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Panorama Les ETI en quête d’un second souffle // P. 32
Enjeux Grandir plus vite en attirant les talents // P. 33
Analyse Financement : l’ère de la désintermédiation // P. 34
Stratégie Etre plus conquérant à l’international // P. 35
ENTREPRENEUR
MERCREDI 5 MARS 2014
// LESECHOS.FR
PANORAMA // Les entreprises de taille intermédiaire ont poursuivi leur croissance durant la crise, mais elles
en sortent fragilisées. Trop petites et trop peu nombreuses, beaucoup souffrent dans la compétition internationale.
Les ETI enquêted’unnouveausouffle
es ETI – entreprises de
taille intermédiaire
devraient être le Graal de
la stratégie de relance du gouvernement. Ces entreprises définies
p a r l eur no mbr e de sa l a r i és
(entre 250 et 5.000) et leur chiffre
d ’a f f a i r e s a n n u e l ( m o i n s d e
1,5 milliard d’euros) sont à la fois
créatrices d’emplois, innovantes
et fortement exportatrices.
Combien sont-elles ? Environ
4.600, soit trois fois moins qu’en
Allemagne et deux fois moins
qu’a u Roya ume -Uni . L a t r ès
grande majorité sont des entreprises familiales ayant leur siège
social en province où elles assurent 75 % de l’emploi total et constituent 85 % des unités de production. Elles y garantissent la
pérennité d’un tissu de sous-trai-
L
grâce, pour un tiers d’entre elles,
à des implantations en Europe,
en Asie et en Amérique du Nord.
« Les dirigeants d’entreprise de
croissance portent la compétitivité
de la France. Les aider à se développer, innover toujours plus, conquérir de nouveaux marchés et créer
encore plus d’emplois doit être une
priorité pour tous », affirme Alain
Pons, président de la direction
générale de Deloitte en France.
Reste que ces anciennes PME peinent à grandir, souvent par manque de fonds propres : la grosse
majorité d’entre elles ont moins
de 350 salariés et leur développement basé sur l’autofinancement
et le crédit bancaire (faute
d’ouvrir leur capital) risque de
souffrir des nouvelles normes
prudentielles qui s’imposent aux
établissements financiers.
tants et de fournisseurs, chaque
emploi dans une ETI générant,
selon leur syndicat Asmep-ETI,
3,5 emplois indirects en
moyenne. Résilientes à la crise,
70 % d’entre elles ont augmenté
leurs effectifs au cours des cinq
dernières années, privilégiant
l’emploi sur la distribution des
dividendes, affirme l’Asmep-ETI.
De fait, les ETI représentent 23 %
de l’emploi salarié en France
(33 % de l’emploi industriel) et
ont créé près de 80.000 emplois
de 2009 à 2013 quand les grands
groupes en supprimaient près de
50.000. Elles assurent 23 % des
investissements, constituent le
gros des troupes des entreprises
cotées et surtout le bras armé de
la France à l’international avec
34 % du total des exportations,
Inquiétude
H. de Oliveira/Expansion-RÉA
3 QUESTIONS À…
ELIZABETH
DUCOTTET
PDG du groupe Thuasne
« Ilfaut alignerles
règlesfrançaisessur
la moyenne desautres
payseuropéens »
lizabeth Ducottet, tout en
dirigeant l’entreprise familiale, est coprésidente
d’Asmep-ETI, syndicat des entreprises de taille intermédiaire et
des entreprises patrimoniales.
Elle lance un cri d’alarme sur la
fragilité accrue des ETI françaises.
E
1 Comment les ETI françaises
ont-elles traversé la crise ?
Elles ont plutôt bien résisté en faisant des efforts importants. Elles
ont réussi parce qu’elles bénéficiaient de schémas de diversification optimisés, d’un développement à l’international solide,
parce qu’elles sont rapides à la
décision, qu’elles font preuve
d’une b onne réactivité p our
s’adapter à leur environnement.
Mais leur capacité de résistance a
ses limites. La crise n’est pas terminée et ces efforts ne peuvent pas
durer éternellement. Trop de résilience aboutit à un essoufflement
et le décalage de compétitivité
avec nos concurrents européens
s’accroît. Aujourd’hui, les dirigeants d’ETI sont inquiets et en
appellent à des mesures
d’urgence.
2 Quelles mesures ?
Il faut rapidement aligner les
règles – fiscales, sociales, juridiques – françaises sur la moyenne
des autres pays européens, car,
dans la partie commune qui se
joue, nous avons les règles les plus
dures et c’est un lourd handicap.
La baisse des charges doit être la
pierre angulaire du dispositif
pour donner la priorité à l’emploi,
avec des mesures simples, visibles, lisibles y compris par le dirigeant d’entreprise qui pourra en
bénéficier de façon immédiate. En
ce sens, le Cice est encore trop
compliqué et ne portera véritablement ses fruits qu’en 2015. Cette
baisse des charges doit être sensible, pas anecdotique, pour être
véritablement incitative à
l’embauche, comme le prévoyait
d’ailleurs le rapport Gallois. On
permettra ainsi aux ETI de
s’adjoindre des compétences
nouvelles dans les champs de
l’innovation et de l’internationalisation et donc de gagner en compétitivité. Il faut également que
notre fiscalité – notamment
l’impôt sur les sociétés – soit du
même ordre que ce qui a cours
dans les autres pays européens.
3 Qu’attend-on aujourd’hui
des ETI ?
Sans doute trop de choses, notamment à court terme. Or ces entreprises sont inscrites dans le
moyen et le long terme en particulier dans l’industrie, et c’est à cette
échelle de temps qu’il faut juger de
leur réussite. C’est pourquoi nous
défendons la création d’un statut
d’investisseur de long terme capable d’accompagner une entreprise
sur des cycles longs de dix ou
douze ans, avec un traitement particulier de la fiscalité de transmission. Je crois que cette proposition
suscite l’intérêt des pouvoirs
publics. Reste à passer aux actes.
Propos recueillis par
G. L.
En outre, ces entreprises fragilisées par la crise envisagent désormais l’avenir avec inquiétude : en
février 2013, 23 % d’entre elles
déploraient une baisse de leur
activité (sondage OpinionWay
pour KPMG) et 17 % prévoyaient
de réduire leurs effectifs. Même si
le nombre de défaillances d’ETI a
diminué en 2013 (– 4,9 %), selon
les derniers chiffres publiés par
Coface, quand la tendance générale est au contraire à la hausse
(+ 4,3 %), cette catégorie d’entreprises avait payé un lourd tribut
l’année précédente avec 45 faillites, un chiffre équivalent à celui
enregistré en 2009 au plus fort de
la crise. En 2013, le coût social et
financier reste lourd. Enfin, ces
entreprises de taille intermédiaire, sur lesquelles notre
société en panne de croissance
fonde tous ses espoirs, se disent
pénalisées face à leurs concurrentes par les règles du jeu à la
française. Fiscalité, charges
sociales, contraintes juridiques,
elles veulent tout remettre à plat.
Ces entreprises
se disent pénalisées
face à la concurrence
européenne.
« Les ETI, familiales en particulier, doivent être préservées face à
un environnement réglementaire
et fiscal toujours plus contraignant », avertit Jean-Pierre Letartre, président d’EY en France.
« L’accroissement des prélèvements obligatoires, particulièrement après le retournement de
conjoncture de 2008, a contribué à
réduire les capacités d’investissements des entreprises », ajoute
Jacky Lintignat, directeur général de KPMG France. « Les ETI
sortent fragilisées par dix années
de hausse continue des prélèvement, avertit Elizabeth Ducottet,
coprésidente d’Asmep-ETI. Il y a
urgence à stopper cette dynamique, car le tissu industriel et
l ’ e m p l o i d e n o s ré g i o n s s o n t
aujourd’hui menacés. »
— Georges Lucien
« Plus d’un tiers de notre activité et de notre
effectif est à l’international », souligne Philippe
Robardey, PDG de Sogeclair. Photo DR
François Lacoste, fondateur de NSE, estime
que « le financement est ce qui fragilise le plus
une ETI ». Photo DR
Sogeclairaélargi
NSEamisé sur
sonchampd’action despaysàpotentiel
l’origine, société de services en ingénierie,
l’entreprise toulousaine Sogeclair (une
dizaine d’implantations en France) a étoffé
sa palette d’activités au fil des années, avec une
offre de produits dans la simulation et la réalité
virtuelle. Ses clients : l’aéronautique, le spatial, la
défense, le ferroviaire, l’automobile. Philippe
Robardey a repris il y a quinze ans les rênes de
l’entreprise créée par sa mère en 1986.
Habitué des croissances annuelles à deux chiffres, le groupe a depuis rejoint le cercle fermé des
ETI françaises avec un millier de salariés et
104 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2013.
Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, Benelux,
Tunisie, Canada. « Plus d’un tiers de notre activité et
de notre effectif est à l’international », souligne
Philippe Robardey. La crise ? Sogeclair l’a mise à
profit pour consolider sa croissance, sécuriser ses
financements, réduire son endettement, dans une
logique continue d’indépendance financière. Coté
en Bourse depuis 1998, le groupe est encore majoritairement dans les mains de la famille (67 % du
capital), qui revendique une belle rentabilité de
11 % en 2013.
A
Contre le « harcèlement réglementaire »
Pour autant, le président du Medef toulousain ne
décolère pas, notamment contre la dernière loi de
Finances. « Il faut être capable de se structurer pour
aller à l’international, c’est un parcours compliqué,
or le Parlement a supprimé la possibilité qu’avaient
les entreprises de déduire de leur bénéfice imposable
en France les pertes de leurs filiales. Il a changé les
règles en cours de jeu et réduit notre capacité à
investir. Une loi votée en décembre remet en cause le
résultat de douze mois d’activité. C’est insupportable
et très démotivant. » Lors de la venue du président
de la République à Toulouse en janvier dernier,
Philippe Robardey qui se félicite d’avoir créé
120 emplois nets en France entre juin 2012 et
janvier 2014 ne cache pas avoir eu des choses
plutôt désagréables à dire au chef de l’Etat.
« Sur la complexité de l’environnement des entreprises
en France, sur le harcèlement réglementaire et fiscal
dont elles font l’objet. » A bon entendeur… — G. L.
e parcours est impressionnant. En 1976,
François Lacoste était agriculteur. En 1983, il
créait à Nizerolles (Allier) la société NSE
(Nizerolles Systèmes Electroniques) avec cinq
salariés. Trente ans plus tard, l’entreprise
auvergnate emploie 800 personnes dont 550 en
France sur une douzaine de sites et 250 à l’étranger. Tout à la fois concepteur, intégrateur de systèmes électroniques et prestataire de services
(maintenance et réparation) pour l’aéronautique
civile, la défense et le ferroviaire, NSE a réalisé
67 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2013.
« Pour réussir à l’international, il faut du temps,
explique François Lacoste. Nous nous sommes
concentrés sur des marchés porteurs comme le
Canada pour l’Amérique du Nord, le Brésil pour
l’Amérique latine, le Maroc pour l’Afrique, l’Inde
pour rayonner sur Singapour et la Malaisie. »
L
« Il faut changer le modèle
qui nous pénalise »
Si le groupe n’a pas relâché ses efforts durant la
crise, s’installant à Casablanca en 2008, à Sao Jose
Dos Campos au Brésil en 2011 et à Bengalore en
Inde l’an passé, la crise a néanmoins eu un impact :
« Nous avons dû réduire nos effectifs en France, mais
la baisse d’activité a été compensée par la croissance
à l’étranger », souligne François Lacoste pour qui
cette stratégie internationale a un coût élevé. « Le
financement est ce qui fragilise le plus une ETI »,
insiste le président de NSE. Le groupe, qui avait
accueilli des fonds d’investissement en 2001, est
entré en Bourse en 2012, mais la majorité de son
capital (61 %) est encore familiale. Confiant dans la
capacité de son entreprise à aller de l’avant grâce à
sa capacité d’innovation technologique et managériale – « Il faut savoir se remettre en cause, être
capable d’anticiper, c’est ce qui fait la force des
ETI » –, l’industriel reste pessimiste sur la relance
de la compétitivité française. « En France, il faut
changer le modèle qui nous pénalise. Aujourd’hui,
notre compétitivité nous la forgeons avec nos filiales
en zones dollar et low cost, ici, nous n’investissons
plus que modérément, en nous concentrant sur la
technologie et le pilotage du groupe. » — G. L.
ENTREPRENEUR // 33
Les Echos Mercredi 5 mars 2014
ENJEUX // Dans un environnement très concurrentiel et un marché du travail rigide, les entreprises
de taille intermédiaire se dotent de nouveaux outils pour trouver, fidéliser et faire évoluer les bons profils.
Grandir plusvite enattirant lestalents
T
Franck Berguig, chef de produits
chez Cegid Ressources Humaines, « et ne pas hésiter à s’investir
sur les réseaux sociaux ». Autres
impératifs : aller dans les écoles,
« sponsoriser » des cycles de formation, créer des chaires de
recherche et d’enseignement
(comme l’a fait par exemple le
groupe Toupargel à Lyon avec
l’EM Lyon).
Le groupe Gifi (équipement
pour la famille et la maison,
4.600 salariés, 410 magasins,
977 millions d’euros de chiffre
d’affaires en 2013) basé à Villeneuve-sur-Lot (47) a ainsi noué
un partenariat avec la Cité de la
formation de Marmande pour
développer un BTS en apprentissage management des unités
commerciales Gifi. Gifi, qui veut
atteindre le cap du millier de
magasins en 2025, mise sur cette
formation pour satisfaire en partie ses besoins d’encadrement.
Pour autant, les rigidités du
marché du travail en France et la
fragilité de la reprise poussent les
dirigeants d’ETI à privilégier la
promotion interne des compétences par rapport aux recrutements. Et, pour être performante,
cette quête des talents doit se professionnaliser. « Jusqu’à présent
les logiciels de gestion des talents
étaient surtout l’apanage des
grands groupes, mais aujourd’hui
ces outils sont adoptés par les ETI
et les PME, et le marché de la GPEC
[gestion prévisionnelle des
emplois et des compétences,
NDLR] est en pleine croissance »,
souligne Pascale Boyaval, directrice marketing, activité ressources humaines chez Cegid.
DR
r o u ve r e t f i d é l i s e r l e s
compétences sont un
enjeu majeur pour les
entreprises de taille intermédiaire (ETI), l’une des clefs de leur
compétitivité dans la bataille
concurrentielle qu’elles se livrent
entre elles et avec les grands
group es. Et cette guerre des
talents va s’intensifier au fur et à
mesure que la reprise économique se confirmera : 14 % des ETI
européennes estiment ainsi que
« le recrutement et la rétention des
talents constitueront les principaux défis pour l’année à venir »
(baromètre Sage Business
Index*).
En France, les ETI misent sur
l’attractivité de leur modèle – circuits hiérarchiques courts, responsabilité individuelle – pour
séduire les jeunes diplômés. Mais
elles doivent aussi « travailler
leur marque employeur » pour
attirer les bons profils, estime
Thierry Boukhari, directeur
délégué de Gifi, défend une
politique salariale visant à faire
progresser les collaborateurs.
Cartographier
les compétences
Ces outils permettent de cartographier les compétences et donnent aux salariés le moyen de
construire leur parcours de
mobilité en fonction des besoins
de l’entreprise. Le tout étant
accompagné d’un effort significatif de formation.
« Chez nous, il avoisine 4 % de la
masse salariale », explique
Thierry Boukhari, directeur délégué du groupe Gifi. Cette entreprise familiale créée par son
PDG, Philippe Ginestet, en 1981,
mise sur ses compétences internes pour assurer son développement. « Nous sommes installés
près d’Agen et cela peut paraître
difficile d’attirer chez nous de jeunes diplômés et encore plus de les
r e t e n i r, r e c o n n a î t T h i e r r y
Boukhari. Nous y parvenons dans
80 % des cas grâce à notre politique
salariale, à nos 200 métiers et à
notre capacité à faire progresser
nos collaborateurs. » Thierr y
Boukhari en est le parfait symbole. Entré comme stagiaire au
service paie en 2003, il a gravi
tous les échelons pour devenir
D R H e n 2 0 0 7 , a v a n t d ’ê t r e
nommé directeur délégué en
novembre dernier. « Depuis cinq
ans, nous pratiquons la GPEC
pour identifier les compétences
clefs en interne et évaluer les attentes de nos collaborateurs. Nous utilisons un logiciel dédié pour les
entretiens annuels de développement et un site Internet Gifi RH
talents permet aux salariés d’identifier les opportunités de mobilité
au sein du groupe. » Gifi, qui veut
accélérer son développement à
l’international, mise sur cette
excellence RH pour y parvenir,
qui lui vaut p our la seconde
a n n é e d ’ê t r e c e r t i f i é To p
Employers France par l’Institut
CRF. — Georges Lucien
* Etude réalisée par Populus auprès de
1.825 décideurs issus de moyennes
entreprises (plus de 100 employés) dans
17 pays, du 31 juillet au 28 août 2013.
ENTREPRISES FAMILIALES
24heurespour coacher
lesleadersde demain
Le groupe d’audit et conseil
Deloitte a réuni pour deux
journées d’échanges et de
formation des responsables
d’entreprises familiales.
Il est toujours bon pour un dirigeant d’entreprise de prendre une
bouffée d’oxygène, de s’offrir une
parenthèse pour réfléchir sur son
rôle, ses objectifs et ses perspectives. Mais les deux journées organisées récemment par le cabinet
Deloitte sous le titre « Les 24 heures des nouvelles générations »,
sont un peu particulières : elles
sont réservées à de jeunes dirigeants – ou futurs dirigeants –
d’entreprises familiales.
L’objectif ? « Leur permettre de
sortir de leur solitude. Les repreneurs familiaux sont souvent mal
perçus, parce qu’on s’imagine qu’ils
sont nés avec une cuillère en argent
dans la bouche. En réalité, la reprise
d’une entreprise familiale est souvent difficile : ils “en bavent” tous les
jours et se sentent prisonniers d’un
devoir de loyauté et de pérennité,
« Il est bon de
susciter le dialogue
entre la génération
en place et celle qui
est appelée
à reprendre. »
CHRISTOPHE SAUBIEZ
Associé expert entreprises
familiales chez Deloitte
sans pouvoir échanger sur le sujet.
Lors du séminaire, ils peuvent partager avec d’autres dirigeants
d’entreprise, qui vivent la même
expérience », explique Christophe
Saubiez, associé expert entreprises familiales chez Deloitte et
organisateur du séminaire, qui
s’est tenu en région parisienne. Si
la « nouvelle génération » a entre
25 et 40 ans, le public est en réalité
un peu plus large. « Les jeunes sont
contents d’être entre eux, mais il est
bon aussi de susciter le dialogue
entre les générations, de bousculer
les schémas établis entre la génération en place et celle qui est appelée à
reprendre », précise Christophe
Saubiez. Ainsi, on est à mi-chemin
entre le séminaire professionnel et
la « cousinade » : une quinzaine de
familles sont venues en « clan », à
2, 3 ou 4 avec un parent, des frères
et sœurs ou des cousins. C’est le cas
par exemple de Bertrand Lajugie,
directeur général délégué et représentant de la quatrième génération au sein du groupe Seeb (ingénierie et construction de
machines-outils – 30 millions de
chiffre d’affaires et 200 salariés
dans quatre filiales), venu avec
deux de ses cousins chercher « des
contacts et des témoignages pragmatiques et informels, au-delà des
formations par des experts »… Car
c’est bien là l’objectif. « Nous souhaitons créer les conditions d’un
échange fructueux entre les participants, qui sont réunis en huis clos.
Ils peuvent parler entre eux de leur
parcours, de leur aventure d’entrepreneur, mais aussi de leurs difficultés au sein de la famille », poursuit Christophe Saubiez.
AVEC RÉCYLUM, RECYCLER LES LAMPES
DE VOTRE ENTREPRISE, C’EST SIMPLE.
« Des pistes pour avancer »
Le programme du séminaire combine donc travail et détente. Côté
travail, des présentations techniques, sur la fiscalité et les évaluations d’entreprise, mais aussi des
ateliers et des tables rondes. A
l’ouverture « officielle », en milieu
de matinée, ils étaient ainsi une
centaine de participants pour
écouter les témoignages de quelques « stars » du « family business » comme Philippe d’Ornano
(Sisley) ou Antoine Mayaud (Association Familiale Mulliez) sur le
thème de « L’entreprise familiale :
comment inventer de nouveaux
modèles de croissance ? ». Au programme des festivités, de longues
soirées d’échanges, autour d’un
buffet, puis d’un verre de whisky
tardif (très tardif pour certains),
dans un cadre agréable mais sans
prétention.
« Nous avons rencontré des
modèles d’entreprises très différents, mais constaté que nos valeurs
étaient communes, conclue Bertrand Lajugie, qui est sorti du
séminaire conforté dans ses choix.
Un actionnariat familial très dispersé peut constituer une force pour
l’entreprise, à condition que la
structuration juridique repose sur
de bons principes et que la famille ne
soit pas un frein au développement
de l’entreprise. » Chez d’autres, la
réflexion est moins avancée. « Certains jeunes découvrent que leur cas
n’est pas unique. S’ils ne repartent
pas avec toutes les réponses, ils ont
au moins des pistes pour avancer »,
résume Christophe Saubiez. Fort
du succès de la rencontre, rendezvous est déjà pris pour l’année
prochaine. — Cécile Desjardins
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34 // ENTREPRENEUR
Mercredi 5 mars 2014 Les Echos
ANALYSE // Devant l’incapacité des banques, contraintes par un nouveau cadre réglementaire, à financer
des projets de moyen et long terme, les entreprises de taille intermédiaire se tournent vers d’autres solutions.
Financement : l’ère de la désintermédiation
C
’e s t u n e é v i d e n c e q u i
s’imp ose désormais à
tous les chefs d’entreprise : les banques ne prêteront
plus. Quand la reprise s’annoncera, et avec elle le retour aux
investissements, il faudra trouver
d’autres sources de financement.
« En raison de leurs nouvelles
contraintes réglementaires, les
banques devraient être moins en
mesure de financer à long terme,
même les meilleurs projets. Elles
doivent dès aujourd’hui mener une
réflexion sur la structure, les produits et les maturités de leurs
financements, devenus stratégiques », juge Emmanuel Gadret,
associé responsable régions chez
Deloitte. « La crise a montré qu’il
était risqué d’être dépendant d’un
ou deux partenaires bancaires traditionnels », confirme Alexandra
Krief, responsable des évaluations « mid-market » chez Standard & Poor’s.
Au cœur du problème ? Les
financements à moyen et long
termes, c’est-à-dire supérieurs
à s i x a n s . Ave c u n p a r a d oxe
terrible : « Plus grand sera le
financement, plus il sera facile à
o b t e n i r… , r é s u m e N a d i n e
Veldung, associé gérant chez
Oddo Corporate Finance. Les
investisseurs jugent que les petits
financements manquent de liquidité, et les frais d’étude, de structure, etc. sont identiques quelle que
soit la taille du financement. » Audelà de 200 millions d’euros, le
marché obligataire est actuellement une solution attractive.
« Les investisseurs se bousculent
sur ces montants de dette, que
fonds prend alors des airs de
c a m p a g n e m a r ke t i n g g r a n d
public, ce qui peut constituer un
avantage pour les entreprises qui
ont la même cible commerciale.
Les groupes immobiliers Capelli
ou Réalités ont ainsi respectivement levé 15 et 7 millions d’euros
(en décembre 2012 et juin 2013).
Mais, outre les contraintes liées
au visa de l’AMF, ces opérations
comportent un risque « d’exécution ». « Il y a – jusqu’au dernier
moment – un risque que l’opération ne se fasse pas car le marché
n’est jamais garanti… », juge
Nadine Veldung. De quoi expliquer leur relatif échec : il n’y a eu
en tout et pour tout que 4 IBO en
deux ans.
La grande majorité
des entreprises
françaises mise
sur le développement
des Euro PP…
10 investisseurs professionnels
(d e t y p e a s s u r e u r s o u f o n d s
d’investissement) s’engagent – en
amont et dans une négociation de
gré à gré – à financer l’entreprise,
sous forme d’obligations ou
de prêt.
l’entreprise soit de qualité “investissement grade” ou inférieure »,
estime Nadine Veldung. De fait, le
marché de la dette « high yield »
(entreprises notées BB ou moins)
se porte très bien : fin janvier, le
spécialiste des pièces automobiles Autodistribution (1,2 milliard
de chiffre d’affaires) y a par exemple levé 240 millions d’euros sur
cinq ans au taux de 6,5 %.
Pour un financement moins
élevé, mieux vaut se tourner vers
les placements privés : entre 3 et
« Des financements
plus flexibles »
Il en existe trois principaux types.
Les USPP, tout d’abord. « Très
mature, le marché américain des
USPP permet d’obtenir des finan-
Une charte pour accélérer le développement
des placements privés
C’est sous le nom de Charte de l’Euro PP
que trois associations professionnelles,
l’Afte (des trésoriers d’entreprise), l’Af2i
(des investisseurs institutionnels) et l’Amafi
(marchés financiers) ont publié mi-février
leurs recommandations pour de « bonnes
pratiques sur le marché des Euro PP ».
Le texte propose un « cadre de relations »
entre émetteurs et investisseurs, ainsi
que des modèles juridiques types pour
ces opérations, ce qui devrait permettre
à ces financements d’être plus facilement
et plus rapidement montés. « Les lignes de
conduite que nous avons posées devraient
permettre de mettre en place un tel
financement en une dizaine de semaines »,
estime Hervé Labbé, directeur de la salle
des marchés et des études
macroéconomiques du groupe Orange
et représentant de l’Afte au sein du groupe
de travail qui a établi cette charte.
Toutefois, le cadre ne se veut pas trop rigide.
« Il faut, pour le moment, laisser la place à
la négociation entre acteurs : d’une entreprise
à l’autre, les situations sont trop différentes »,
ajoute Hervé Labbé.
Au t a n t d i r e q u e l a g r a n d e
majorité des entreprises françaises mise aujourd’hui sur le développement plus récent des
Euro PP, marché sur lequel les
ETI ont déjà levé quelque 7 milliards d’euros entre 2012 et 2013.
Ses avantages ? « Les financements sont plus flexibles et peuvent prendre la forme de prêts ou
d’obligations, cotées ou non. Ils
sont accessibles dès 10 millions
d’euros sur cinq, sept, voire dix
ans », explique Alexandra Krief.
Certains tablent sur quelque
10 milliards de financements
Euro PP par an, grâce notamment
à un changement réglementaire
inter venu l’été dernier et qui
devrait permettre aux assureurs
français d’accroître leur mise sur
ce marché. Surtout, émetteurs et
investisseurs viennent de se mettre d’accord sur un « cadre de
référence » qui devrait faciliter le
développement de ces financements (voir ci-contre).
Au-dessous de 10 ou 15 millions
d’euros ? Les entreprises peuvent
se tourner vers les particuliers et
leur proposer des obligations à
travers un IBO (pour « initial
bond offering »). La levée de
cements essentiellement obligataires, auprès d’investisseurs qualifiés, d’un montant minimal de
50 millions d’euros, sur cinq à
quinze ans », explique Alexandra
Dimitrijevic, responsable de la
notation des entreprises en
Europe chez Standard & Poor’s. Si
des entreprises comme B onduelle ou plus récemment Neopost ont régulièrement fait appel
à c e m a r c h é , i l n’e s t p a s
forcément facile d’accès. « La
documentation est importante et
doit correspondre aux formats
américains, avec notamment l’établissement des comptes selon les
normes IFRS. C’est donc un mode
de financement réservé aux entreprises qui ont une activité importante en dollars ou qui bénéficient
d’une bonne notoriété sur le marché américain », ajoute Alexandra Dimitrijevic. Seconde solution, le marché allemand, dit des
« Schuldschein », essentiellement constitué de prêts. « Il offre
des financements de trois à sept
ans, dès 25 millions d’euros », précise Alexandra Krief. Mais, là
aussi, mieux vaut avoir une activité – et une réputation – sur le
marché allemand.
… Marché sur lequel
les ETI ont déjà levé
quelque 7 milliards
d’euros entre 2012
et 2013.
Reste alors la solution des
fonds communs de placement
obligataire, de t yp e Novo ou
Micado. Si le premier peut apporter jusqu’à une cinquantaine de
millions d’euros par opération, le
second vise plutôt entre 5 et
10 millions d’euros. Mais encore
faut-il répondre aux critères fixés
par ces structures : s’afficher
« entreprise de croissance » est
indispensable pour séduire Novo
(qui a récemment participé au
placement privé réalisé par le
groupe MK2). Micado, de son
côté, cible les « ETI françaises
cotées mais non notées », ce qui a
permis à VM Matériaux d’émettre fin décembre un emprunt
obligataire de 3,8 millions
d’euros (à taux fixe de 6 % et remboursables in fine en décembre 2019). Chacun peut donc finir
par trouver chaussure à son
pied… même si les petites pointures sont plus rares.
— Cécile Desjardins
IBO : Réalités, 7 millions d’euros à 9 % sur six ans
USPP : Neopost emprunte 50 millions de dollars sur six ans
Spécialisé dans l’immobilier neuf, le groupe Réalités a mené
en juin 2013 la plus récente « initial bond offering » (IBO)
réalisée en France. C’était aussi la première à concerner
une société non cotée. L’entreprise, qui visait 10 millions
d’euros, en a finalement obtenu un peu plus de 7,
à travers l’émission de 72.805 obligations au prix unitaire
de 100 euros, à destination d’investisseurs particuliers
ou institutionnels. Ces titres sont cotés sur le marché Alternext
de Nyse Euronext à Paris, leurs intérêts étant versés
semestriellement, en juillet et en janvier, depuis janvier dernier.
Créé en 2003, le groupe a réalisé en 2012 un chiffre d’affaires
de 42 millions d’euros.
C’est en complétant un placement privé de 175 millions de dollars, mis
en place en juin 2012, que le groupe de traitement de courrier Neopost
a levé fin janvier 50 millions de dollars. Conclu en octobre 2013, au taux
variable de Libor 3 mois + 1,75 %, le financement a pris la forme d’une
dette senior non garantie auprès d’un investisseur unique. La mise à
disposition des fonds a été réalisée le 23 janvier. Le directeur financier
de Neopost, Jean-François Labadie, a jugé que, « avec cette nouvelle
tranche complétant notre placement privé, nous continuons à profiter
des opportunités qu’offre le marché américain pour obtenir un
nouveau financement dans de très bonnes conditions ». Neopost, coté
au SBF 120, a affiché un chiffre d’affaires de 1,07 milliard d’euros en
2012, pour un endettement de quelque 800 millions à fin juillet 2013.
Altrad
Groupe Realités
Jean-François Labadie/Photo DR
Trois exemples récents de financements alternatifs
Euro PP : Altrad obtient 100 millions d’euros
auprès de 3 investisseurs
Numéro un européen des échafaudages, le groupe Altrad a émis,
en octobre 2013, 100 millions d’euros d’obligations par le biais
d’un placement privé Euro PP, avec une maturité de 7 ans
et pour un coupon de 4,4 %. Trois investisseurs – Natixis
Assurances, le fonds Novo et Amundi – se sont engagés
dans le financement de l’entreprise, qui devrait cette année
dépasser les 700 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Le groupe, qui a ouvert son capital à hauteur
de 25 % au FSI en 2011, souhaitait ainsi diversifier
ses sources de financement, jusqu’à présent
exclusivement bancaires.
ENTREPRENEUR // 35
Les Echos Mercredi 5 mars 2014
STRATÉGIE // Partir à l’étranger est un facteur d’accélération de croissance. Les ETI réalisent
un tiers des exportations françaises. Mais certaines manquent d’ambition.
Au-delà
des clichés
Etre plusconquérant
à l’international
LA
CHRONIQUE
de Philippe
Bloch
Yves Vilagines
[email protected]
a q u e s t i o n n ’e s t p a s :
« Combien de divisions ? ». Près de 90 % des
ETI sont exportatrices, soit 4.100
en 2013, selon le dernier comptage des Douanes. La question est
plutôt celle de l’intensité, de la
détermination, de l’ambition et
de la stratégie. « Beaucoup de
PME de viennent des ETI avec
l’international », assure Arnaud
Leurent, consultant en organisation et stratégie. De même, un
bon nombre deviennent de grandes entreprises en intensifiant
leur présence partout dans
le monde.
L
Volot regrette cependant que
trop d’entreprises françaises
subissent l’international faute de
stratégies de conquête.
Au Medef, il a été l’artisan d’un
plan pour y remédier. Baptisé
Stratexio, il doit permettre aux
18.000 entreprises qui réalisent
de 20 à 30 % de leur chiffre d’affaires à l’export d’aller encore plus
loin. « Il s’agit de passer de l’état de
sur vie à l’état de conquête »,
assure Jean-Claude Volot. Olivier
Dhonte est le fondateur et président de Viseo, société de solutions de gestion informatiques.
Au début, pour suivre ses clients
à l’étranger, l’entreprise dépê-
L’export, un premier pas
L’ancien vice-président du Medef
Jean-Claude Volot décrit le parcours classique : « Au-delà de
100 personnes, une volonté concomitante d’innovation et d’international émerge. » Le patron de la
PME toulousaine Dedienne
Aerospace détaille les trois volets
de l’international : les achats,
l’export et l’implantation. « Le
“sourcing” de fournisseurs est un
premier pas nécessaire, un bon
moyen de se frotter aux procédures
de dédouanement par exemple. »
Puis vient l’export, souvent à la
demande de clients, par opportunisme, voire l’implantation par
nécessité dans des pays à bas
coûts, poussée par les donneurs
d’ordre. Ainsi, lorsque à la fin des
années 1980, Plastivaloire investit dans une première usine en
Pologne, c’est pour ne pas perdre
le marché des façades plastiques
de petits téléviseurs dont son
client Philips délocalisait la production. Le patron Patrick Findeling a suivi. Aujourd’hui, la moitié des 24 usines du groupe de
plasturgie sont situées à l’étranger. Mais, une fois implantée,
l’entreprise en profite pour « grapiller » des clients. Jean-Claude
32 %
DES EXPORTATIONS
(EN VALEUR)
Les ETI exportatrices sont 4.100
selon les Douanes et réalisent
un tiers des exportations
françaises. En comparaison, les
360 grandes entreprises
exportatrices ont réalisé 40 %
des exportations l’an dernier.
`
SUR
LE WEB
Bâtir une stratégie
•à l’international,
les conseils
d’Arnaud Leurent
sur lesechos.fr
Chine : l’expérience
de Moret industries et les
conseils de Dominique Jolly
sur lesechos.fr
Elizabeth Ducottet
portera le flambeau des ETI
françaises sur lesechos.fr
•
•
chait quelques expatriés. Par la
suite, elle a créé des filiales locales, par exemple aux Etats-Unis
en 2005 pour accompagner
L’Oréal. En parallèle, Viseo a créé
une filiale de développement
informatique au Maroc pour
réduire ses coûts. Là où elle est
présente, Viseo souhaite maintenant s’attaquer au marché local.
« Nous avons un savoir-faire, des
références, une équipe, une organisation, pourquoi ne pas avoir une
stratégie plus agressive ? » reconnaît Olivier Dhonte.
Répliquer les succès
Passer de quelques clients locaux
à l’ouverture d’un nouveau pays
est une autre frontière à franchir.
Et le plus souvent par croissance
externe. Les ETI sont les mieux
armées : un savoir-faire ou un
produit éprouvé, et une surface
financière suffisante. Le consultant Arnaud Leurent recommande de faire preuve de méthodologie pour répliquer le succès.
A l’image de Solutions30, société
d ’a s s i s t a n c e à l ’ i n s t a l l a t i o n
d’équipements technologiques.
Après avoir analysé son succès en
France, le fondateur Gianeppi
Fortis a cherché « des marchés
avec la même structure pour faire
un copier-coller ». L’entreprise de
95 millions d’euros de chiffre
d’affaires est aujourd’hui implantée en Italie, au Benelux et en
Allemagne.
La dernière étape est celle de la
globalisation, illustrée par ce que
Gabriel Attias, asso cié chez
Deloitte appelle « la stratégie des
pays à rebond ». Force est de
constater que conquérir l’Afrique
depuis la France avec une structure de coûts européens est illusoire. Gabriel Attias recommande d’investir d’ab ord au
Maroc puis de s’en servir comme
plate-forme de conquête sur le
continent. Et ainsi du Vietnam
pour l’Asie ou de l’Argentine pour
l’Amérique latine. n
’il est un cliché qui
colle trop souvent
à la peau des entrepreneurs français, c’est bien celui
du malin plaisir que prendraient certains à se séparer
de leurs collaborateurs à la
moindre occasion ou à manquer d’ambition quant à la
croissance de leur entreprise.
Au prétexte que la dictature
du court terme pousse parfois
les dirigeants de grands groupes à tailler dans leurs effectifs
pour satisfaire l’appétit insatiable des analystes financiers
et faire monter leur cours
de bourse, tous ne seraient
que de cyniques personnages
motivés par le seul profit
financier. Et parce que la
France manque cruellement
d’ETI si on la compare à l’Allemagne, ils ne seraient que des
petits joueurs incapables de se
hisser un jour dans la cour des
grands. C’est oublier un peu
vite la nature même de l’esprit
d’entreprise, qui consiste à
décider un jour qu’un projet
forcément fou mérite d’être
vécu et surtout partagé avec
une équipe d’hommes et de
femmes prêts à conquérir le
monde à nos côtés.
S
Meralliance est spécialisé dans les poissons fumés. Photo DR
Meralliancesécurise safilière
saumon àl’étranger et en France
Franco-française jusqu’en
2008, l’entreprise bretonne
a élargi sa gamme et
ses bases, grâce à ses usines
en Pologne et en Ecosse.
En 1993, lorsque Gilles Charpentier reprend Meralliance, l’entreprise spécialiste des poissons
fumés, créée vingt-deux ans plus
tôt à Quimper, perd le quart de
son chiffre d’affaires de 18 millions d’euros. Recentrée sur les
m a r q u e s d e d i s t r i b u t e u r, l a
société retrouve la forme, mais
reste cantonnée à la France, ayant
juste, depuis 2001, un acheteur en
Norvège, haut lieu de l’élevage de
saumons. La véritable première
incursion à l’international est en
Pologne, où l’entreprise sous-traitait déjà sa gamme premier prix.
Meralliance y rachète une usine
en 2008, qui aujourd’hui emploie
170 personnes et conditionne
2.500 tonnes de poissons pour la
France, le Benelux et l’Allemagne.
Puis Meralliance investit en
Ecosse, autre haut lieu de production, dans une usine plus haut de
gamme et pour y servir surtout le
marché britannique. « Ma stratégie est de remonter vers la matière
première, de créer une filière. Car
nous sommes pris entre des producteurs très concentrés en Norvège et des distributeurs eux aussi
très puissants », avoue Gilles
Charpentier, le patron de Meralliance, qui emploie 950 salariés et
réalise 155 millions d’euros de
chiffre d’affaires.
Pour sécuriser l’accès à la ressource, l’entreprise va investir
dans une ferme d’élevage de saumons en Bretagne. Elle renforcera sa stratégie export hors
d’Europe depuis sa base britannique pour exporter du saumon
d’Ecosse. — Yv. V.
Retrouvez l’intégralité de cette
chronique sur lesechos.fr
ATTIRER LES MEILLEURS TALENTS POUR L’ INTERNATIONAL,
C’EST L’EFFET UBIFRANCE.
Atalianpart àlaconquête de deux
nouveaux marchés chaque année
Après avoir investi en
Europe, l’entreprise
toulousaine de « facility
management » aborde la
Thaïlande et l’Indonésie.
Une stratégie rodée
La stratégie d’abordage puis de
développement est rodée. La Turquie est un cas d’école. L’implantation date de 2012 avec le rachat
d’une société de nettoyage de
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Plus de 8 OOO V.I.E contribuent actuellement au succès des entreprises françaises dans 13O pays.
Franck Julien, petit fils du fondateur et actuel président
du directoire d’Atalian, privilégie la croissance externe. Photo DR
10 millions d’euros de chiffre
d’affaires. Le mois dernier, Atalian a acquis une entreprise de
maintenance technique de
13 millions d’euros de chiffre
d’affaires. Et le groupe a déjà en
ligne de mire une cible dans la
sécurité. Après la Turquie, les
prochains pays d’implantation
sont l’Indonésie et la Thaïlande.
« En Europe, nous concentrons
nos positions, mais nous ne créons
plus de points d’implantation.
Nous misons sur le très grand
export où la croissance est plus
forte et les taux de rentabilité
meilleurs. Notre objectif est de tripler notre chiffre d’affaires à
l’international d’ici à trois ans avec
l’implantation dans deux nouveaux pays chaque année », assure
Franck Julien. Pour tenir cet
engagement, l’entreprise dispose
d’une cellule interne audit et
acquisitions chargée de répérer
les cibles et de faire les premières
approches. Les décisions de prises de participation sont, elles, du
ressort d’un comité d’investissement où siègent tous les patrons
de divisions du groupe.
— Yv. V .
Pour toute information :
[email protected] ou
0 810 659 659
COÛT D’UN D'APPEL LOCAL
L’Agence française pour le développement international des entreprises
* Décision n° 16 du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi...
« Faire progresser le nombre de VIE de 25% en 3 ans »...
**rapprochement entreprise / candidat.
Au rythme actuel, Atalian ne sera
bientôt plus une ETI : le chiffre
d’affaires atteint 1,3 milliard
d’euros, dont 200 millions réalisés à l’international dans 16 pays,
e t l ’e f f e c t i f d é p a s s e l e s
65.000 salariés, dont 22.000 à
l’étranger… Créée en 1944 par
Paul Julien sous le nom de TFN,
l ’e n t r e p r i s e a p r o c é d é à
200 acquisitions en vingt ans,
surtout en France, et fait ses premiers pas à l’étranger il y a six ans,
pour suivre ses clients, en créant
des filiales en Espagne (revendue
depuis), en Slovaquie et en République tchèque. « Créer ex nihilo
prend trop de temps, explique
Franck Julien, petit-fils du fondateur et actuel président du directoire. Désormais, on privilégie la
croissance externe. On recherche
un entrepreneur, souvent du nettoyage, qu’on rachète à 51 % et puis,
petit à petit, on consolide nos
positions. »

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