Bal/Ballet Le Bal Renaissance : ses danses

Transcription

Bal/Ballet Le Bal Renaissance : ses danses
L’Orchésographie de Thoinot Arbeau :
source inépuisable pour les amateurs de choréologie
et les interprètes de danseries
Souvent considérée comme une bible par les danseurs/chercheurs passionnés de danse ancienne,
l’Orchésographie de Thoinot Arbeau est très intéressante comme dictionnaire.
Etudiée par des universitaires spécialisés dans l’histoire des arts, la sociologie et l’anthropologie, elle
révèle également de multiples indications au ménétrier choréologue que je suis.
Avant tout, il faut bien comprendre de quoi traite Thoinot Arbeau. Outre son introduction sur les
bienséances à observer en société, les batteries de tambours et les tablatures d’arigot (flûte), il parle bien de
danses récréatives -opposées aux danses religieuses et militaires- qui sont à la fois dans le domaine de la
représentation (ce que nous nommons spectacle ou ballet aujourd’hui) ou celui de la pratique collective (ce que
nous nommons bal aujourd’hui).
Bal/Ballet
Cette notion de bal/ballet nécessite quelques explications. En effet, en France à cette époque, le verbe
« baller » était autant utiliser que son synonyme « danser ». Le mot « bal » apparaît à la fin du XIIe siècle et
vient du verbe baller (latin : ballare) signifiant tout simplement danser. Il devient la racine de plusieurs termes :
ballet, balleur, ballade, balader, balladeur, balladin …; tous ces vocables ayant comme dénominateurs communs la
danse et la musique. Aujourd’hui leurs significations sont clairement définies, mais au début des temps
modernes, d’énormes flous subsistent car l’un peu être employé pour l’autre et vice et versa.
Pour ce qui concerne le « bas peuple », il est évident qu’il ne s’agisse que de bal dans l’acception
d’aujourd’hui. En revanche, pour le « haut peuple », cela se complique considérablement. Les rôles titres des
spectacles sont confiés exclusivement aux nobles ou grand dignitaires et se sont des spectateurs de la même
condition, des personnes fréquentant la cour ou ayant un accès réservé. Les bals (dans l’acception
d’aujourd’hui) royaux, princiers ou d’autres nobles sont eux aussi de véritable spectacle car tous les convives
ne peuvent pas prétende au rang de danseurs.
Le Bal Renaissance : ses danses
Les indications de Thoinot Arbeau dans son Orchésographie concernant les danses récréatives sont très
précieuses et de plusieurs ordres.
En raccordant les informations nous pouvons supposer une hypothèse de déroulement de bal.
[Page 68, verso] Capriol
Je me suis prins garde qu'ez bonnes compagnies, on commence ordinairement les dances par branles. Dictes
moy comment il les fault dancer?
[Page 69 recto] Arbeau
[…] Les joueurs d'instruments sont tous accoustumez à commencer les dances en un festin par un branle
double, qu'ils appellent le branle commun, & en aprez donnent le branle simple, puis aprez le branle gay,
& à la fin les branles qu'ils appellent branles de Bourgoigne, lesquels aucuns appellent branles de
Champaigne: La suyte de ces quatre sortes de branles est appropriee aux trois differences de personnes qui
entrent en une dance: Les anciens dancent gravement les branles doubles & simples: Les jeusnes mariez
dancent les branles gayz: Et les plus jeusnes comme vous dancent legierement les branles de Bourgoigne: Et
neantmoins tous ceulx de la dance s'acquittent du tout comme ils peuvent, chacun selon son aage, & la
disposition de sa dexterité.
Après les trois « branles réguliers » vient donc les branles coupés, puis les branles morguées et enfin les
danses de marche.
Voici une récapitulation de mon classement exhaustif des danses récréatives décrites dans
l’Orchésographie de Thoinot Arbeau. L’orthographe et les vocables choisis ne sont pas forcément ceux d’Arbeau,
ils sont empruntés à ses contemporains ou actualisés dans un souci pédagogique.
Les danses de côté
Branles communs :
Branles doubles1
Branles simples
Branles gays
Branles de Poitou (Classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Branles coupés :
Triory de Bretagne, autrement appelé Passepieds (classé dans les branles régionaux par Arbeau)
Deux premiers branles de la suite des 10 branles de champagne couppez de Lengres : Cassandre & Pinagay
Charlotte
Aridan
Branles morgués :
Guerre (classé dans les branles coupés par Arbeau)
Malte
Lavandières
Sabots
Pois, autrement appelé Margueritotte
Hermites
Chandelier, autrement appelé Torche
Chevaulx
Montarde
Haye
Official
1
Les vocables utilisés par Thoinot Arbeau ont la plupart du temps plusieurs significations suivant le contexte où ils sont employés ou
qu’il s’agisse d’un nom ou d’un adjectif. Nous dénombrons ainsi trois sens possibles pour le mot « double » quand il est utilisé dans
les danses de la Renaissance française :
« Double », seul, utilisé comme un nom correspond à un pas de danse construit sur quatre temps. Il peut être qualifié de
gauche ou de droite. Voici la description de Thoinot Arbeau pour le double à gauche : « […]vous sçavez bien qu'un double consiste de trois
pas, & un pied joinct: Pour faire lesquels de cousté, vous qui serez en contenance decente (aprez la reverence salutatoire) tenant ferme & posé le pied
droit, getterez a cousté le pied gaulche, qui sera un pied largy pour la premiere mesure: Puis pour la secunde mesure (tenant ferme & posé le pied
gaulche) approcherez le pied droit du gaulche, qui sera un pied largy, quasi joinct: Pour la troisieme mesure (tenant ferme & posé le pied droit)
getterez à cousté le pied gaulche, qui sera un pied largy Et pour la quatrieme mesure (tenant ferme le pied gaulche) approcherez le pied droit prés
dudit gaulche, qui sera pied joinct. Ces quatre pas faicts en quatre mesures ou battements de tabourin, nous les appellerons double à gaulche, […] »
(page 68).
« Branle double » est un nom de danse : « […] En premier lieu, quand au branle appellé branle double, vous y marcherez un double
du cousté gaulche puis un double du cousté droit, […] » (page 68).
« Double », seul, utilisé comme un adjectif signifie que la musique est construite sur 8 temps. Il en est de même pour
« simple », seul, utilisé comme un adjectif signifie que la musique est construite sur 6 temps. Ainsi un « Branle de Poitou double » est
un branle de Poitou à 8 temps.
Les danses de marche
Pavanes
Gaillardes
Bassedanses
Retours de bassedanses
Tourdions
Voltes
Courantes
Allemandes
Allemandes courantes
Les danses de passage, de mascarade et d’intermède
Ballets
Gaillardes à la Lyonnaise
Gavottes
Morisques
Canaries
Passemaizes
Bouffons
Fantaisies ménétrières
Passage en « branles de Bourgogne » (Classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Passage en « branles de Haut Barrois » (Classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Passage en « branles d’Ecosse » (Classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Passage en « mesure2 légère »
Passage en « branles de Poitou », en mesure ternaire (cf. catégorie branles communs)
Passage en « branles coupés », « danses de marche » …
Il me semble important de s’attarder sur la famille des « branles régionaux » décrit par Thoinot Arbeau
que je m’approprie en « fantaisies ménétrières ».
[Page 69 recto] Arbeau
Plusieurs branles preignent denomination des pays esquelz on les praticque ordinairement: Les Poictevins
dancent leurs branles de Poictou: Les Escossois les branles d'Escosse: Les Bretons, les branles qu'ils appellent
le Triory, ou passe pied.
Il est indéniable que certains noms de danseries sont en liens directs avec le nom d’une région ou d’un
pays ; cependant il faut absolument faire la différence entre l’hommage rendu à un lieu, pour l’origine de
composition et de création de la mélodie " […] Et aultant qu'il survient de fresches compositions & nouveaultez,
aultant en font ils de suittes, & leur attribuent des noms à plaisir." " […] Et fault que vous sçachiez que quand on fait un
branle nouveau, qu'ils appellent un ballet ( pour s'en servir en une mascarade de quelque festin) incontinent les jeunes gens
l'apportent ens compagnies, & luy attribuent un nom à leur plaisir." [Orchésographie] et l’indication de forme et de
2
Le sens du mot « mesure », pour les musiques des XVIIème, XVIIIème et XIXème siècles, désigne un espace-temps délimité par deux
barres dans une partition musicale. Pour les compositeurs modernes ou contemporains, il équivaut à la délimitation d’une phrase
musicale. A la Renaissance, ces deux sens existent, mais quand nous le rencontrons dans les descriptions de Thoinot Arbeau il est
essentiellement utilisé comme synonyme du « temps musical », de la pulsation actuelle, qui peut être court, long, primaire, binaire
ou ternaire.
caractère de la danse. L’exemple le plus frappant étant le Branle de Poitou, qui se caractérise par sa mesure
ternaire. En effet dans le premier recueil de danseries édité par Pierre Phalèse en 1571, nous trouvons plusieurs
Branles de Poitou respectant la description de Thoinot Arbeau et un autre étant clairement en mesure
binaire…
Ces « fantaisies ménétrières » s’appliquent à toutes les danseries, qu’elles soient régulières ou
irrégulières.
L’intérêt de cette catégorie de danses réside dans leurs cadences : tempo, dynamique et surtout le
geste de conclusion du pas. C’est, pour les ménétriers, une véritable invitation à l’appropriation et à
l’invention pour un jeu (dans tous les sens du terme) spontané avec les danseurs. C’est une indication de
caractère, on dira donc que l’on joue à la façon d’un …
L’aspect géographique n’est pas important, j’en prends pour preuve le Branle de Malte qu’Arbeau
classe dans la catégorie des danses morguées. Il n’a pas de caractéristique musicale ou chorégraphique propre,
mis à part le coté dramaturgique de la deuxième partie spécifique aux branles morgués ; de même pour les
branles de Champagne. Donc ce ne sont pas des branles régionaux ! D’autre part une même mélodie peut être
nommée d’une façon différente d’un éditeur à l’autre (« […] & à la fin les branles qu’ils appellent branles de
Bourgoigne, lesquels aucuns appellent branles de Champaigne » [Orchésographie]). C’est d’ailleurs le cas pour de
nombreuses mélodies « traditionnelles ».
Clefs de lecture solfègiques et caractéristiques
Outre l’ordre d’un bal et cet essai de classement, intéressons-nous surtout aux indications solfègiques
données en amont des tablatures. Grace à elles, nous pouvons déterminer une fourchette métronomique à
l’aide des différentes mesures et des différents tempos mentionnés
Les différentes mesures
-Mesure ternaire
-Mesure binaire (binarisation de la mesure ternaire dans un rapport de : division du temps =
division du temps [blanche = blanche])
-Mesure légère (ternarisation de la mesure binaire dans un rapport de : temps = temps
[blanche = blanche pointée])
-Mesure primaire (les appuis sont sur la division du temps)
Les différents tempos du plus rapide au plus lent
-Léger (synonymes également utilisés dans l’Orchésographie : rapide, concis)
-Légèrement médiocre
-Médiocrement léger
-Médiocre (à comprendre dans son origine latine : moyen)
-Médiocrement grave
-Gravement médiocre
-Grave (synonymes également utilisés dans l’Orchésographie : pesant, lent)
Ainsi, il nous suffit de centraliser les caractéristiques que Thoinot Arbeau nous livre sur chacune des
danseries et nous avons de solides arguments pour décider et assumer nos choix d’interprétations.
Voici quelques éléments pour interpréter les danses récréatives décrites dans l’Orchésographie. Vous
trouverez des renseignements sur leurs mesures, constructions rythmiques, tempos et organisations des
cadences chorégraphiques. L’orthographe et les vocables choisis ne sont pas forcément ceux d’Arbeau, ils sont
empruntés à ses contemporains ou actualisés dans un souci pédagogique.
NB : pour l’organisation des cadences chorégraphiques, Arbeau, suivant le contexte, considère
la cadence avec son enchaînement cadentiel ou seulement le dernier geste conclusif. En
musique (comme pour la danse) même si une cadence est construite et repérable avec en
général deux accords, il y a en amont tout un chemin contrapuntique ou harmonique qui
conduit à cet enchaînement plus ou moins conclusif. Quand je présente, en conscience, que la
cadence chorégraphique est sur 1 temps, comprenez qu’il faut garder le poids du corps sur la
jambe d’appui du temps précédent et que le temps de la cadence est un repos, une désinence,
à interpréter sans tension ni appui. Pour les cadences plus longues (comme la gaillarde),
l’attention doit être portée au premier temps de la cadence qui est la tension la plus
importante de la phrase, les temps suivants sont des détentes (sauf pour le branle Gay où les
trois temps primaires de cadence sont une désinence).
DANSES DE CÔTE
Danses essentiellement collectives : rondes, farandoles (chaîne ouverte libre dans l’espace),
lignes, « files indiennes… » évoluant sur le côté, latéralement
Branles communs
Danses régulières, connues de tous, ayant le même pas du début jusqu’à la fin, quelque soit le
support musical.
Branles doubles
Mesure : binaire ou légère (quand rien n’est précisé, la mesure binaire est sous
entendu).
Construction rythmique à 8 temps : 4 + 4 (d à gauche + d à droite).
Tempo : médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pieds joints.
Branles simples
Mesure : binaire ou légère.
Construction rythmique à 6 temps : 4 + 2 (d à gauche + s à droite).
Tempo : médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pieds joints.
Branles gays
Mesure : primaire.
Construction rythmique à 6 temps.
Tempo : légèrement médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 3 temps primaires : pied en l’air
gauche.
Remarque particulière : ils évoluent toujours à gauche sans jamais divertir à droite
[Orchésographie].
Branles de Poitou (Classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Mesure : ternaire.
Construction rythmique à 4 temps, à 6 temps (c’est celui qui est décrit dans
l’Orchésographie), à 8 temps.
Tempo : médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 2 temps : 3 appuis alternés en
commençant du pied gauche sur le premier temps, et 1 appui causant un pied en l’air
gauche sur le deuxième temps.
Remarque particulière : ils évoluent toujours à gauche sans jamais divertir à droite
[Orchésographie]. (sauf en cas de mesures coupées).
Branles coupés
Danses forcément irrégulières puisqu’elles mélangent des branles communs, régionaux …
Arbeau insiste sur l’appellation de branles de Champagne coupés, et précise : « De tous les
branles cy dessuz comme d'une source sont derivez & emannez certains branles composez, & entremeslez de
doubles, de simples, de piedz en lair, de piedz joinctz & saultz quelquesfois variez par intercalation de
mesures diverses, pesantes ou legieres, selon que bon a semblé aux compositeurs & inventeurs. Les joueurs
distrumentz les appellent branles de Champagne couppez. Et affin de saccorder par ensemble, ils ont mis
ces branles par suites de certains nombres, comme les nostres de Lengres en jouent dix de suitte, quilz
appellent branles de Champagne couppez. Ilz en jouent un certain aultre nombre de suitte, qu'ilz
appellent branles de Camp, une aultre suitte, ilz la nomment branles de Henault, une aultre suitte, ilz la
nomment branles d'Avignon: Et aultant qu'il survient de fresches compositions & nouveaultez, aultant en
font ilz de suittes, & leur attribuent des noms à plaisir. » [Orchésographie]
Branles morgués
Danses mimes où il y a une formule chorégraphique figurative, théâtrale symbolisant un
métier, personnalité, objet, action … Nous l’élargissons aux branles chorégraphiés qui
nécessitent l’explication d’un maître à danser pour pouvoir l’exécuter.
DANSES DE MARCHE
Danses régulières et irrégulières, généralement en couple ou en solo, évoluant dans le sens de
la marche. Elles sont organisées en cortège ou libres dans l’espace.
Pavanes – description pour les pavanes régulières
Mesure : binaire.
Construction rythmique à 8 temps : 2 + 2 + 4 (s du pied gauche + s du pied droit + d du pied
gauche > puis démarche3 : s + s + d).
Tempo : grave.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pieds joints.
3
Chez Thoinot Arbeau le mot « démarche » signifie au premier abord : marché à reculons. « […] Arbeau : Il est ainsi: Es si on veut on
ne recule point, & marche lon tousjours avant. / Capriol : Ne faict-on point de demarches en danceant la basse-dance? / Arbeau : Quelquesfois il
y a si grand presse & multitude de personnes en la salle, que la place pour dancer est racoursie, parquoy quand vous serez prez du bout, fauldra que
faciez de deux choses l'une, ou que desmarchiez vous & la damoiselle que vous menez, ou bien que faciez une conversion. […] » (page 28 et 29).
Cependant nous pouvons quand même questionner cette définition en pensant qu’il peut également être un synonyme de « revers ».
C’est-à-dire faire le même pas mais en commençant de l’autre pied. Les descriptions nous interpelant le plus sont celles concernant la
pavane « […] La pavane est facile à dancer, car il n'y a que deux simples & un double, en marchant & savanceant. Et deux simples & un double en
reculant & desmarchant : Et se joue par mesure binaire. Et notterez qu'en la dançeant, lesdits deux simples & ledit double de l'advance, se commencent
par le pied gauche: Et lesdits deux simples & le double de la desmarche, se commencent par le pied droit. […] » (page 28) et la Pavane
d’Espagne : « […] La pavane d'Espagne se dance par mesure binaire mediocre, soubz l'air, & avec les mouvements, dont s'ensuyt la tabulature, &
quand on l'a dancee en marchant en avant pour le premier passage, il la fault retrograder en desmarchant, […] » (page 96). Pour tous ceux qui
pratiquent ces danses, il parait invraisemblable de faire un pas en avant puis de le répéter en arrière ! Nous comprenons donc, comme
dans la description des maîtres à danser espagnols, qu’il s’agit bien d’un pas, d’un passage ou d’une variation à exécuter d’un pied
puis de la recommencer de l’autre pied.
Gaillardes – description pour les plus fréquentes
Mesure : primaire.
Construction rythmique principalement à 6 temps et 12 temps (2 x 6) ; il est en effet possible
de rencontrer des 9, 18, 24 … temps.
Tempo : légèrement médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 3 temps : appui, saut majeur et posture.
Bassedanses & Retours de bassedanses (nous la trouvons écrite : Basse Danse dans
plusieurs sources, dont l’Orchésographie)
Mesure : ternaire, organisée en quaternon ou tetradion (unité de 4 temps ternaires).
Construction rythmique à 4 temps (cinq pas différents : R, ss, d, r & b).
Tempo : médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pieds joints.
Tourdions (il est généralement la troisième partie de la suite Bassedanses & Retours de
bassedanses)
Tempo : plus léger que la bassedanse et la gaillarde.
Remarque particulière : même chose que la gaillarde mais par terre [Orchésographie], sans sauter
pour esquiver le saut majeur.
Voltes
Sorte de gaillarde avec un porté !
Remarque particulière : si vous choisissez le pas de promenade décrit par Arbeau occupant 6
temps primaires, l’attention sera sur le premier temps et non le quatrième comme dans la
gaillarde.
Courantes
Mesure : binaire ou légère.
Construction rythmique à 8 temps : 2 + 2 + 4 (s + s + d) ou 4 + 4 (d + d) ou 6 temps : 4 +
2 (d + s).
Tempo : léger.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pieds joints.
Remarque particulière : tous les pas sont sautés.
Allemandes – description pour les allemandes régulières
Mesure : binaire.
Construction rythmique à 8 temps : 2 + 2 + 4 (s + s + d) ou 4 + 4 (d + d) ou 6 temps : 4 +
2 (d + s).
Tempo : médiocrement grave, puis, dans le cour de la danse : plus léger.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pied en l’air = pied suspendu, sans
tension !
Remarque particulière : quand le tempo devient plus léger, tous les pas sont sautés.
Allemandes courantes (nom de danse inventé pour palier à une carence, certain l’appelle
saltarelle…)*
Allemande en mesure légère = ternaire, dans un rapport de temps = temps.
Pour le reste : comme l’Allemande !
*NB 1 : Dans les recueils de danseries de la Renaissance, nous trouvons plusieurs noms de
danse pour définir ce passage de l’Allemande en mesure légère. Nous préférons aujourd’hui
utiliser « Allemande courante » car c’est celui qui nous semble le moins ambigu ! Le plus
logique serait « Allemande légère » mais l’adjectif « léger » est à notre connaissance, dans les
partitions du XVIe siècle, exclusivement utilisé pour les danses de côté. En revanche,
« saltarelle », « courant », « triple », « sarabande », « reprise » indiquent bien une
transformation rythmique, mais elle peut être comprise comme un passage en mesure primaire
ou ternaire, alors qu’avec « Allemande courante » nous sommes assurés qu’il s’agit bien d’un
rapport de temps = temps ou plutôt d’appui = appui.
*NB 2 : Cela n’exclut pas qu’un saltarello mis à la suite d’une allemande puisse être une
gaillarde plutôt qu’une allemande courante.
DANSES DE PASSAGES, DE MASCARADES ET D’INTERMEDES
Danses, de marche ou de côté, destinées à l’improvisation, la composition et/ou la
représentation.
Ballets
Terme ambigu car il définit aussi bien une représentation dansée qu’une suite d’airs à danser
pouvant mélanger toutes les danses de marche et toutes les danses de côté. « Et fault que vous
sçachiez que quand on fait un branle nouveau, qu'ils appellent un ballet (pour s'en servir en une
mascarade de quelque festin) incontinent les jeunes gens l'apportent ens compagnies, & luy attribuent un
nom à leur plaisir » [Orchésographie].
Gaillardes à la Lyonnaise
Invitations à l’improvisation en duo ou en solo.
Gavottes
Branles découpés par passages à plaisir tirés des gaillardes [Orchésographie].
Morisques
Danses à passages avec des pas frappés.
Canaries
Jeux amoureux où les passages sont gaillards & néantmoins estranges, bizares, & qui ressentent fort le
sauvage [Orchésographie]. Thoinot Arbeau précise que cette danse s’exécute avec des tapements
de pieds.
Passemaizes - exemple = Pavane d’Espagne
Littéralement : passage en mesure moyenne. Danses de marche jouées avec un tempo, ou
plutôt, caractère médiocre. Elle se caractérise par : « Et autre passage de cette pavane d’Espagne en
lieu de ces fleurets ici, le danseur fait d’autres gesticulations. » [Orchésographie]
Bouffons
Danse de bâtons, avec le vocabulaire de l’escrime ancienne et artistique.
FANTAISIES MENETRIERES
Passage en branles de Bourgogne (classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Mesure : binaire, légère ou ternaire.
Tempo : médiocrement léger.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pied en l’air.
Passage en branles de Haut Barrois (classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Mesure : binaire ou légère.
Tempo : légèrement médiocre.
Organisation des cadences chorégraphiques : sur 1 temps : pieds joints
Remarque particulière : tous les temps sont sautés avec un double appui avec une égale
répartition du poids du corps.
Passage en branles d’Ecosse (classés dans les branles régionaux par Arbeau)
Mesure : binaire, légère ou ternaire.
Tempo : léger.
Organisation des cadences chorégraphiques pour les mesures binaires et légères : sur 1 temps :
pied croisé. Pour la mesure ternaire : idem branle de Poitou, avec un pied croisé sur le
deuxième temps.
Passage en mesure légère
Passage en branles de Poitou (cf. catégorie branles communs)
Passage en branles coupés, danses de marche …
Déplacement des cadences en allongeant ou en raccourcissant la musique, ou en réorganisant
les articulations et les phrasés.
Pour conclure, je pense que ce petit échange entre Capriol et son maître résume à merveille
l’état d’esprit dans lequel nous devons appréhender l’interdisciplinarité de la musique et de la danse :
[Page 5 recto] Capriol
Puis que c'est un art, il depend donq de l'un des sept arts liberaulx.
Arbeau
Je vous ay ja dit, quelle depend de la musique & modulations d'icelle: car sans la vertu rithmique, la dance
seroit obscure & confuse: daultant qu'il fault que les gestes des membres accompaignent les cadances des
instruments musicaulx, & ne fault pas que le pied parle d'un, & l'instrument daultre. Mais principallement
tous les doctes tiennent que la dance est une espece de Rhetorique muette, par laquelle l’Orateur peult par
ses mouvements, sans parler un seul mot, se faire entendre, & persuader aux spectateurs, quil est gaillard
digne d'estre loué, aymé, & chery. N'est-ce pas à vostre advis une oraison qu'il faict pour soy-mesme, par
ses pieds propres, en gendre demonstratif? Ne dit il pas tacitement à sa maistresse (qui le regarde dançer
honnestement & de bonne grace) aymés moy, desirés moy? Et quant les masquarades y sont joinctes, elle ha
efficace grande de mouvoir les affections, tantost à cholere, tantost à pitie & commiseration, tantost à la
hayne, tantost à l'amour.