Présentation M. Millon à l`ENM 21 Juin 2013

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Présentation M. Millon à l`ENM 21 Juin 2013
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ENM – 21 mai 2013
PROPOS INTRODUCTIF DE M. ALAIN MILON, PRÉSIDENT
Méthodes de travail – particularités de cette commission (sujet et méthode)
Leçons tirées des auditions de victimes et de la partie adverse
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie de l’intérêt que vous portez à la commission d’enquête du
Sénat sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la
santé.
Je me réjouis beaucoup d’être avec vous aujourd’hui avec mon collègue Jacques
Mézard, qui a été notre rapporteur et qui a pris l’initiative de la constitution de
cette commission d’enquête.
À la commission des affaires sociales dont je suis membre depuis mon élection
au Sénat, j’ai contribué à de nombreux rapports, à l’examen de nombreux textes
législatifs, mais cette commission d’enquête fera date dans ma vie de
parlementaire. Elle m’a permis de découvrir un univers et des personnes dont je
ne soupçonnais pas l’existence…
Et le médecin que je suis a frémi à de multiples reprises au cours de nos quelque
72 auditions !
Comme vous le savez, notre commission était la quatrième commission
d’enquête parlementaire consacrée aux dérives sectaires, mais c’était une
première au Sénat.
Je vais dans un premier temps développer plus particulièrement tout ce qui a pu
à mon sens faire de notre commission un cas assez original.
Puis j’évoquerai avec vous les auditions qui nous ont paru les plus
marquantes au cours de cette enquête.
(I) Commençons donc par ce qui a fait l’originalité de cette commission.
1.Notre commission tout d’abord était particulière par son sujet, qui s’est vite
révélé extrêmement vaste, au point qu’en réalité nous avons abordé deux
thématiques distinctes :
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- celle des dérives sectaires proprement dites, faisant de la santé une des
voies d’accès à une forme d’emprise,
- et celle des dérives thérapeutiques, qui s’appuient sur des pratiques
commerciales s’apparentant à de la charlatanerie ou à de l’escroquerie.
Le titre de notre rapport (Dérives thérapeutiques et dérives sectaires : la santé
en danger) rend compte de la dualité des problématiques soulevées par le
sujet traité. M. Mézard vous expliquera tout à l’heure comment ces deux
enquêtes se sont finalement rejointes.
2. Une autre particularité de notre commission tient à sa décision, prise
pratiquement d’emblée, de respecter le principe du contradictoire, c’est-àdire de recevoir non seulement les victimes, leurs proches ainsi que les
associations qui les représentent, mais aussi ce que nous avons appelé la « partie
adverse », qui a représenté 18 auditions sur 72.
Comment avons-nous sélectionné les personnes et mouvements à
auditionner ?
En ce qui concerne les victimes et les proches de victimes, ces personnes ont
été conviées soit parce qu’elles nous avaient sollicités directement, soit parce
que leur expérience avait paru éclairante aux associations et que celles-ci ont pu
nous suggérer d’entendre ces témoins. Mais à chaque fois, nous avons vérifié
que ces témoignages s’appuyaient sur des faits concrets et vérifiables, qu’elles
dénonçaient des pratiques dont nous avions entendu parler par ailleurs, que ces
personnes étaient en état de témoigner et que leur témoignage avait une portée
générale et ne relevait pas d’une vindicte personnelle.
Dans la mesure du possible – ce but n’a pas été atteint à chaque fois - nous
avons essayé de faire en sorte que les témoignages des victimes soient
prolongés par l’audition des responsables qu’elles dénonçaient.
Par exemple, nous avons entendu le 9 janvier un témoin dont la femme avait été,
en fin de vie, tourmentée par un médecin adepte de la « biologie totale ». Ce
témoignage a donc en quelque sorte commandé l’audition de l’un des chefs de
file français de cette « école de pensée ».
Quant au choix des représentants de la « partie adverse » que nous avons
auditionnés, nous avons souhaité entendre les personnes et les représentants de
mouvements pour lesquels nous avions reçu des témoignages spontanés ou sur
lesquels notre attention avait été attirée sur Internet, par la Miviludes ou par des
associations de victimes.
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Compte tenu du sujet, la « partie adverse » était constituée tout débord des
mouvements responsables de dérives sectaires :
- les Témoins de Jehovah, en raison de leur refus de la transfusion
sanguine et de leur entrisme à l’hôpital à travers les comités de liaison
hospitalière,
- la Scientologie, non seulement en raison de son combat contre la
psychiatrie, mais aussi pour répondre à nos questions sur le livre de
souvenirs de la nièce du responsable américain de cette « Église » et pour
équilibrer l’audition d’un apostat français,
- IVI (Invitation à la vie), non seulement parce qu’une victime a attiré notre
attention sur cette association, mais aussi parce qu’elle a beaucoup recruté
à un moment parmi les médecins, que sa « gourelle » promettait la
guérison aux malades du cancer et que ses pratiques de soins (les
« vibrations » et les « harmonisations ») nous ont beaucoup intrigués.
Nous avons aussi auditionné les représentants des associations qui reflètent le
point de vue de ces mouvements et dont les sites internet nous ont beaucoup
appris : CAPLC, le CICNS, le Comité des médecins contre les traitements
dégradants de la psychiatrie et la CCDH (Commission des citoyens pour les
droits de l’Homme).
Enfin, la « partie adverse » comprenait des thérapeutes pratiquant les
techniques non conventionnelles douteuses :
- la naturopathie, la kinésiologie et la biologie totale, pour lesquelles nous
avions reçu des plaintes spontanées,
- l’anthroposophie et le reiki (les personnes nous avaient directement
sollicités),
- l’« ondobiologie » (ou « chirurgie immatérielle », ou encore
« biomagnétisme ») et les utilisateurs de techniques prétendument
quantiques, sur lesquels notre attention avait été alertée sur Internet, par
la Miviludes et l’Unadfi.
Nous avons été obligés, pour respecter le délai de six mois imparti aux
commissions d’enquête, d’être sélectifs, et de ce fait probablement incomplets,
car nous ne pouvions ni traiter toutes ces pratiques non conventionnelles ni
aborder l’ensemble du paysage sectaire.
On peut avoir un regret avec le recul, c’est que la commission n’ait pas
davantage développé le thème des psychothérapies déviantes, notamment les
faux souvenirs induits, mais hélas six mois c’est bien court…
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3. J’en viens à une autre particularité de nos travaux : il s’agit de la place des
investigations conduites sur Internet dans nos réflexions. M. Mézard y
reviendra en détails dans un instant. Cette telle orientation n’aurait peut-être pas
été décidée de manière aussi systématique il y a encore cinq ans.
Nous avons eu très vite en effet le sentiment que, comme les victimes
potentielles des dérives que nous dénonçons, victimes d’une véritable
propagande sur Internet, nous devions aller « sur la toile » constater par nousmêmes ce que l’on y trouve.
Internet a été pour nous une source quotidienne d’informations, qu’il s’agisse
des sites eux-mêmes ou des forums et blogs auxquels ils conduisent.
Il en ressort la physionomie un peu particulière de notre rapport, très
abondamment illustré de « sorties d’écran » effectuées entre janvier et mars
dernier. Ces sorties d’écran qui émaillent le rapport visent à apporter un
éclairage factuel et vérifiable aux affirmations contenues dans le rapport.
Pour la plupart, les auditions de la « partie adverse » ont été préparées sur
Internet et le résultat de ces recherches a servi de point de départ aux questions
que nous adressions aux personnes auditionnées.
4. Particulière, notre commission l’a été aussi par les méthodes retenues, dans le
sens d’une volonté d’ouverture au public de nos travaux : nous voulions
participer à l’information du public sur ce sujet particulièrement grave.
Pour assurer la plus large diffusion à notre message de vigilance, nous avons eu
le sentiment de devoir ouvrir au maximum nos travaux au public.
Je rappelle que la publicité des travaux d’une commission d’enquête, c’est-àdire des auditions auxquelles elle procède et qui nourrissent la rédaction de son
rapport, est une décision qui lui appartient souverainement en vertu de l’article 6
de l’ordonnance du 17 novembre 1958 sur le fonctionnement des assemblées
parlementaires. Cette publicité peut aujourd’hui prendre diverses formes :
- tout d’abord, l’ouverture des auditions au public et à la presse,
- la publication des procès-verbaux écrits de ces auditions,
- la retransmission des enregistrements vidéo des auditions sur le site
internet de l’assemblée intéressée.
Il nous a paru difficile de décider d’emblée, dès le début de nos travaux, un
« protocole » de publicité qui vaudrait pour l’ensemble de nos auditions, à cause
de la grande diversité des personnes que nous allions rencontrer.
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Nous avons donc décidé dans un premier temps de laisser les personnes
auditionnées libres de leur choix :
- et sur l’accès du public et des journalistes à leur audition,
- et sur l’enregistrement vidéo de celle-ci.
L’objectif était d’assurer à la commission le meilleur niveau d’information
possible tout en respectant notre pari d’ouverture.
Cette décision a concerné les auditions qui se sont déroulées entre octobre 2012
et janvier 2013 : acteurs de la vigilance sectaire (associations de victimes,
MIVILUDES, membres éminents des précédentes commissions d’enquête de
l’Assemblée dont nous souhaitions recueillir l’expérience), responsables
administratifs, autorités médicales diverses.
La doctrine a dû changer quand nous avons abordé les auditions les plus
complexes, celles de la « partie adverse ». Nous avons décidé collégialement
des modalités d’auditions de ces témoins particuliers.
Sur la question de l’ouverture de ces réunions au public « physique » et à la
presse, nous avons tous été d’accord pour l’exclure, principalement pour des
raisons de sécurité.
Sur le sujet de l’enregistrement vidéo de ces auditions, nous avons été
partagés.
Certains, comme notre rapporteur, ont d’emblée été partisans de ces
enregistrements et de leur mise en ligne, par cohérence avec le souci d’ouverture
qui sous-tendait nos travaux.
D’autres collègues ont estimé que c’était déjà beaucoup de pression de recevoir
ces personnes et que l’enregistrement vidéo constituait une difficulté superflue.
Parmi les arguments des indécis, il y avait notamment la crainte que ces vidéos
fassent la publicité de pratiques thérapeutiques que nous épinglions dans le
rapport et qu’elles soient récupérées par certains mouvements à des fins de
propagande. En bref, on pouvait craindre que le Sénat offre une tribune à ces
mouvements et contribue à la respectabilité de ces pratiques.
Dans un premier temps, c’est un compromis qui a été adopté : l’idée était de
procéder à ces enregistrements, et de reporter la décision de les mettre en ligne à
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une date ultérieure, en fin de parcours, une fois qu’un bilan de ces auditions
pourrait être dressé.
Nous avons veillé avant chaque audition à recueillir l’accord des personnes
auditionnées et à les informer de cette incertitude sur la diffusion de
l’enregistrement.
Comme tous les compromis, c’était une décision facile à critiquer en ce
qu’elle laissait dans l’ombre les raisons pour lesquelles nous déciderions de
diffuser ou non ces enregistrements.
Compte tenu de l’absence de précédent, nous n’avons toutefois pas considéré
cette défaillance comme une réelle fragilité car l’effort que nous faisions en
auditionnant ces personnes était vraiment important de notre part.
Certains ne se sont cependant pas privés de relever que nous diffuserions ces
films si nous les trouverions à notre avantage… Nous avons sur ce point été très
critiqués par la Scientologie et par la CAPLC, qui a considéré une éventuelle
décision de non diffusion comme une atteinte à leurs droits.
En fait, nous avons plutôt rendu service à ces mouvements car depuis le début
de nos travaux, nous lisions sur les sites de la CAPLC et du CICNS des mises en
cause assez sévères de nos travaux, fondé sur le fait que notre commission
n’écoutait qu’une seule catégorie d’intervenants. S’il n’y avait pas eu cette
décision, ils auraient été obligés de nous tresser des couronnes !
Juridiquement cependant, nous n’étions pas attaquables car, je le rappelle,
l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des
assemblées parlementaires laisse les commissions d’enquête totalement libres
d’organiser la publicité de leurs travaux :
« Les auditions auxquelles procèdent les commissions d'enquête sont
publiques. Les commissions organisent cette publicité par les moyens de leur
choix. »
Au terme de ces auditions, nous avons voté le 3 avril en faveur de la mise en
ligne de ces enregistrements, au cours d’une réunion dédiée à cette
question, qui s’est tenue le lendemain de l’adoption du rapport.
Il nous est apparu que nous ne pouvions faire autrement que de diffuser ces
vidéos, dans la logique de notre volonté d’ouverture.
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Ce vote a donc permis la mise en ligne de 13 auditions, sachant que 4 personnes
avaient refusé d’emblée toute captation et qu’un 5e témoin s’est finalement
opposé à la diffusion de son enregistrement.
Peu de temps après la mise en ligne de ces vidéos, j’ai reçu un message de
remerciement du porte-parole de la Scientologie…
Je récapitule donc. Sur les 72 auditions auxquelles nous avons procédé au total,
pour une durée de 80 heures :
- 42 ont donc été ouvertes au public et à la presse,
- 14 ont fait l’objet d’une diffusion en direct de leur enregistrements
vidéo,
(Il faut dire aussi que certaines auditions n’ont pas donné lieu à captation
vidéo alors que les personnes ne s’y opposaient pas : ces enregistrements
ont aussi dépendu de contingences techniques),
- 13 auditions de la « partie adverse » (sur 18) ont été diffusées sur le site
du Sénat après l’adoption du rapport.
(II) La seconde partie de mon propos porte sur les auditions qui nous ont
paru les plus marquantes. Il s’agit, comme vous pouvez l’imaginer, des
auditions des victimes et de la « partie adverse ».
Que nous ont enseigné les auditions des victimes et de leurs proches ?
À l’exception d’une personne, ces auditions ont eu lieu à huis clos et l’anonymat
de ces personnes a été scrupuleusement respecté. Aucune mention du nom des
témoins n’a été faite pendant les réunions.
Je fais observer que la décision de publier tous les procès-verbaux de nos
auditions en annexe au rapport a concerné aussi les six auditions à huis clos
demandées par des victimes ou des proches de victimes. Cette publication,
même s’il y a des précédents, n’allait pas de soi.
À cet effet, il a donc été décidé de soumettre ces comptes rendus aux témoins
pour validation, même si l’article 6 de l’ordonnance de 1958 n’admet pas la
recevabilité des demandes de correction formulées par les personnes entendues
par une commission d’enquête.
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Je dois dire que malgré leur volonté d’anonymat, les victimes ont joué le jeu
pour participer à l’information du public.
On relève ainsi dans les compte rendus de ces auditions un certain nombre de
passages entre crochets qui matérialisent des passages supprimés parce qu’ils
contribuaient à identifier des personnes ou des lieux, ou parce que les personnes
auditionnées ont finalement hésité à rendre publics certains aspects de leur
témoignages.
S’agissant des proches de victimes, nous avons frappé par la grande émotion
ressentie par certains témoins à l’évocation du drame qu’ils avaient vécu (ou
vivaient encore) à travers l’embrigadement de leur proche. Les plus émus
avaient eu cependant l’air rompus à la prise de parole lors des entretiens
téléphoniques qui avaient précédé ces auditions. Cette charge émotionnelle était
probablement due à la solennité de l’audition.
S’agissant des victimes elles-mêmes, leurs témoignages nous ont montré la
force extraordinaire de l’emprise mentale exercée par les gourous. L’une de
ces personnes nous a avoué avoir volé à la demande de son gourou et avoir
accepté de subir des traitements plus que dégradants. Elle nous a dit qu’elle avait
cru son gourou quand il a prétendu l’avoir épousée au cours d’un simulacre de
cérémonie dans un recoin de Notre-Dame, alors même qu’aucun prêtre n’était
présent… Cela nous a fait toucher du doigt la pertinence de la loi «AboutPicard ».
Nous même qui étions sensibilisés à ces questions, nous avons été parfois
incrédules face au comportement de certaines victimes : il nous a donc semblé
indispensable de généraliser la connaissance du phénomène de l’emprise
mentale auprès des magistrats, sauf à contribuer à l’impunité des bourreaux.
Deuxième question : Que nous ont enseigné les auditions de la « partie
adverse » ?
- Certains nous ont paru absolument sincères : c’est le cas à mon avis des
représentants d’IVI et des Témoins de Jehovah.
- Nous avons eu le sentiment d’une langue de bois moyennement
maîtrisée face au représentant du CICNS, qui a tourné en rond en
répétant inlassablement que les pratiques sur lesquelles il était interrogé,
par exemple la biologie totale, ne devaient pas être évaluées dans une
logique de dérive sectaire, ce qui n’était pas le sujet. Nous voulions
savoir, du fait que son association prône une entière liberté thérapeutique
et s’oppose clairement à l’autorité médicale, à quel type de médecine
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(classique ou non conventionnelle) il ferait confiance dans le cas d’une
maladie grave pour lui ou un de ses proches. Nous n’avons pas eu de
réponse.
- Nous avons eu ce même sentiment de langue de bois, mais mieux
maîtrisée, avec les deux associations scientologues contre la
psychiatrie. Avec eux aussi, le débat a tourné en rond, puisqu’ils ont
donné l’impression de ne pas vraiment savoir en quoi consistent
aujourd’hui les excès de la psychiatrie. Ils ne nous ont pas convaincus.
Nous avons eu l’impression d’un « produit » américain inadapté à la
réalité française.
- Avec le représentant de la CAPLC, nous avons été servis en matière
d’excès de langage puisqu’il a comparé la campagne de vaccination
contre la grippe H1N1 à la Shoah, cela nous a paru inexcusable !
- L’Église de la Scientologie, plus que ses associations contre la
psychiatrie, a représenté un choc culturel complet. Nous avons eu le
sentiment d’être face non pas à un adversaire, car même avec un
adversaire on peut avoir de bons moments de connivence (c’est le
parlementaire qui parle !), mais à un ennemi inconciliable, qui aimerait
clairement nous détruire.
Nous étions face à un mur : les écrits de Ron Hubbard ne pouvaient être
commentés car il s’agit de livres aussi sacrés que les Évangiles. On ne
pouvait donc pas s’étonner que ces livres promettent la guérison du
cancer : demande-t-on à un prêtre catholique de faire des miracles ?
Toute question relative aux pratiques scientologues se voyait opposer
l’existence du procès sur l’escroquerie, même une question relative au
fonctionnement concret de l’électromètre !
Nous avons beaucoup été agressés sur la fermeture de l’audition au public
et sur notre choix de diffusion en différé de l’enregistrement vidéo. Le
porte-parole de la Scientologie avait organisé une audition « parallèle »,
publique, au Lutétia, quelques heures avant son audition au Sénat, après
avoir un certain temps laissé planer le doute sur sa venue. Je note que la
Préfecture de police a été prévenue par nos soins de cette réunion au
Lutétia, et que la direction de l’hôtel, sollicitée sur ce point par la police, a
refusé d’annuler cette manifestation…
Ces agressions ne servaient qu’à nous déstabiliser et à perdre du temps
pour éviter tout débat de fond, c’était très clair.
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- S’agissant des représentants des pratiques thérapeutiques douteuses, nous
avons eu le sentiment d’une problématique de chiffre d’affaires pour les
kinésiologues, qui ont fréquemment parlé des revenus de leurs collègues,
pour le reiki, les appareils de soins « quantiques » et pour l’ondobiologie.
- Avec le Cenatho, l’un des principaux organismes de formation à la
naturopathie, nous avons eu un discours très structuré, une volonté
d’inspirer confiance avec une apparence responsable, ouverte au dialogue,
professionnelle… Le directeur opinait, allait dans notre sens… Je suis
pour ma part convaincu que le témoignage très critique que nous avons
entendu sur ses pratiques était fondé, mais je pourrais comprendre que
dans un cadre judiciaire, ce soit la naturopathie qui inspire confiance, car
cette pratique n’est pas interdite…
- Tous ces gens croient-ils à ce qu’ils font ? Ont-ils conscience d’être des
charlatans ? Personne ne peut le dire à leur place. Quand je repense à cet
infirmier adepte de la biologie totale qui vous dit avec conviction qu’un
problème de côlon ascendant reflète un problème relationnel avec les
parents et que le côlon descendant se rattache à un problème d’enfants,
j’ai des doutes. Quand je repense à l’audition du président du Syndicat des
« ondobiologues », je me dis qu’il n’est pas possible d’être convaincu de
changer des vertèbres en mimant des opérations dans l’espace ! J’ai le
même sentiment quand je repense à l’audition du représentant de la
société Etioscan France (par ailleurs kinésithérapeute), qui soigne tout,
même l’énurésie des enfants, avec un appareil inspiré des technologies
spatiales russes les plus pointues. Son explication est désarmante : « Mon
appareil marche. Comment ? Je ne sais pas, je ne suis pas physicien.
Demandez à mes patients ce qu’ils en pensent. Ils en redemandent ! »
- Quant à savoir si ces personnes nous ont dit la vérité, c’était impossible
de détecter d’éventuels mensonges pendant les auditions, faute
d’information contraire… Mais nous venons de recevoir un courrier
mettant en cause la sincérité d’une des réponses à nos questions, sur le
montant de certains tarifs de consultation. C’est l’un des avantages de la
transparence que nous avons souhaitée : les gens peuvent réagir, soit
auprès de nous, soit auprès des personnes directement quand ils ont
l’impression qu’on les a trompés. Même si cela ne cause pas d’ennui à ces
praticiens, cela peut les obliger à revoir certains comportements,
notamment tarifaires…