l’utilité d’un investissement en informatique et technologies de l’information. Même si la formule n’est pas politiquement correcte et est empreinte d’un enthousiasme dépourvu d’esprit critique et peu réfléchi à l’égard des avantages de l’informatique pour l’apprentissage, elle souligne l’un des points principaux de ce document concernant le rôle des nouvelles technologies dans l’apprentissage des langues. Il faudra permettre aux générations futures de travailler et d’apprendre de plus en plus par des moyens autres que les manuels traditionnels et les scénarios d’apprentissage s’appuyant uniquement sur l’enseignement en classe. Une approche intégrée de l’exploitation des outils enrichis par les technologies et mis en réseaux locaux ou mondiaux deviendra la clé d’une éducation réussie au XXIe siècle. Un tel scénario, qui prévoit que les élèves puisent dans les ressources, acquièrent des connaissances et ne se contentent pas de recevoir un enseignement, avoisine l’approche cognitive-constructiviste de l’apprentissage des langues étrangères. De telles approches sont de plus en plus appréciées et sont considérées par ceux qui réfléchissent à l’éducation comme un cadre théorique adapté à l’environnement pédagogique de demain. La citation ci-dessus fait totalement abstraction des idées instructivistes que sont les concepts traditionnels de formation assistée par ordinateur, ce qui peut être le fruit du hasard, mais reflète la ligne de pensée des défenseurs de l’utilisation intensive des documents électroniques dans l’éducation en général. La recherche sur les processus d’apprentissage et d’acquisition des langues étrangères suggère qu’un simple enseignement des structures (grammaticales) et du vocabulaire ne débouchera pas sur de véritables compétences linguistiques, ni sur une réelle maîtrise de la langue. Néanmoins, outre les compétences de communication de base, privilégiées dans les années 80, il s’agit de développer des stratégies de traitement de la langue, de compétence linguistique, de perception des connaissances, de production et de construction du savoir, si l'on veut qu’une formation en langue aboutisse. De telles compétences, souvent évoquées dans le contexte de l’autonomie de l’élève, sont capitales pour apprendre une langue, notamment dans le contexte professionnel. Cependant, ceux qui suggèrent de repenser une méthodologie purement communicative (Wolff, 1994), parlent de l’ère post-communicative du FLL7 non pas en terme de retour à des concepts traditionnels d’exercices, bien au contraire. Outre qu’il rejette un paradigme instructiviste traditionnel, le paradigme cognitif-constructif est considéré comme une base méthodologique importante pour une véritable innovation dans l’apprentissage des langues étrangères. 7 FLL: Foreign Language Learning (apprentissage d’une langue étrangère). Une méthodologie fondée sur de tels principes est “orientée vers l’élève, vers les processus et vers l’autonomie de l’élève” (Wolff, 1994, p. 407), tout cela étant très important dans le contexte de l’apprentissage des langues à des fins professionnelles (VOLL - Vocational Language Learning). L’apprentissage doit être considéré comme un processus de collecte d’informations et de traitement des connaissances. Dans le cadre d’un tel processus, l’interaction entre les connaissances précédemment acquises et les nouvelles informations collectées conduit à l’acquisition, voire à la production, de nouvelles connaissances. L’apprentissage est un processus actif durant lequel les élèves construisent de nouvelles idées sur la base de leurs connaissances actuelles et passées (Bruner, 1990). Par conséquent, l’apprentissage de la langue devrait, à mes yeux, être décrit comme un processus interactif et dynamique durant lequel de nouvelles connaissances sont souvent acquises lorsque les élèves ont la possibilité d’explorer des sources et ressources et ne sont pas placés dans un contexte d’instruction formelle. Dans un tel scénario, les élèves allient les nouvelles informations et les connaissances antérieures factuelles (déclaratives) et procédurales et tirent de nouveaux enseignements de ce processus. Une telle approche de l’apprentissage, orientée vers les processus, permettra de mieux comprendre les faits linguistiques (structure et vocabulaire, par exemple) et d’acquérir une maîtrise de la langue, mais également une plus grande compétence et sensibilité à l’apprentissage. La résolution de problèmes, la formulation et la validation d’hypothèses permettront de rendre le contenu des outils d’apprentissage et le processus d’apprentissage lui-même plus transparents et plus compréhensibles. En outre, une approche constructiviste met l’accent sur l’apprentissage par l’expérience. Il a été dit et répété que les meilleurs résultats sont obtenus lorsque les élèves travaillent, autant que possible, sur des supports authentiques et semi-authentiques, placés dans le contexte de situations authentiques ou fondées sur la réalité ou, au pire, sur des simulations. Ainsi, l'approche de l’exploitation des nouvelles technologies, enrichie par des outils, doit être considérée comme l’approche la plus prometteuse pour l’intégration de ces technologies dans les programmes d’enseignement des langues. L’efficacité des méthodes traditionnelles d’apprentissage assisté par ordinateur et des outils CALL8 doit être jugée avec plus de scepticisme que par le passé. Cependant, l’apprentissage des langues enrichi par les technologies, c’est-à-dire l’utilisation de ces outils pour compléter le processus d’apprentissage, doit être considéré comme faisant partie intégrante du scénario constructiviste de l’apprentissage particulièrement bien adapté à VOLL. On dit donc que l’utilisation d’outils technologiques du monde réel, tels que le traitement de texte et de données, les publications électroniques et les outils dits cognitifs, va largement contribuer à une mise en place réussie de ces outils dans des programmes d’apprentissage des langues (à des fins professionnelles) plus efficaces. Le schéma suivant résume les principes méthodologiques évoqués jusqu’à présent. 8 Computer Assisted Language Learning (apprentissage des langues assisté par ordinateur). Apprentissage par contenu, contexte, tâche MÉTHODOLOGIE outils authentiques tâches authentiques Apprentissage par projet/orienté processus interaction authentique compétence stratégique Apprentissage cognitif-constructiviste Construction autonome et autogérée du savoir Apprentissage dans un environnement riche, ouvert, multimodal L’élément figurant dans la dernière flèche revêt une importance particulière: nous devons tout faire pour permettre aux élèves d’apprendre dans un environnement riche, ouvert et multimodal. Le terme multimodal, par opposition à multimédia, a été choisi délibérément. En effet, il se rapporte à ce qui a été dit sur le contexte d’utilisation, le contenu des outils pédagogiques ainsi que la méthode d’enseignement. Combiner les outils existants, les nouvelles technologies et les supports multimédia: voilà l’objectif que nous devons poursuivre afin de permettre aux élèves d’aborder une tâche sous des angles différents et de se familiariser avec différents modes d’apprentissage. Comme cela a été indiqué précédemment, le cadre théorique présenté ici est adapté à l’innovation par TELL (Technology Enhanced Language Learning - apprentissage des langues enrichi par les technologies), mais aussi à l’apprentissage novateur dans le cadre de VOLL. S’agissant de l’apprentissage linguistique à des fins professionnelles, deux aspects sont importants lorsque l’on parle du potentiel des ressources TELL. Tout d’abord, la maîtrise de la langue, les compétences associées et autres aptitudes ainsi que les niveaux de sensibilisation linguistique sont très importants pour VOLL. Cela est dû, en partie, au temps limité pour VOLL et, surtout, au fait que l’autonomie des élèves doit être développée afin de préparer et de former des professionnels à utiliser la langue sur leur lieu de travail. Cela doit comprendre les compétences en communication, mais aussi la capacité à relever de nouveaux défis posés par la langue étrangère et à développer les compétences existantes en cas de nouveaux développements professionnels et de supports d’apprentissage qui évoluent constamment. Ensuite, les types de stratégies et de compétences évoqués ci-dessus sont importants pour le développement d’aptitudes linguistiques à des fins professionnelles. L’apprentissage tout au long de la vie, la coopération européenne et internationale plus grande ainsi que la mondialisation croissante des métiers et des services, à tous les niveaux de la vie professionnelle et pas seulement au niveau du management, exigent des compétences particulières qui permettent aux élèves d’étendre ou de réactiver en permanence leurs compétences linguistiques. Les ressources TELL vont donc non seulement faciliter la souplesse d’organisation des programmes VOLL, mais aussi s’adapter aux contraintes liées à la formation professionnelle et/ou à l’emploi. Ces ressources sont particulièrement bien adaptées à ce type de formation linguistique. Les élèves ne travaillent pas qu’avec les outils et les supports qui font partie de leur vie professionnelle. Ils répondent ainsi au critère d’authenticité de la tâche et du niveau de contenu dans le processus d’apprentissage de la langue. Ils apprennent également dans le contexte de scénarios d’apprentissage par projet/orienté et processus, ce qui permet d’augmenter les formes d’apprentissage autodirigé et l’autonomie des élèves. 3.3 Logiciel et exemples de ressources Si l’on considère ce qui a été dit jusqu’ici, on pourrait avancer que les sources TELL ne devraient être utilisées que sous la forme d’outils authentiques, publiés sous forme électronique, et d’outils cognitifs (Wolff, 1994). Après tout, “les outils efficaces sont des outils qui étayent le processus cognitif ou permettent aux élèves de formuler et de tester des hypothèses dans le cadre de tâches de résolution de problèmes significatives” (Jonassen, 1992, p.6). Néanmoins, il faut brosser un tableau plus large et envisager des adaptations positives des concepts de logiciel éducatif traditionnel à l’heure de discuter des ressources TELL pour VOLL. Il va sans dire qu’une description intégrale des logiciels modèles et des exemples de bonne pratique dépasserait le cadre de cette contribution. Toutefois, les équipes de projet doivent examiner certaines questions clés et certains critères lorsqu’elles élaborent de tels outils. Les critères ci-dessous s’appliquent aux outils enrichis par le multimédia: i. ce type de logiciels doit permettre aux élèves d’être en “interaction” avec des données linguistiques afin de modifier des connaissances linguistiques acquises sur la base de l’analyse et du test; ii. par conséquent, ces logiciels ne doivent pas tester l’élève, mais lui permettre d’expérimenter et de chercher; iii. en outre, l’élève doit pouvoir contrôler davantage ce que fait le logiciel ou ce que l’on veut lui faire faire; iv. s’agissant du traitement des langues, la plupart des exercices traditionnels CALL et TELL se concentrent trop sur l’aspect linguistique du savoir déclaratif. En permettant à l’élève de travailler sur des outils différents, ces logiciels devraient accorder un plus grand intérêt aux connaissances des procédures. Outre les avantages que peuvent offrir les logiciels aux enseignants et aux élèves, leur véritable contribution à l’innovation dans l’apprentissage des langues étrangères réside dans la fonction outil des ressources TELL. La recherche a montré que l’utilisation de traitements de texte simples peut renforcer l’acquisition de la compréhension écrite et orale et de compétences de traitement. Cela vaut surtout lorsque d’autres outils “du monde réel” sont intégrés dans les logiciels de traitement de texte, tels que les thésaurus, les correcteurs grammaticaux et lexicaux et les outils qui combinent multimédia et liens hypertextes. Les scénarios d’apprentissage axés sur des projets produisant des dossiers électroniques au format hypertexte peuvent grandement renforcer les connaissances stratégiques et les compétences en traitement de l’information et en construction du savoir. Les banques de données et les CD-ROM sous forme d’encyclopédies thématiques ou générales participent également au processus d’apprentissage. En outre, les logiciels de création de banques de données individuelles ou collectives, telles que les dictionnaires de classe ou les encyclopédies liées au programme d’enseignement, peuvent se révéler des outils utiles pour les enseignants, mais aussi pour les élèves. Enfin, les outils de concordance, outils cognitifs les plus évidents, mettent les élèves dans une position qui leur permet, sur la base de leurs propres recherches, de découvrir des formes, des structures ou des schémas de pensée et des principes de formation lexicale. Les concepts hypermédia sont très utiles pour les outils pédagogiques qui mettent en pratique certains des aspects théoriques évoqués dans ce document. Ici, les procédures de navigation, la conception de l’interface utilisateur, les métaphores de navigation et l’aide orientée vers l’élève doivent être examinées avec soin. Car, après tout, “... la transformation du savoir est le test ‘litmut’ que nous devrions utiliser pour juger les hypertextes exploratoires et constructifs”. Ce type d’outils engage “... les élèves à regarder différemment l’outil ...” (Jackson, 1988, p. 12), restructurant et complétant ainsi la base de connaissances. Enfin, les télécommunications semblent évoluer vers une plate-forme mondiale pouvant être très utile lorsque l’apprentissage de la langue essaie de dépasser le cadre des classes isolées, surmontant ainsi certaines des limites de l’approche communicative dans une telle organisation de l’apprentissage. L’accès à des réseaux d’information mondiaux, la communication avec des pairs ou des enseignants, natifs ou étrangers, les projets télecoopératifs, qui dépassent les confins de la salle de classe traditionnelle, et l’usage de la télématique dans l’enseignement à distance : autant de possibilités offertes par Internet et le World Wide Web à l’apprentissage linguistique en général et à VOLL en particulier. 3.4 Conclusion Un point important est à souligner au terme de cette contribution: dans un programme d’enseignement, l’intégration de tout outil enrichi par les technologies doit se fonder sur une “informatique pédagogique utilitaire” (Pelfrêne, 1986). Cela veut dire que les outils ne confrontent pas les élèves aux exercices traditionnels de “rabâchage” et aux tests de compréhension, mais plutôt à des outils destinés à renforcer l’acquisition de stratégies et compétences de traitement et de production des langues. Il convient d’intégrer les aspects suivants au concept d’outil enrichi par les technologies: CONSTRUCTION DU SAVOIR communication aptitudes langues compétences apprentissage stratégies FLEXIBILITÉ & SENSIBILITÉ La construction du savoir, visant à permettre aux élèves de développer une plus grande souplesse et sensibilité au niveau de la communication, des langues et de l’apprentissage, doit faire partie intégrante de la conception des outils. En outre, les concepts classiques d’enseignement destinés à développer des compétences en communication, au sens traditionnel du terme, n’exploitent pas pleinement les nouvelles technologies pour l’apprentissage linguistique. La compétence linguistique et l’acquisition de stratégies d’apprentissage sont tout aussi importantes, sinon plus. Si ces systèmes sont bien conçus et les concepts d’application bien élaborés, le recours aux nouvelles technologies pour l’apprentissage des langues peut permettre aux enseignants et aux élèves d’accomplir certaines tâches avec une plus grande efficacité, non pas dans le sens d’une simple résolution de problème, mais comme ajout des scénarios d’apprentissage dans lesquels la construction interactive de nouvelles connaissances et l’acquisition de compétences et de stratégies sont tout aussi importantes. S’agissant de la théorie méthodologique, éducative et pédagogique, les limites et les contraintes des scénarios d’apprentissage à tendance purement communicative ou instructiviste sont devenus plus évidentes. Cela vaut plus particulièrement dans le contexte de VOLL, qui met davantage l’accent sur la promotion de l’autonomie de l’élève et la capacité d’“apprendre à apprendre” que sur l’apprentissage d’une langue étrangère en général. Par conséquent, les scénarios constructivistes et cognitifs pour l’apprentissage d’une langue, ancrés dans une classe de langue post-communicative et se concentrant sur une forme plus authentique d’apprentissage dans le contexte de l’apprentissage par l’expérience, par le projet et orienté processus, semblent être des principes pédagogiques sains sur lesquels fonder les concepts d'élaboration et d’exploitation de tout type d’outil enrichi par les technologies. Dans ce contexte, le potentiel d’un monde d’apprentissage de la langue, enrichi par la technologie et qui, espérons-le, ne sera pas le “meilleur des mondes”, peut être décrit comme suit: des outils puissants, qui facilitent l’accomplissement de certaines tâches, mais aussi l’application et l’acquisition de stratégies de plus en plus efficaces de traitement et de production des langues dans un environnement multimodal, enrichi par la technologie où l’on “apprend à apprendre”. 4 Assurance qualité et apprentissage des langues Le présent chapitre décrit, brièvement, quelques principes généraux de la qualité et l'ensemble des critères et des indicateurs qui seront appliqués à un éventail complet d’approches pédagogiques et didactiques, utilisées dans différents environnements d’apprentissage des langues, qui sont rassemblés dans un guide. Le débat est actuellement ouvert sur le concept d’assurance qualité appliqué à la formation professionnelle et sur ce qu'il recouvre. Est-il limité au contexte et à l’organisation ou inclut-il également le contenu et les moyens? Le contenu, la méthodologie et le processus d’apprentissage sont souvent décrits comme une “boîte noire” du système d’assurance qualité qu’il est déconseillé d'ouvrir. Le guide qualité pour l'évaluation et l'élaboration de méthodologies et de matériaux pédagogiques pour l'enseignement et l'apprentissage des langues9, élaboré dans le cadre du programme Leonardo da Vinci, vise, au contraire, à fournir une “boîte à outils” pratique et complète destinée à soutenir et à favoriser une conception et une évaluation qualitative des éléments constitutifs de cette “boîte noire”. Ce guide a pour principaux objectifs: - de sensibiliser les parties intéressées au concept de qualité appliqué à l’apprentissage et à l’enseignement modernes des langues et de participer au débat ouvert dans ce domaine; - de servir “d’exemple”, c’est-à-dire d’ouvrage de référence ou incitatif pour les maisons d’édition, les concepteurs d’outils pédagogiques, les enseignants et les formateurs, les décideurs, lorsqu’ils conçoivent les programmes, les outils et les stages de formation; - de proposer un instrument pratique à l’adresse des enseignants, des formateurs et des chefs de projets pour la conception et l’évaluation des programmes et des outils pédagogiques et pour renforcer leur motivation en insistant sur une efficacité accrue du processus d’apprentissage et d’enseignement. 9 Ce guide pour la conception et l’évaluation des programmes et outils d’apprentissage et d’enseignement des langues est cofinancé par la DG XXII et élaboré par: Jean-Claude Lasnier, A.C.F.C.I./A.G.E.R.C.E.L., France Petra Morfeld, International Certificate Conference, Allemagne Brian North, Eurocentres Foundation, Grande-Bretagne Carlo Serra Borneto, Université de Rome, Italie Preben Späth, PS Sprog & Edb, Danemark. D’autres informations et une brochure illustrée sont disponibles en EN,FR et DE. Contacter AGERCEL-CHCI, quai George V, FR-76600 Le Havre tél. (33-2) 32 74 95 95 fax (33-2) 32 74 95 96. 4.1 Phases de la gestion de la qualité dans le processus d’apprentissage et d’enseignement On peut considérer qu’une approche de la gestion de la qualité, appliquée à l’élaboration de programmes et d’outils d’apprentissage et d’enseignement des langues, se déroule en trois temps volontairement définis au sein du processus d’assurance qualité: avant - conception -, pendant - mise en œuvre - et après - résultats. La qualité lors de la phase de conception facilite mais ne garantit pas la qualité lors de la phase de mise en œuvre. La qualité lors de la phase de mise en œuvre peut partiellement compenser un défaut de conception, mais, en réalité, cela est illusoire à moins de pouvoir exploiter un contenu adapté et correctement présenté. Au niveau de la conception et de la mise en œuvre du programme, la qualité du service fourni ne peut être garantie que par une évaluation visant à déterminer si, indépendamment des impressions subjectives, le programme produit des résultats satisfaisants. Les trois phases de la gestion de la qualité - conception, mise en œuvre et résultats - sont résumées dans les schémas ci-après. CONCEPTION - avant À la phase de conception, la qualité s’applique à la définition du contenu et des activités d’apprentissage à partir de l’analyse des besoins des élèves, y compris au niveau de la présentation de ce contenu et de ces activités dans le programme ou les outils pédagogiques. Contenu Linguistique Textes Compétences Tâches pédagogiques Contenu Activités Thèmes ConcepIllustration tion Présentation Mise en page Couleur et musique Navigation Tâches vie réelle Stratégies d'apprentissage Conception des programmes Organisation Conception de l'unité Gestion Interaction Évaluation Le contenu porte sur la sélection du contenu linguistique, c’est-à-dire sur les fonctions et les notions, la grammaire et le vocabulaire, les types de texte et de thèmes abordés. Les activités couvrent les compétences, la lecture, l’expression orale, l’expression écrite, l’interaction, la médiation, ainsi que les exercices et les tâches pédagogiques, les tâches et les projets “en situation réelle” et les stratégies d’apprentissage. Pendant cette phase, l’organisation consiste à concevoir globalement des unités individuelles et des programmes, à élaborer les procédures destinées à évaluer la réalisation des objectifs ainsi que la manière d’organiser l’interaction. La présentation du programme/outils pédagogiques porte, essentiellement, sur les aspects suivants : la navigation, les illustrations, la mise en page, les couleurs et le son. MISE EN ŒUVRE - pendant Au stade de la mise en œuvre, la qualité implique la création d’une atmosphère positive, au niveau affectif et d’un environnement propice à l’apprentissage dans lesquels la mise en œuvre de la conception est surveillée et adaptée de manière souple aux besoins évolutifs des élèves. Cette phase comprend: la gestion de l’affectif, la surveillance des activités et les mesures d’accompagnement. Encourager Observation Évaluation Stimuler Allier Gestion Activités de au niveau contrôle affectif Mise Cadrer et Centrer en place Soutien Retour d'informations Ajuster Provision Mesures Soutien Meilleure prise de conscience et Autoapprentissage Outils Information Outils La gestion de l’affectif se déroule selon des étapes visant à s’assurer que le processus d’apprentissage est une expérience amusante, stimulante et enrichissante. Elle s’appuie sur les concepts de cadre et de centre d'intérêt - par exemple créer une ambiance conviviale, adapter le rythme d’apprentissage, récupérer -, d’adéquation - des sujets traités et des activités en fonction des spécificités des élèves -, de stimulation - stimuler la curiosité et la créativité des élèves - et d’encouragement - inciter à relever des défis, distribuer éloges et récompenses. Les activités de surveillance consistent à observer les performances individuelles de l’élève, ou l’avancement du processus d’enseignement, par exemple, à évaluer/examiner les résultats par rapport au point de départ et/ou au temps et aux ressources disponibles, à assurer le retour d’expérience vers l’élève sur ses performances linguistiques et à ajuster la prestation en conséquence, dans la présentation des activités à partir des autres activités de surveillance, par exemple. Les mesures d’accompagnement englobent les personnes susceptibles d’apporter leur assistance en cas de problème - les “tuteurs” et le personnel de soutien, à l’exception de l’enseignant -, les outils d’information - la présentation du contenu du programme, les outils de référence -, le développement de la sensibilité et les outils de formation par soi-même guide du professeur ou de l’élève, méthode accélérée pour aider les élèves plus indépendants, etc. RÉSULTATS - après La qualité des résultats peut être évaluée en termes de gain de compétences et de développement de la sensibilité en fonction des ressources et des conditions réelles et également en termes de satisfaction des personnes impliquées. Une fois les résultats évalués, il est possible d’établir la distinction entre un apprentissage réussi de la langue (succès), l’évaluation approfondie des moyens, les réactions au programme et aux outils pédagogiques (satisfaction) et la réalisation d’objectifs éducatifs plus vastes (prime à l’éducation). Profondeur Évaluation des des stratégies Compétenceacquisitions Buts / Vie réelle réalisations Critères Évaluation externes Retour des Succès Critères internes Conscience interculturelle Résultats moyens Prime à l'éducation Satisfaction Stratégies d'apprentissage Communication Stratégies Confiance en soi + Motivation d'informations pour révisions Modalités Lieux Activités Progrès Le succès, du point de vue des élèves, est évalué en termes de critères internes - tests de progrès, évaluations par l’enseignant et autoévaluation - et de critères externes, en comparant la maîtrise de la langue avant et après les cours, les gains de compétences acquis dans la vie réelle, c’est-à-dire les progrès réalisés dans l’utilisation de la langue dans la vie réelle, l’ampleur de l’acquis, c’est-à-dire l’acquisition à long terme, et la capacité à accomplir de nouvelles tâches. Quant à l’évaluation des moyens, le programme et les outils pédagogiques devraient être évalués en comparant les objectifs avec leur réalisation afin de disposer du retour d’expérience utile pour reconsidérer la conception et la mise en œuvre. La satisfaction - la réalisation des attentes - est mesurée en évaluant, par exemple, les modalités - durée, ordonnancement, logistique -, les équipements - outils, ressources, support -, les activités - tâches, interaction, stratégies d’apprentissage - et les progrès réalisés. La prime à l’éducation comporte divers aspects comme la sensibilité à différentes cultures, les stratégies d’apprentissage, les stratégies de communication, la confiance en soi et la motivation des élèves. 4.2 Principes de la qualité appliqués à la surveillance des processus d’apprentissage et d’enseignement Le tableau ci-après énumère neuf principes de la qualité avec les sous-principes correspondants. PERTINENCE Centrage sur l’apprenant Adéquation sociale et politique Adaptation ses besoins personnels et professionnels des objectifs éducatifs généraux au contexte d’apprentissage Clarté du ciblage Clarté des résultats des objectifs, aptitudes et niveaux en termes de réussite ou de difficultés Clarté de la présentation Clarté méthodologique en termes de logique structurelle pour l’apprentissage de la langue Cohérence méthodologique Cohérence interne Intégrité méthodologique Intégrité linguistique Intégrité textuelle Faisabilité pratique entre les objectifs et leur réalisation entre les différentes séquences et unités grâce à des principes validés d'une langue d'un usage courant en fonction des différents genres des exercices ou des activités Convivialité Interactivité Variété Affectivité facilitant l'utilisation stimulant l'implication de l'apprenant dans la gamme d'activités prise en compte de la dimension affective Individualisation prenant en compte les caractéristiques de l’apprenant permettant l’ouverture ou la réduction du programme TRANSPARENCE FIABILITÉ ATTRACTIVITÉ FLEXIBILITÉ Adaptabilité ÉVOLUTIVITÉ Transférabilité Intégration Développement cognitif à différents contextes d’apprentissage concernant les concepts existant des capacités et des stratégies d’apprentissage de l’apprenant PARTICIPATION Implication Intérêt personnel Partenariat dans le processus d’apprentissage opinions et centres d’intérêt des apprenants par le partage des responsabilités Rentabilité dans l’utilisation du temps et des ressources disponibles degré de correspondance entre les moyens et les exigences ÉFFICACITÉ Ergonomie Compétences sociales SOCIALISATION Compréhension interculturelle en termes d’enrichissement personnel, de coopération de sa propre culture et de celle des autres Le guide a adopté la méthode de gestion de la qualité suivante: - définition des besoins des utilisateurs et des objectifs en termes d’amélioration de la qualité; - découpage du processus d’enseignement et d’apprentissage en trois phases - conception, mise en œuvre et résultats; - application des principes et des sous-principes de la qualité au cours des trois phases, avec leurs divers éléments. 4.3 Indicateurs et profils qualité Le résultat principal repose sur plusieurs indicateurs et profils qualité: L’ensemble du processus d’apprentissage des langues doit être considéré comme un cycle de surveillance dans lequel les conclusions de l’évaluation des résultats d’un programme d’apprentissage des langues doivent avoir une incidence sur la conception et la mise en œuvre du programme suivant. Pour chacune des trois phases - conception, mise en œuvre et résultats -, le guide définit les règles de bonne pratique. Les indicateurs qualité, qui se présentent sous la forme de questions, permettent de vérifier que les mesures nécessaires ont été prises pour que ces règles soient respectées dans la prestation d’un service de qualité. Les questions renvoient aux principes et aux sous-principes de la qualité. Leurs réponses révèlent dans quelle mesure ces indicateurs ont été pris en compte. L’utilisation des indicateurs permet à l’utilisateur d’évaluer d’importants aspects de n’importe quel programme ou outil d’apprentissage des langues, depuis la phase de conception jusqu'à l’évaluation des résultats. Le tableau ci-après donne un exemple d’un ensemble de questions utilisées pour un élément de la phase de conception. Principes Quelles ont été les mesures prises pour s’assurer que les sujets et les Pertinence situations abordés étaient pertinents et intéressants pour les élèves? Participation INDICATEURS CLÉS Une analyse formelle des besoins a-t-elle été réalisée pour cette Pertinence population dans son ensemble? Une recherche des besoins de ce groupe cible particulier a-t-elle été Participation réalisée? Une recherche des intérêts de ce groupe cible particulier a-t-elle été réalisée? Les élèves ont-ils répondu à un questionnaire? Les besoins et les intérêts ont-ils fait l’objet d’un débat avec le groupe? Les élèves ont-ils été interviewés? Sous-principes Intérêt centré sur l’élève Intérêt personnel Intérêt centré sur l’élève Intérêt personnel La version CD-ROM du guide va permettre d’établir des profils qualité des programmes et des outils d’apprentissage concernés. Ces profils montreront, sous la forme de graphiques, les forces et les faiblesses des phases de conception, de mise en œuvre et de résultats. Un autre profil indiquera dans quelle mesure chaque principe qualité est représenté et signalera les points qui pourraient bénéficier du retour d’expérience pour améliorer la qualité du programme et des outils pédagogiques. La version CD-ROM contiendra également des exemples de bonne pratique, qui aideront l’utilisateur à appliquer les principes de la qualité au programme d’apprentissage des langues ou aux outils pédagogiques utilisés. 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