L`intelligence économique au Canada

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L`intelligence économique au Canada
RU : Regards sur le monde
TI : L’intelligence économique au Canada
Philippe Clerc, Président de l’AFDIE - Association française pour le développement de
l’intelligence économique – [email protected]
Canada : terre des « passeurs d’information »
À l’instar de nombreux pays industrialisés, l’activité d’intelligence économique ne s’est
développée que tardivement au Canada, vers la fin des années 90. Certes, si une aussi courte
période ne permet pas d’offrir des données pertinentes sur la pratique des entreprises, ni de
bénéficier d’un regard suffisamment long sur plusieurs facteurs qui fondent l’intérêt d’une
telle analyse, l’observation des pratiques canadiennes d’intelligence économique est malgré
tout riche d’enseignements.
D’abord, par l’appartenance au bloc économique de l’Amérique du Nord et la capacité des
Canadiens à traduire et à intégrer les savoir-faire américains, notamment en matière
d’intelligence concurrentielle, ensuite par leur capacité et leur pragmatisme à mettre en œuvre
l’intelligence économique. Il y a certainement là un exemple à méditer.
Le Québec y apparaît original avec sa réalité bi-culturelle, son ambivalence, francophone et
anglophone, qui font de ses experts en intelligence économique des « passeurs », véritables
traducteurs des cultures françaises et anglo-saxonnes de l’intelligence économique, y compris
dans le champ de l’intelligence organisationnelle et la formation.
Par ailleurs, l’expérience québécoise de création et de pilotage de politiques publiques d’IE,
nationale et régionale, ainsi que la coordination de ces mêmes politiques (avec le savoir-faire
universitaire dans le domaine des recherches évaluatives) suggèrent des retours d’expériences
des plus utiles. Ces caractéristiques rendent l’étalonnage bien plus productif. Il convient
d’ajouter à cela que les chercheurs et praticiens québécois, publics et privés, sont des
observateurs avertis des expériences françaises.
Dernier élément à prendre en considération : le savoir-faire canadien dans le déploiement de
stratégies d’influence, notamment à travers des politiques de coopération technologique,
scientifique et culturelle, est unanimement reconnu.
Analyser les pratiques d’intelligence économique au Canada…L’entreprise est excitante, mais ô
combien difficile ! Il serait hasardeux de se lancer dans pareille aventure sans se donner les moyens
d’y parvenir. On ne gravit pas l’Everest en espadrilles… Le temps est ici notre ennemi ! Mais le sujet
n’en demeure pas moins passionnant et éclairant à plus d’un titre. L’aborder nous permettra,
également, d’enrichir la démarche d’analyse comparée, que nous avons initié dans le premier numéro
de ce magazine.
L’observation de l’activité d’intelligence économique au Canada suscite des sentiments pour le moins
controversés. Le paradoxe est le suivant : d’un côté, se dégage une impression prégnante de déjà vu,
de déjà lu et de l’autre, existe une véritable originalité - que l’on retrouve peut-être en France et dans
1
l’action de la Commission européenne - celle de l’intelligence territoriale et de l’orientation PME des
actions d’appui à l’intelligence économique. Sans oublier une utilisation dynamique de l’intelligence
économique pour piloter la stratégie des politiques publiques.
Tour d’horizon.
Définition sémantique du « Business intelligence »
Les Canadiens utilisent l’expression anglaise de « Business Intelligence » que l’on peut
facilement traduire par « renseignement d’affaire ». Dans les ouvrages de Chung Wei Choo, il
existe un lien fort, comme une filiation avec les travaux du professeur Stevan Dedijer,
véritable instigateur de l’enseignement d’intelligence sociale dès 1975 à l’Université de Lund
en Suède, fondateur, avec Blaise Cronin, de la revue Social Intelligence (1989)1.
Pierrette Bergeron2 note la difficulté qu’il y a à définir les spécificités du « renseignement
d’affaire ». Elle le définit comme « une activité de surveillance systématique de
l’environnement organisationnel, afin de collecter des informations pertinentes, ouvertes, de
transmettre, analyser et évaluer ces informations pour une action et une prise de décision
optimum de l’organisation, ainsi que pour l’anticipation. Il s’agit d’une activité qui est partie
intégrante du management de l’information stratégique dans une organisation (…) Il s’agit
aussi d’une activité formalisée qui requiert des processus d’organisation, de collaboration et
une reconnaissance formelle pour être exploitée pleinement. »
Ainsi que nous le vivons en France, une tension s’établit au Canada entre la veille, la veille
stratégique et l’intelligence économique. Au Canada, l’intelligence concurrentielle apparaît
comme une notion plus usitée.
Pourtant, les Canadiens développent une culture de la stratégie et les observateurs relèvent un
intérêt croissant pour la démarche prospective, ce qui semble nouveau et intéressant, si l’on se
place du point de vue du stratège ainsi que du développement d’une panoplie de démarches
complémentaires pour l’analyse des ruptures, l’identification de potentialités de
développement ou le pilotage de projets complexes.
Pour approfondir ce sujet, rien de mieux que de se référer à l’ouvrage, cité plus loin, de C.W.
Choo, qui, dans sa première partie fait un travail exhaustif de clarification de la terminologie
grâce à la grille de lecture qu’offrent les différentes pratiques.
La communauté de l’intelligence économique au Canada
Ainsi que mentionnée en préambule, l’intelligence économique est une activité apparue
récemment au Canada. Un signal fort : le nombre de conférences sur le sujet. En 1996, aucun
colloque sur le sujet. En 1998, six sont programmées au Canada3. En 1990, il n’existait que
trois « chapters » de SCIP Etats-Unis. Les plus dynamiques hors Etats-Unis ont été les
chapitres canadiens qui représentaient plus de 9 % des effectifs de l’organisation en 1998.
C’est dans ce vivier que l’on retrouve un jeune chercheur et consultant, François Brouard,
porteur de la mémoire des liens entre les spécialistes français et canadiens de la veille
1
Choo, C.W Information management for the Intelligent Organization, The art of scanning the Environnement,
ASIS, Information Today, Inc. 2000.”Lintelligence sociale consiste dans la capacité à s’adapter/répondre aux
circonstances mouvantes, afin de réaliser des objectifs ciblés ou plus simplement, comme la capacité à survivre
et bien se développer » (B. Cronin cité par C.W. Choo)
2
Bergeron, P. « Regional business intelligence : the view from Canada », Journal of Information Science, 26,
(3), 2000, pp. 153-160.
3
Calof, J. « Increasing your « CIQ »: the competitive intelligence edge”, in The 1998 Economic & Technology
Development Journal of Canada
2
stratégique.... Dans une tentative, aujourd’hui réussie, de différenciation par rapport à SCIP
Etats-Unis, Estelle Matayer a créé Competia, un cabinet d’intelligence concurrentielle et de
planification stratégique, basé à Montréal et qui organise un forum annuel international.
Après, donc, des débuts hésitants, une rationalisation s’est opérée et l’on retrouve 4
« chapters » canadiens : Edmonton, Alberta, Québec et Toronto. Le site de SCIP Edmonton
propose la mise en place d’un annuaire des professionnels du « competitive intelligence ». Il
va de soi que de nombreux professionnels du sujet n’appartiennent pas tous à SCIP et certains
sont inscrits à la « Special Libraries Association ».
Comme c’est le cas aux Etats-Unis et en France avec les fondateurs de SCIP Etats-Unis et des
praticiens de renom, stratégistes, consultants, patrons de cellules d’IE, des figures qualifient la
communauté de l’intelligence économique au Canada.
S’il est clair que nous ne disposons que de peu d’études sur l’intelligence économique au
Canada, et donc de peu d’information sur la communauté et les pratiques, nous devons
souligner l’apport essentiel des travaux de chercheurs tels que Chun Wei Choo4 et Ethel
Auster (tous deux professeur à la Faculty of Information Studies de Toronto) ou encore
Pierrette Bergeron (professeur à l’Ecole de Bibliothéconomie et de Sciences de l’Information
de l’Université de Montréal UDM) qui ont créé une véritable dynamique de recherche et
d’études sur le sujet dès le début des années 90 dans le champ du management de
l’information.
Cette dynamique est à relier avec celle que les chercheurs ont développée dans le champ de la
veille et de l’innovation, notamment à l’université de Laval et de Montréal - les professeurs
Pierre-André Julien et Louis Raymond - et celle très applicative pilotée par des experts
gouvernementaux, telle Raymonde Ouellette du ministère de la Recherche, des sciences et de
la technologie du Québec. Cette dernière œuvre au développement de pratiques innovantes et
formalisées de veille stratégique au sein des réseaux publics d’appui à la technologie et
l’innovation. Par ailleurs, le site de l’Université de Laval, www.rqsi.laval.ca recense et
analyse les évènements canadiens, européens et internationaux relatifs aux « pratiques
ingénieuses d’innovation » et publie une lettre d’actualité bimensuelle largement diffusée au
Canada et à l’étranger.
Notons, par ailleurs, que les professeurs français Humbert Lesca et Henri Dou travaillent de
longue date avec les universités canadiennes et notamment avec le professeur Raymond5.
C’est à partir de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) que le professeur Michel Cartier
pilote avec une vingtaine d’experts dans le monde (Brésiliens, Français, Allemands,
Américains, etc.), un réseau de veille et de prospective sur la société du savoir, ses nouveaux
modèles économiques et sociétaux, ses enjeux technologiques6. Ses questionnements sont les
suivants : comment ces réseaux se « fertilisent-ils » avec les entreprises et les réseaux
publics ? comment créent-ils une vraie capacité d’intelligence collective ?
La pratique de l’intelligence économique dans les entreprises canadiennes
Pour le Canada, nous ne disposons pas d’études relatives aux pratiques – techniques et
organisation – de l’intelligence économique suffisamment larges pour les qualifier de façon
4
http://choo.fis.utoronto.ca/Bio.8.html
Noté à l’occasion du colloque d’HEC Montréal de 2002, 6e congrès international francophone sur la PME.
6
www.michelcartier.com
5
3
pertinente, telles que celles dont nous bénéficions en France7. Seule, l’étude de C.W. Choo sur
les pratiques des grands groupes canadiens, révèle les forces et les faiblesses ainsi que les
avancées et les retards - somme toute classiques !- liés aux rites stratégiques des grands
patrons et au niveau d’intelligence organisationnelle des grandes organisations. Sont par
ailleurs disponibles, les résultats de trois études conduites dans l’univers des PME8. Les
recherches évaluatives les plus intéressantes (sur les systèmes d’intelligence territoriaux) sont
celles qui portent sur les réseaux d’innovation et l’évaluation de leur performance.
La première étude a été conduite à la fin des années 90 auprès de PME du secteur
manufacturier9. Les auteurs ont étudié les caractéristiques et les facteurs clés du succès de la
mise en œuvre d’une démarche d’intelligence compétitive. Au-delà de la typologie classique
des entreprises « primitives », actives, pro-actives, le résultat le plus intéressant portait sur
l’identification du facteur déclenchant essentiel : le facteur « stratégie ». Étrangement pour un
secteur dit traditionnel et peu intensif en matière d’information, 32 % des répondants
disposaient d’une organisation plus ou moins formalisée de renseignement d’affaire.
En 200110, une étude effectuée sur les réseaux d’information utiles aux PME du secteur des
équipements de transport terrestre souligne l’existence de réseaux à signaux forts et de
réseaux à signaux faibles, comme sources d’information compétitives pour les PME. Il ressort
clairement que les réseaux à liens forts – géographiquement et sociologiquement proches
(clubs professionnels) des chefs de PME – émettent des signaux forts facilement
compréhensibles et assimilables par l’entreprise. Paradoxalement, ce sont les réseaux à liens
lâches, plus éloignés des comportements habituels et coutumiers des chefs d’entreprise, qui
émettent des signaux faibles (réseaux techniques, commerciaux publics) qui sont susceptibles
d’apporter des « informations nouvelles et pré-compétitives » à l’origine d’avancées
innovantes.
La seconde étude a été conduite dans le secteur des hautes technologies11entre 1998 et 1999.
L’enseignement majeur a été de mettre en évidence le fossé existant entre la perception et la
pratique de l’intelligence économique. Les déclarants ont révélé leur prise de conscience de
l’importance de pratiquer le renseignement d’affaire, mais 11 % seulement avaient mis en
place un système d’intelligence économique.
Les politiques publiques
C’est peut-être dans le secteur public que le développement de la pratique de l’intelligence
économique et la formalisation d’organisation intelligente, sont le plus avancés sans, comme
c’est le cas en France, que ne se dégage la notion de politique publique d’intelligence
économique.
7
Bournois,F. et Romani, P-J, Intelligence économique et stratégique, Economica, Paris, 2000. Divers études
publiées par le CEPS ou études conduites en région par les C®CI.
8
Rapportées par Pierrette Bergeron, article cité. Bergeron, P. Veille stratégique et PME. Comparaison des
politiques gouvernementales de soutien. Presse de l’Université du Québec, Sainte-Fou (QC) 2000. Cet ouvrage
qui est d’une grande actualité au moment où le gouvernement français met en place une politique d’intelligence
territoriale, représente une somme très importante de données sur les pratiques et les organisations nationales d’
IE dans le monde. Disponible en France, 30, rue Gay-Lussac, 75005 Paris.
9
Julien P.A, Raymond L., Jacob R., Ramangalahy C., Information, stratégies et pratiques de la veille
technologique dans les PMI, in Système d’information et Management 2 (2) (1997)
10
Julien & al. « Réseaux, signaux faibles et innovation technologique dans les PME du secteur des équipements
de transport terrestre ». Colloque d’HEC Montréal en 2002, 6e congrès international francophone sur la PME.
11
Cité par P. Bergeron. Calof J. & al. Survey of Canadian R&D Companies.
« http://www.ncr.ca/cisti/ref/nrcci_e.html
4
Pour entrer dans la dynamique canadienne, il convient de distinguer ce qui est de l’ordre des
politiques d’appui à la veille ou l’intelligence concurrentielle (destinées à développer les
tissus économiques et prioritairement les entreprises petites et moyennes), de ce qui relève de
la stratégie de l’Etat ou des organisations publiques déconcentrées.
Dans ces deux domaines, le Canada apparaît innovant et créatif.
Les politiques d’appui à la veille concurrentielle
Voici l’exemple d’une politique à caractère stratégique mise en place en 1994 et l’examen des
forces et des faiblesses de ce dispositif.
En 1994, le gouvernement du Québec décide de lancer, pour cinq années, un programme
destiné à « favoriser la diffusion et l’acceptation du concept de veille, ainsi que sa
reconnaissance comme apport stratégique » dans les PME12. 14 centres de veille
concurrentielle sont ainsi créés. Le cahier des charges comporte une obligation de « veille
générique » et d’autofinancement à trois ans. Ces réseaux d’appui et d’excellence avaient
pour vocation d’apporter aux PME, secteur par secteur (chimie, environnement, mécanique,
etc.) les services suivants : expertise, transferts de technologies, informations, apprentissage
de l’utilisation de l’information stratégique et mise en place de démarche de Business
Intelligence (BI). Les forces de ce programme ont été nombreuses : de l’approche
pragmatique en passant par l’acculturation à la veille stratégique comme innovation, à
l’introduction d’un outil logiciel de veille piloté aujourd’hui par le Centre de Recherche
Industriel du Québec13 (CRIQ).
Malgré tout, la faible performance du dispositif a été rapidement actée, les concepteurs
n’ayant pas ancré l’organisation sur la réalité des réseaux locaux (manque de coordination
entre les acteurs-clés travaillant avec les PME et les experts en veille concurrentielle) et des
besoins des tissus industriels localisés.
Il n’a pas non plus tenu été compte du fait que l’intelligence économique (ou concurrentielle)
est une démarche de management de l’innovation. Le programme a été conçu comme si
l’intelligence concurrentielle était un fait acquis. L’approche sectorielle a été déclinée sans
cohérence régionale. Enfin, l’absence de lien entre le niveau national de la politique
gouvernementale et la déclinaison des politiques industrielles a nui à l’efficacité du système.
En complément, le Gouvernement fédéral lance, via le National Research Center, (NRC), des
programmes dit d’Assistance à la Recherche Industrielle (IRAP), dans lesquels une large
place est réservée au renseignement d’affaire. Sous la rubrique « guide de veille
concurrentielle », le programme met à la disposition des PME une base de données
d’informations à valeurs concurrentielles14. De la même façon, le ministère de l’Industrie
diffuse sur le site « ebiz.facile » toute une série de mémos relatifs à la veille concurrentielle,
ses méthodes et ses outils ainsi que des grilles d’analyse opérationnelles d’intelligence
concurrentielle15.
Pratique de la veille stratégique au service de l’efficacité gouvernementale
La politique québécoise 2001 de la science et de l’innovation16 plaçait la veille et la
prospective au même titre que la planification stratégique et l’évaluation, c’est-à-dire au
centre de la dynamique de la politique tant à l’échelle régionale qu’internationale. « Faire de
12
Fond de partenariat sectoriel – Volet IV.
http://www.criq.qc.ca/fr/0302_iit/p030207_cvc.html et http://www.vigipro.com
14
http://irap-pari.nrc-cnrc.gc.ca/french/lifesciences_f.html
15
« ebiz.facile » sur www.strategis.ic.gc.ca
16
« Savoir changer le monde », ministère de la science, de la recherche et de la technologie.
13
5
la veille, c’est aussi réaliser des activités qui permettent d’être à l’affût des systèmes de
recherche et d’innovation des autres pays. Cette connaissance rend possible des comparaisons
et des analyses quant aux avancées réalisées ailleurs dans le monde. À partir de ces résultats,
le gouvernement peut adopter des approches d’étalonnage concurrentiel (…) ».
L’ensemble de ces efforts publics produit des stratégies abouties et originales de l’Etat
québécois, qui a organisé depuis 1999 « à la japonaise » un dispositif de veille systématique
(réseau de veille intégré) sur les politiques publiques dans le monde, la gestion des musées, le
pilotage et l’accompagnement des politiques d’appui au développement local et à
l’innovation. Cela constitue une infrastructure de l’information, conçue comme un système de
gestion des connaissances coordonné sur des cibles pilotées par une stratégie.
Là où la veille et la prospective se mettent au service du pilotage des politiques stratégiques et
de l’évaluation, l’innovation constitue une cible prioritaire. Dès 2002, des régions pilotes sont
désignées pour expérimenter le déploiement d’observatoires régionaux intégrés au sein de
« l’Observatoire-réseau17 du système d’innovation québécois ». Les mandats des
observatoires comportent, en particulier, le recueil de données sur le développement du
système régional d’innovation auprès des réseaux d’affaires ou d’experts, le traitement
d’information sous forme d’étalonnage concurrentiel et d’analyses prospectives, l’animation
et le soutien des réseaux de veille ciblés sur les besoins spécifiques de secteurs d’activité et la
diffusion des informations utiles au pilotage stratégique à destination des décideurs.
Un dernier exemple dans ce domaine illustre le savoir-faire canadien en matière d’intelligence
économique. En 1998, l’organisme « Investissement Québec » crée, pour dynamiser son
action de recherche d’investissements, un centre d’intelligence économique doté de 36
veilleurs stratégiques en charge du recueil et de l’analyse d’information, susceptible de
mobiliser les experts du Centre de Recherche Industrielle sur des missions commerciales,
effectuant ainsi un travail de recomposition des plans d’affaires d’entreprises18.
La pratique de l’intelligence économique au Canada n’est pas encore formalisée de manière
définitive. Elle se construit. Brique après brique, la politique d’intelligence économique est en
devenir. Le Québec y apparaît comme un terrain d’expérimentation vivace.
Toutefois, l’agencement de ces briques prend du sens lorsque l’on se penche sur la stratégie
internationale d’influence du gouvernement canadien. Un seul exemple : le programme
autoroute de l’information au Canada comporte un chapitre intitulé : « Développement de
l’industrie du contenu et de l’information », dont nous retiendrons un axe qui constitue la base
d’actions fortes d’intelligence économique et d’influence. Il suffit de lire : « Liens entre les
Canadiens et le reste du monde : le Canada sert les intérêts des Canadiens et présente les
valeurs canadiennes au reste du monde : il est ouvert à ce que le monde a de meilleur à
offrir. » À ce titre, les actions préconisées sont les suivantes : présenter les valeurs
canadiennes au reste du monde et influencer, autant que faire se peut, la diversité culturelle
mondiale.
En, résumé : « le Canada attire ce que le monde a de meilleur à offrir et ce sont les Canadiens
qui en profitent ». À méditer !
17
18
Raymonde Ouellette, citée plus haut, est une des chevilles ouvrières de ces dispositifs.
Les veilleurs utilisent Vigipro (http://www.vigipro.com)
6