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L’«ancien» nouveau Monde
En se gardant de toute originalité, cette splendide région a réussi à préserver son authenticité. Ici tout est simple et
vrai: on compose harmonieusement avec une nature crue et pure. Un mode de vie qui, paradoxalement, lui permet
de rester le creuset du Nouveau Monde, celui du temps des premiers colons, vers lequel les plaisanciers se tournent
de plus en plus pour nourrir leur passion pour la mer et ses secrets de beauté.
Texte : Sandrine
Moirenc
photos : Camille Moirenc
7h 00 le matin. Vision monochrome. Une passerelle
de bois s’avance dans l’eau pour bientôt disparaître
dans l’épais brouillard. On arrive à distinguer tout de
même, à une certaine hauteur, le ponton flottant qui
lui est rattaché et autour duquel un nombre incalculable de barquettes y sont agglutinées. La scène a
quelque chose de doux, de rassurant, une idée de
bercail, mais elle est également à double tranchant: il
n’en faut pas beaucoup à l’imagination pour épicer le
décor d’un arrière-goût de pesanteur inquiétante…
Une légère lumière diffuse réussit à s’inscrire dans la
brume matinale: c’est un lampadaire. Juste à côté, on
devine une cabane de pêcheurs dont la façade s’est
parée d’une multitude de tâches de couleurs. A y regarder de plus près, ce sont des bouées de bois peint
qui y sont accrochées. Et puis c’est un bruit de corne
de brume, venant du large, qui perce le silence… ça
sent l’océan. Premier signe de vie: deux pêcheurs de
homards s’activent sur le pont pour charger leurs casiers. Quelques mots échangés, de l’américain teinté
d’un accent si particulier et le décor est planté: nous
sommes dans le Maine, ce vaste Etat de la Nouvelle
Angleterre ancré dans le Nord-Est des Etats-Unis. Le
petit port de Kittery, frontière entre le New Hampshire et le Maine, s’éveille enfin. Premier cliché de cette
région à la beauté crue dans tout ce qui la compose,
paysages et hommes.
Retour sur le parking. L’odeur fumante d’un «bon» café
américain, mêlé de fragrances de hot dog et de soupe
chaude, s’échappe délibérément du Frisbee’s 1828
Market, l’un des plus vieux general store du Nouveau
Monde, si l’on en croit l’historique des guides locaux.
D’ici la vue sur la baie révèle un bon nombre de
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voiliers. Un peu plus loin, à York Beach, le brouillard
ne s’est toujours pas levé sur le joli phare de Cape
Nuddick. A en juger par le nombre de charmants cottages qui frangent les eaux froides de l’Atlantique
Nord, l’endroit a tout l’air d’une fameuse station balnéaire bon chic bon genre. Encore quelques miles et
c’est le beau village de Ogunquit qui offre en pâture
aux peintres sa fameuse Perkins Cove, ses boutiques
et restaurants de poissons s’étalant le long du petit
port dominé par son pittoresque pont levant…
Cabotage
Les baies et les ports intimes s’enchaînent ensuite, sur
la côte, peuplés de nombreux voiliers et de yachts. On
peut maintenant avoir une idée générale de la côte du
Maine et ses charmants villages: ce résidu montagneux et forestier des Appalaches du Nord, couru par
plus de 2500 lacs et 5000 rivières se termine dans
l’océan, lui offrant un littoral escarpé et déchiqueté à
souhait pour former de nombreuses péninsules abritant des secrets de vie et de pureté, des confettis
d’îles, plus de 3000, un inestimable paradis marin.
Ce sanctuaire préservé est devenu un lieu de villégiature incontournable pour les riches américains, les
touristes en mal de grands bains de nature, d’authenticité, les fanas de la navigation de plaisance. Le Maine
a d’ailleurs une riche histoire qui s’inscrit dans la tradition de la construction navale et de l’exploitation
du bois. A cela s’ajoute une forte activité de pêche
avec comme spécialité, celle du homard. Là également, on est très vite plongé dans l’ambiance. Tous
les villages, ou presque, sont des villages de pêcheurs.
Sur les ports, les casiers piégeurs s’amoncellent en
même temps que les barriques remplies de harengs,
ces poissons qui serviront d’appât pour le très prisé
crustacé. En bordure des quais, le homard barbote
dans les bassins des lobster houses, ces «boutiques/
Snack» qui proposent d’acheter ou de consommer sur
place son lobster garanti tout frais.
Plus au Nord, Kennebunkport se découvre, adorablement niché entre la rivière du même nom et l’Atlantique: jolis cottages de bois aux couleurs acidulées,
tous fleuris, charmantes échoppes aux vitrines avenantes déclinant le homard en peluche, en porte-clés,
en stylos et autres. Le long du port, de prestigieux
gréements mouillent à côté de nombreux lobster
boats, ces bateaux à homards aux lignes si particulières et dont les amoureux du nautisme en ont également fait une version pour la plaisance de luxe, style
Riviéra du Maine. Juste avant le pont qui enjambe la
rivière on apprécie de déguster, à la bonne franquette,
ce que la mer a apporté: chichis de coquillages et
crustacés en tout genre, encore made in Le Maine! A
côté, on vend des homards et des coquillages à
­l’emporter. L’établissement a acquis ses lettres de
noblesses en devenant le principal fournisseur des
Bush, qui ont leur maison présidentielle d’été juste en
bordure du Walker’s Point. Au large, on aperçoit le
phare de Goat Island, en bout de la pointe qui mène
à Cape Porpoise, le dernier à avoir été automatisé dans
le Maine, en 1990.
La ville la plus photographiée
Le homard est l’une des
principales sources de revenu
de la région.
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Portland, la plus grande ville du Maine, l’antre natal
de Stephen King, marque le début de la superbe baie
de Casco. Ce grand port spécialisé dan la pêche au
homard s’est également développé au 18e siècle,
grâce à la construction navale. Un peu plus haut encore, on découvre, perché sur la falaise, le Portland
Head Light, l’une des tours de lumières qui signalent
la ville, la plus vieille de la côte – 1790 -, mais aussi la
plus peinte et photographiée des Etats-Unis. Voilà
bien un autre centre d’intérêt qui s’ajoute aux raisons
pour lesquelles Le Maine est une destination absolument magique pour la navigation… Les phares, ils sont
au nombre de 65, font également partie intégrante
du voyage, de la découverte.
Et puis le littoral se fait plus intime, plus grave, plus
déchiqueté. Il se dessine comme une main déployée
ancrant ses innombrables doigts dans l’océan, autant
de péninsules à explorer si l’on barre avec la marée.
Plurielles et singulières, elles y abritent des villages de
pêcheurs de homard plus ou moins retranchés, authentiques, selon l’endroit. Avant d’atteindre la ville
de Bath, d’où l’on peut remonter la belle rivière de
Kennebec à l’intérieur de l’Etat, Bailey Island, bien que
muni du traditionnel ascenseur à casiers attendant
les bateaux à décharger, s’est investi dans le business
package: les ferries de Portland traversent Casco bay
pour mener ces messieurs dames sur les terrasses du
port déguster du homard bouilli en veux-tu en voilà!
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Harpswell, plus authentique, a échappé à la grande
ruée, même si, à la longue, elle a accepté de prestigieuses villégiatures à côté des maisons de pêcheurs.
Etape suivante: Boothbay Harbor, haut lieu de rassemblement de voiliers et de régates qui n’ont pas
manqué à rendre les ports du Maine célèbres. Il en est
ainsi tout le long de la côte. Un bond de quelques
miles et c’est la splendide baie de Christmas Cove qui
réfléchit l’image du joli port du même nom. Ici tout
est plus reculé, intense. En témoignent les incroyables
criques sauvages qui se dévoilent à chaque avancée.
Autre moment fort du voyage, la rencontre avec le
seigneur du Maine, le phare de Pemaquid Point perché
sur des falaises incroyablement griffées par le déchainement de l’océan, lorsque celui-ci fricote avec les
énormes tempêtes! Un peu plus haut, on y découvre
Friendship et Port Cycle, deux joyaux rivalisant d’authenticité: ici on a atteint le cœur du Maine côtier. A
cette heure du jour, les casiers sont amassés le long
des pontons reliés aux maisons des pêcheurs. Tout
est calme et volupté. Aux lueurs tombantes, les lobsters boat barbotent pour un repos bien mérité, honorés par un soleil couchant embrasant également,
Infos
Climat: En été, grâce à l’influence de l’Atlantique, les températures sur la côte
varient entre 15° C et 25° C. A l’intérieur des terres, elles peuvent atteindre les
32° C. En automne, l’été indien, les forêts flamboyantes offrent un spectacle
époustouflant.
Location de bateaux: Diverses possibilités de louer un bateau, qu’il s’agira de
choisir en fonction des besoins et du programme. Les principales adresses se
trouvent à Bootsbay Harbor (Midcoast Boat Rentals), Rockland (Midcoast Yacht
Sales and Rental und Bay Island Yacht Charters & Sailing) ou encore à Southwest
Harbor (Manset Yacht Service, Mansell Boat Rental Company).
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non loin de là, le phare de Marshall Point qui abrite
un intéressant musée sur l’histoire maritime locale.
La petite bourgade de Rockland – qui organise le
lobster festival chaque année - est un autre spot pour
la pêche au homard. Sur le port, l’occasion est donnée
d’entamer la discussion avec les pêcheurs: «un bon
lobsterman, doit penser comme un homard, il doit
connaître ses habitudes et l’environnement dans lequel il prospère!»… des secrets généreusement livrés
dans le brouhaha d’un vol effréné de mouettes espérant chiper un ou deux harengs trainant sur le quai.
En face, l’île de Vinalhaven diffuse ses charmes et ses
filets sur tout ce qu’elle attire, homard ou plaisancier!
Et puis, dans un dernier élan d’enthousiasme, la ville
de Camden, station touristique du Maine décorée de
maisons de capitaines datant du 19e siècle, et d’un
magnifique port accueillant voiliers et yachts tout
luxe, se picore des yeux avant une retraite finale dans
l’antre de la perle littorale, le Parc National d’Acadia
où il ne faudra pas manquer le coucher de soleil sur
la baie depuis Cadillac Mountain. Ici encore rien n’a
changé, la pandémie du modèle de consommation
américain n’a pas eu raison du Maine bien qu’elle ait,
depuis longtemps, réussi à traverser l’Atlantique…
KANADA
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