Régimes de change fixes et ajustables

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Régimes de change fixes et ajustables
REGIMES DE CHANGE FIXES ET AJUSTABLES:
LES LEÇONS DES EXPERIENCES TCHEQUE ET SLOVAQUE
Guergana STANOEVA*
Introduction
Les Républiques Tchèque et Slovaque (ainsi que leur prédécesseur commun la
Tchécoslovaquie) ont été parmi les premiers pays de l’Europe de l’Est à avoir opté pour
un régime de change fixe (mais ajustable) au début de la transition économique. Les
motivations derrière un tel choix sont largement étudiées dans la littérature économique.
Ce qui est moins analysé cependant c’est la compatibilité des régimes de change fixes
avec la politique monétaire de ces pays. Un des principaux enseignements du triangle
d’incompatibilité de Robert Mundell stipule que les régimes de change fixes stricto senso
sont incompatibles avec une politique monétaire autonome dans un monde ouvert aux
mouvements de capitaux. Pourtant la théorie nous indique qu’il est possible d’avoir « un
peu » des trois « ingrédients », i.e. une politique monétaire relativement autonome, avec
un taux de change limité dans ses mouvements par des bornes plus ou moins étroites et
une libéralisation financière modérée. La tentation de pratiquer une telle politique est
grande, notamment dans les pays qui libéralisent progressivement leurs marchés de
capitaux comme l’a été le cas des pays de l’Est en question. Le bon « dosage » de chacun
de ces trois ingrédients n’était pas évident vu la faible expérience dans la matière de ces
pays. Cependant une politique « mixte » semblait appropriée pour plusieurs raisons que
nous évoquons dans la première partie de notre article. En Tchéquie et en Slovaquie cette
politique s’est traduite par l’adoption d’un double objectif intermédiaire de la politique
monétaire : celui du taux de change et de la masse monétaire.
Dans la deuxième partie de cet article nous tâchons d’analyser l’impact de cette
politique sur deux des principales variables économiques (inflation et taux d’intérêt)
directement liées au choix de régime de change fixe en Tchéquie et en Slovaquie. Nous
partons donc de la présomption que l’objectif final prioritaire des deux pays a été (et
continue de l’être) la stabilité des prix. Plus précisément, si la politique menée par les
autorités monétaires est crédible, l’inertie de l’inflation doit être éliminée pour permettre
à l’inflation domestique de converger vers l’inflation du pays d’ancre. Nous vérifions si
tel est le cas en utilisant une version adaptée du modèle théorique développé par Edwards
(1992). Le modèle économétrique que nous proposons est moins restrictif que le modèle
de base car nous le définissons comme un processus ARMA(p, q). Puis nous utilisons la
procédure de Box-Jenkins pour déterminer la forme exacte de ce processus pour chacun
des pays considérés.
*
ATER, LAREefi, Université Montesquieu – Bordeaux IV, Av. Léon Duguit, 33608 Pessac Cedex ;
E-mail : [email protected]
En ce qui concerne l’évaluation de la crédibilité du couple régime de change –
politique monétaire en matière de taux d’intérêt, nous nous basons sur le test proposé par
Svensson (1990, 1991). L’idée principale de ce test est que sous un régime de change
complètement crédible et sous l’hypothèse de mobilité parfaite des mouvements des
capitaux, le taux d’intérêt domestique doit se situer dans la bande définie par les bornes
des taux de rémunération domestique effectif sur les investissements étrangers. Si le taux
domestique ne se situe pas dans cette bande et sous certaines autres conditions, la
crédibilité du régime de change est mise en question. Nous développons ce raisonnement
plus en détails dans notre article.
Nous terminons cette étude par un résumé des principaux résultats et conclusions.
1. La politique de change fixe de la République Tchèque et de la Slovaquie –
préoccupations initiales et expérience pratique
L’analyse traditionnelle montre que dans une situation de libre mouvement des
capitaux, le ciblage direct de l’inflation et le ciblage intermédiaire des agrégats
monétaires ne sont pas compatibles avec un régime de change rigoureusement fixe. De
même, le régime de change fixe n’est pas compatible avec une politique monétaire
autonome. Ce sont en effet les principaux enseignements du triangle d’incompatibilité de
Robert Mundell. Alors, pourquoi la République Tchèque et la Slovaquie n’ont pas opté
pour un régime de change de coin dès le début de la transition? Une politique « mixte »
semblait appropriée pour plusieurs raisons. Les plus importantes sont les suivantes :
La première concerne la faible ouverture initiale des marchés de capitaux qui
permettait la combinaison d’une politique de change stable avec une politique monétaire
autonome. En même temps la restructuration de l’économie nécessitait des capitaux
étrangers d’où l’intérêt d’ouvrir progressivement mais pas très lentement la porte aux
investisseurs étrangers. D’autant plus, que les pays qui traînaient derrière risquaient de
perdre des opportunités importantes face aux pays voisins – concurrents pour ces mêmes
capitaux. La crédibilisation d’un tel engagement nécessitait l’ouverture non seulement de
la porte d’entrée mais aussi celle de la sortie. L’environnement dans lequel évoluait la
politique monétaire et de change des pays de l’Est était donc par définition un
environnement dynamique.
La deuxième considération porte sur les gains d’une politique monétaire
totalement autonome qui sont souvent illusoires. Plus les marchés financiers sont
intégrés, moins il est possible d’isoler la politique monétaire domestique des mouvements
internationaux des capitaux. L’essai de s’isoler peut aboutir à une volatilité excessive du
taux de change avec des avantages au niveau d’autonomie de la politique monétaire
relativement modestes. D’où l’intérêt d’utiliser l’ancrage externe comme objectif
intermédiaire prioritaire.
La troisième considération porte sur la nécessité d’avoir des mains libres quant au
recours aux déficits budgétaires. La dépense publique est difficile à réduire (et les impôts
à augmenter) au moment où le système de sécurité sociale de l’époque communiste vient
de s’écrouler, pour ne pas parler de la nécessité de moderniser l’infrastructure nationale.
La pression budgétaire rend donc difficile la décision de l’adoption d’un régime de
change fixe stricto senso qui exclut tout dérapage budgétaire.
2
La quatrième considération porte sur la nécessité de maintenir la compétitivité prix des produits exportés. Un tel objectif se trouve menacé par le processus
d’appréciation du taux de change réel qui accompagne les régimes de changes fixes et
non ajustables.
Le jonglage entre ces objectifs et la nécessité de réduire le taux d’inflation a du
amener les autorités tchécoslovaques1 à adopter le régime de change fixe (mais ajustable)
dès le début de la transition. Le taux de change a été déterminé par rapport à un panier de
cinq devises: DEM (45.52%), USD (31.34%), ATS (12.35%), CHF (6.55%), GBP (4.24%). En soi, ce
choix ne constituait pas une rupture nette avec le passé car la couronne tchécoslovaque a
été officiellement rattachée à un panier avant 1990 (Hrnčiř 1999). En même temps, avant
de trouver sa valeur de référence de 28 CZK pour un USD au 1er janvier 1991, la monnaie
a été dévaluée à 4 reprises en 19902. Il n’y avait bien sûr aucun indicateur quant à la
conformité de ce taux de change avec le taux d’équilibre car ce dernier s’avérait
impossible à déterminer avec précision à l’époque. Selon Hrnčiř (1999) la dévaluation ne
reflétait pas en entier les sentiments du marché car les trois premières dévaluations se
sont effectuées avant la libéralisation des prix et seulement la quatrième est considérée
comme une « vraie » dévaluation. Cela étant, il y a un consensus général (Hrnčiř (1999),
Horvath et Jonas (1998) que la couronne a été sous-évaluée au moment de son
rattachement au panier qui donnait une bouffée d’oxygène initiale pour le secteur
exportateur de l’économie et une poussée temporaire de l’inflation. En même temps, la
banque centrale ne s’est jamais engagée publiquement quant au maintien du régime de
change fixe, ou de son niveau. Donc, au passage, nous enregistrons l’absence d’effet
d’annonce qui pourrait influencer positivement la crédibilité initiale de l’arrangement. De
plus, le panier de rattachement, même s’il était censé représenter les poids des partenaires
dans le commerce du pays, était assez complexe pour être considéré comme facilement
observable par les agents économiques. Dès le début et jusqu’en mai 1993, il a été
constitué de 5 devises dont le poids et la composition ont été changés en 1992. A partir de
3 mai 1993, le panier a été enfin simplifié pour ne contenir que deux devises : le DEM
(65%) et le USD (35%). Ce panier est resté inchangé jusqu’à la fin de l’application du
régime de change fixe en Tchéquie. Nous avons utilisé ces devises et leurs poids3 pour
tracer le graphique représentant l’évolution du taux de change tchèque par rapport au
panier (voir Fig. 1). Nous distinguons deux Phases du régime de change fixe en Tchéquie.
Phase (1) concerne la période pendant laquelle les marges de fluctuation ont été de +/1.5% autour de la parité centrale. Phase (2) s’applique à la période où ces marges de
fluctuation ont été officiellement élargies à +/-7.5%. Le graphique montre que la
couronne tchèque a été effectivement maintenue dans un couloir de +/- 1,5% par rapport
1
Comme la Tchéquie et la Slovaquie faisaient partie de la Tchécoslovaquie jusqu’en 1993, nous ne
dissocions pas leurs politiques économiques pour la période avant la séparation.
2
Plus précisément les 4 dévaluations de 1990 ont été effectué le 2 janvier (CZK/USD = 14,62, i.e. 2,10%
de dévaluation), 8 janvier (CZK/USD = 17 ; 16,30%), 15 octobre (CZK/USD = 24 ; 55,20%) et 28
Décembre (CZK/USD = 28 ; 15,90%). Source : Statistique financière de la Banque centrale tchèque.
3
Nous n’avons pas pu trouver des statistiques quant au taux de change de la couronne tchècoslovaque visà-vis les autres devises dans le panier pour la période 1991 – 1993. Donc, le panier n’a pas la même valeur
de référence avant mai 1993 comme celle représentée sur le graphique. Néanmoins, comme le DEM et le
USD ont toujours eu la part majoritaire dans les paniers et que la plupart des autres devises ont suivi
l’évolution de la monnaie allemande, nous pouvons utiliser la même valeur de référence avant et après
1993 sans biaiser significativement la représentation.
3
au panier jusqu’en mi - 1996. Cela prouve que la cible du taux de change a été respectée
pendant plus de 5 ans, ce qui constitue un premier bon indicateur de la crédibilité de
l’engagement officieux des autorités monétaires.
Fig. 1
La politique de change slovaque marque sa première différence par rapport à son
voisin tchèque à partir de mois de juillet 1993. Ainsi, le 10 juillet 1993 s’effectue une
dévaluation de 10% de la couronne slovaque par rapport au panier initial de l’époque où
les deux pays constituaient la Tchécoslovaquie. La couronne slovaque a bénéficié donc
d’une dévaluation avant la redéfinition du panier d’ancrage (un an plus tard), ce qui
n’était pas le cas de la couronne tchèque. Cela a permis aux autorités slovaques
d’éloigner dans le temps les pressions éventuelles à l’appréciation de la monnaie
nationale au risque d’une inflation initiale plus marquée. De plus, la politique de change
fixe slovaque semble plus souple car les bandes de fluctuation autour de la parité centrale
ont été élargies à plusieurs reprises ce qui nous permet de définir les quatre phases du
régime de change fixe dont l’évolution est présentée sur la Fig. 2 suivante4. Ce qu’on
observe sur le graphique, c’est que malgré l’élargissement officiel des marges de
fluctuation, le taux de change est resté confiné de facto dans les limites de +/-1.5% autour
de la parité centrale jusqu’à janvier 1997. De plus, pendant la plupart de Phase (4) le taux
de change a de facto varié dans des limites de +/-5% au lieu des marges officielles de+/7%. Tout cela prouve que, comme dans le cas tchèque, l’objectif intermédiaire du taux de
change fixe a été bien respecté par les autorités slovaques.
4
Comme dans le cas tchèque notre taux de change de référence utilise les mêmes poids du DEM (60%) et
du USD (40%) après comme avant la redéfinition du panier en juillet 1994. Cela ne nuit pas à l’analyse
pour des raisons expliquées auparavant.
4
Fig. 2
D’ailleurs le taux de change n’était pas le seul objectif intermédiaire de la
politique monétaire en Tchécoslovaquie. Le deuxième pilier de cette politique a été
constitué par le ciblage de M25. Cette configuration de la politique monétaire a continué
d’exister après 1993 en République Tchèque et en Slovaquie avec comme justification, la
priorité donnée à la désinflation et la stabilisation macroéconomique. Nous avons déjà vu
cependant qu’une telle combinaison s’avère peu crédible dans une économie ouverte aux
mouvements de capitaux. Si nous nous référons aux tableaux sur les flux des prêts
bancaires, sur les investissements de portefeuille et sur l’ouverture aux mouvements de
capitaux présentés dans l’annexe (Tableaux A1, A2 et A3), nous pouvons constater
qu’une telle politique a été praticable dans le cas tchèque au début de la transition et
jusqu’en 1993-94 quand les flux de capitaux ont nettement augmenté. En réfléchissant
avec le recul du temps, il est évident que cette politique ne pouvait pas être crédible sur le
long terme, et qu’en la pratiquant, les autorités monétaires se sont concentrées sur les
gains immédiats de crédibilité. Si tel était le cas, il semble que le fait de ne pas s’être
engagées de façon officielle avec une politique de change fixe a été une erreur stratégique
de la part de ces autorités. D’autant plus que l’objectif monétaire a été régulièrement
dépassé en Tchéquie (voir Tableau 1 ci-dessous) malgré les efforts de la Banque
Centrale. Hrnčiř (1999) explique cette croissance excessive par les flux croissants de
capitaux. En effet, la croissance de M2 était moins que prévue seulement en 1996, ce qui
coïncide avec la diminution des flux au cours de cette année. Nous pouvons donc
conclure que cet objectif monétaire n’a pas était atteint en Tchéquie.
5
Entre 1991 et 1992 il existait aussi des plafonds de crédits et de taux d’intérêt sur les prêts.
5
Tableau 1
Cibles monétaires et évolution observée de M2 (en pourcentage) en République Tchèque
Cible monétaire
Evolution actuellement observée
Année
Initiale
Corrigée
1992
12
17.5
22.8
1993
17
19
20.3
1994
12-15
17
20.8
1995
14-17
14-17
19.4
1996
13-17
13-17
9.2
Source : Hrnčiř, M. (1997)
Comme en Tchéquie, les autorités monétaires slovaques ont défini la croissance
de la masse monétaire mesurée par l’agrégat M2 comme objectif intermédiaire de la
politique monétaire. Leurs projections dépendaient de la croissance anticipée du PIB réel
sous l’hypothèse d’une vitesse – revenu constante (Kominkova (2000)). On peut se
douter des difficultés des autorités d’atteindre cette cible – d’abord pour des raisons
d’incompatibilité entre les objectifs intermédiaires (au moins sur le moyen - long terme)
et puis à cause de l’hypothèse invraisemblable d’une vitesse – revenu constante dans un
environnement micro- et macro-économique extrêmement instable. En effet, l’objectif
monétaire a été régulièrement dépassé jusqu’en 1997 (voir Tableau 2) et de plus, il n’est
pas en relation directe et positive avec les taux d’inflation observés, même au contraire :
il semble que les autorités monétaires ont laissé croître M2 au-dessus de la valeur ciblée
dès qu’elles ont estimé que le taux d’inflation serait faible afin de stimuler la croissance
réelle de l’économie. L’efficacité de cet objectif intermédiaire est donc douteuse.
Tableau 2
Cibles monétaires et évolution observée de M2 (en pourcentage) en Slovaquie
Cible monétaire
Evolution actuellement observée
Taux d’inflation
M2
Taux d’inflation annuel (déc.- déc.)
M2
annuel (déc.- déc.)
Année
(%)
(%)
(%)
(%)
1993
12
17
18.3
25.1
1994
13.2
10-13.2
18.9
11.7
1995
12.3
8.
21.2
7.6
1996
11.6+/-0.6*
6-7.5
16.5
5.4
1997
10.7
4.9-5.8
8.7
6.4
1998
9.4
5.6-5.9
2.7
5.6
*Valeur révisée en Juin 1996 : valeur initiale 13.2%
Sources : Kominkova (2000), Makúch et Nemec (1999)
Cependant, à la différence de la Tchéquie, les autorités slovaques utilisaient aussi
des instruments directs en imposant des plafonds de crédit aux banques commerciales dès
le mois de mars 1993. Ces plafonds ont été réduits progressivement et en 1995 ils
s’appliquaient seulement aux quelques grandes banques, puis ils ont été supprimés à
partir de janvier 1996.
Le résultat de toutes ces mesures (voir Fig. 3) est une baisse de l’inflation
slovaque tout au long de la période d’application du régime de change fixe et une hausse
temporaire de la même après le passage au flottement dirigé (situation qui ressemble bien
à celle en République Tchèque comme nous pouvons le constater sur le Fig. 4).
6
Evolution des prix à la consommation en Slovaquie et en Allemagne par rapport au même
mois de l’année précédente
Fig. 3
Evolution des prix à la consommation en Rép. Tchèque et en Allemagne par rapport au même
mois de l’année précédente
Fig. 4
7
En Tchéquie, après la désinflation initiale observée en 1992, l’inflation a
augmenté pour rester relativement stable entre 1994 et 19976. Le taux moyen d’inflation
domestique pour la période du régime fixe varie autour de 12%.
D’ailleurs, les valeurs moyennes des différentiels de taux d’inflation sur la totalité
des périodes en régimes de change fixe sont quasi – identiques en Slovaquie et en
République Tchèque (voir Tableau 3). Cependant, la volatilité de l’inflation (mesurée par
l’écart - type) est plus forte en Slovaquie qu’en République Tchèque. Nous observons
aussi la même tendance dans les deux pays : les Phases successives de taux de change
fixe, qui se caractérisent par un élargissement progressif des marges de fluctuation autour
de la parité centrale, connaissent des différentiels d’inflation de moins en moins élevés, la
seule exception étant la Phase 4 (+/-7%) du régime fixe en Slovaquie qui enregistre une
hausse (à la fois en termes de valeurs moyennes, médianes et des écart-types) par rapport
aux résultats précédents (voir toujours Tableau 3).
Tableau 3
Taux d’inflation (%) par rapport au même mois de l’année précédente
Régime
de
change
(Période)
Valeur
moyenne
Valeur
médiane
Ecarttype
Phase
(Période)
République Tchèque
Régime de change fixe
1992 :01 – 1997 :05
Slovaquie
Régime de change fixe
1992 :01 – 1998 :09
Différentiel
par rapport à
la RFA (I)
Taux
domestique
(II)
Différentiel par rapport à la
RFA (I)
Taux domestique
(II)
8.6
11.6
8.3
11
7.4
9.5
6.1
7.8
4.26
4.93
5.6
6.35
Phase (1)
1992 :01–
1996 :02
(I)
(II)
Phase (2)
1996 :031997 :05
(I)
(II)
Phase (1)
1992 :01–
1995 :12
(I)
(II)
Valeur
9.2
12.7
6.7
8.2
10.7 14.2
moyenne
Valeur
7.8
10.1
7.1
8.6
9.5
11.9
médiane
Ecart4.7
5.2
1.1
1.0
6.16 6.46
type
Calculs : l’auteur, d’après des données DATASTREAM
Phase (2)
1996 :011996 :07
(I)
(II)
Phase (3)
1996 :081996 :12
(I)
(II)
Phase (4)
1997 :011998 :09
(I)
(II)
4.6
6.1
3.9
5.3
4.9
6.5
4.7
6.2
3.8
5.3
4.7
6.3
0.28
0.29
0.25
0.21
0.93
0.63
Certes, cette performance n’est pas exemplaire si l’on la compare avec celle d’une
économie développée mais c’est un bon résultat par rapport à nombreux d’autres pays en
transition. De plus, une partie de l’inflation relativement élevée peut être expliquée par
6
Selon certains auteurs (Sachs (1996)), l’inflation au début de la transition en Tchécoslovaquie a été
modérée à cause de l’absence des déséquilibres macroéconomiques majeurs avant 1990.
8
les phénomènes de rattrapage dus à l’effet Balassa-Samuelson7. Il faut noter cependant
que, dans la mesure où cet effet existe, il est plus faible au début de la transition qu’au fur
et à mesure de sa progression du fait de l’héritage d’une segmentation élevée du marché
de travail de l’époque planifiée, de la rigidité des salaires réels et de l’existence de
nombreux prix administrés des biens non échangeables. Par exemple, le « saut
d’inflation » de 1993 s’explique par l’introduction de la TVA. Celui de 1997-1998 en
Tchéquie est attribué à la crise financière et à la libéralisation de plusieurs prix
administrés. On voit aussi que le taux d’inflation tchèque commence à se rapprocher de
celui d’Allemagne à partir de 1999, c’est-à-dire un an après l’introduction officielle du
ciblage direct de l’inflation et deux ans après l’adoption du flottement dirigé.
Les observations faites plus haut nous amènent aux remarques suivantes :
1)
La période de régime de change fixe se caractérise par une réduction des
différentiels d’inflation tchèque et slovaque vis-à-vis de l’Allemagne.
2)
Cette baisse de l’inflation ne peut pas être attribuée uniquement à la politique de
change fixe mais aussi à d’autres mesures (directes et indirectes) visant à contrôler la
croissance de la masse monétaire. Cependant, sachant que l’objectif de croissance de la
masse monétaire a été régulièrement dépassé dans les deux pays, on peut se douter quant
à l’importance de cette politique pour la baisse de l’inflation.
3)
L’augmentation des marges de fluctuation autour de la parité centrale ne semble
pas nuire au processus désinflationniste (à l’exception du dernier élargissement en
Slovaquie) car les taux d’inflation et leur volatilité baissent progressivement avec
l’augmentation de ces marges. Trois explications à ce phénomène peuvent être avancées :
a) l’élargissement des marges de fluctuation de jure ne signifie pas une augmentation des
fluctuations du taux de change de facto. Il faut noter que, dans le cas slovaque, le taux de
change fixe n’ait pas dépassé les bornes de +/-1.5% jusqu’à janvier 1997, i.e. bien après
que les marges de fluctuation sont passées de +/-3% à +/-5%. En même temps
l’assouplissement officielle de la politique de change laisse une marge de manœuvre aux
7
Les résultats concernant la portée de l’effet Balassa-Samuelson (BS) sur les taux d’inflation des PECO
varient considérablement selon les méthodes utilisées par les auteurs et les techniques économétriques
employées. De Broeck et Sløk (2001) trouvent que la contribution moyenne à l’inflation due a l’effet BS
pour un panel de pays de l’Est est de 1% en 1999 (la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie et la
Slovaquie se caractérisant par une contribution plus élevée que la République Tchèque, l’Estonie, la
Lettonie, la Lituanie et la Slovénie ; période analysée 1991-98). Sinn et Reutter (2001) présentent des
résultats plus détaillés selon lesquels le différentiel d’inflation vis-à-vis de l’Allemagne (période considérée
1987-95) s’élève à 2,88% pour la République Tchèque (1995-98) ; 3,38% pour la Slovénie (1996-99) ;
4,16% pour la Pologne (1994-97) ; 6,86% pour la Hongrie (1994-97) et 4,06% pour l’Estonie (199498).Cependant, la fiabilité de ces résultats est un peu douteuse car les périodes considérées ne coïncident
pas et sont très différentes. Rother (2000), de son côté, estime que, pour la période 1993 – 1998 l’inflation
attribuée à l’effet BS est en moyenne de 2,6% en Slovénie. Nenovsky et Dimitrova (2002) ne trouvent pas
que l’effet BS contribue à la montée de l’inflation pour la période 1997-01 en Bulgarie. Golinelli et Orsi
(2001) utilisent comme référence la zone euro pour estimer l’effet BS pour la période (1993 – 2000) à 4,3%
(République Tchèque), 2,1% (Hongrie) et 5,1% (Pologne). Les résultats de Egert (2002) vis-à-vis de
l’Allemagne sont nettement inférieurs : dans le cas de la République Tchèque ils sont compris entre 0,2 et
0,6% dans la période 1991–95 et entre 0,1 et 0,5% dans la période 1996-01 ; en Hongrie : 0,6-1% (199195) et 2,1-2,3% (1996-01) ; en Pologne :0,7-0,9% (1991-1995) et 1,7-1,8% (1996-01) ; en Slovaquie : (1,9%)- (-0,2%) (1991-95) et 0,1-1% (1996-01) ; en Slovénie : (-2,4%)-(-0,2%) (1991-95) et 0,3-1,1%
(1996-01) ; en Estonie 2-3% (1993-02).
9
autorités quant à la direction des taux d’intérêt en fonction des prévisions inflationnistes
sans que cela incite des entrées de capitaux spéculatifs; b) il est normal que le taux
d’inflation initial soit plus élevé car les répercussions de la dévaluation initiale de la
monnaie nationale ne se sont pas encore dissipées (sans oublier la dévaluation
supplémentaire de la couronne slovaque en 1993) et que l’incertitude économique est
plus grande au début de la transition surtout quand on tient compte du fait que pendant
cette Phase (1) du taux de change fixe s’est effectuée la désintégration de la
Tchécoslovaquie en deux états indépendants et c) la réduction de la volatilité de
l’inflation peut s’expliquer par la possibilité accrue d’absorption des chocs par le taux de
change que par les prix.
Les expériences tchèque et slovaque semblent confirmer la priorité des faits sur
les paroles. Les deux pays se sont engagés explicitement (paroles) dans une politique de
ciblage intermédiaire de la masse monétaire, engagement qu’ils ont systématiquement
dépassés, alors qu’à première vue l’importance qu’ils ont officiellement accordés au
maintient du taux de change fixe a été plus faible (rappelons que les autorités tchèques ne
se sont pas engagées explicitement avec une politique de change fixe et que les autorités
slovaques ont élargi les marges de fluctuation de la couronne à plusieurs reprises). Or les
faits démontrent une stabilité prolongée du taux de change fixe dans les deux pays et des
résultats en termes de maîtrise de l’inflation qui ne sont pas négligeables.
Cependant l’analyse de l’évolution des prix et de la stabilité du taux de change
n’est pas suffisante pour déterminer le degré de crédibilité du régime de change fixe.
L’étude du degré d’inertie de l’inflation et l’analyse en termes de taux d’intérêt semblent
plus révélatrices à ce sujet.
2. L’impact de la politique de change fixe sur l’inertie de l’inflation et sur les
taux d’intérêt tchèques et slovaques
2.1. Impact sur l’inertie de l’inflation
Nous utilisons le modèle d’Edwards (1992) pour estimer l’évolution du degré
d’inertie de l’inflation et donc du degré de crédibilité du régime de change. Dans ce
modèle l’inertie de l’inflation est définie comme la dépendance de l’inflation actuelle de
l’inflation passée. Une telle dépendance démontre le degré des anticipations adaptives des
agents économiques. Le plus souvent ces anticipations se manifestent à travers
l’existence des indexations salariales. Plus l’inflation est persistante, moins les agents
croient dans le pouvoir du régime fixe de réduire l’inflation et donc moins la crédibilité
du régime de change. Au contraire, une baisse du degré de l’inertie de l’inflation indique
une amélioration de la crédibilité de la politique de change.
Sans changer le raisonnement de base, nous modifions l’expression proposée par
Edwards pour l’ajuster aux spécificités des pays considérés. Cela nous permet d’enlever
aussi certaines hypothèses restrictives de son modèle économétrique (notamment
l’hypothèse du bruit blanc dans son expression). Ainsi, la relation économétrique que
nous testons a la forme générale suivante :
10
y t = β 1 + β 2 xt + u t
(1)
p
q −1
i =1
j =0
ut = ∑ ( ρ i ⋅ L( i )u t ) + ∑ ( γ j ⋅ L( j )ε t ) où :
(2)
yt est la variable expliquée (i.e. le taux d’inflation mensuel en République
Tchèque ;
xt = (π t* , mt ) , un vecteur des variables explicatives exogènes telles que le taux
d’inflation en Allemagne π *t et le taux de croissance de la masse monétaire mt . Les
variables mt et zt sont conçues afin de représenter l’impact de la demande globale sur le
taux d’inflation domestique ;
ut est un terme d’erreur aléatoire
ε t est un bruit blanc
β , ρ ,γ sont des coefficients
L(i) et L(j) sont des opérateurs de retard.
Exprimée ainsi, la relation économétrique se définie comme un processus
ARMA(p, q) où p ≥ 1 et q ≥ 1 . Dans le cas particulier où q = 1 , nous avons un
processus AR(p) pur.
La procédure économétrique que nous employons est la suivante :
D’abord nous testons l’hypothèse nulle selon laquelle les séries possèdent une
racine unitaire. Après avoir vérifié la stationnarité des séries, nous utilisons la procédure
de Box – Jenkins pour déterminer la forme exacte du processus ARMA pour chaque pays
considéré. Cela implique la construction de corrélogrammes et l’application des tests de
Breusch – Goddfrey pour s’assurer de l’absence d’une autocorrélation significative du
résidu. Des tests de normalité sont également effectués et les estimations sont corrigées
pour tenir compte d’une éventuelle hétéroscedasticité. Finalement, nous nous référons
aux critères d’Akaike et de Schwarz. Cette procédure nous permet de déterminer le
nombre de retards optimal qui, de son coté, est associé à l’inertie de l’inflation. Si le
régime de change est crédible, l’inertie de l’inflation sera faible. Nous nous attendons
aussi à une relation positive et significative entre le taux d’inflation domestique et
étranger et à une relation positive et significative entre le taux d’inflation domestique et la
croissance de la masse monétaire (ou le crédit domestique selon le cas).
Les séries utilisées sont mensuelles et proviennent de la base des données
DATASTREAM.
Nous présentons dans l’annexe les tests de stationnarité des variables utilisées
(Tableaux A4 et A5). Comme attendu, elles sont toutes stationnaires en niveau.
La procédure de Box-Jenkins nous amène à définir le processus caractéristique de
la République Tchèque comme ARMA ((1,4,6),4), car dans ce cas les critères d’Akaike (6.539) et de Schwarz (-6.129) ont des valeurs les moins élevées. Un tel résultat est en
11
conformité avec nos attentes car il permet d’évaluer la présence (ou l’absence) d’inertie
de l’inflation à la fois à très court terme (retard = 1) et à plus long terme (retard = 4 et 6)
Dans le cas de la République Tchèque, pour la spécification ainsi donnée,
l’équation régressive estimée (avec le t de Student indiqué entre parenthèses) est la
suivante :
π t = −0.001 + 0.427π t −1 + 0.009π t − 4 − 0.102π t −6 + 3.681π t* + 0.175mt −1
(-0.56)
(4.10)
(0.04)
(-0.86)
(3.09)
(3)
(2.09)
nombre d’observations : 43
Echantillon : 1992 :08 – 1996 :02
R2 ajusté : 65%
Tests d’autocorrélation du résidu : DW :2.04
BG Test pour L = 10 : F-statistique (1.104), Pb (0.39)
Obs*R-carré (13.391), Pb (0.20)
Tests de normalité du résidu :
Valeur moyenne : 0.001 (Valeur de référence VR: 0)
Skewness :0.687 (VR :0)
Kurtosis :3.242 (VR :3)
Jarque-Bera :3.492, Pb (0.17)
Cette estimation ne concerne que la Phase (1) du régime de change fixe quand la
parité fixe a été effectivement respectée. La Phase (2) se caractérise par plusieurs
perturbations qui rendent le modèle inefficace.
Malgré le nombre restreint d’observations, les résultats sont relativement robustes
car l’hypothèse d’existence d’autocorrélation est rejetée haut la main par le test de
Breusch – Godfrey et il s’avère que l’erreur suit asymptotiquement la loi normale. De
plus, le modèle semble bien expliquer l’inflation en République Tchèque car son R2
ajusté est de 65%. Les estimations montrent que l’inertie de l’inflation n’est pas
complètement éliminée sous le régime de change fixe car elle est positive et significative
à très court terme. En même temps, elle est quasiment éliminée sur le moyen terme. Il
faut noter aussi la relation forte et significative entre les taux d’inflation étranger et
domestique, ce qui correspond aux attentes théoriques du fonctionnement d’un régime de
change fixe. Nous nous attendions cependant à une relation encore plus importante entre
les valeurs passées de l’inflation allemande et la valeur présente de l’inflation tchèque car
il semble peu probable que les inflations dans les deux économies soient si synchronisées.
Malheureusement, ce n’est pas le cas ici. Il faut noter aussi l’importance de la croissance
de la masse monétaire (au sens de M2) dans la détermination du taux d’inflation
domestique. Le résultat obtenu est conforme à la réalité observée où nous avons des
entrées croissantes de capitaux et donc une croissance plus que prévue de la masse
monétaire qui ne peut qu’avoir un effet accélérateur sur l’inflation.
Nous avons testé plusieurs spécifications du modèle d’Edwards de type ARMA(p,
q) ou AR(p) pour trouver celle qui est la mieux adaptée au cas slovaque. Il s’avère que
quelque soit la spécification, l’inertie à très court terme est toujours significative, mais
que son importance diminue au profit de l’inertie à moyen terme avec l’élargissement de
12
la période testée. Dans le premier cas de figure, la période concernée est août 1993 –
janvier 1997 et dans le deuxième cas : août 1993 – septembre 1998. Le choix des
périodes est justifié comme suit :
-> le début est fixé en août 1993 car c’est le mois après la dernière dévaluation officielle
de la couronne slovaque. De plus, si l’on inclut la période avant août 1993, on obtient
systématiquement des spécifications dont le résidu n’est pas normalement distribué ;
-> janvier 1997 est la date jusqu’à laquelle le taux de change reste de facto dans des
marges de fluctuation de +/-1.5%. Nous ne rapportons pas les résultats pour les
différentes phases de régime de change fixe car les séries observées dans ce cas seront
très courtes ;
-> septembre 1998 est le dernier mois d’existence officielle du régime de change fixe en
Slovaquie.
Dans le cas slovaque, les résultats de l’estimation régressive de la spécification
ARMA ((1,4,6), 4) déterminée selon la procédure de Box-Jenkins sont8 :
Pour la période août 1993 – janvier 1997 :
π t = 0.005 + 0.360π t −1 − 0.256π t −4 − 0.283π t −6 + 1.103π t*− 2 + 0.045mt −1
(5.27)
(2.84)
(-1.30)
(-1.99)
(3.03)
(4)
(2.55)
nombre d’observations : 42
R2 ajusté : 47%
Akaike :-7.923 ; Schwarz :-7.633
Tests d’autocorrélation du résidu : DW :2.13
BG Test pour L = 6 : F-statistique (1.931), Pb (0.11)
Obs*R-carré (11.982), Pb (0.06)
Tests de normalité du résidu :
Valeur moyenne : -6.87E-0.5 (Valeur de référence VR: 0)
Skewness :0.194 (VR :0)
Kurtosis :2.611 (VR :3)
Jarque-Bera :0.528, Pb (0.77)
Pour la période août 1993 – septembre 1998 :
π t = 0.004 + 0.276π t −1 + 0.567π t −4 − 0.159π t −6 + 0.005π t*− 2 + 0.093mt −1
(6.79)
(2.34)
(6.42)
(-1.5.8)
(0.02)
(5)
(6.11)
nombre d’observations : 62
R2 ajusté : 50%
Akaike :-8.076 ; Schwarz :-7.836
Tests d’autocorrélation du résidu : DW :1.66
8
Les résultats ne sont pas modifiés sensiblement si l’on remplace la croissance de la masse monétaire par la
croissance du crédit domestique dans les équations présentées ici.
13
BG Test pour L = 6 : F-statistique (0.667), Pb (0.68)
Obs*R-carré (0.535), Pb (0.99)
Tests de normalité du résidu :
Valeur moyenne : 0.001 (Valeur de référence VR: 0)
Skewness : 0.016 (VR :0)
Kurtosis : 2.816 (VR :3)
Jarque-Bera :0.090, Pb (0.96)
Ces résultats sont robustes au changement de la spécification et des retards utilisés
en ce qui concerne l’importance de la croissance de la masse monétaire domestique et du
taux d’inflation étranger pour le taux d’inflation domestique. Il est intéressant de noter
que le lien entre l’inflation étrangère et la hausse des prix domestiques est beaucoup plus
important quand le taux de change varie dans un couloir de +/-1.5% (de facto) que si l’on
tient compte aussi d’une variation de +/-7%. Cela n’est pas étonnant vu que
l’assouplissement de la politique de change peut être considéré comme un signe de la
plus grande indépendance de la politique monétaire, ce qui implique une plus faible
corrélation entre inflation domestique et étrangère. En même temps, le lien entre taux
d’inflation domestique et croissance monétaire reste toujours positif et significatif même
si l’élasticité des prix par rapport à la masse monétaire est moins élevée que celle en
République Tchèque. Le problème qui se pose cependant, est le signe du coefficient de
l’inertie d’inflation à plus long terme (retard = 6) qui est tantôt positif (et significatif),
tantôt négatif (et faiblement significatif) selon la spécification utilisée. Nous n’avons pas
d’explication théorique à cette instabilité. Par contre le coefficient de π t −1 est toujours
positif et significatif et le coefficient de π t −4 est significatif seulement lorsqu’il est
positif, ce qui est conforme à la théorie.
Nous pouvons conclure que dans le cas slovaque (comme d’ailleurs dans le cas
tchèque), le régime de change fixe est associé à une inertie de l’inflation à court terme et
donc il n’est pas parfaitement crédible. Ce qui est cependant plus inquiétant c’est la
confirmation de l’apparition d’une inertie à plus long terme avec l’élargissement des
marges de fluctuations autour du taux de change dans le cas slovaque. Selon ce critère, le
régime de change fixe perd de crédibilité au fur et à mesure de son existence. Dans ce
cas, la « longévité » ne bénéficie pas à la crédibilité…
2.2. Impact sur les taux d’intérêt
Une autre mesure de la crédibilité du régime de change consiste à évaluer le
différentiel entre les taux d’intérêt du pays domestique et du pays d’ancrage. Dans le cas
des régimes de change fixe ce différentiel peut être associé à la prime du risque. Dans
d’autres travaux nous avons décomposé ce risque en risque de change et en risque pays
que nous avons mesuré pour les pays de l’Est avec des Currency Boards. Cette analyse
ne peut pas être effectuée dans le cas de la République Tchèque et la Slovaquie de la
même façon que pour les pays avec des caisses d’émission car il n y a pas de données
disponibles qui différencient les taux d’intérêt selon la monnaie d’origine de
l’investissement. Voila pourquoi ici notre analyse porte sur la prime du risque « global ».
14
Dans les figures suivantes (Fig. 5 et Fig. 6), nous présentons l’évolution de ce
risque en Tchéquie et en Slovaquie. La prime de risque est mesurée comme le différentiel
des taux domestiques et étrangers de maturités correspondantes. Dans le cas de la
Tchéquie il s’agit des taux d’intérêt sur les marchés interbancaires tchèque et allemand de
fonds de maturité de 3 et de 12 mois. Dans le cas de la Slovaquie nous utilisons les taux
sur les marchés interbancaires slovaque et allemand lorsqu’il s’agit de fonds de maturité
de 3 mois. L’absence de séries de données sur le taux BRIBOR (Bratislava Offer
InterBank Rate) à 12 mois concernant la période de change fixe nous a amenés à
considérer les taux domestiques sur les dépôts à 1 et 2 ans en monnaie nationale et les
taux respectifs allemands.
Les graphiques et le Tableau 4 montrent que la prime de risque est importante
dans les deux pays pour toutes les maturités concernées. Ces écarts posent de sérieuses
questions sur la fiabilité du régime de change fixe si l’on considère ce critère comme
indicateur de la crédibilité.
Fig. 5
15
Fig. 6
Tableau 4
République Tchèque//Régime de change fixe//Taux d’intérêt du marché interbancaire
Différentiel par
Différentiel par
Taux
rapport au
Taux
rapport au
PRIBOR
FIBOR
PRIBOR
FIBOR
12 mois
(EURIBOR)
3 mois
12 mois
3 mois
Valeur
6.59
11.53
7.12
11.98
moyenne
Valeur
6.84
11.3
7.2
11.52
médiane
Ecart-type
2.79
2.53
2.07
2.20
Slovaquie//Régime de change fixe//Taux d’intérêt du marché interbancaire et sur les dépôts
Différentiel
Différentiel par
Taux sur
Différentiel par Taux sur les
Taux
par rapport
rapport au
les dépôts
dépôts
rapport au taux
BRIBOR
au taux
FIBOR
domestiqu
domestiques
européen
domestique
européen
(EURIBOR) 3
es 24 mois
12 mois
12 mois
3 mois
24 mois
mois
Valeur
12.33
15.87
6.46
10.85
8.42
11.39
moyenne
Valeur
11.26
14.45
6.66
10.67
8.66
10.74
médiane
Ecart-type
6.47
6.36
1.03
1.53
1.03
2.19
Calculs : l’auteur, d’après des données DATASTREAM
16
Pour évaluer plus précisément les défauts de crédibilité du couple régime de
change – politique monétaire, nous utilisons la méthode proposée par Svensson (1990,
1991) en l’adaptant aux cas tchèque et slovaque. Cette méthode est appropriée car elle
peut s’appliquer aux régimes autres que les régimes de coin tels que le Currency board et
le flottement indépendant.
L’idée de base est la suivante : l’existence des limites de fluctuation du taux de
change implique l’existence des limites de fluctuation des taux d’intérêt portant sur les
investissements étrangers (en devises). Supposons que les capitaux sont mobiles. Si le
taux d’intérêt domestique pour une maturité quelconque se positionne en dehors (par
exemple au-dessus) de sa bande de fluctuation, la crédibilité du régime de change sur le
moyen – long terme (par opposition à la crédibilité immédiate) est menacée. Les taux
d’intérêt élevés vont attirer des capitaux afin de profiter de la différence de rémunération
entre le pays domestique et l’étranger. L’arbitrage se fera a priori sans risque si les
investisseurs sont persuadés que le taux de change restera fixe9,10. L’entrée excessive de
capitaux (surtout quand il s’agit des investissements de court terme) met de la pression
sur la stabilité du taux de change. Pour empêcher son appréciation, les autorités se voient
obligées de procéder aux opérations de stérilisation. Or, nous avons déjà vu que la
stérilisation continue est coûteuse et même inefficace en cas de parfaite mobilité des
capitaux. De plus les capitaux de court terme sont très volatils, donc susceptibles à sortir
aussi vite qu’ils sont entrés. De tels mouvements peuvent in fine déstabiliser le taux de
change et mettre fin au régime de change fixe. Il reste à préciser que le fait que les taux
d’intérêt sont à l’intérerieur des bornes de fluctuation ne signifie pas nécessairement que
le régime de change est crédible, mais si les taux d’intérêt débordent, il est certain que le
régime ne l’est plus. C’est à cause de cette particularité que ce test de crédibilité du
régime de change est souvent considéré comme relativement faible.
Nous pouvons définir le test de crédibilité proposé plus haut de manière
analytique. Soit :
S t taux de change nominal pour la période t coté à l’incertain
itT taux d’intérêt domestique annuel appliqué aux actifs en monnaie nationale
avec une maturité T (mesurée en mois)
it*T taux d’intérêt étranger annuel appliqué aux actifs en monnaie étrangère avec
une maturité T (également mesurée en mois)
Alors, une unité en monnaie nationale sera équivalente à 1/St unités de la monnaie
étrangère. Si l’on l’investit pour un période de T mois, à la fin de ces T mois on obtiendra
9
En théorie, ce mouvement doit continuer jusqu’à ce que les possibilités d’arbitrage s’épuisent et les taux
s’égalisent. Pourtant, comme nous le verrons ce n’est pas le cas des pays étudiés. N’oublions pas que les
autorités monétaires de ce pays essayaient de contrôler à la fois la croissance de la masse monétaire et les
fluctuations du taux de change. Cela a nécessairement abouti à une politique monétaire restrictive se
traduisant par des taux d’intérêt élevés.
10
En même temps, si les flux de capitaux sont faibles ou dans la mauvaise direction, cela signifie que
l’arbitrage n’est pas sans risque – les investisseurs craignent un changement du taux de change. Cela
implique que le régime de change est déjà en train de perdre sa crédibilité.
17
(1 + i )
*T
t
T
12
St
unités de monnaie étrangère ou
(
)
(1 + i )
*T
t
T
St
12
S t +T
unités domestiques
T
équivalentes à 1 + RtT 12 où RtT est le taux de rémunération annuel effectif ex post
portant sur l’investissement exprimé en monnaie nationale.
(
L’égalité 1 + R
T
t
) = (1 + i S)
T
*T
t
12
T
12
S t +T
(6)
t
peut être modifiée pour obtenir RtT :
S
R = (1 + i ) t +T
 St
T
t



*T
t
12
T
-1
(7)
Sachant que par définition le taux de change fixe est limité dans des bornes, ainsi
que S ≤ S t ≤ S , alors le taux de rémunération effectif sera également restreint :
T
R t ≤ RtT ≤ R t où :
T
S
R = (1 + i )
 St



S
R = (1 + i )
 St




T
t
T
t
*T
t
*T
t
12
12
(8)
T
T
− 1 et
−1
(9)
(10)
Dans ce cadre d’analyse un taux de change courant plus élevé (i.e. une monnaie
domestique plus faible) implique, toutes choses égales par ailleurs, une baisse des taux de
rendements et donc un déplacement de sa bande vers le bas. D’ailleurs, plus la maturité
de l’investissement est longue, plus la bande est étroite (car le montant maximal de
l’appréciation ou dépréciation par unité de temps diminue avec l’augmentation de la
maturité).
Donc, sous un régime de change complètement crédible (aussi bien dans
l’immédiat que dans le futur) et sous l’hypothèse de parfaite mobilité des capitaux, le
taux d’intérêt domestique itT doit se situer dans le corridor défini par les bornes des taux
de rémunération domestique effectif portant sur des investissements étrangers.
Dans ce qui suit nous appliquons cette analyse d’abord au cas tchèque et puis au
cas slovaque.
Nous déterminons les corridors nécessaires pour évaluer la crédibilité du régime
de change selon la formule présentée plus haut en utilisant les taux d’intérêt
18
internationaux11 et les marges de fluctuation du taux de change12 de la couronne tchèque
par rapport au DEM. Puis nous vérifions graphiquement si les taux tchèques respectifs
restent dans ces corridors (voir Fig. 7 et Fig. 8 ci-après). Les résultats sont très
intéressants.
D’abord, en ce qui concerne le taux à court terme (3 mois), le graphique (Fig. 7)
montre que ce taux « sort » du corridor une fois en avril – mai 1993 et une autre fois –
pour une période plus longue - à partir de juillet 1994 jusqu’en mars 1996. Ces taux
d’intérêt élevés sont accompagnés de flux de capitaux croissants (voir Fig. 9 ci-dessous),
ce qui montre que les investisseurs n’anticipent pas de changement dans le taux de
change pendant cette période. Les entrées de capitaux cependant mettent la pression sur
la stabilité du taux de change et les autorités se voient obligées de les stériliser afin de
maintenir le cours de change. Cela se traduit par une hausse des réserves internationales
(Fig. 10) qui correspond notamment à la période où le taux d’intérêt est au-dessus du
corridor. Pour créer de l’incertitude sur la stabilité du taux de change sans pour autant
renoncer au système fixe (et dans le but de ne pas engendrer de la panique), les autorités
décident d’élargir les bandes de fluctuation de la couronne. Cette mesure a les effets
suivants : la couronne tchèque s’apprécie, les entrées de capitaux se ralentissent, la
nécessité de mener des opérations de stérilisation disparaît et le taux d’intérêt à court
terme entre dans le corridor. La crédibilité à court terme du taux de change semble
assurée. Cependant, si l’on regarde l’évolution du taux d’intérêt à plus long terme (1 an)
(Fig. 8), on peut constater que ce taux n’entre dans son corridor respectif que pendant une
brève période – entre décembre 1996 et mars 1997 – pour ressortir après de nouveau.
En avril – mai 1997, malgré les taux élevés, cette fois-ci, les sentiments des
investisseurs sont différents car ils retirent leurs capitaux, un signe d’anticipation de
dépréciation de la couronne. Les autorités interviennent lourdement en faveur de la
monnaie nationale en mai 1997 comme on peut le constater par la baisse spectaculaire
des réserves internationales au cours de ce mois (voir toujours Fig. 10). Cette démarche
n’a pas l’effet attendu et le 26 mai les autorités annoncent l’abandon des bandes de
fluctuation et le remplacement du régime fixe par un régime de flottement dirigé à partir
du jour suivant. Cela met terme au long règne du régime de change fixe en Tchéquie. Le
27 mai la couronne tchèque perd presque 12% de sa valeur.
11
A cet effet nous utilisons le FIBOR – le taux d’intérêt sur le marché interbancaire de Frankfurt. Ce taux,
en ce qui concerne la maturité de 3 mois, a la même valeur que l’EURIBOR (le taux concernant toute
l’Union monétaire européenne) à partir de 1999. Donc c’est un taux assez représentatif du taux d’intérêt sur
le marché international.
12
Nous considérons les marges réellement observées dès le début de l’application du taux de change fixe –
c’est-à-dire +/-1.5% et non +/-0.5%. A partir de mars 1996, nous appliquons la nouvelle marge de
fluctuation de +/-7.5%. Le taux de change de référence est celui du DEM. Nous n’utilisons pas le taux de
change par rapport au panier car, dans ce cas, il faudrait introduire un taux d’intérêt international qui
correspond à ce panier. Nous ne considérons pas que le biais que cette simplification introduit soit
significatif.
19
Fig. 7
Fig. 8
20
0
m ai-9 7
m ars -9 7
janv -97
n ov -9 6
s ep t-96
juil-96
m ai-9 6
m ars -9 6
janv -96
n ov -9 5
s ep t-95
juil-95
m ai-9 5
m ars -9 5
janv -95
n ov -9 4
s ep t-94
juil-94
m ai-9 4
m ars -9 4
janv -94
n ov -9 3
s ep t-93
juil-93
m ai-9 3
m ars -9 3
janv -93
U S D M LN
Flux d'investissements de portefeuille dans la Rép. Tchèque (engagements)
1200
1000
800
600
400
200
0
-200
-400
Fig. 9
Changement du montant des réserves interantionales par rapport au mois précédent
1000
500
-500
-1000
-1500
Fig. 10
21
Plusieurs explications à cette crise ont été avancées. Une première relève de la
crise asiatique – qui par contagion s’est propagée aux pays « émergents » dont les
marchés de capitaux sont relativement bien liés aux marchés internationaux comme c’est
le cas du marché tchèque. Une autre se base sur l’aggravation des « fondements » et
notamment le ralentissement de la reforme structurelle sur laquelle se base la confiance
des investisseurs. Une troisième rappelle l’instabilité du gouvernement pendant cette
période et le climat d’insécurité qui en suit. Sans doute, toutes ces explications sont
correctes. Selon nous cependant, il faut en ajouter explicitement une autre – celle de la
crédibilité imparfaite du régime de change fixe.
Considérons maintenant le cas de la Slovaquie.
L’analyse approfondie des taux de trois maturités différentes (3 mois, 1 an et 2
ans) révèle une crédibilité menacée du système de change en 1995 – 1996 quand tous les
taux se positionnent au-dessus de leurs bandes respectives (voir Fig. 11, Fig. 12 et Fig.
13). Dans le cas tchèque, une évolution analogue a attiré des capitaux qui étaient stérilisés
pour baisser les pressions sur le taux de change. Or, on voit sur Fig. 14 que dans le cas
slovaque cela ne s’est pas produit : on n’assiste ni à une hausse significative des
investissements de court terme ni à une accumulation excessive des réserves
internationales13 (Fig. 15). En effet, depuis la deuxième moitié de 1996 (et jusqu’en
1998), les autorités slovaques ont pris des mesures pour éliminer la possibilité
d’arbitrage, i.e. en l’occurrence les entrées de capitaux à court terme en imposant aux
banques un ratio d’actifs/passifs ajusté en fonction de l‘origine résidentielle ou non
résidentielle des fonds. Parallèlement, les autorités ont augmenté les marges de
fluctuations de la couronne slovaque. Les taux d’intérêt à 3 mois et à 1 an sont rentrés
dans leurs corridors et la stabilité du taux de change semblait être assurée. Néanmoins, la
couronne slovaque a subi des pressions à la dévaluation en mai 1997 comme l’on peut le
constater à travers la première baisse importante des réserves internationales (voir Fig.
15) et l’arrêt des cotations des taux d’intérêt sur le marché interbancaire de Bratislava
(voir Fig. 11). La Banque centrale a été même amenée à suspendre temporairement le
refinancement du secteur bancaire pour éviter la dévaluation de la monnaie nationale. Dès
le début de 1998, il a été évident que la stabilité de la couronne slovaque était
sérieusement menacée – l’élimination des obstacles administratifs devant la mobilité des
capitaux a provoqué consécutivement une hausse et une baisse spectaculaire des entrées
de capitaux à court terme (voir toujours Fig. 14). Cela a nécessité une intervention
massive de la Banque centrale dont les réserves internationales ont diminué fortement en
août et en septembre 1998 quand le taux d’intérêt sur les dépôts à 1 an s’est envolé de
nouveau par rapport au corridor. Les autorités se sont vues dans l’obligation
d’abandonner le taux de change fixe et de passer au flottement dirigé à partir du 2 octobre
1998. Suite à cette décision, la couronne slovaque s’est dépréciée d’environ 18% par
rapport à son ancienne parité.
13
A noter que les chiffres sont exprimés en DTS et pas en USD.
22
Fig. 11
Fig. 12
23
Fig. 13
Flux d’investissements de portefeuille en Slovaquie (engagements)
Fig. 14
24
Fig. 15
Nous voyons donc que le cas slovaque est, sur plusieurs points, similaire au cas
tchèque – notamment dans la poursuite d’un objectif final en passant par deux objectifs
intermédiaires. Quelques nuances peuvent cependant être dégagées :
D’abord, le régime de change fixe slovaque a duré 14 mois de plus que celui de la
République Tchèque. Cela s’explique par l’absence de mouvements significatifs de
capitaux à court terme (surtout pour des raisons administratives mais aussi à cause de la
faible présence de la Slovaquie sur les marchés internationaux de capitaux) et le control
direct sur les crédits pratiqué jusqu’en 1996. Puis, il ne faut pas négliger la meilleure
crédibilité du régime fixe dans le cas slovaque sur le court terme comme le témoigne
l’évolution des taux d’intérêt à 3 et à 12 mois. Cette crédibilité à court terme peut être
attribuée en partie à l’élargissement progressif des marges de fluctuation da la couronne
slovaque. Cependant, il s’avère que ces mesures n’ont pas été suffisantes pour assurer la
crédibilité de la monnaie sur le plus long terme comme nous l’indiquent l’évolution du
taux d’intérêt sur les dépôts à 2 ans et la présence d’inertie de l’inflation à plus long terme
si l’on inclut les données de la Phase (4) du taux de change slovaque dans le modèle
économétrique.
25
Conclusion
Les estimations présentées dans cet article montrent que :
1.)
La période d’application du régime de change fixe se caractérise par une
réduction progressive des différentiels d’inflation tchèque et slovaque vis-à-vis de
l’Allemagne (principal pays d’ancre) ;
2.)
L’inertie de l’inflation à moyen et plus long terme est maîtrisée au cours des
premières années d’application du régime de change fixe dans les deux pays mais ;
3.)
L’inertie de l’inflation à très court terme reste toujours importante ;
4.)
Le taux d’intérêt à court terme en République Tchèque se positionne au-dessus de
sa bande respective à partir du mois d’août 1994 pour n’y renter qu’en mars 1996 après
un élargissement significatif des marges de fluctuation autour de la parité centrale. Cela
confirme les problèmes de crédibilité que subit la couronne tchèque à partir de juillet août 1994. D’autant plus que le taux d’intérêt à plus long terme ne parvient pas à rester
dans son corridor même après l’assouplissement de la politique de change ;
5.)
En Slovaquie, la crédibilité du régime de change à court terme semble mieux
assurée que celle da la République Tchèque grâce notamment à l’augmentation
progressive des marges de fluctuations du taux de change. Cependant cette politique ne
réussit pas à assurer la crédibilité du régime de change slovaque à plus long terme ;
6.)
Les problèmes de la crédibilité des régimes de change tchèque et slovaque
surgissent à partir du moment où les flux de capitaux s’accélèrent. Nous ne cherchons pas
à établir un lien explicite de causalité entre ces deux phénomènes, mais la relation est
évidente. A partir de ce moment la politique de change fixe dans ces pays a été
condamnée à l’échec.
L’analyse de l’expérience tchèque et slovaque indique que dans plusieurs aspects
les résultats de la politique de taux de change fixe n’ont pas été à la hauteur des
espérances. La faille cependant n’est pas dans le régime fixe per se. Le problème comme
nous l’avons souligné déjà est dans la pratique conjointe d’un régime de change fixe et
d’une politique monétaire restrictive basée sur le contrôle de la masse monétaire. Cette
politique monétaire se traduit notamment par des hausses des taux d’intérêt qui ne
permettent pas au régime de change d’affirmer sa crédibilité. Si une telle politique donne
des résultats convenables au début de la transition quand les flux de capitaux sont
modestes et pas très influencés par le monde extérieur, elle n’est plus légitime à partir du
moment où ces flux deviennent importants. La question pratique que l’on peut se poser
est comment savoir quel est le bon moment pour abandonner un des deux objectifs
intermédiaires pour ne pas les rendre conflictuels. Selon nos estimations les autorités
devraient changer de politique dès le moment où les écarts entre les taux d’intérêt
domestiques et les bandes respectives ont commencé à s’élargir durablement. La sortie du
régime de change fixe à ce moment aurait pu se passer sans autant de pression sur la
stabilité du taux de change. De façon alternative, un relâchement de la politique
monétaire aurait pu préserver la stabilité du taux de change fixe plus longtemps.
26
Annexe
Tableau A1
Bulgarie
Estonie
Hongrie
Lettonie
Lituanie
Pologne
Rép.
Tchèque
Roumanie
Slovaquie
Slovénie
Flux des prêts bancaires et d'autres projets d'investissement per capita en USD
1990 1991
1992
1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000
-405
-37
30
55
34
-14
-25
-5
-5
35
53
63
550
66
79
197
80
197
117
0
0
16
0
-35
-3
42
117
112
90
129
28
165
213
86
22
189
171
199
301
78
152
331
0
0
0
0
0
-23
42
95
107
192
135
14
36
-10
11
18
9
6
28
43
47
93
147
73
2001
37
134
110
311
87
93
2002
30
361
-61
441
70
#N/A
#N/A
#N/A
#N/A
58
249
498
473
357
15
114
-24
-20
-8
48
#N/A
0
40
#N/A
0
25
#N/A
29
27
53
19
32
18
81
9
189
238
55
436
121
7
441
194
-15
146
195
1
-255
369
24
-98
433
41
#N/A
288
#N/A
#N/A
333
Calculs : l’auteur, d’après des données DATASTREAM
Tableau A2
Engagements au titre d'investissements de portefeuille en termes de flux per capita en USD
1990
1991
1992
1993
1994
Bulgarie
1995 1996 1997 1998
0
0
0
0
-1
-10
-15
19
Estonie
0
0
0
0
6
8
145
313
1999
2000
2001
2002
-14
1
-15
13
-38
1
112
55
61
252
180
Hongrie
105
114
99
385
241
217
-39
-90
189
203
-18
149
Lettonie
0
0
0
0
0
0
10
-14
11
91
11
78
-4
Lituanie
0
0
0
0
1
8
26
52
-12
146
117
68
35
Pologne
0
0
0
10
4
30
1
34
47
18
89
28
73
Rép. Tchèque
0
18
-4
179
87
165
75
112
111
49
47
78
79
Roumanie
0
0
0
0
0
2
9
24
6
-32
3
26
#N/A
Slovaquie
0
14
0
86
56
10
5
17
156
75
188
51
52
Slovénie
0
0
0
2
0
8
317
119
60
182
123
95
14
Calculs : l’auteur, d’après des données DATASTREAM
Tableau A3
Ouverture aux mouvements de capitaux: FLUX/PIB en %
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001
2002
Moyenne
Bulgarie
*
7,9
10,5
4,9
10,1
3,1
15,7
14,0
8,7
10,3
19,5
13,9
15,3
11,2
Estonie
0,5
2,6
3,4
10,4
11,9
19,9
16,7
20,3
12,9
23,0
20,5
18,1
22,9
14,1
Hongrie
*
23,5
21,1
12,7
17,3
44,5
18,6
19,6
18,0
23,4
24,2
21,6
13,0
Pologne
*
4,2
*
*
14,8
Rép. Tchèque
Roumanie
Lettonie
Lituanie
Slovaquie
Slovénie
9,3
8,8
18,7
12,2
19,2
10,9
12,6
12,9
15,1
15,9
17,4
11,5
*
*
42,8
14,7
31,6
20,7
26,5
37,9
12,0
19,5
27,2
17,2
*
25,0
0,5
8,7
4,9
8,8
10,3
15,1
14,6
12,6
12,3
10,5
11,1
10,0
*
3,6
2,8
3,9
5,4
7,7
4,9
7,1
9,2
11,3
13,0
8,2
4,2
7,0
2,9
0,2
*
4,1
1,1
*
4,0
4,3
5,9
3,1
5,9
7,0
6,5
6,0
6,0
7,2
0,2
19,1
7,3
9,4
17,5
19,5
13,2
28,9
24,7
*
*
*
5,2
3,0
6,9
6,4
5,9
8,8
9,2
6,2
9,1
9,9
11,9
16,5
Moyenne des dix pays
12,8
8,5
12,8
Calculs : l’auteur, d’après des données DATASTREAM
27
Tableau A4
ADF Test de Racine Unitaire : République Tchèque
H0 : présence de racine unitaire ; valeurs critiques définies par MacKinnon
* H0 est rejetée avec 99% de certitude
** H0 est rejetée avec 95% de certitude
Avec coefficient de
interception
Avec coefficient d’interception et
trend
Sans coefficient d’interception
-4.145*
-5.762*
-2.808*
-5.216*
-5.671*
-3.477*
Taux de croissance de la
masse monétaire_Rép.
Tchèque
(mt)
-4.380*
-5.317*
-2.582*
Valeurs critiques
1% :-3.481
5% :-2.883
1% :-4.030
5% :-3.444
1% :-2.581
5% :-1.942
(1992 :06 – 2003 :05)
Taux d’inflation_Rép.
Tchèque’
(π )
Taux d’inflation_RFA
(π
*
)
Le sigle reporté sur la droite de chaque variable correspond à la notation utilisée dans le modèle.
Tableau A5
ADF Test de Racine Unitaire : Slovaquie
H0 : présence de racine unitaire ; valeurs critiques définies par MacKinnon
* H0 est rejetée avec 99% de certitude
** H0 est rejetée avec 95% de certitude
Avec coefficient de
interception
Avec coefficient d’interception et
trend
Sans coefficient d’interception
-5.653*
-5.902*
-3.586*
-4.683*
-5.608*
-3.206*
Taux de croissance de la
masse
monétaire_Slovaquie
(mt)
-5.176*
-5.659*
-2.772*
Valeurs critiques
1% :-3.477
5% :-2.882
1% :-4.025
5% :-3.442
1% :-2.580
5% :-1.942
(1991 :07 – 2003 :05)
Taux
d’inflation_Slovaquie’
(π )
Taux d’inflation_RFA
(π
*
)
Le sigle reporté sur la droite de chaque variable correspond à la notation utilisée dans le modèle.
28
Références bibliographiques
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Svensson, L. (1991), “The Simplest Test of Target Zone Credibility”, IMF Staff Papers, Volume 38,
Number 3, IMF Publication Services
29

Documents pareils