Cancer de prostate
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CANCER DE PROSTATE I – DEPISTAGE L’HAS ne recommande pas le dépistage de masse du cancer de la prostate dans la population générale. L’AFU recommande un dépistage individuel entre 50 et 75 ans, chez les hommes dont l’espérance de vie est estimée supérieure ou égale à 10 ans. Ce dépistage est recommandé dès l’âge de 45 ans chez les hommes ayant un risque accru de cancer de la prostate. Il s’agit des hommes d’origine africaine ou antillaise, et des hommes ayant un antécédent familial de cancer de la prostate. Le dépistage repose sur le toucher rectal et sur le dosage sérique du PSA (antigène spécifique de la prostate) total. Le dosage du PSA total ne se substitue pas au toucher rectal. Une information concernant les raisons, les bénéfices éventuels, les risques et les limites du dépistage doit être donnée par l’urologue ou le médecin traitant avant de proposer ce dépistage. Le dépistage se fait après accord du patient. La publication des résultats préliminaires des deux études évaluant l’intérêt du dépistage (études ERSPC et PLCO) n’a pour l’instant pas donné lieu à une modification des recommandations. II – ANATOMO-PATHOLOGIE Il s’agit dans la plupart des cas d’adénocarcinomes (plus de 95%) plus ou moins différenciés. Dans moins de 10% des cas, ces adénocarcinomes présentent une variante morphologique (carcinome endométrioïde, carcinomes mucineux, carcinome à petites cellules, carcinome sarcomatoïde, carcinome épidermoïde…). Il existe un état précancéreux représenté par la néoplasie intra-épithéliale (Prostatic Intra Epithelial Neoplasia ou PIN des anglo-saxons). Cette lésion est classée en néoplasie intra-épithéliale de haut et de bas grade. L’existence de PIN de haut grade sur une biopsie doit faire réaliser de nouvelles biopsies. Le PIN de bas grade n’a pas de conséquence pratique et ne doit pas être mentionné dans la conclusion. Il apparaît indispensable de grader les adénocarcinomes prostatiques selon le score de Gleason qui représente la somme de deux grades classés sur 5, en prenant en compte les deux territoires les plus largement représentés dans la tumeur. Le pourcentage de grade 5 doit être mentionné, même s’il est minoritaire. L’immunohistochimie avec P63, 504S est indispensable au moindre doute diagnostic. Une recherche de marquage neuro-endocrine (chromogranine A, NSE, synaptophysine) doit être effectuée en cas de doute morphologique ou clinique. Le compte-rendu anatomo-pathologique d’une biopsie prostatique doit préciser : - la longueur de la biopsie en millimètre, sa qualité (fragmentation éventuelle) et sa localisation, - la longueur du foyer tumoral en millimètre ou le pourcentage de longueur envahie sur la biopsie, - le pourcentage de biopsies positives, - le grade et le score de Gleason, - seules les lésions de PIN de haut grade seront mentionnées et nécessiteront, si elles sont isolées, de débiter tout le matériel de biopsie, à la recherche de micro-foyer infiltrant, - l'engainement péri-nerveux. pourra préciser : - la présence ou non de structures capsulaires et péri-capsulaires, - la situation du foyer tumoral par rapport à la capsule et la présence ou non de franchissement capsulaire, - la présence d’éléments inflammatoires lorsqu’ils sont nombreux. Pour le matériel de résection transuréthrale ♦ la technique recommandée est la suivante : - inclusion de la totalité des copeaux jusqu’à concurrence de 12 à 15 g (8 cassettes), - le nombre de cassettes d’inclusion peut être augmenté au rythme de 1 cassette pour 5 g de copeaux de résection en cas de matériel abondant, en sachant que l’on peut être amené à inclure d’emblée tout le matériel réséqué en fonction du contexte clinique (sujet jeune, PSA élevé). ♦ le compte rendu doit préciser : - le type histologique du cancer, - le grade et le score de Gleason, - le volume tumoral, - l’envahissement péri nerveux. pourra préciser : - l’invasion micro vasculaire, - les foyers de néoplasie intra-épithéliale, - les modifications post-thérapeutiques, - l’hyperplasie adénomateuse atypique , - l’extension extra-prostatique. L’examen d’un matériel de prostatectomie radicale la technique recommandée est la suivante : - les vésicules séminales, la base et l’apex seront prélevés séparément, - les vésicules séminales seront incluses en coupes sagittales, - la base et l’apex seront également inclus en totalité en coupes sagittales et parasagittales sériées, - le reste de la pièce est prélevé en coupes transversales allant de la base à l’apex perpendiculairement à la surface rectale et à l’urèthre, - chaque tranche de section est séparée en 2 à 4 fragments par recoupe médiane et paramédiane, - la technique d’inclusion en méga cassette permet d’obtenir de grandes coupes topographiques mais nécessite une adaptation de la technique de coupes et une coloration manuelle des coupes. doit préciser : - le type histologique du cancer, - la localisation de la tumeur, - le grade et le score de Gleason, - le stade pathologique (TNM 02) avec l’extension extraprostatique et l’envahissement des vésicules séminales (proximal ou distal), - l’état des marges chirurgicales et la localisation de marges positives ainsi que la distance par rapport à la marge la plus proche, - l’état ganglionnaire, - la proportion de grade 4/5, - l’envahissement péri nerveux. pourra préciser - le volume tumoral, - les lésions associées : PIN, …, l’envahissement microvasculaire, les modifications post-thérapeutiques . III – DIAGNOSTIC Le diagnostic repose sur les biopsies prostatiques qui seront effectuées devant une anomalie du toucher rectal et/ou du PSA. Le diagnostic pourra également être posé sur une pièce d’adénomectomie ou des copeaux de résection (Cf. supra) 1 - Le toucher rectal Toute anomalie au toucher rectal doit amener à la réalisation de biopsies de prostate, même si le taux de PSA est normal, chaque fois qu’une thérapeutique à visée curatrice est envisageable (espérance de vie supérieure à 10 ans). 2 - Le PSA Il n’y a pas d’indication à doser le PSA chez un patient asymptomatique dont l’espérance de vie est inférieure à 10 ans. Actuellement, l’Association Française d’Urologie retient une valeur seuil de PSA total à 4 ng/ml. Lorsque le PSA total est supérieur à 4 ng/ml, des biopsies prostatiques sont recommandées. Le dosage du PSA libre n’est pas recommandé en première intention. Ce dosage et le rapport PSA libre/PSA total sont utiles chez les patients qui ont déjà eu des biopsies prostatiques négatives, lorsque le PSA total reste élevé. Il permet d’indiquer de nouvelles biopsies lorsqu’il est bas. L’intervalle entre deux tests de dépistage est habituellement d’un an. En l’absence de suspicion clinique ou biologique de cancer de la prostate, le dépistage consiste donc à faire un toucher rectal et à demander un dosage du PSA total tous les ans. Cependant, l’intervalle entre deux tests de dépistage peut varier selon les données du toucher rectal, la valeur la plus récente du PSA total et la cinétique du PSA total. Ainsi, l’intervalle peut être rallongé chez des patients ayant un PSA total bas. Si à 45 ans, le PSA total est inférieur à 0,6 ng/ml, le prochain dépistage peut être réalisé 5 ans plus tard. Si après 50 ans le PSA total est inférieur à 1 ng/ml, le dépistage peut être espacé tous les 2 ans. A l’inverse, l’intervalle peut être raccourci en cas de suspicion élevée de cancer de la prostate, malgré une première série de biopsies prostatiques négatives. 3 - Les biopsies prostatiques ⇒ La technique recommandée est celle des biopsies écho-guidées ⇒ Les biopsies peuvent être réalisées en consultation externe ou en hospitalisation ⇒ Un lavement rectal est conseillé ⇒ Elles doivent être entourées d’un protocole d’antibioprophylaxie. L’antibioprophylaxie doit se faire en une prise unique, par exemple une fluoroquinolone de deuxième génération une ou deux heures avant la réalisation des biopsies. Elle peut être prolongée sur plusieurs jours en cas de facteurs de risque infectieux : immunodépression, antécédent de prostatite. ⇒ Une anesthésie locale sera préférée, avec éventuellement une analgésie au MEOPA. Une neurolept-analgésie ou une anesthésie générale pourront être réalisées dans certains cas particuliers : biopsies multiples, patients stressés, canal anal étroit et/ou douloureux, antécédents de chirurgie ou de pathologie ano-rectale. ⇒ En l’absence d’anomalie au toucher rectal (stade clinique T1), douze prélèvements écho-guidés sont recommandés regroupés en 6 paires. En cas d’anomalie au toucher rectal (stades cliniques T2 et T3) ou de nodule hypoéchogène de la zone périphérique, un prélèvement supplémentaire est recommandé dans la zone suspecte. ⇒ Il est conseillé de repérer les différentes carottes 4 – Indications de l’imagerie à visée diagnostique Les performances de l’échographie dans un but diagnostic sont faibles, peu améliorées par l’utilisation du Doppler couleur. Les lésions apparaissent comme des plages hypoéchogènes et hypervascularisées au Doppler couleur. Ces signes sont plus spécifiques lorsqu’ils siègent au niveau de la prostate périphérique. L’échographie endo-rectale permet de répartir les biopsies sur l’ensemble de la zone périphérique et éventuellement de biopsier un nodule. L’IRM est la meilleure technique pour l’étude de la prostate et des vésicules séminales. Cependant, sa place dans le diagnostic reste du domaine de la recherche. IV - BILAN D’EXTENSION En dehors du PSA et du toucher rectal, pourront être effectuées : une scintigraphie osseuse : elle n’est indiquée qu’en cas de PSA supérieur à 10 ng/ml ou de Gleason supérieur ou égal à 8. En cas d’anomalie de fixation, possibilité de réaliser un SPECT CT (TEMP-TDM) qui améliore considérablement la spécificité Il est considéré qu’un bilan d’imagerie en coupes (TDM ou IRM) doit être réalisé avant un traitement curatif : - L’IRM : chez les patients à risque intermédiaire ou élevé, l’IRM permet une meilleure évaluation pour la détection des T3 L’examen est idéalement réalisé avec une antenne endorectale qui confère un meilleur rapport signal/bruit couplée à une antenne en réseau phasé pelvienne. L’examen sans antenne rectale est réalisable avec un aimant d’au moins 1,5 Tesla. Un délai d’au moins 6 semaines (idéalement 8 semaines) doit être respecté afin de s’affranchir des remaniements hémorragiques post biopsiques. L’examen prostatique est couplé à une analyse de la cavité abdomino pelvienne en coupes axiales de 5 mm en SE T2 ou T1 et doit comporter : • Des séquences morphologiques en TSE ou FSE T2 en coupes fines jointives de 2,5 à 3 mm dans les plans sagittal, coronal oblique dans le plan de la prostate et axial perpendiculaire à la paroi rectale antérieure. Une séquence en pondération T1 dans le plan axial permet de rechercher les remaniements hémorragiques post biopsiques. • Des séquences fonctionnelles o IRM dynamique après injection de Gadolinium en EG T1 avec analyse des courbes de rehaussement o IRM de diffusion avec calcul de l’ADC (coefficient de diffusion apparent) o Spectro IRM 3D multi-voxel analysant le rapport Choline-Créatine /Citrate. En pratique : La localisation du cancer et l’estimation de son volume doivent s’appuyer sur les résultats des anomalies T2 et comporter deux séquences fonctionnelles (le couple diffusion et IRM dynamique réalisable avec une antenne externe donne une bonne sensibilité et spécificité). La spectroIRM nécessite une antenne endorectale et n’est pas interprétable dans 30 % des cas. Les lésions cancéreuses apparaissent en hyposignal T2 et sont caractérisées par une restriction de la diffusion avec baisse de l’ADC, un pic de choline-créatine avec baisse du pic de citrate en SpectroIRM et un rehaussement précoce avec une courbe de décroissance en IRM dynamique. Les performances de l’IRM fonctionnelle (dynamique, perfusion et spectroscopie) sont meilleures que celles des séquences morphologiques en T2 avec des sensibilités et des spécificités élevées pour la détection des lésions de plus de 0.5cc. L’extension extra-capsulaire n’est aujourd’hui retenue en pratique que devant des signes directs : visibilité de l’hyposignal tumoral dans le tissu périprostatique et/ou déformation irrégulière ou spiculée des contours prostatiques. L'extension aux vésicules séminales se caractérise par un hyposignal uni- ou bilatéral d'une partie ou de la totalité des vésicules. Les nanoparticules permettant la réalisation de lymphoIRM n’ayant toujours pas l’AMM, l’extension ganglionnaire est appréciée sur un critère morphologique : le petit axe ganglionnaire dépassant 8 mm à l’étage pelvien et 10 mm en rétro péritonéal. - La tomodensitométrie pourra être réalisée si difficultés d’accès à l’IRM Sinon, elle est réservée aux patients présentant des contre-indications à l'IRM pour l’extension ganglionnaire pelvienne et lombo-aortique avec une fiabilité qui varie de 67 à 97 %. - Le TEP scan avec l’utilisation de la F18-choline est en cours d’évaluation. Le TEP au 18-FDG n’a pas d’indication. Le curage ganglionnaire pelvien Il apporte la seule information sûre quant à l’état ganglionnaire du patient. Il doit être proposé dès qu’un traitement à visée curative est envisagé. Il peut être omis avant la radiothérapie ou la prostatectomie radicale quand le risque de métastases ganglionnaires est minime (faible risque de d’Amico). Il peut être réalisé comme premier temps d’une prostatectomie radicale ou de façon séparée (surtout s’il existe une présomption d’atteinte ganglionnaire). Il peut être effectué par chirurgie ouverte (pelvioscopie) ou par cœlioscopie. V - CLASSIFICATION - TNM 2002 T0 : Pas de tumeur primaire décelable T1 : Tumeur cliniquement inapparente, non palpable et non mise en évidence par les examens d’imagerie • T1a : Découverte histologique accidentelle, présence d’éléments tumoraux dans moins de 5 % du tissu réséqué • T1b : Découverte histologique accidentelle, présence d’éléments tumoraux dans plus de 5 % du tissu réséqué • T1c : Tumeur identifiée sur une biopsie pratiquée devant une augmentation du PSA sérique Rq : le grade de Gleason n’est pas pris en compte dans la classification de l’UICC. La classification de l’American Joint Committee intègre le score de Gleason pour différencier le T1a du T1b : T1a < 5 % du tissu réséqué avec un score de Gleason < 7 ou absence de grade 4 ou 5 T1b > 5 % du tissu réséqué et/ou un score de Gleason > 7 ou présence de grade 4 ou 5 T2 : Tumeur limitée à la prostate • T2a : tumeur concernant la moitié d’un lobe ou moins • T2b : tumeur concernant plus de la moitié d’un lobe mais sans atteindre les deux lobes • T2c : tumeur concernant les deux lobes T3 : Tumeur s’étendant au delà des limites anatomiques de la glande • T3a : Tumeur avec extension extra-capsulaire • T3b : Tumeur envahissant les vésicules séminales T4 : Tumeur fixée ou envahissant les structures adjacentes autres que les vésicules séminales • T4a : Tumeur envahissant le col de la vessie et/ou son sphincter externe et/ou le rectum • T4b : Tumeur fixée aux parois pelviennes et/ou envahissant les muscles releveurs de l’anus Le traitement sera fonction des groupes à risque de d’Amico. Ces groupes à risque de d’Amico ont été validés pour estimer le risque de progression après prostatectomie totale, radiothérapie externe et curiethérapie interstitielle. Ils sont prédictifs du risque de récidive biologique. Le TD du PSA est lui même corrélé au risque de décès par cancer de la prostate - faible risque : PSA ≤ à 10 ng/ml et score de Gleason ≤ à 6 et stade clinique T1c ou T2a. - risque intermédiaire : PSA entre 11 et 20 ng/ml, ou score de Gleason = 7 ou stade clinique T2b. - risque élevé : PSA > 20 ng/ml ou score de Gleason de 8 à 10 ou stade clinique T2c-T3. VI – TRAITEMENT Certains critères cliniques, biologiques et anatomo-pathologiques préthérapeutiques permettent d’estimer le résultat des traitements proposés à visée curative et/ou éventuellement d’orienter la décision thérapeutique initiale. Outre le stade clinique selon les données du toucher rectal, le score de Gleason des biopsies, le nombre de biopsies positives (et la « longueur » de cancer sur les biopsies) et la valeur du PSA total pré-thérapeutique, la cinétique du PSA constitue un facteur indépendant de l’évolution de la maladie. Elle se mesure par la vélocité du PSA et le temps de doublement du PSA (TD PSA). La vélocité préthérapeutique s’est avérée être un facteur de pronostic indépendant de la récidive après prostatectomie totale ou radiothérapie à condition de connaître l’historique de ce paramètre en remontant à au moins 12 mois et d’avoir une valeur seuil de 2ng/ml/an. Le TD PSA est plutôt utilisé après chirurgie ou après radiothérapie en cas de récidive biologique mais également lors de l’échappement au traitement hormonal en phase métastatique. Un TD PSA < à 12 mois sera plutôt en faveur d’une récidive à distance alors qu’un TD PSA > 12mois sera plutôt en faveur d’une récidive locale. La combinaison de certains de ces facteurs pronostiques qualitatifs ou semiquantitatifs permet d’évaluer le risque d’extension extracapsulaire ou ganglionnaire (tables de Partin), de progression biologique post-thérapeutique (nomogrammes de Kattan) ou de classer en pré-thérapeutique les patients dans des groupes à risque évolutif après traitement local. Divers «calculateurs» basés sur ces nomogrammes peuvent être trouvés sur Internet . Avant le traitement, une consultation d'oncogériatrie pourra être demandée afin d'orienter au mieux la thérapeutique. A – Traitement du cancer de prostate localisé 1 - Les différentes modalités et leur suites a) LA PROSTATECTOMIE RADICALE La prostatectomie totale est le traitement de référence des tumeurs localisées de la prostate chez l’homme avec une espérance de vie supérieure à 10 ans et habituellement d’un âge ≤ à 70 ans. Il n’y a pas de règle absolue concernant l’âge limite de réalisation de la prostatectomie totale, mais après 70-75 ans, la morbidité compétitive augmente et rend le bénéfice de la chirurgie plus discutable par rapport aux autres alternatives thérapeutiques. La prostatectomie radicale assure le contrôle local de la maladie et représente le seul traitement ayant montré une amélioration de la survie spécifique comparativement à la surveillance dans un essai prospectif, randomisé. Le curage ganglionnaire ilio-obturateur bilatéral associé est optionnel pour les cancers à faible risque évolutif (faible risque de d’Amico). Sur le plan technique, la prostatectomie totale est associée à l’exérèse bilatérale des vésicules séminales. La préservation des faisceaux neuro-vasculaires peut être envisagée en fonction de l’information donnée au patient, de son désir de conservation des érections, de sa fonction sexuelle avant la chirurgie et des critères d’agressivité tumorale. Elle peut être effectuée par voie sus-pubienne, par voie périnéale ou par laparoscopie. La voie périnéale est contre-indiquée en cas de volumineux adénome. Complications : - per-opératoires : hémorragie, plaie rectale (0 à 1,6 %), plaie urétérale (0 à 1,6 %) - tardives : incontinence et impuissance. Pour la continence, l’analyse de la littérature révèle que globalement 50 % des patients sont continents à 3 mois et que 10 % environ des patients présentent des fuites urinaires à 2 ans. Pour l’impuissance, les données de la littérature varient de 30 à 100% en fonction des techniques opératoires de préservation nerveuse. Les aléas carcinologiques immédiats : - - Le curage ganglionnaire positif : - Fait préalablement à la prostatectomie ou à la radiothérapie : le malade passe dans le groupe métastatique (cf.infra), - Fait dans le premier temps de la prostatectomie avec extemporanée : en principe arrêt de l’intervention (exception acceptable si envahissement microscopique . Discussion en RCP d’un traitement adjuvant). Les marges positives (R1) Radiothérapie immédiate ou retardée jusqu’à rechute biologique (qui ne se produit que dans 2/3 des cas). Les aléas carcinologiques tardifs : - La remontée du PSA : Après une prostatectomie radicale, un taux de PSA inférieur à 0,2 ng/ml est attendu. Une augmentation supérieure à ce chiffre témoignera d’une rechute. - Indication de la radiothérapie : si les critères pronostics sont en faveur d’une récidive locale (la biopsie de l’anastomose n’est plus recommandée) : - ascension secondaire du PSA en l’absence de métastase à distance, - vélocité du PSA pré-chirurgical < 0,75 ng/ml/an, - temps de doublement du PSA post chirurgical > 12 mois, - marges chirurgicales positives, - absence d’atteinte des vésicules séminales, - délai supérieur à 1-2 ans après la chirurgie. Elle semble plus efficace lorsque le PSA est inférieur à 1 ng/ml. - Indication du traitement hormonal : cf. infra au paragraphe B b) LA RADIOTHERAPIE CONVENTIONNELLE • • Constitue une alternative à la prostatectomie radicale ; elle est considérée comme moins efficace mais moins porteuse de complications, tout cela sans preuve de niveau I. par voie externe, conformationelle ou par modulation d’intensité (RCMI). irradiation fractionnée sur une période de 7 à 8 semaines, selon les Centres et les habitudes, doses totales de 70 à 76 Gy à raison de 5 séances par semaine. Complications : - précoces : irritation rectale plus que vésicale tardives : impuissance, sténose uréthrale (surtout si antécédents de résection prostatique), rectite radique, cystite radique. Les aléas carcinologiques : - La remontée du PSA : bien qu’il n’existe pas un accord formel sur la question, un nadir du PSA < 1 ng/ml, voire 0,5 ng/ml paraît nécessaire pour une réussite du traitement (avec un nadir inférieur à 0.5 ng/ml, il y aurait encore 5 % de progression à distance). La valeur nadir n’est acquise en moyenne que 12 à 18 mois après traitement. Les critères de récidive après traitements par agents physiques (radiothérapie externe ou curiethérapie) ont changé depuis 2006. La récidive est maintenant définie par une élévation du PSA au delà de la valeur du nadir + 2 ng/ml (critères de Houston ou de Phoenix). Elle remplace l’ancienne définition : 3 valeurs successives de PSA en augmentation. - Indication des ultra-sons focalisés à discuter en RCP : retour de longue durée des PSA à des valeurs indétectables dans 1/3 des cas, mais complications uréthrales fréquentes dans cette indication : sténoses, incontinence. - Indication du traitement hormonal : cf. infra au paragraphe B. c) LA CURIETHERAPIE INTERSTITIELLE La curiethérapie à l’Iode 125 est proposée dans des situations cliniques précises qui correspondent aux cancers de prostate à faible risque : tumeur localisée sans extension extra-prostatique de stade ≤ à T2b, score de Gleason ≤ à 6 (pas de grade 4 prédominant) et PSA ≤ à 10 ng/ml. Il n’y a pas de limite inférieure d’âge pour laquelle la curiethérapie est contre-indiquée, mais il existe quelques réserves pour les patients les plus jeunes. Un score de Gleason 3 + 4 ou un PSA entre 10 et 15 ng/ml ne constitue pas une contre-indication formelle à condition que les autres critères soient respectés. Un volume prostatique supérieur à 5060 cm3, l’existence d’une hypertrophie du lobe médian et/ou de symptômes obstructifs constituent des contre-indications relatives à la curiethérapie. Un antécédent de résection trans-uréthrale est une contre-indication à cette technique. Complications : - rétention : RTUP dès que le rayonnement est devenu acceptable (6 mois pour l’iode 125 qui est la source utilisée en France). Les aléas carcinologiques : - La remontée du PSA: cf. supra Radiothérapie conventionnelle - Indication du traitement hormonal : cf. infra au paragraphe B d) LES AUTRES METHODES PHYSIQUES Les ultrasons focalisés (HIFU) Le traitement par HIFU peut être proposé à des patients : - âgés de plus de 70 ans, dont l’espérance de vie est au moins de 7 ans (ou à des patients plus jeunes lorsqu’existe une morbidité compétitive), - présentant une tumeur T1-T2 N0 M0, Gleason ≤ 7 (3+4), - une valeur de PSA ≤ 15 ng/ml, - un volume prostatique ≤ 50 cc, - un volume tumoral limité (moins de 4 zones prostatiques atteintes sur 6). Le recul de la technique est insuffisant pour juger du bénéfice à long terme. Les patients doivent en être informés lors de la discussion des options de prise en charge. Complications : uréthrales, rares dans cette indication. Les aléas carcinologiques : - La remontée du PSA : cf. supra Radiothérapie conventionnelle - Indication de la Radiothérapie : à discute en RCP - Indication du traitement hormonal : cf. infra au paragraphe B Radiofréquence et cryothérapie : en cours d'évaluation e) L’HORMONOTHERAPIE Dans le cadre d’un cancer de prostate localisé, elle a des indications en association à la radiothérapie. Elle sera également proposée en traitement pour les sujets dont l’espérance de vie est inférieure à 10 ans. Sur le plan des modalités de réalisation, cf. infra. f) LA SURVEILLANCE Elle est basée sur l’évolution du taux de PSA. Il est à distinguer l’abstention surveillance de la surveillance active. - L’abstention surveillance correspond à la décision d’instaurer un traitement hormonal (ou divers traitements palliatifs) seulement à l’apparition de signes de progression locaux ou généraux. - La surveillance active est une notion plus récente qui repose sur l’hypothèse de formes «latentes» du cancer localisé de la prostate, non ou très lentement évolutives, pouvant ne pas s’exprimer cliniquement du vivant du patient. Ces formes ont été qualifiées également «d’indolentes», de «non significatives», et par les anglo-saxons de «insignificant» ou «unimportant». Un programme de surveillance active a deux objectifs : - ne pas proposer un traitement définitif pour les cancers localisés à faible risque initial mais enclins à progresser. - réduire le risque des effets secondaires et des complications des traitements pour ces cancers peu susceptibles de progresser. Il n’y pas de critères validés pour proposer cette tactique : - L’HAS envisage T1 avec < 3 biopsies positives et aucune carotte avec cancer > 3 mm. - Le protocole Toronto réunissant les critères suivants : - Cancer localisé à faible risque évolutif T1- T2a, - PSA initial < 10 ng/ml, - Score de Gleason des biopsies ≤ 6 et absence de grade 4, - Moins de 3 biopsies positives (sur au moins 6 biopsies réalisées), - Moins de 50 % de tumeur sur chaque biopsie envahie. 2 - Indications thérapeutiques pour les patients ayant une espérance de vie > 10 ans (récapitulatif) 2-1 Options thérapeutiques pour les patients du groupe à faible risque de d’Amico (T1-T2a, PSA à 10 ng/ml, score de Gleason ≤ à 6) : a - Surveillance active (modalités : Cf. ci-dessus) b - Prostatectomie totale (curage ganglionnaire ilio-obturateur bilatéral optionnel) c - Curiethérapie avec implants permanents d’Iode 125 d - Radiothérapie externe du volume prostatique seul à une dose de 70 Gy ou plus e – L’Ablatherm est autorisée par l’AFU 2-2 Options thérapeutiques pour les patients du groupe intermédiaire de d’Amico (stade clinique T2b ou PSA 10-20 ng/ml ou score de Gleason 7), trois possibilités thérapeutiques existent : - Prostatectomie totale avec curage ganglionnaire - Radiothérapie externe conformationelle avec une dose minimale de 74 Gy - Radiothérapie externe avec une hormonothérapie courte (6 mois) par analogues de la LH-RH Egalement, dans le cas de ces patients, 2 options après discussion en RCP peuvent être envisagés : - Curiethérapie interstitielle - L’Ablatherm est autorisée par l’AFU 2-3. Options thérapeutiques pour les patients du groupe à haut risque de d’Amico (PSA > 20 ng/ml ou score de Gleason de 8 à 10 ou stade clinique T2cT3) Un curage préalable est recommandé Deux possibilités : - Association radiothérapie + hormonothérapie prolongée (2 à 3 ans) - Prostatectomie radicale 1 - Indications thérapeutiques pour les patients ayant une espérance de vie < 10 ans Les traitements pourront être : - L’abstention surveillance peut être indiquée chez les hommes porteurs d’un cancer localisé T1-T2 bien ou moyennement différencié, - une hormonothérapie d’emblée, continue ou intermittente - Ablatherm - Une radiothérapie externe peut être discutée Cas particulier de la radiothérapie adjuvante à la chirurgie : Elle n’est pas indiquée en cas de cancer avec envahissement ganglionnaire (pN+). Récemment, du fait de l'amélioration des techniques d'irradiation (IMRT), ce dogme a été discuté pour les patients avec une faible atteinte ganglionnaire. L'indication devra être discutée en RCP. Elle pourra être également indiquée lorsqu’existent des critères de mauvais pronostic sur la pièce opératoire (marges positives) de prostatectomie radicale, ou simplement un pT3 ; elle sera plutôt effectuée à la remontée du PSA. 4 – Suivi Après traitement d’un cancer de la prostate localisé, la surveillance va porter uniquement sur le taux de PSA. Après un dosage à 3 mois post-thérapeutique, ce paramètre sera dosé tous les 6 mois pendant 3 ans puis tous les ans pendant 10 à 15 ans. Les autres examens biologiques ou morphologiques, sauf cas particuliers, ne font pas partie du bilan de surveillance standard. B - Traitement de première ligne du cancer de prostate métastasé Il s’applique aux patients porteurs d’un cancer de prostate métastasé d’emblée ou récidivant après traitement « curateur » (remontée isolée du PSA ). 1 - Les différentes méthodes L'hormonothérapie. Elle peut être réalisée: • • • • • par castration chirurgicale, par agoniste de la LHRH plus ou moins associé à un anti-androgène. Le gain sur la survie de l’association est contestable, surtout si on prend en compte les effets secondaires. Cependant, l’utilisation d’un antiandrogène doit accompagner la première injection d’un analogue, surtout si le volume tumoral est important, par antagonistes de la LHRH, par anti-androgènes stéroïdiens, par anti-androgènes non stéroïdiens qui permettent d’espérer le maintien de la puissance sexuelle au prix d’une efficacité peut-être moindre. Elle sera le plus souvent effectuée en continu mais pourra être réalisée de façon intermittente (notamment si souhait d'essayer de maintenir une sexualité et si mauvaise tolérance du traitement au long cours). Abstention Surveillance Elle constitue une option intéressante en cas de faible volume métastatique. Elle permet de conserver un temps les effets trophiques (anti-ostéoporose), psychiques (dynamisme) et sexuels (libido) des androgènes. Par rapport à l’hormonothérapie immédiate, cette hormonothérapie retardée ne semble pas modifier significativement la survie des patients. 2 – Suivi Il repose exclusivement sur le taux de PSA, les rechutes sans ré-ascension du PSA étant absolument exceptionnelles, sauf peut-être pour les tumeurs très indifférenciées. C - Traitement de deuxième ligne jusqu'à l'hormono-résistance Blocage androgénique complet L’adjonction d’un anti-androgène périphérique à l’agoniste de la LHRH permet une réponse biologique dans 60 % des cas pour une durée de 4 à 6 mois. Syndrome de retrait Après progression sous blocage androgénique complet, il convient de rechercher un syndrome de retrait des anti-androgènes. Ce syndrome initialement décrit en 1993 avec le Flutamide est observé avec tous les anti-androgènes. Il correspond pour un tiers des patients à une diminution de plus de 50 % de la valeur du PSA à l’arrêt des anti-androgènes pour une durée médiane de 4 à 6 mois. Autre traitement hormonal Une troisième étape peut consister en la prescription de trois autres types de traitement : • Le Bicalutamide à forte dose (150 à 200 mg) a été proposé avec constatation chez 25 % des sujets d’une amélioration subjective des symptômes sans réponse objective, • Le Diethylstilbestrol permet l’obtention d’une réponse objective sur le PSA dans près de 50 % des cas mais avec un risque thrombo-embolique majoré. L’Estramustine phosphate (4 à 6 comprimés par jour) peut être essayée dans ce cadre avec le même risque. • Les corticoïdes à faible dose : que ce soit par un blocage des androgènes surrénaliens, par leur action anti-œdémateuse et/ou anti-métabolique, ils ont souvent un effet notable. Ils constituent également un traitement associé à la chimiothérapie du cancer de prostate en hormono-résistance. D - Traitement du cancer de prostate en hormono-résistance L’hormono-résistance du cancer de prostate se définit comme : - trois augmentations du PSA à au moins deux semaines d’intervalle, dont 2 à plus de 50 % au dessus du nadir, - avec une testostéronémie à des taux de castration, - et malgré des manipulations hormonales secondaires (Cf ci-dessus), Devant une évolution inhabituelle par sa rapidité ou par ses localisation secondaires, devra être évoquée une évolution histologique et faire indiquer la réalisation de marqueurs neuro-endocrines et éventuellement de nouvelles biopsies. Cela aura une incidence sur la thérapeutique. Le rythme de surveillance devra être basé sur les facteurs pronostiques initiaux. Il est cependant nécessaire de dépister les blocages urétéraux à bas bruit par des échographies régulières. A cette phase de la maladie, il ne sert à rien de multiplier les dosages de PSA. La prise en : - en charge du cancer de prostate en hormono-résistance va consister le maintien de la déprivation androgénique, une chimiothérapie parentérale, un traitement palliatif des symptômes, un soutien psychologique. a - le maintien de la déprivation androgénique Il n’existe aucune donnée scientifique pour procéder à l’arrêt du traitement hormonal, certaines études ayant au contraire démontrées une diminution significative de la survie globale chez les patients arrêtant le traitement. b - une chimiothérapie parentérale Deux grandes études randomisées (TAX 327 et SWOG 99-16) parues en 2004 ont démontré l’efficacité d’une chimiothérapie de type Docetaxel associée à une corticothérapie par Prednisone 10 mg/jour. Le Docetaxel à la dose de 75 mg/m2 toutes les trois semaines associé à 10 mg/jour de Prednisone est le traitement de chimiothérapie de référence pour le cancer de prostate en hormono-résistance. Par rapport à la Mithoxantrone qui était le traitement antérieur de référence qui n’avait pas démontré d’avantage en survie, il existe un gain de 2 à 3 mois de survie globale. L'indication est à discuter afin de préciser le ratio bénéfice-risque. Le moment idéal pour initier la chimiothérapie reste controversé. Si elle se justifie en cas de cancer métastatique symptomatique, il n’y a pas de preuve quant à l’intérêt de la débuter devant un échappement biologique isolé. Le traitement doit être poursuivi jusqu’à progression ou toxicité limitante et pourra être repris en cas de bonne efficacité initiale. En cas d’inefficacité du Docetaxel, une deuxième ligne pourra être discutée en RCP. Aucun protocole de chimiothérapie dans ce cadre n’est validé. c - un traitement palliatif des symptômes o Prise en charge des métastases osseuses Protocoles hiérarchisés d’antalgiques Consultation spécialisée de la douleur Radiothérapie des métastases osseuses symptomatiques (métastase unique ou peu nombreuses). Elles seront diagnostiquées par l’imagerie (scintigraphie osseuse et radiographies). Le risque fracturaire devra être évalué. Dans les cas douteux, une biopsie est nécessaire (attention à l’ostéoporose de l’andropause induite). Il n’existe pas de protocole de radiothérapie optimal en terme de dose/fractionnement et il est préférable d’utiliser des doses fractionnées étalées. La radiothérapie peut être justifiée devant un tassement vertébral métastatique récent, sans attendre les symptômes fonctionnels neurologiques afin de prévenir la compression médullaire. Radiothérapie métabolique par Strontium 89 (Mestastron®) ou Samarium 153 (Quadramet®). Elle peut être utilisée en cas de métastases multiples. Une diminution des douleurs a été mentionnée chez 70% des patients traités. Le retentissement médullaire doit être surveillé. Elle peut être renouvelée si récidive des douleurs 3 à 6 mois après le premier traitement si et seulement si le premier traitement a été efficace. Une évaluation de l’efficacité thérapeutique doit être réalisée lors d’une « consultation de la douleur ». Un traitement par biphosphonates, après bilan dentaire, peut se discuter. Compression médullaire A dépister au premier signe, les traitements en sont : Avis neuro-chirurgical en urgence Radiothérapie Corticoïdes o Prise en charge d’une obstruction des voies urinaires Obstacle cervico-prostatique. Résection endoscopique si rétention aiguë. Obstacle du ou des bas uretères. Dérivation urinaire temporaire (Sonde urétérale ou néphrostomie) ou définitive (urétérostomie cutanée bilatérale) en fonction du stade de la maladie si insuffisance rénale. o Autres complications Il n’est pas de notre propos de passer en détail les thérapeutiques très variées de syndromes qui ne le sont pas moins. Néanmoins, pourront être cités : - Compression digestive, essentiellement engainement rectal - Syndromes paranéoplasiques (hypercalcémie par exemple) - - Blocage vasculaire Veineux Lymphatique Complications hématologiques Envahissement médullaire Anémie inflammatoire Troubles de l’hémostase d – Soutien psychologique – Consultation d’onco-psychologie Il est clair aussi que le soutien psychologique nécessaire devra prendre des formes diverses (simple dialogue ou appel à un psychologue) en fonction du malade et de son entourage.