Rapport PDF - Centre canadien d`études allemandes et européennes
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Rapport PDF - Centre canadien d`études allemandes et européennes
! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! 20 janvier 2016! ! ! ! ! ! ! ! ! Université de Montréal! RAPPORT DE SÉJOUR DE RECHERCHE! CONCOURS DE BOURSES D’APPOINT POUR SÉJOUR DE RECHERCHE \ CCEAE! ! Andrea Mercier! Bachelière ès arts et candidate à la maîtrise \ Philosophie!et Diplôme complémentaire du CCEAE! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! Objet : objectifs et activités réalisés lors du séjour de recherche \ Berlin, du 24 août au 24 décembre 2015! ! À qui de droit,! ! Le texte qui suit vise à dresser le bilan de mes activités lors d’un séjour de recherche effectué à Berlin du 24 août au 24 décembre 2015, sous l’invitation de Prof. Dr. Anne Eusterschulte de l’Université libre de Berlin. Ce voyage avait pour objectif général de me familiariser avec le monde intellectuel allemand, mais c’est en m’intéressant en particulier à la figure de Kierkegaard que je m’y suis plongé, car cet auteur sera au coeur de mon mémoire de maîtrise. ! ! La ville de Berlin n’était pas un choix arbitraire pour ce projet, car bien qu’il s’agisse d’un philosophe danois originaire de Copenhague, Kierkegaard entretient des liens à plusieurs niveaux avec la capitale allemande : en tant que penseur, du point de vue exprimé par ses écrits destinés à la publication, puis en tant que personne privée, du point de vue de l’expérience vécue lors de ses voyages dans la capitale allemande et dont les traces nous sont parvenues via ses journaux et correspondances. J’ai donc tenté au cours de mon propre passage dans la ville d’approfondir ma compréhension du rapport complexe qui anime ces deux facettes de la figure de Kierkegaard, afin de bien situer l’auteur qui m’intéresse au sein d’une histoire des idées fondamentalement intriquée avec celle des peuples et des individus. ! ! 1 sur 4 ! D’abord, en tant que penseur, Kierkegaard se positionne en réaction à l’idéalisme allemand, dont Berlin fut résolument la capitale ; l’une des têtes de proue de ce courant philosophique, Hegel — dont Kierkegaard fit une virulente critique, mais qui l’inspira aussi à certains égards —, y termina sa vie alors qu’il enseignait à l’Université de Berlin1 ; il y occupa de 1818 à 1831 la chaire de Fichte. Par la suite, Schelling — un troisième représentant majeur de l’idéalisme allemand — occupa de 1841 à 1846 la même chaire que Hegel, mais s’opposa toutefois à la pensée de son prédécesseur. C’est à cette époque que Kierkegaard se rendit luimême à Berlin pour y assister aux cours de Schelling, qui influencèrent sa propre critique de l’idéalisme hégélien, lui permettant ainsi de poser parallèlement à Nietzsche les bases de l’existentialisme moderne. ! ! ! Outre l’incidence de penseurs berlinois sur les réflexions de Kierkegaard, j’ai désiré explorer dans mes recherches la réception allemande de ses écrits, car si sa pensée plonge ses racines dans l’histoire philosophique de ce pays, elle y est aussi étudiée jusqu’à nos jours. D’une part, les développements qui se dessinèrent dans l’histoire des idées après la mort de Kierkegaard en auront marqué une lecture proprement germanique, qui se fit notamment à l’aune de l’herméneutique heideggerienne, mais qui comprend maintes facettes dont Jon Stewart fournit un survol dans son ouvrage sur la réception internationale de Kierkegaard2. Cependant, j’ai vite compris qu’un séjour de recherche de quatre mois ne me permettrait pas d’entreprendre un projet aussi ambitieux. J’ai donc résolu de restreindre le champ de mes recherches par rapport à ce que je me proposais d’étudier à l’origine.! ! Plus précisément, j’ai limité mes recherches à une forme particulière de la réception allemande de Kierkegaard en concentrant mon travail sur la littérature secondaire récente à son sujet, car celle-ci m’a semblé plus utile à la rédaction de mon mémoire. De plus, j’ai sélectionné de préférence des titres traitant du rapport entre la pensée de Kierkegaard et celle de Schelling, 1 Celle-ci est aujourd’hui renommée la Humboldt Universität, en l’honneur de son fondateur, Wilhelm von Humboldt, ce qui permet aussi de la distinguer des autres universités berlinoise, comme la Freie Universität où je fus invitée par Pr. Dr. Eusterschulte. 2 Cf. STEWART, Jon (2009). Kierkegaard’s International Reception, Volume 1, éd. Ashgate 2 sur 4 car peu d’écrits existent à ce sujet dans le monde intellectuel francophone3, alors que les chercheurs de langue allemande on accordé plus d’intérêt à une rencontre qui s’est déroulée sur un sol germanique. Les notes prises par le danois au sujet des cours donnés à Berlin par Schelling en 1841 et 1842 fournissent par ailleurs de précieuses indication quant à l’évolution de son rapport à l’idéalisme allemand.! ! ! Cette orientation sur Kierkegaard et Schelling revoie de plus au second aspect de la figure de Kierkegaard que j’ai évoqué plus tôt, soit son expérience personnelle de Berlin. Celleci n’est pas à négliger dans ma recherche, car de même que son vécu est tissé de considérations philosophiques, celui-ci sous-tend sans contredit son travail d’écriture, dont la visée existentielle replace l’individu au coeur de la philosophie. Aussi, le journal rédigé par Kierkegaard lorsqu’il séjournait à Berlin en 1841-42, 1853, 1845, puis 1846 laisse entrevoir la portée philosophique de son expérience. De plus, Kierkegaard s’est rendu dans la capitale allemande spécifiquement pour y assister aux cours de Schelling ; cet événement représente dès lors la rencontre vivante du danois avec l’idéalisme allemand. L’importance de cette ville dans la vie et la pensée du danois est d’ailleurs manifeste si ce n’est que par la fréquence de ses séjours, mais elle se trouve renforcée par le fait qu’il s’agisse des seuls voyages qu’il eut entrepris hors de son pays natal. ! ! ! Pour en venir finalement à ma propre expérience de Berlin, celle-ci m’a permis d’explorer le monde académique européen afin de paver la voie à des projets futurs. J’ai d’abord fait le tour des bibliothèque berlinoises, dont les plus remarquables sont la bibliothèque philosophique de la Freie Universität, celle de la Humboldt Universität, ainsi que la Staatsbibliothek zu Berlin. J’ai aussi eu l’occasion de visiter la bibliothèque de l’Université de Tubingue (Tübingen), dans le sud de l’Allemagne près de Stuttgart. La proximité géographique en Europe m’a également permis de me rendre à Paris à deux reprises où, grâce à mon statut 3 Diplômé de l’Université de Montréal, François Guillet aura contribué à combler cette lacune grâce à son mémoire de maîtrise — présenté en 2008 sous la direction de Dr. Bettina Bergo — intitulé « Analyse comparative entre Schelling et Kierkegaard sur la question du mal ». À ma lecture prochaine de ce texte, je pourrai comparer son traitement de ces auteurs au travail d’un étudiant allemand, car en 1997, sous la direction de Pr. Dr. Michael Theunissen, Thomas Oser présentait à la Freie Universität Berlin un texte au sujet de Schelling — « Sprünge über den Horizont des Denkens, Interpretationen zum mittleren Schelling 1806-1811 » — où il est notamment mis en rapport avec la pensée existentielle de Kierkegaard. 3 sur 4 d’étudiante en séjour de recherche, j’ai pu consulter la collection de recherche de la Bibliothèque nationale de France. ! ! ! De plus, j’ai voulu m’extirper de l’univers solitaire des bibliothèques en assistant notamment à une table ronde interdisciplinaire intitulée « Literature in the Public Sphere », organisée par Anne Fleig de la Freie Universität Berlin et par Luciana Villa Bôas de la Universidade Federal do Rio de Janeiro. Rassemblant des chercheurs d’Europe et des Amériques, cet événement m’a permis de constater que malgré les différences immanquables qui existent au sein de la culture académique d’un pays à l’autre et d’une langue à l’autre, un terrain d’échange international est bien établi dans les universités du monde occidental, à Montréal, à Berlin, comme — je me permets de le supposer — à Rio. ! ! ! Enfin, pour faire honneur à ma première expérience de recherche à l’étranger, je désire maintenant confronter la documentation que j’ai ramené d’Europe à celle qui m’est disponible à Montréal, où le monde intellectuel francophone et anglophone prédominent. Pour ce faire, je prévois dans les prochaines semaines rédiger un article au sujet de Kierkegaard et Schelling, afin de le présenter pour publication à des revues académiques comme Eurostudia, la revue transatlantique de recherche sur l’Europe qui est associée au Centre canadien d’études allemandes et européennes. ! ! ! ! ! Andrea Mercier! Étudiante en maîtrise à l’Université de Montréal, département de philosophie et CCEAE! ! 4 sur 4